Paul Delforge

Statue Eden HAZARD

Statue Eden Hazard, réalisé par Roberto Ollivero, 3 juin 2014.

En 1986, les autorités communales de Tubize inaugurent l’une des premières sculptures réalisées par Roberto Ollivero. Cette année-là, Michel Platini illumine de son talent la planète foot et le sculpteur brabançon a décidé de le représenter en train d’inscrire un but. Pour l’artiste, « ce coin de match » marque le début d’une riche carrière faite d’œuvres populaires. Mais le « Platini du stade Leburton » n’est pas épargné par les conditions climatiques changeantes et quand il lui est demandé de rénover sa statue, il devient très vite évident que Platini doit être remplacé par un autre joueur portant lui aussi un numéro 10, en l’occurrence Eden Hazard, un enfant du pays, issu du centre de formation de l’AFC Tubize qu’il fréquenta assidument au début des années 2000. 

En juin 2014, la statue d’Eden Hazard est par conséquent inaugurée au sommet de la butte surmontant les infrastructures sportives tubiziennes. Avec les couleurs du maillot l’équipe belge de football, l’œuvre de Roberto Ollivero qui mesure près de 8 mètres de haut ne peut échapper au regard. Cependant, l’œuvre n’est complète que quand on voit le ballon au fond des filets, malgré la spectaculaire envolée d’un gardien de buts anonyme, celui-là. Le cadre du but est déformé par la puissance du tir et un énorme GOOOAL coloré apparaît en arrière-plan.

Italien, né à Elisabethville en 1949, Roberto Ollivero s’établit à Nivelles où il donne libre cours à son tempérament artistique. Après avoir créé un lieu de théâtre du geste et de performances, à Schaerbeek, au début des années 1970, Roberto Ollivero se tourne vers la création contemporaine d’un autre genre. Cherchant entre le papier mâché, le béton et le métal le meilleur support de ses inspirations, il en vient à se spécialiser dans le polyester polychrome qui devient sa signature et prend différentes formes : sculptures d’extérieur et d’intérieur, des hauts reliefs, empreintes et peintures. Après Art Foot (Tubize, 1986), Articulture II (Mariemont, 1987), Rempart-Art (Binche, 1989) et Des mots, rien que des mots (Nivelles, 2005) qui sont autant d’événements occupant l’espace public de manière éphémère, Ollivero expose ses œuvres dans diverses galeries et obtient des commandes publiques en France et surtout à Bruxelles. 

Toujours conçues à partir d’une idée ou d’une réflexion, ses sculptures qu’il veut vivantes sont réalisées sans aucun socle. Maniant humour et critique, questionnant la société et les enjeux de pouvoir, jouant volontiers sur les mots et les codes, s’inspirant de l’actualité ou puisant dans sa mémoire, Ollivero associe étrangement et de manière volontiers provocatrice des images, des références et des valeurs établies, en créant des situations dissonantes le plus souvent dans des couleurs joyeuses qui entrent en contradiction avec les sujets abordés. Prix du ministre wallon des Travaux publics (1990), réalisateur d’une pipe à l’occasion de l’année Simenon à Liège (2003), le sculpteur s’est aussi lancé dans la réalisation de bronzes. Si son style est bien présent dans le monument de Tubize, il est évident qu’Ollivero a du football une approche bien différente de celle d’Eden Hazard.

Élu meilleur joueur de Premier League et champion d’Angleterre avec Chelsea au terme de la saison 2014-2015, après avoir été désigné comme meilleur jeune de la League en 2014, Eden Hazard est né à La Louvière en 1991 et a fait du football son art et sa profession. Après avoir joué à Braine-le-Comte et à Tubize (à partir de 2003), il est recruté par le LOSC et, en 2007, atteint les demi-finales du Championnat d’Europe des moins de 17 ans avec l’équipe de Belgique. Aligné en Ligue 1 française alors qu’il n’a pas encore 17 ans, il fait les beaux jours du club de Lille. Salué comme le meilleur jeune par le football français, il emmène Lille au paradis : Coupe de France 2011 et champion de France 2011. Poursuivant patiemment sa formation au sein du club qui lui a fait confiance, il achève la saison 2012 en tant que meilleur joueur de la Ligue 1 pour la seconde fois. Quelques jours après son succès contre Munich en finale de la Champions League, Chelsea recrute Eden Hazard et, sous la férule de Mourinho, lui confie les clés de la maison. La Ligue Europa 2013, une demi-finale de Coupe du Monde avec la Belgique en 2014, la Coupe de la Ligue anglaise 2015 et le championnat anglais 2015, voilà quelques-uns des titres collectifs auxquels le prodige a contribué depuis son départ du LOSC. Doué d’une technique exceptionnelle – peut-être héritée de ses parents tout deux anciens footballeurs de haut niveau – Eden Hazard occupe une place enviée au sommet de la hiérarchie du football mondial, étant régulièrement comparé à Messi et à Ronaldo.

