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Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Statue Mathias-Guillaume de LOUVREX

Statue de Mathias-Guillaume de Louvrex, réalisée par Jules Halkin, c. 15 octobre 1880.


Au milieu du XIXe siècle, afin de doter l’institution provinciale de Liège de bâtiments dignes de ce niveau de pouvoir, d’importants travaux sont entrepris autour de l’ancien palais des princes-évêques. Propriétaire des lieux (1844), l’État belge retient le projet du jeune architecte Jean-Charles Delsaux (1850) et lui confie la mission de réaliser la toute nouvelle aile, en style néo-gothique, sur le côté occidental du Palais. Face à la place Notger, Delsaux (1821-1893) achève l’essentiel du chantier en 1853, mais des raisons financières l’empêchent de réaliser la décoration historiée qu’il a prévue pour la façade du nouveau palais provincial. Vingt-cinq ans plus tard, le gouverneur Jean-Charles de Luesemans prend l’avis d’une commission pour déterminer les sujets et les personnes les plus dignes d’illustrer le passé de « la Nation liégeoise ». Placés sous la responsabilité de l’architecte Lambert Noppius, une douzaine de sculpteurs vont travailler d’arrache-pied, de 1877 à 1884, pour réaliser 42 statues et 79 bas-reliefs. Dès la mi-octobre 1880, 27 des 42 statues sont achevées, validées par la Commission et mises à leur emplacement respectif. Celle de Louvrex est parmi celles-ci.


Placée aux côtés de Charles de Méan et de Jean Del Cour, la statue de Mathias-Guillaume de Louvrex est l’une des 42 personnalités retenues, selon le critère d’avoir marqué l’histoire de la principauté de Liège. De facture sérieuse, elle a été réalisée avec un souci d’art et de différenciation ; le visage présente des similitudes avec le peu de documents que l’on a conservés. Sur la façade du marteau de droite du palais provincial, dans la partie inférieure des colonnes d’angle, Mathias-Guillaume de Louvrex (1665-1734) a été représenté tenant son livre en mains, par le sculpteur Jules Halkin qui signe huit des statues et bas-reliefs liégeois dont « l’assassinat de Saint-Lambert », « la sortie des Franchimontois » et un « Notger répandant l’instruction ».


Jurisconsulte, magistrat de la cité en 1702, diplomate, Mathias-Guillaume de Louvrex possédait une bibliothèque exceptionnelle. Il avait rassemblé dans un impressionnant Recueil en quatre volumes, des édits, règlements, privilèges, concordats et traités du pays de Liège et du comté de Looz.


Quant à Jules Halkin (Liège 1830 – Liège 1888), il accomplit l’essentiel de sa carrière de sculpteur à Liège, sa ville natale, où il avait suivi les cours de Gérard Buckens à l’Académie des Beaux-Arts. Une bourse de la Fondation Darchis lui permet de séjourner à Rome pendant plusieurs mois (1851-1853), avant de parfaire sa formation en France et en Allemagne. Au début des années 1860, il trouve facilement des acheteurs privés pour plusieurs de ses premières réalisations essentiellement à connotation religieuse (Vierge, chemin de croix, bas-reliefs, etc.), avant de participer au chantier de décoration du palais provincial de Liège. Ses bustes en bronze et en marbre trouvent de nombreux amateurs auprès de bourgeois de la Cité ardente, qu’ils soient industriels, intellectuels ou artistes eux-mêmes. Il réalise aussi un Saint-Lambert pour la cathédrale Saint-Paul et un chemin de croix en pierre de France pour l’église Saint-Jacques (1862-1865). Sa notoriété, Jules Halkin la doit surtout à sa sculpture monumentale du Cheval de halage (1885) qui partage avec le Torè de Mignon l’espace des Terrasses de Liège.

 

Sources


Liliane SABATINI, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 436-437
Julie GODINAS, Le palais de Liège, Namur, Institut du Patrimoine wallon, 2008, p. 103
http://www.chokier.com/FILES/PALAIS/PalaisDeLiege-Masy.html (s.v. août 2013)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 676
Isabelle VERHOEVEN, dans Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996 

 

Statue de Mathias-Guillaume de Louvrex

Façade du Palais provincial, face à la place Notger

4000 Liège

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Paul Delforge

Plaque Orsini Dewerpe (Jumet) – Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Albert DION

Monument à la mémoire d’Albert de Dion, réalisé par Siob, 5 septembre 2004.

Sur la place communale de Dion le Val, à hauteur du carrefour entre la rue des Frères Poels, de la rue des Écoles et du boulevard du Centenaire, un monument est inauguré en 2004 en l’honneur d’un industriel qui, un siècle plus tôt, avait orienté ses activités vers la production de voitures de luxe. L’idée d’un monument qui rende hommage à l’un des grands pionniers de l’automobile est ancienne. À la fin des années 1950, elle renaît à l’époque où l’Antique Car Club de Belgique organise un rallye de voitures anciennes de Bruxelles à la place de Dion-le-Val ; une première pierre est alors posée. Le lieu est déterminé ; il reste à y édifier le monument commémoratif. 

Au début du XXIe siècle, à l’initiative de l’asbl « Auto moto rétro », l’artiste Jean-Marc Bois, mieux connu sous son pseudonyme de Siob, en est chargé. Donnant l’impression d’une route pavée, la stèle intègre une gravure de la « Populaire » réalisée dans de la pierre bleue ; elle s’élève à quelques centaines de mètres du château de la famille Dion.

