© Augusta Stylianou Gallaery

Meunier Constantin

Culture, Sculpture

Etterbeek 12/04/1831, Ixelles 04/04/1905

Peintre d’abord, sculpteur ensuite, c’est dans la Wallonie industrielle de la deuxième moitié du XIXe siècle que Constantin Meunier trouve l’inspiration qui lui donne sa stature internationale. Les mineurs, les souffleurs de verre, les puddleurs, les ouvriers de l’industrie et de la campagne sont ses premiers sujets ; il donne dans le même temps ses lettres de noblesse à une certaine manière de représenter le paysage industriel wallon. Quand viennent ses sculptures, elles sont l’œuvre d’un créateur génial : « Meunier est un de ces rares artistes dont l'œuvre originale a marqué une époque, a ouvert des voies nouvelles à l'Art et, plastiquement autant que moralement, il ne cessera jamais d'émouvoir » (A. Marchal).

Orphelin de son père, élevé par sa mère et par son parrain, le professeur Constantin Héger (futur préfet de l’Athénée de Bruxelles), Constantin Meunier est en contact très jeune avec le milieu cultural : son frère aîné, Jean-Baptiste se forme à la gravure ; dans la maison familiale, on loue des chambres à des artistes qui viennent travailler à Bruxelles. Inscrit à l’Académie de Bruxelles dès 1845, il s’initie au dessin avant d’opter pour la sculpture et de devenir l’élève du Liégeois Louis Jehotte. Il fréquente aussi l’atelier de Fraikin, mais finalement c’est vers la peinture qu’il se tourne lors de sa dernière année à l’Académie (1854).

Au contact du Carolorégien Navez, il trouve sa voie, d’autant qu’en fréquentant aussi l’atelier Saint-Luc il croise Félicien Rops, Louis Dubois et autre Charles de Groux. Avec eux notamment, Meunier fondera, en 1868, la Société libre des Beaux-Arts de Bruxelles. À partir de 1857 et pendant vingt ans, il expose aux Salons de Paris et de Bruxelles ; de ses séjours au monastère des Trappistes de Westmalle, il rapporte des sujets religieux ; il s’inspire ensuite d’événements historiques, liés au passé de la Belgique ; mais il recherche surtout des sujets populaires, des hommes au travail, à la campagne, puis à l’atelier et à l’usine. À la fin des années 1870, lors d’une visite à Huy, il découvre des fonderies et laminoirs ; en 1879, il visite les usines Cockerill à Seraing ; l’année suivante la verrerie du Val Saint Lambert.

C’est à partir de ce moment que Constantin Meunier présente ses premières œuvres inspirées par le monde du travail et de l’industrie. Avec Xavier Mellery, qui prépare un ouvrage sur La Belgique et qui souhaite des illustrations du peintre, C. Meunier parcourt les sites houillers et métallurgiques du Borinage et du pays de Charleroi (1881-1882). Une commande du gouvernement en Espagne (pour copier une Descente de Croix d’un maître flamand) finit par le convaincre que sa voie est tracée dans un genre qui est avant tout réaliste et qui met l’homme laborieux en valeur.

Ressentant désormais mieux ce que peut lui apporter la sculpture, il y revient au milieu des années 1880. Un « puddleur » et un « débardeur » voient le jour en 1885 sortis directement de son inspiration et de ses dessins. L’accueil est enthousiaste. Libéré de toute pression esthétique, Constantin Meunier libère sa force créatrice dans une œuvre faite désormais indifféremment de sculptures, de peintures ou de dessins. En plus de représenter les diverses activités professionnelles de l’industrie, il rend compte de la condition ouvrière, des malheurs qui frappent les travailleurs, que soit le grisou, la misère ou l’alcool.

Professeur de peinture à l’Académie de Louvain (1888-1896), il s’inspire aussi de la mer du Nord et prépare un Monument au Père Damien, commande de la ville de Louvain qu’il achève en 1894, au milieu de statues où mineurs, métallurgistes et gens du peuple restent présents. Alors que Paris acclame la rétrospective qu’il y présente en 1896 et lui donne une dimension internationale, Constantin Meunier a l’esprit accaparé par un projet ambitieux. Depuis 1890, il porte l’idée d’un Monument au Travail.

Sollicité de toutes parts (commandes, expositions à Berlin et à Dresde, nomination à l’Académie de Belgique, sollicitations de bustes de ses amis, construction de sa maison près du Bois de la Cambre, etc.), il construit pas à pas les différents éléments de son Monument du Travail. Au début du XXe siècle, il a achevé les quatre hauts reliefs majeurs et les principales figures ; avec Horta, il entreprend de cerner la composition architecturale de l’ensemble, tandis qu’il achève la maquette du Semeur qui doit surmonter l’ensemble. Proche du but, il accepte de se laisser distraire encore, par la réalisation d’un monument dédié à Émile Zola, récemment disparu. Alors qu’il travaille sur les deux projets, Constantin Meunier s’éteint paisiblement en avril 1905, laissant ses deux dernières œuvres inachevées. Le Zola (réalisé avec le sculpteur français Alexandre Charpentier) sera inauguré à Paris en 1924, tandis que le Monument au Travail attendra 1930 pour être inauguré à Bruxelles, dans une forme et à un emplacement sans rapport avec les intentions de l’artiste.

Sources

Pierre BAUDSON, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 497-503
Une certaine idée de la Wallonie. 75 ans de Vie wallonne, Liège, 1995, numéro spécial de La Vie wallonne, t. LXIX, p. 152
Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 1995
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 468
André MARCHAL, La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 523, 541-542, 572-573 ; t. III, p. 32