 

Statue Eden Hazard (Tubize)

Sources
 


Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Alain DE WASSEIGE, Roberto Ollivero. Œuvre en polyester polychrome. Sculptures et empreintes, Bruxelles, La Papeterie, 2003
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 239

Allée des Sports 7
1480 Tubize

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Monument Docteur HAQUIN

Monument au docteur Haquin, réalisé par Gustave Jacobs, 30 août 1936.

Surnommé le « médecin des pauvres », le docteur Ulysse Haquin était un médecin généraliste, originaire de Gilly où il était né en 1865, qui s’était installé dans la commune de Quaregnon, en 1889. Au cœur du bassin minier et industriel, il porte une attention particulière à la classe ouvrière ; on le sait disponible et il n’hésite pas à soigner gracieusement. Après la Grande Guerre, il crée la « Consultation des Nourrissons » de Quaregnon. Après son décès en 1933, l’initiative est prise de lui élever un monument. Les autorités locales confient sa réalisation à Gustave Jacobs (1891-1986). Davantage qu’un buste ou une simple plaque commémorative, l’artiste réalise un monument caractéristique de cette époque. Il place en effet une statue en bronze d’une femme tenant son enfant dans les bras devant une haute stèle en pierre, de forme rectangulaire, et fait apparaître dans la partie supérieure un médaillon ; il y représente le profil gauche du docteur Haquin. La superposition du médaillon par rapport à la statue donne l’impression que le médecin continue à veiller sur ses patients. Sur la stèle verticale apparaît la dédicace gravée dans la pierre :


AU
DOCTEUR
HAQUIN


Sur le socle portant l’ensemble, sous la statue de bronze, a été gravée la mention :


LA COMMUNE RECONNAISSANTE

Monument au docteur Haquin


Situé à l’extrémité de la place Nicolas Jenart, dans un cadre fort arboré, l’ensemble monumental se trouve actuellement juste devant le CPAS de la localité. Il porte la signature du sculpteur montois Gustave Jacobs à qui l’on lui doit de nombreux bas-reliefs et monuments à Mons, que ce soit à l’hôtel de ville, au gouvernement provincial, ou dans les rues de la ville. Ami d’Anto Carte qui lui avait dressé le portrait, formé aux Académies de Mons et de Bruxelles, Jacobs a donné son nom à un jardin de Mons, au bas de la rue d’Havré. En dehors de Mons, le sculpteur – influencé par l’Art déco – signe plusieurs monuments (parfois aux morts de la Grande Guerre) dans l’espace public wallon, essentiellement dans le Hainaut ou le Namurois (Wasmes, Gembloux… ou ici à Quaregnon), ainsi qu’à Bruxelles. Professeur de sculpture et directeur de l’École des Arts et du Dessin de Saint-Josse-ten-Noode, il livre des bustes et expose, à partir de 1925, avec le Cercle « Bon Vouloir » à Mons. Sculpteur apprécié, il a déjà obtenu le Prix du Hainaut lorsqu’il termine le monument du docteur Haquin, inauguré le 30 août 1936.

 



 

Jurbise, Lens, Quaregnon et Saint-Ghislain, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2007, p. 172
http://www.vanderkrogt.net/statues/land.php?land=BE&webpage=ST&page=5 (s.v. août 2013)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 746
Le Thyrse, 1er septembre 1936, n°9, p. 267-276
 

place Nicolas Jenart – 7390 Quaregnon

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Statue Guillaume IV de Hainaut-Bavière

Statue de Guillaume de Bavière, réalisée par Frantz Vermeylen, septembre 1911.