Car si l’inventeur de la « Populaire » est né à Nantes et est par conséquent Français, il est établi par des recherches généalogiques sérieuses qu’Albert Dion (1851-1946) est un descendant « de la lignée du seigneur de Dion-le-Val ». Marquis de Malifranche, natif de Carquefou, Albert de Dion fait la rencontre décisive de Georges Bouton, un ingénieur parisien qui a mis au point une machine à vapeur. Dès les années 1880, ils cherchent à mécaniser les déplacements et contribuent à la saga des grands débuts de l’automobile. Mise au point en 1903, la « Populaire » assure leur succès ; très reconnaissable à son capot métallique allongé à l’avant, ce véhicule impose la silhouette désormais caractéristique de toutes les autres voitures. L’entreprise Dion-Bouton construit des voitures de grand luxe ; ses limousines sont prisées, mais la société ne supporte pas les conséquences de la Première Guerre mondiale, puis de la crise de 1929. La production de voitures de tourisme est arrêtée en 1932 ; celle d’autobus se poursuit jusqu’en 1953, tandis que des bicyclettes assurent encore la postérité de la marque jusque dans les années 1960.

En venant à plusieurs reprises à Dion le Val, sur la terre de ses ancêtres, l’industriel Albert de Dion a marqué les esprits : il est vrai que les automobiles étaient rares ; de surcroît, le chauffeur du marquis, l’Abyssin Zélélé, était originaire d’Afrique noire. S’appuyant notamment sur le résultat des recherches du Cercle historique de Chaumont-Gistoux, l’asbl « Auto moto rétro » a pris l’initiative d’élever une stèle en souvenir du génial inventeur ; l’inauguration du monument réalisé par Siob a été l’occasion d’un rassemblement de voitures très anciennes « Dion-Bouton » et de descendants de la famille Dion, dont une voix venant du Canada.

Originaire de Charente où il est né en 1963, Jean-Marc Bois avait rêvé de faire carrière en mer, mais c’est avec un diplôme de mécanicien en poche qu’il s’installe un jour à Freschaux, près de Beauraing, et qu’il rencontre le prince Decroy l’incite à se lancer comme peintre et à vivre de sa passion. Au commencement des années 1990, il se forge un style particulier dans l’accomplissement de dizaines de toiles, avant de se lancer aussi dans la sculpture. Jetant un regard critique, satirique et narquois sur la société, il s’impose sous son pseudonyme de Siob comme un artiste international. Installé à Marche puis au château de Saive, peintre et sculpteur, formateur de jeunes par l’art, Siob est présent à divers endroits dans l’espace public de Wallonie : ainsi à Marche-en-Famenne avec ses Naïades (1997) et sa Sérénité (1998), ou sur des ronds-points comme à Hastière avec sa « Lavandière » et sur la route de Givet à Beauraing, avec une sculpture évoquant à la fois une femme et un oiseau (2000). Plus discret, le monument de Dion le Val est inauguré en 2004. Revenu à la peinture à l’huile, Siob n’hésite pas à faire de la politique belge ses principaux sujets artistiques ; ainsi, en 2011, le peintre a offert une toile « polémique » à la ville de Dinant. 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Mireille ROMMENS, Siob 20 ans, 2011
http://www.automag.be/NOM-DE-DION 
 

Plaque Orsini Dewerpe (Jumet)

 
 

© Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Orsini Dewerpe (Jumet)

Place communale
1325 Dion le Val

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Maurice GAUCHEZ

Au sein de l’Amicale des Anciens élèves de l’Athénée de Chimay, un comité local s’est constitué pour honorer la mémoire d’un enfant du pays, le romancier, poète, journaliste et essayiste Maurice Gauchez (1884-1957). Le Comité est présidé par M. Hondermarcq et reçoit le soutien des autorités locales et surtout l’aide active de Jean-Marie Horemans : professeur à Saint-Ghislain et administrateur de l’Institut Destrée, ce dernier a en effet préparé une exposition de livres, dessins, manuscrits qui est inaugurée en même temps que la plaque commémorative apposée sur la maison natale de Gauchez, à Chimay, lors des Fêtes de Wallonie en septembre 1970.

Né Maurice Gilles en 1884, Gauchez restera toute sa vie fortement attaché à sa ville natale qui perpétue par conséquent le souvenir de son œuvre littéraire. Au cours de la première moitié du XXe siècle, Gauchez s’est révélé un véritable animateur des lettres françaises en Belgique, multipliant des notices et présentations de ses confrères écrivains, en plus d’être conférencier et surtout à la tête de l’Association des écrivains belges anciens combattants, en souvenir d’une Grande Guerre qui avait mobilisé Gauchez dans la force de l’âge. Responsable de la revue La Renaissance d’Occident, il anime encore une maison d’édition et une troupe théâtrale qui compte à son répertoire de nombreuses œuvres d’avant-garde. Poète à ses débuts, journaliste, essayiste, critique littéraire, romancier régionaliste, « écrivain de guerre », Gauchez est un auteur fécond. Inspiré par Verhaeren en poésie, il l’est par Lemonnier dans sa prose.

Même si Le roman du grand veneur est le livre le plus souvent attaché au nom de Maurice Gauchez, Émile Lempereur retient Cacao comme la meilleure de son œuvre ; elle lui est inspirée par Anvers, métropole dans laquelle Gauchez a grandi en raison de la désignation de son père dans la cité portuaire en tant que professeur de mathématiques. C’est à Anvers que Gauchez fait ses études ; c’est aussi là qu’il publie ses premiers textes en français ; c’est encore là qu’il travaille comme journaliste (au Matin) et qu’il enseigne la rhétorique française, après la Grande Guerre. En 1922, son Histoire des lettres françaises de Belgique des origines à nos jours est plusieurs fois primée. À la fin des années 1920, il poursuit sa carrière de journaliste et d’enseignant à Bruxelles où il s’est établi. Auteur de plusieurs « romans-frontières », Gauchez inscrit le pays de Chimay dans Le roman du grand veneur, Le Baron des Robaux, Tignasse, Timothée Flouque et L’Aventurier sans envergure. Avec Au cœur des Fagnes et La Grange au Bois (situé en Gaume), Gauchez visite d’autres lieux du pays wallon.

 

Sources

La Vie wallonne, III-IV, 1970, n°331-332, p. 547-548
André LÉPINE, 80 monuments insolites d’Entre-Sambre-et-Meuse, Cerfontaine, 1989, p. 66
Roger FOULON, Maurice Gauchez, Dossiers L, Marche-en-Famenne, Service du livre luxembourgeois, 2e trimestre 2000, 28 p.
Fernand DEMANY, Un poète belge : Maurice Gauchez, Bruxelles, La Renaissance d’Occident, 1923
Georges DOPAGNE, Maurice Gauchez, Bruxelles, 1937
Préface de Jean-Marie HOREMANS à la réédition du Roman du grand veneur, Mons, Tourisme et Culture-Hainaut, 1970

 

Plaque Maurice Gauchez (Chimay)

Rue de Virelles 5
6460 Chimay

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Paul Delforge

Paul Delforge

Monument Alexis HOUBOTTE

Monument  Alexis Houbotte, réalisé par Julien Dillens, jardin de l’hospice Fiérain, mai 1905 ; parc Houbotte, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

À l’origine, le monument Alexis Houbotte, inauguré en 1904, a été installé dans le jardin de l’Hospice Fiérain. Par la suite, il a été déplacé et s’est retrouvé au centre d’un parc aménagé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, sur l’emplacement de l’ancien domaine des Carmes. Le lieu qui fut baptisé « parc Houbotte » accueille aussi, depuis 1951, le monument aux victimes wavriennes tant des deux guerres mondiales que la Révolution de 1830, et depuis 1954 la cloche Dongelbert. En raison de sa situation proche de la gare, ce parc occupe une position relativement centrale dans la ville de Wavre et l’on ne peut que s’étonner, par conséquent, du peu d’informations relatives au « médecin de la bienfaisance publique », titre qui figure sur la face avant du piédestal qui supporte son buste. L’activité d’Alexis Houbotte a sans conteste marqué les esprits de la population locale, puisqu’une souscription publique a été lancée pour lui ériger un monument. Pourtant, l’historiographie paraît bien pauvre lorsqu’il s’agit de cerner davantage le parcours et l’activité de ce médecin. Chacun s’accorde à lui reconnaître une attention particulière à l’égard des pauvres et des malades durant de nombreuses années, dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Il apparaît de manière précise que le « docteur bienfaiteur des pauvres » a été le médecin de la Bienfaisance publique de 1875 à 1901, mais aucune information ne paraît disponible pour cet homme dont la date naissance reste aussi inconnue. Par conséquent, il existe un véritable contraste entre la discrétion de ce médecin et la notoriété qui entoure l’artiste qui a sculpté son buste.

Fasciné par une exposition des œuvres de Léopold Harzé (1867), formé notamment par le Liégeois Simonis à l’Académie de Bruxelles qu’il fréquente en cours du soir (1864-1868, 1873-1875), Julien Dillens (1849-1904) devait devenir ingénieur selon l’avis de son père en dépit d’un environnement familial largement ouvert au monde artistique. Il sera dessinateur, aquarelliste et sculpteur. Employé sur plusieurs chantiers de décoration bruxellois (années 1870), le jeune sculpteur y fait ses armes, tout en exposant quelques œuvres personnelles dans les Salons. C’est l’une d’elles, L’Enigme, montrée à Bruxelles, qui focalise l’attention de tous les critiques en 1876. Taxé de « vulgaire », son nu féminin semble faire scandale, alors qu’il est fort apprécié par de jeunes artistes qui se mobilisent, forment un Cercle qui, plus tard, deviendra L’Essor et organisent une exposition des œuvres de Dillens. Après un bref séjour à Paris, ce dernier remporte le Prix de Rome 1877 : son goût pour le style néo-renaissance français va pouvoir s’immerger à la source. Imprégné de Renaissance italienne, le style novateur de Dillens se heurtera encore pendant quelques années à l’absence de reconnaissance de ses contemporains. 

Monument  Alexis Houbotte

Pendant dix ans, les grandes commandes officielles lui échappent ; il doit se contenter de réalisations secondaires jusqu’au moment où, au début des années 1890, les commandes abondent à Bruxelles comme en pays flamand. Ses bustes officiels ou d’inspiration se multiplient, de même que les monuments funéraires, les fontaines, etc. Il est fait appel à son talent pour des statues didactiques destinées à l’Exposition universelle de Bruxelles (1897). Exposant souvent à l’étranger, professeur à l’École artistique d’Ixelles (1887) puis à l’Académie de Bruxelles (1898-1901), président de l’Essor, l’artiste fidèle à son style et à ses thèmes de prédilection est à la fois un « grand maître de la sculpture belge » et un artiste controversé quand la commande lui est passée pour le buste en bronze d’Alexis Houbotte. Il doit d’ailleurs s’agir de l’une des toutes dernières réalisations du sculpteur : atteint d’un cancer, Julien Dillens décède en décembre 1904 ; le monument Houbotte semble, quant à lui, avoir été inauguré en mai 1905.