Face à la gare de Binche, de style néo-gothique, construite entre 1905 et 1910, s’étend une imposante esplanade, au centre de laquelle a été inaugurée en 1931 une statue de l’Indépendance ; autour de ce monument central s’étendent quatre pelouses séparées par des chemins : la moitié supérieure, côté gare, est ceinturée par une balustrade en pierre bleue, sculptée, de style néo-gothique d’où émergent 8 colonnes de pierre, elles-mêmes surmontées d’une statue en bronze. Destiné à mettre la gare davantage en évidence tout en atténuant harmonieusement le dénivelé du terrain, le square a été aménagé en respectant les indications très précises de la Commission royale des Monuments qui délégua sur place, à plusieurs reprises, ses représentants pour veiller à la bonne exécution des travaux (adjugés à 60.000 francs de l’époque). Soutenu par les autorités locales, et en particulier par le bourgmestre Eugène Derbaix, le projet de square s’inspire de celui du Petit Sablon, à Bruxelles, avec ses colonnettes gothiques et ses statuettes évoquant « l’histoire nationale ». Il est inauguré en septembre 1911.

Oeuvres des sculpteurs Vermeylen et Valériola, désignés en mai 1911, les 8 statues représentent « des personnages illustres qui ont joué dans l’histoire locale un rôle important et dont le souvenir mérite de vivre dans la mémoire des Binchois » (Derbaix). Quatre sont dues au ciseau d’Edmond de Valériola : Baudouin le Bâtisseur, Gilles Binchois (statue disparue en 2014), Yolande de Gueldre et Marie de Hongrie (statue volée en 1993) ; il s’agit en fait de toutes les statues de gauche quand on fait face à la gare. Les quatre autres ont été réalisées par Frantz Vermeylen (1857-1922) : Charles-Quint, Marguerite d’York, Arnould de Binche et Guillaume de Bavière qui nous occupe ici. Il s’agit de la statue située entre Charles Quint et Marguerite d’York. Dans le projet initial, présenté en octobre 1910, Guillaume de Bavière, comme d’ailleurs Yolande de Gueldre et Gilles Binchois, n’avait pas été retenu. Figuraient alors Albert, Isabelle et Jacques Du Broeucq qui, sur décision du conseil communal de Binche et d’Eugène Derbaix en particulier, furent remplacés dans la version définitive du projet, arrêtée au printemps 1911.


Natif de Louvain, où son père (Jan Frans) exerçait déjà le métier, Fr. Vermeylen a appris la sculpture dans l’atelier familial, avant de suivre les cours de l’Académie des Beaux-Arts de Louvain (1869-1878) où son père enseigne, et de se perfectionner à Paris (chez A-A. Dumont). Ayant certainement travaillé sur les chantiers de décoration de l’hôtel de ville de Louvain, de la gare d’Amsterdam et au Rijksmuseum dans les années 1880, il devient l’expert attitré des autorités louvanistes, avant de répondre aussi à des commandes de décoration pour la ville d’Audenarde, l’abbaye Saint-Gertrude, la Volksbank, etc. Spécialisé dans les intérieurs d’église (par ex. Saint-Martin à Sambreville), il reste un artiste demandé tant pour ses médailles que pour ses bustes et ses statues, comme celle du gouverneur Orban de Givry à Arlon (1903), que pour les quatre statues qu’il réalise pour Binche.


Concernant les 8 statues qui composent l’ensemble face à la gare, tous les personnages ont vécu avant le XVIIe siècle, deux sont des artistes (Gilles Binchois et Arnould de Binche) et six représentent des « princes ou princesses » qui « ont apporté la prospérité à Binche ». Guillaume IV est le dernier comte de Hainaut, avant que les Bourguignons n’imposent sa cession en 1428, par une habile politique de mariages. Pourtant, en 1324, par le mariage de Marguerite II d’Avesnes avec Louis IV de Wittelsbach (sacré empereur), le comté de Hainaut était entré dans l’orbite de l’importante famille de Bavière. De cette union, naîtra notamment Albert Ier, héritier des titres et propriétés de la famille, marié à Marguerite de Brzeg. De cette union naîtront Marguerite (mariée à Jean sans Peur), Guillaume, héritier principal, et Jean qui deviendra évêque de Liège. À la mort d’Albert Ier, en décembre 1404, Guillaume (1365-1417) devient duc de Bavière sous le nom de Guillaume II, comte de Hainaut sous le nom de Guillaume IV, ainsi que comte de Hollande et de Zélande. Son mariage avec Marguerite de Bourgogne conforte le rapprochement entre les Bavière et les ducs de Bourgogne, mais introduit surtout le loup bourguignon dans la bergerie hennuyère. L’intégration du Hainaut dans le giron bourguignon sera scellée en 1433 quand Jacqueline de Bavière (la fille de Guillaume IV et l’épouse de Jean IV de Bourgogne, le neveu de Jean Sans Peur) finit par abandonner le comté de Hainaut à Philippe le Bon institué comme héritier dès 1428. Mais ce n’est pas cet aspect-là que veulent mettre en évidence les autorités de Binc