 



Pierre GUSBIN, Wavre : Parc de la mémoire, dans Wavriensia, n° 1, 2011, p. 17-30
Hugo LETTENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 367-372
Georges-Marie MATTHYS, dans Biographie nationale, t. 43, col. 334-346
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 495

Jardin de l’hospice Fiérain puis parc Houbotte
1300 Wavre

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Lambert LOMBARD

Statue à la mémoire de Lambert Lombard, réalisée par Alphonse de Tombay, c. 15 octobre 1880.




Au milieu du XIXe siècle, afin de doter l’institution provinciale de Liège de bâtiments dignes de ce niveau de pouvoir, d’importants travaux sont entrepris autour de l’ancien palais des princes-évêques. Propriétaire des lieux (1844), l’État belge retient le projet du jeune architecte Jean-Charles Delsaux (1850) et lui confie la mission de réaliser la toute nouvelle aile, en style néo-gothique, sur le côté occidental du Palais. Face à la place Notger, Delsaux (1821-1893) achève l’essentiel du chantier en 1853, mais des raisons financières l’empêchent de réaliser la décoration historiée qu’il a prévue pour la façade du nouveau palais provincial. Vingt-cinq ans plus tard, le gouverneur Jean-Charles de Luesemans prend l’avis d’une commission pour déterminer les sujets et les personnes les plus dignes d’illustrer le passé de « la Nation liégeoise ». Placés sous la responsabilité de l’architecte Lambert Noppius (1827-1889), une douzaine de sculpteurs vont travailler d’arrache-pied, de 1877 à 1884, pour réaliser 42 statues et 79 bas-reliefs. Dès la mi-octobre 1880, 27 des 42 statues sont achevées, validées par la Commission et mises à leur emplacement respectif. Celle de Lambert Lombart figure parmi les premières.
Artiste majeur, Lambert Lombard (1505 ou 1506-1566) se devait de trouver place parmi les personnalités illustres. En pleine Renaissance italienne, cet artiste de la principauté de Liège fait le voyage en Italie, avec mission de son prince-évêque de ramener dans le nord un maximum des joyaux du sud (1537). Peintre et architecte lui-même, Lambert Lombard découvre ainsi les grands maîtres et acquiert à la fois des objets et des connaissances. À son retour à Liège, il fonde l’une des toutes premières académies d’art de l’Europe du Nord et participe aux ambitieux chantiers de reconstruction de la ville de Liège en introduisant des éléments de style Renaissance. 
La statue de Lombard se trouve sur la façade du marteau de droite du Palais provincial, sur la partie supérieure de la colonne la plus à droite ; Chapeaville et Borset sont ses voisins immédiats. Avec sa palette de couleurs posée sur le bras gauche, Lombard est aisément reconnaissable ; sa longue cape est par contre peu visible. Même si la statue pourrait être l’œuvre d’Alexandre de Tombay (1815-1881) comme l’indiquent certaines sources, il est plus vraisemblable de suivre celles qui l’attribuent à son fils, Alphonse de Tombay (1843-1918). En plus de son apprentissage dans l’atelier paternel, de Tombay fréquente l’Académie de Liège où il bénéficie notamment des conseils de Prosper Drion. Ami de Léon Mignon, il bénéficie comme lui d’une bourse de la Fondation Darchis et séjourne plusieurs mois à Rome (1874-1878). De retour à Liège, il répond à plusieurs commandes officielles dont un buste de Charles Rogier (1880) à Bruxelles qui aura beaucoup de succès. C’est aussi à ce moment qu’il participe au chantier de décoration du palais provincial de Liège auquel il livre six statues et trois bas-reliefs évoquant des scènes historiques (L'exécution de Guillaume de la Marck, La mort de Louis de Bourbon, L'octroi de la Paix de Fexhe). Exposant ses propres œuvres tout en répondant à de nombreuses commandes officielles à Bruxelles, il devient professeur à l’Académie de Saint-Gilles, avant d’en assurer la direction (1902).



Julie GODINAS, Le palais de Liège, Namur, Institut du Patrimoine wallon, 2008, p. 100
http://www.chokier.com/FILES/PALAIS/PalaisDeLiege-Masy.html
Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 350-351
Lambert Lombard et son temps, catalogue d’exposition, Liège, Musée de l’Art wallon, 30 septembre - 31 octobre 1966
Godelieve DENHAENE, Lambert Lombard, Renaissance et humanisme à Liège, Fonds Mercator, Anvers, 1991
Godelieve DENHAENE (dir.), Lambert Lombard. Peintre de la Renaissance. Liège 1505/06-1566. Essais interdisciplinaires et catalogue de l’exposition, Bruxelles, IRPA, collection Scientia Artis, 2006
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 457-458
Serge ALEXANDRE, Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996
La Meuse, 2 octobre 1880



 

Statue Lambert Lombard


 

© Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Statue Lambert Lombard

façade du Palais provincial, face à la place Notger – 4000 Liège

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Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Mémorial Stan OCKERS à Sprimont

Stan Ockers, un cyliste en pleine force de l’âge

L’Anversois Stan Ockers (né Josephus Constant Ockers en 1920) a marqué l’histoire du cyclisme belge par ses performances en tant que coureur professionnel. 