he au début du XXe siècle. Elles souhaitent honorer Guillaume IV de Bavière parce qu’il a assuré la translation des reliques de saint Ursmer de Lobbes vers Binche (1409). 
En fait, dans la guerre opposant les Liégeois à leur prince-évêque, Jean de Bavière, le comte de Hainaut (son frère) vient à sa rescousse avec le comte de Namur et le soutien des Bourguignons. Se sentant menacé, le chapitre de Lobbes vient chercher la sécurité dans la ville fortifiée voisine de Binche. Ce transfert constitue un événement pénible pour Lobbes et une aubaine pour Binche : pendant plusieurs siècles, les deux cités entretiendront une inimitié tenace. En honorant Guillaume IV d’une statue au début du XXe siècle, les autorités de Binche entretenaient en quelque sorte une vieille rivalité villageoise.

 

Statue de Guillaume de Bavière

 


Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Le Journal de Charleroi, 31 octobre 1910 et 16 mai 1911, Journal de Bruxelles, 3 octobre 1911
Ludo BETTENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 602-604
Eugène DERBAIX, Monuments de la Ville de Binche, Vromant & Cie, 1920, p. 38-39
Étienne PIRET, Binche, son histoire par les monuments, Binche, Libraire de la Reine, 1999
Victor DE MUNTER, Frantz Vermeylen et son œuvre, dans Revue belge de numismatique et de sigillographie, Bruxelles, Société royale de Numismatique, 1925, n°1, p. 57-68
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 739
http://www.histoire-des-belges.be/listes/comtes-de-hainaut 
(Monique MAILLARD-LUYPAERT, Alain DIERCKENS), Autour de saint Ursmer, de Lobbes à Binche, conférences, Tournai, 2011
Des Trésors à partager autour de Saint Ursmer, comité du 600e anniversaire de la translation des reliques et du Chapitre de Saint Ursmer, Lobbes, 2011

Place et square Eugène Derbaix
7130 Binche

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Monument Maurice GREVISSE

Monument d’hommage à Maurice Grevisse, réalisé par Fernand Tomasi, 29 octobre 1995. 

En Gaume, l’enfant du pays le plus célèbre a donné son nom à une rue de l’entité de la Rulles ; l’acte fut posé de son vivant, la rue étant inaugurée le 30 octobre 1966, à l’occasion du 30e anniversaire de la naissance du Bon usage. Par la suite, l'école primaire fut aussi rebaptisée (1988), tandis que la nouvelle gare de Marbehan était décorée de fresques murales rendant hommage à Grevisse en 1995. Les autorités locales de son village natal ne pouvaient manquer le rendez-vous du centième anniversaire de sa naissance et organisèrent elles aussi une manifestation officielle, le 29 octobre 1995. Un petit musée était inauguré dans l’école communale tandis qu’était dévoilée une sculpture due à un artiste bien connu de la région, en l’occurrence Fernand Tomasi (Orsainfaing 1934 - ).
Professeur de français consciencieux, Maurice Grevisse (Les Rulles 1895 – La Louvière 1980) était parti d’une bonne intention louable : rendre plus accessible à ses jeunes élèves les règles complexes de la grammaire française courante. De fil en aiguille, le jeune instituteur devenu docteur en Philologie classique de l’Université de Liège (1925) puis professeur à l’École royale des Cadets à Namur (1927), puis à Bruxelles a mis au point Le Bon usage que l’imprimeur de Gembloux Jules Duculot prit le risque de publier (1936). Après la Seconde Guerre mondiale, le succès est au rendez-vous. Le Bon usage devient l’ouvrage de référence, volumineux, constamment réédité et mis à jour, connaissant sa 14e édition en 2007 sous la direction des successeurs spirituels de Maurice Grevisse.

Monument d’hommage à Maurice Grevisse

C’est sous une tout autre forme de langage que le sculpteur Fernand Tomasi rend hommage au grammairien wallon. Fils de menuisier lombard, ayant quitté l’Italie de Mussolini pour le sud de la Wallonie, le jeune Tomasi a dû connaître très tôt Le Bon usage puisqu’il a mené un régendat littéraire à l’ISMA (Arlon, 1958), et il a dû l’utiliser à de nombreuses reprises quand il a enseigné à la fois le français et l’histoire pendant deux ans au Congo, puis pendant 30 ans au Collège N-D. du Bonlieu, à Virton (jusqu’en 1990). Avec Grevisse, Tomasi partage autant le goût de la langue ; depuis qu’il est installé à Meix-devant-Virton, Tomasi s’y adonne en effet autant à l’écriture qu’à la sculpture. Poète, nouvelliste et romancier, il travaille autant les mots que le bois et la pierre (marbre, calcaire, etc.). Plusieurs de ses œuvres sont visibles dans les églises ou les villages du sud Luxembourg, comme la fontaine D’Jean Mady à Virton, les Commères à Athus, et aussi le spectaculaire Mur de becs et de plumes, taillé dans un bloc de calcaire pesant 42 tonnes, achevé au début des années 1990 et qui décore l’espace devant le « nouveau » Palais de Justice d’Arlon ; en 2012, il déposait un original « chou cabus » de 8 tonnes, sur le nouveau square Lenoir, à Mussy, là où il avait déjà réalisé un mémorial pour l’inventeur de l’automobile. Si le monumental ne le rebute pas, il réalise davantage de petits formats, se laissant inspirer par la thématique inépuisable de la femme.

Implantée en face de la maison natale de Grevisse, l’œuvre de Tomasi est inaugurée le 29 octobre 1995, pour marquer le centième anniversaire du philologue. Il s’agit d’une interprétation très libre de l’artiste. Dans la pierre, il a en effet représenté un aigle, dont l’inclinaison de la tête semble indiquer la façade de la maison natale de Maurice Grevisse. De petit format, l’oiseau n’a pas les ailes déployées. Son dos paraît offrir la place pour déposer un livre à la manière des lutrins d’église. Le rapace est posé sur un socle rectangulaire, l’ensemble étant lui-même installé au centre d’un cercle délimitant son implantation au sol.

 



 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (dont Le Soir, 30 octobre 1995 et 22 avril 2000)
Jean-René KLEIN, Maurice Grevisse, dans Nouvelle Biographie Nationale, t. II, p. 210-212
Paul DELFORGE, Cent Wallons du Siècle, Liège, 1995
La Vie wallonne, IV, 1966, n°316, p. 284

66 rue Maurice Grevisse – 6724 Les Rulles Virton

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Statue André-Modeste GRETRY

Statue André-Modeste Grétry, réalisée par Guillaume Geefs,29 juin 1866.

Alors que l’époque de la « statuomanie » officielle n’a pas encore vraiment commencé dans le nouvel État belge, le monument d’André-Modeste Grétry apparaît comme étant le tout premier, dédié à un personnage historique, à faire son apparition dans l’espace public du pays wallon. Figée dans le bronze par Guillaume Geefs, la représentation d’André-Modeste Grétry est alors située entre la salle académique de la « nouvelle » Université et la façade de la Société libre d’Émulation, sur ce que l’on appelle à l’époque la place de Liège et qui deviendra, après la Grande Guerre, la place du 20 Août. Entre-temps, cependant, le monument « Grétry » a été déplacé. Le 29 juin 1866, la statue est hissée sur son socle à son emplacement définitif, à savoir devant l’Opéra. Son ancienne situation est alors occupée par la statue d’André-Hubert Dumont : l’emplacement occupé par le monument Dumont au début du XXIe siècle est cependant distant d’une vingtaine de mètres de l’endroit où Grétry et Dumont se succédèrent. Quant à la statue Grétry, elle fut enlevée durant la période de la Seconde Guerre mondiale ; un blockhaus était installé à cet endroit. La statue fut remise en place en 1945.