Surtout, il est entré dans la mémoire collective en raison de sa disparition tragique, en 1956, après une chute lors des Six Jours d’Anvers. Diverses manifestations d’hommage sont organisées à la suite de son décès, dont l’érection d’un monument à Gomzé-Andoumont, au sommet de la côte des Forges, l’une des dernières difficultés de la course Liège-Bastogne-Liège, épreuve qu’il avait remportée avec panache en 1955.

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le « gamin de Borgerhout » s’était progressivement forgé un palmarès enviable en collectionnant les accessits des grandes courses d’un jour ainsi que des grands tours. Souvent bien classé au Tour de France (il est 2e du classement général en 1952 et remporte deux fois le classement par points (1955 et 1956), il connaît une année 1955 exceptionnelle, enlevant le bouquet final lors de la Flèche wallonne (pour la 2e fois, après 1953), de Liège-Bastogne-Liège (les deux courses forment le week-end ardennais) et du championnat du monde. 

C’est par conséquent un sportif en pleine force de l’âge et promis à de nombreux autres succès qui chute brutalement sur la piste du Sportpaleis d’Anvers, à l’occasion des Six Jours, le 29 septembre 1956. Son décès, le 1er octobre, suscite un vif émoi dans la population.

Le sculpteur Louis Van Cutsem

Le monument de la côte des Forges fut confié à Louis Van Cutsem (1908-1992). Certes influencé par les activités familiales – son père est responsable d’une entreprise de monuments funéraires établie à Evere –, Louis Van Cutsem reçut d’abord une formation de maçon, avant de s’inscrire à l’Académie de Saint-Josse, puis à l’Académie de Bruxelles, où ses dons de sculpteur se révèlent. Lauréat de plusieurs prix, celui qui affectionne particulièrement de tailler directement dans la pierre bleue commence à travailler à Schaerbeek dans un atelier qui lui survivra (1936). 

Très tôt, ancien footballeur et athlète lui-même, il est attiré par la représentation des sportifs dont il fera sa spécialité : des grands de la boxe d’abord, des cyclistes ensuite (Romain Maes, Eddy Merckx, Rick Van Steenbergen et le mémorial Stan Ockers), des athlètes (Jef Rens) et des pilotes automobiles, etc.

Portraitiste, médailleur, il travaille à la fois à partir du modèle, mais aussi de photographies. Par ailleurs, il ne résiste pas à l’envie de croquer des personnalités du monde politique et artistique. À partir de 1932, il est membre du groupe « Mine souriante », composé d’humoristes bruxellois qui excellent dans le dessin. Enfin, Van Cutsem réalise encore divers trophées sportifs pour de nombreuses disciplines. 

Durant la Seconde Guerre mondiale, le sculpteur et sa femme apportent leur aide à plusieurs Juifs, ce qui vaudra à Louis Van Cutsem d’être reconnu, par la suite, comme Juste parmi les Justes. Et son aide à un réfugié russe lui vaudra une médaille de l’URSS. Après la Libération, Louis Van Cutsem signe aussi bien un buste de Fernand Demany (secrétaire du Front de l’Indépendance) qu’une haute statue de la Vierge, ainsi que plusieurs monuments aux victimes de la guerre. Il est le père de Simone, elle aussi sculptrice.

Mémorial Stan Ockers (Gomzé-Andoumont, Sprimont)

Inauguré le 4 mai 1957, la veille de Liège-Bastogne-Liège, le mémorial Stan Ockers, en pierre bleue de Liège, est situé devant ce qui était à l’époque la laiterie de la Croix Michel, le long de la grand-route reliant Aywaille à Beaufays. L’ensemble est imposant : sur une large base surélevée et construite en moellons, se dresse une sculpture originale représentant un Stan Ockers très réaliste, qui pédale sur un vélo figuratif ; à l’arrière, un haut mur, toujours en moellons, soutient des écritures. En grand, apparaît le nom de STAN OCKERS, et sur deux plaques sont gravés deux textes plus longs, l’un en français, l’autre en néerlandais :


3.2.1920 – 1.10.1956
SUR CETTE ROUTE, EN MAI 1953,
BÂTIT LA PREMIÈRE D’UNE SÉRIE
DE RETENTISSANTES VICTOIRES
INTERNATIONALES
____
FLÈCHE WALLONNE 1953
WEEK-END ARDENNAIS 1955
CHAMPIONNAT DU MONDE 1955
CHALLENGE DESGRANGE-COLOMBO 1955
ROME-NAPLES-ROME 1956

Depuis 1996, le « Cyclo-Club de Beaufays » organise chaque année le « mémorial Stan Ockers ».


Théo MATHY, Dictionnaire des sports et des sportifs belges, Bruxelles, 1982, p. 179.
Didier MALEMPRÉ, Liège-Bastogne-Liège, une Doyenne vénérable et vénérée, Liège, Céfal, 2014.
http://www.sonuma.be/archive/hommage-%C3%A0-stan-ockers 
http://www.siteducyclisme.net/coureurfiche.php?coureurid=3051 
http://www.tento.be/tentoonstelling/louis-van-cutsem-1908-1992-sportbeeldhouder-bij-uitstek (s.v. juin 2015)
Louis Van Cutsem. Un atelier de sculpteur à Schaerbeek, Bruxelles, Les Amis de la Maison des Arts et La Mine souriante, 1988.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 557.
ENGELEN-MARX, La sculpture en Belgique à partir de 1830, Bruxelles, août 2006, t. VI, p. 3536-3537.