En choisissant d’ériger un monument à Grétry (pour un coût global de 50.000 francs de l’époque, dont 20.000 accordés par le gouvernement) au moment où l’on célèbre le 100e anniversaire de sa naissance, les autorités liégeoises acceptent de contribuer à une démarche « nationale » qui vise à peupler l’espace public de monuments en l’honneur des « grandes gloires nationales belges ». Les peintures d’histoire ne suffisent pas. Il faut toucher le plus grand nombre et lui inspirer un sentiment national, au sein du jeune État. À Anvers, au même moment, on a choisi d’ériger une statue à Rubens. Dès le début des années 1840, les gouvernements belges ne manquent pas d’inciter les pouvoirs locaux et provinciaux à faire preuve d’initiative. En honorant Grétry (1842) puis A-H. Dumont (1866), « ses enfants », Liège participe à ce mouvement qui se poursuivra avec le monument « Charlemagne » (1868), les statues de la façade du Palais provincial (1884) puis de la Grand Poste (1901), ainsi qu’avec les monuments Zénobe Gramme et Charles Rogier en 1905, notamment.


En présence d’un important public, l’inauguration du monument Grétry se déroule finalement le 18 juillet 1842, en même temps que celle de l’arrivée à Liège du chemin de fer, en l’occurrence l’ouverture des plans inclinés de la ligne Ans-Liège. De nombreuses manifestations sont organisées pour l’occasion et le jeune écrivain Van Hasselt y rencontre un franc succès au cours d’une séance littéraire publique à la Société libre d’Émulation. L’idée de rendre un hommage appuyé à Grétry avait déjà été émise sous le régime hollandais. Depuis Bruxelles, le compositeur Roucourt fut l’un des tout premiers à réclamer une statue en l’honneur de Grétry, en ouvrant une souscription (Le monde musical, 25 février 1821). À Liège, se constitua une « Société Grétry » et, en 1828, le retour dans sa ville natale de l’urne funéraire de Grétry est marqué par des débordements d’enthousiasme populaire : trois jours de fêtes publiques sont alors organisés (discours, cérémonies, réjouissances, concerts). « Partout où la civilisation a fait des progrès, les rares talents sont comme une sorte de propriété publique ; et la nation dont ils étaient les délices et la gloire se charge de leurs funérailles » déclarait alors le gouverneur de Gerlache. Mais pour certains (dont le jeune Charles Rogier) ce n’est pas suffisant. Avant le retour de l’urne, des projets de monument ont été élaborés, des pétitions lancées, des souscriptions ouvertes, des finances rassemblées ; en 1828, de nouveaux projets fleurissent et même le célèbre Meyerbeer en appelle à la mobilisation des Liégeois. En septembre 1829, le journal Le Politique souligne que « l’absence prolongée du monument (…) [provoque] la risée de nos voisins (…) ». Une fois la Révolution de 1830 passée, une fois le Traité des XXIV articles signé, l’attention des autorités liégeoises se concentrera sur ce projet de monument et le concrétisera en 1842. Il n’est pas inutile de mentionner que, depuis septembre 1780, un buste de Grétry – fait par ailleurs « citoyen d’honneur » – a été installé à l’avant-scène du théâtre de Liège à la demande du « Conseil de la cité ».


Formé à l’Académie d’Anvers, sa ville natale, le sculpteur Guillaume Geefs (Anvers 1805 – Bruxelles 1883) est convié à laisser sa signature sur le premier monument marquant de « la capitale de la Wallonie » de l’époque. Ayant très rapidement fait preuve de son talent, le jeune Geefs a été repéré par ses professeurs. Une bourse lui permet de parfaire sa formation à Paris et, à son retour, il est nommé professeur de sculpture à l’Académie d’Anvers (1833-1840). Présent dans différents salons, il s’impose avec le modèle de la statue du Général Belliard et le monument funéraire du comte Frédéric de Mérode. Le jeune royaume de Belgique vient de trouver en Guillaume Geefs un propagandiste de talent, l’un de ses sculpteurs capables de figer dans la pierre les personnes et les événements les plus illustres du pays. Statuaire du roi, Geefs s’installe à Bruxelles où son atelier répond aux multiples commandes destinées à orner les églises, les places, les édifices, les cimetières ou les salons de toute la Belgique. Ses statues de Léopold Ier se déclinent en diverses versions, dont l’une sur la colonne du Congrès, à Bruxelles, et une autre à Namur. À Anvers, il livre une statue de Rubens (1840) ; à Liège, celle de Grétry (1842). Membre de la classe des Lettres de l’Académie dès 1845, il la préside de 1858 à 1883. Il était membre de l’Institut de France.