Thier des Forges
4140 Gomzé-Andoumont (Sprimont)

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Paul REUTER

Monument Paul Reuter, 1948 
Réalisé par Victor Demanet.


Au pied de l’Église Saint-Donat, près de la rue du Bastion, un monument  dédié à Paul Reuter (Clausen 1865 – Arlon 1949) rappelle le souvenir du bourgmestre d’Arlon. Placé dans un espace arboré, le buste réalisé par Victor Demanet a été inauguré au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en présence

Monument Paul Reuter – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

du mandataire communal qui, quelques mois avant sa disparition, recevait ainsi le témoignage public de la reconnaissance de ses administrés.

Successeur de Numa Ensch-Tesch en 1921, Paul Reuter est avant tout un municipaliste qui perpétue une tradition libérale bien ancrée dans le chef-lieu de la province de Luxembourg. Depuis 1830 en effet, le parti libéral a toujours compté l’un de ses représentants à la tête du collège communal. Après Numa "le bâtisseur" (bourgmestre de 1901-1921), auquel il était apparenté, Paul Reuter abandonne l’échevinat de l’Instruction publique qu’il exerçait depuis 1895 pour ceindre l’écharpe maïorale. Il conforte la majorité libérale durant toute la durée de son mandat qui s’achève en 1949. Seules les occupations allemandes de 14-18 et de 40-45 ont été des périodes de contestation des choix politiques de Paul Reuter. Pour celui qui est né à Clausen, au grand-duché de Luxembourg en 1865, et qui défend la primauté de l’usage du français, la question de l’emploi des langues restera en permanence un enjeu important. Bourgmestre d’Arlon siégeant à l’Assemblée wallonne (1927-1940), Paul Reuter est écarté du maïorat d’Arlon par les autorités allemandes en 1941. Après trois années d’activités clandestines périlleuses, il reprend son maïorat le 10 septembre 1944, jour de la libération d’Arlon.

L’inauguration du monument Reuter, en 1948, est l’occasion d’honorer plus de cinquante ans d’activités communales. Le monument a été commandé à Victor Demanet (Givet 1895 – Namur 1964). Ayant grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse où ses parents tiennent un commerce d’antiquités au cœur de la ville, le jeune Namurois était appelé à leur succéder si ses études à l’Académie des Beaux-Arts (1916-1919) où il est l’élève de Désiré Hubin, ne lui avaient pas donné le goût de la pratique de la sculpture. La révélation lui vient des œuvres de Constantin Meunier et surtout de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois.

Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin finissent de convaincre Demanet que sa voie est dans la sculpture. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’impose rapidement comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Comme d’autres artistes de son temps, il réalise plusieurs monuments aux victimes des deux guerres. Tout en poursuivant une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail, Victor Demanet est aussi l’auteur de plusieurs dizaines de médailles. C’est un artiste renommé et en pleine maturité qui signe le buste de Paul Reuter, placé à Arlon sur un piédestal en grès d’Esch-sur-Alzette, à la facture simple. En bronze, ce buste présente la particularité d’être plus élancé que les bustes habituels. 

La dédicace sur la face avant mentionne simplement :

A PAUL REUTER
LA POPULATION ARLONAISE RECONNAISSANTE 
1865 - 1948

 

http://www.routeyou.com/location/view/47438337/le-buste-au-bourgmestre-paul-reuter.fr (s.v. juillet 2013) 
Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2001, t. III, p. 1416 
Bulletin trimestriel de l’Institut archéologique du Luxembourg, 1949, 25e année, p. 40-41 
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397 
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147

Au pied de l’Église Saint-Donat
6700 Arlon

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Stèle Théroigne de MÉRICOURT

Stèle à la mémoire de Théroigne de Méricourt, réalisée à l’initiative du SI de Marcourt, 5 août 1989.

Sur un bloc de pierre installé devant le syndicat d’initiative de Marcourt, une plaque rend hommage à une jeune fille née dans ce petit village au XVIIIe siècle et qui s’est distinguée, à Paris, durant les années décisives de la Révolution française. Comme l’indique l’inscription :


THEROIGNE DE MERICOURT
EST NÉE A MARCOURT
LE 13 AOÛT 1762
ANNE JOSEPHE DITE DE MERICOURT.
FILLE DE PIERRE THEROIGNE ET
D’ELISABETH LAHAYE DE MARCOURT
DÉCÉDÉ À PARIS LE 8 JUIN 1817.
ELLE A PARTICIPE
A LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
ET A LA PROPAGANDE DE LA JUSTICE
ET DU BON DROIT.


Anne-Josèphe Terwagne (ou Théroigne, les orthographes varient très fort) est une figure mythique de cette période troublée qui va de 1789 à 1794. Après avoir beaucoup voyagé en Europe, la jeune fille est à Paris au printemps 1789. Beaucoup de rumeurs alimentent la notoriété de la « Belle Liégeoise » dont il semble établi qu’elle assiste à la visite du roi à l’hôtel de ville (17 juillet), qu’elle s’assied fréquemment dans la tribune de l’Assemblée nationale pour assister aux débats, qu’elle tient salon rue du Boulay et qu’elle constitue avec Romme un cercle politique qui défend des idéaux démocratiques. Prenant résolument le parti des républicains contre les royalistes (1792), prenant en tout cas le parti de Brissot, elle semble vouloir développer un programme dans lequel la femme est appelée à jouer un rôle actif dans la société. Peu suivie par les femmes elles-mêmes, regardée avec circonspection par ses « amis » politiques, Théroigne de Méricourt (ainsi que la surnommait la presse royaliste) devient par contre le porte-fanion de tous les combats sous la plume de certains biographes : ils lui accordent un premier rôle dans les différents événements sanglants qui marquent 1792 et le début de 1793. Passée à tabac et outragée par des « jacobines » (mai 1793), elle sombre dans la dépression nerveuse et mentale. Sa vie mouvementée nourrira les imaginations, dès le siècle du romantisme, au point d’en faire une des premières féministes. Le village de Marcourt n’a pas échappé au phénomène : le curé de la paroisse obtint au tournant du XIXe et du XXe siècle de faire démolir la maison natale de cette héroïne aux idées révolutionnaires.

En l’absence de lieu de mémoire, le syndicat d’initiative de Marcourt saisit l’occasion des célébrations du bicentenaire des événements de 1789 pour lancer le projet d’élever une stèle en l’honneur de la jeune femme et de ses idées. L’inauguration de la stèle s’est déroulée le 5 août 1989, dans le cadre de l’émission Télé-tourisme, avec représentation théâtrale, kermesse et barbecue. La stèle est située en face de l’emplacement qu’occupait jadis la maison natale d’A-J. Terwagne.


Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, en particulier Le Soir, 7 août 1989
Félix MAGNETTE, dans Biographie nationale, t. 24, col. 760-768
Félix MAGNETTE, Théroigne de Méricourt, la belle Liégeoise. Légendes littéraires et réalité historique, dans Wallonia, XXIe année, mars 1913, p. 163-187
Ursmer LEGROS, Double destin de Théroigne de Marcourt, dite de Méricourt, Marquain (Hovine), Hotton, 1969
La Vie wallonne, II, 1970, n°330, p. 175-177
Marcellin PELLET, Étude historique et biographique sur Théroigne de Méricourt, dans les Variétés révolutionnaires, 3e série, Paris, 1890
Léopold LACOUR, Trois femmes de la Révolution : Olympe de Gouges. Rose Lacombe, Théroigne de Méricourt, Paris, 1900
E. et J. DE GONCOURT, Histoire de la Société française pendant la révolution, Paris, 1889
http://www.marcourt-beffe.be/historique.php (s.v. mars 2015)

Place de Chéroubles 
6987 Marcourt

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Buste de Félicien Yernaux

Buste de Félicien Yernaux.
16 septembre 1934, Réalisé par les élèves de l’École, avec l’aide de Hector Brognon.

Ce sont les élèves de l’École industrielle d’Écaussinnes, vraisemblablement aidés par leur professeur, le sculpteur Hector Brognon, qui ont réalisé, avant la Seconde Guerre mondiale, les bustes d’Ernest Martel et de Félicien Yernaux que l’on peut encore voir aujourd’hui depuis la rue Ernest Martel, dans la cour d’entrée de l’actuelle École Industrielle et Commerciale d’Écaussinnes. La juxtaposition de ses deux bustes peut apparaître quelque peu étonnante au vu du passé des deux personnages. Actif syndicaliste du secteur des carrières, Ernest Martel s’était signalé par son opiniâtreté dans la défense des intérêts des ouvriers carriers. Face à ce leader socialiste, Félicien Yernaux (1854-1943) était, au contraire, un des patrons des célèbres carrières d’Écaussinnes, certes à l’écoute de certaines revendications de ses ouvriers, mais pas du tout sensible au discours syndical et politique des socialistes locaux. D’ailleurs, en 1910, Félicien Yernaux participe à un important mouvement de lock-out décidé par les 18 maîtres de carrières de l’Association des Maîtres de carrières d’Écaussinnes, Marche-lez-Écaussinnes, Feluy et Arquennes, solidaire avec la direction du Levant ; les patrons réagissent ainsi à une grève générale décrétée par l’organisation syndicale d’Ernest Martel. Mouvement destiné à raffermir l’autorité patronale face aux ouvriers de mieux en mieux organisés, le lock-out va durer de juin 1909 à janvier 1910. Après 37 semaines de bras de fer, le travail reprendra, mais laissera des traces.

Une trace positive de ce conflit social est notamment la transformation de l’École locale de dessin en une École industrielle. L’utilité d’une telle école était défendue de longue date par Ernest Martel, et les maîtres de carrières acceptent finalement de soutenir sa création. Il semble que c’est à cette époque que Félicien Yernaux est désigné pour devenir le premier président de la Commission administrative de l’École industrielle et commerciale d’Écaussinnes. Il exerce cette présidence jusqu’en 1933, année où il est remplacé par… Ernest Martel. Destiné à former la jeunesse aux métiers de la région, cet établissement symbolise en quelque sorte l’accord qui pouvait régner entre l’industriel et le syndicaliste. La juxtaposition des bustes de Yernaux et de Martel renvoie dès lors davantage au fruit de leur collaboration, qu’aux distances idéologiques évidentes qui existaient entre ces deux personnalités marquantes de la région. L’idée des bustes est née au moment du passage de relais entre les deux hommes et leur inauguration remonte au 16 septembre 1934.

Attribué aux élèves de l’École, le buste doit certainement surtout au sculpteur et architecte Hector Brognon (Bois d’Haine 1888 – Bois d’Haine 1977) qui est professeur dans l’établissement. Surnommé récemment « le Rodin de Bois d’Haine », Brognon avait l’habitude de prêter ses services dans la réalisation de monuments ou de bustes réalisés par ses élèves ou par ses amis. Au sortir de la Grande Guerre, il jouit d’une solide réputation dans le Hainaut en raison de sa parfaite connaissance de la pierre bleue d’Écaussinnes. Plusieurs commandes de bustes et de statues lui parviennent, ainsi que des monuments aux morts et aux héros des deux guerres destinés aux places publiques (Écaussinnes-d’Enghien) ou aux cimetières (les « Martyrs de Tamines » en 1926, ou le bas-relief Ernest Martel en 1939). Brognon est encore l’auteur du monument dit de Marguerite Bervoets à La Louvière et a participé à la décoration des frontons et panneaux de l’hôtel de ville de Charleroi (côté rue de Turenne et rue Dauphin).

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Archives
Informations aimablement communiquées par la bibliothèque d’Écaussinnes et le Cercle d’Information et d’Histoire locale (l’abbé Jous et son frère)
Claude BRISMÉ, Ernest Martel (1880-1937), dans Le Val Vert. Bulletin trimestriel du Cercle d'Information et d'Histoire locale des Écaussinnes et Henripont, Écaussinnes-Lalaing, 1988, n° 64 ; 1989, n° 65-67
Claude BRISMÉ, Histoire des Écaussinnes, recueil n°15 du Cercle d’information et d’histoire locale, 2010
Léon BAGUET, dans Le Val Vert, 1990, n°69, p. 12
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 155
Guy SYMOENS, Hector Brognon (1888-1977) le Rodin de Bois d’Haine, dans Les Cahiers du Grand Manage, 2009, n°56
http://www.eic-ecaussinnes.be/historique_suite.html (s.v. février 2014)

Buste de Félicien Yernaux – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Cour de l’École commerciale et industrielle
Rue Ernest Martel 6
7190 Ecaussines

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Paul Delforge

Paul Delforge-Diffusion Institut Destrée-Sofam

Plaque et médaillon François BOVESSE

À divers endroits et sous diverses formes, le souvenir de François Bovesse est bien présent dans l’espace public de la capitale wallonne : une plaque avec inscription sur sa maison natale (1946), une esplanade devant la Maison de la Culture et une plaque avec un médaillon sur un mur de la Halle al’Chair (1960), une plaque sur la maison de l’avenue Cardinal Mercier à Salzinnes sur le lieu de son assassinat (1962), le mémorial François Bovesse (1964), une présence sur la Fresque des Wallons, une rue et une place dans la périphérie. Depuis peu, l’Athénée a cependant officiellement enlevé son patronyme (sans évoquer la fin du dragueur de mines « M909 Bovesse »).

Défenseur de sa ville natale, militant wallon, député, figure de proue du parti libéral dans l’Entre-deux-Guerres, ministre – des PTT (1931-1932), de la Justice (1934-1935 et 1936-1937) et de l’Instruction publique, des Lettres et des Arts (1935-1936) – François Bovesse avait abandonné tous ses mandats électifs lorsqu’il avait été nommé gouverneur de la province de Namur (16 avril 1937). Quelques mois plus tard, il allait être démis de ses fonctions par l’occupant. Celui qui a repris officiellement ses activités d’avocat maintient ses convictions et prend des risques. Le 1er février 1944, il est assassiné par des collaborateurs rexistes qu’il n’a jamais cessé de dénoncer. Malgré les interdictions, son enterrement donne lieu à un impressionnant rassemblement de citoyens qui manifestent ainsi leur opposition à l’Ordre nouveau et surtout leur admiration à un homme qui a défendu son pays et ses libertés.

Sur le pignon de la Halle al’Chair, a été placée une pierre bleue où le nom de François Bovesse apparaît au-dessus d’un médaillon avec le portrait de François Bovesse gravé de profil. Sous ce médaillon, apparaît la mention :

« Mon domaine n’est
qu’un bout de sol
wallon »

Cette réalisation est l’œuvre d’un artiste d’origine italienne, Guido Casci (1917-2001). Né à Barga en Toscane, il habite la Belgique depuis 1919 et a obtenu la naturalisation dans les années 1950. Artiste-peintre et médailleur, il reprend l’industrie familiale installée à Namur, son père Jean étant couleur de plâtre et fondeur de bronze, spécialisé dans les œuvres religieuses et statues de saints. Guido Casci a déjà réalisé un mémorial en 1959, à la demande des anciens condisciples de Bovesse à l’Athénée. Le 31 mai 1959, ce premier mémorial est accroché sur le grand palier du premier étage du bâtiment central de l’établissement scolaire. Il présente un médaillon représentant François Bovesse identique à celui que l’on va retrouver l’année suivante, dans la petite rue de Namur. Cet endroit devient une étape obligatoire sur « la route des plaques », parcours créé par le Comité central de Wallonie à la fin des années 1920, afin de rendre hommage aux « grands Namurois » et redynamisé à l’entame du XXIe siècle. La plaque d’hommage à François Bovesse est peut-être une initiative du Comité central de Wallonie, de la ville de Namur et des Amis et disciples de François Bovesse.


Jacques VANDENBROUCKE (texte), Pierre DANDOY (photos) : 40 ans de fêtes de Wallonie à Namur, Bruxelles, Luc Pire, 2000
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, 1999, p. 285-300
Renseignements fournis par Jacques Vandenbroucke, janvier 2014 et par Marie Dewez, février 2014.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 194 

Pignon de la Halle al’Chair
Rue du Pont, sur l’esplanade de l’Entre-Sambre et Meuse 
5000 Namur

carte

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