C’est sans doute l’un des rares points communs qu’il partage avec Grétry (Liège 1741 – Montmorency 1813). Membre de l’Institut de France en 1796, chevalier de la Légion d'honneur à la création de cet ordre, André-Modeste Grétry reçut de son vivant tous les honneurs possibles de la part des autorités en place à Paris, cité où il accomplit l’essentiel de sa carrière, tout en ayant été, en 1776, un conseiller particulier de François-Charles de Velbruck, prince-évêque de Liège, sa ville natale. Plongé dès son plus jeune âge dans le monde de la musique, André-Modeste fut enfant de chœur à la collégiale Saint-Denis et participa aux Crámignons. Ayant forcé sa voix alors en mue, il est contraint de se tourner vers la composition où il trouve à s’épanouir avec talent. Remarqué par le chanoine de Harlez, riche mécène éclairé liégeois, Grétry reçoit sa chance : comme Jean-Noël Hamal juste avant lui, il bénéficie d’une bourse de la Fondation Darchis qui lui permet de séjourner à Rome de 1759 à 1766. Séduit par un opéra de Piccini, formé auprès de Casali, maîtrisant le chant et la musique italienne, Grétry s’écarte des sentiers battus ; à l’occasion d’un carnaval (1765), il compose un intermède, Les Vendangeuses (Vendemiatrici) qui lui vaut les encouragements de Piccini. Nommé maître de chapelle à Liège, Grétry est encouragé par Voltaire et tente sa chance à Paris. Après plusieurs mois de galère, Grétry triomphe pour la première fois avec le Huron (1768). Lucile (1769) confirme le talent du jeune Wallon qui séduit aussi dans le genre comique, voire bouffon (Le Tableau parlant). Dans la lumière parisienne, Grétry va connaître une carrière exceptionnelle faite d’une quinzaine d’opéras et d’une quarantaine d’opéras comiques, tenant l’affiche pendant plus de trente ans avec Zémire et Azor (1771), Le Jugement de Midas et L’Amant jaloux (1778), Colinette à la Cour (1782), La Caravane du Caire (1783) et surtout un exceptionnel Richard Cœur de Lion (1784-1785).
Introduit dans les milieux parisiens, il devient le directeur de musique de la reine Marie-Antoinette (1774) et, en dépit des bouleversements politiques de 1789, de l’évolution des esprits et d’une inspiration moins heureuse, il conserve sa notoriété : inspecteur de musique du Conservatoire (1795-1800), protégé de Napoléon. C’est dans l’ancienne propriété de Jean-Jacques Rousseau, à Montmonrency, que Grétry se retire et finit sa vie, tout auréolé d’une gloire qui lui survivra. S’il est enterré au cimetière du Père Lachaise, sa ville natale obtient que son cœur soit rapatrié : l’urne qui le contient est visible dans le socle qui soutient la statue en bronze érigée en 1842.


À quelques pas de la place Saint-Lambert, le monument Grétry est au cœur de la cité de Liège. Une discrète mention figure au pied du socle portant l’impressionnante statue :


ANDRE ERNEST MODESTE
GRETRY
1741 – 1813


Orné de décors floraux, le socle délicatement sculpté contient effectivement la fameuse urne qui apparaît derrière un grillage sur la face avant du monument. À l’origine, un vers de Fuss devait être gravé sur le socle : Corpatrioe dedit ipse, lyram sibi vin.licat orbis. Représenté debout, Grétry tient dans sa main gauche ce qui ressemble à l’une de ses compositions.

 

Source


J-B. RONGÉ, dans Biographie nationale, t. 8, col. 256-299
Suzanne CLERCX, Grétry 1741-1813, Bruxelles, 1944
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. II, p. 90-93, 339-340 
Histoire de la Wallonie (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 264, 307, 394, 397
Jean-Marc Warszawski reprend la liste de toutes les œuvres de Grétry : http://www.musicologie.org/Biographies/g/gretry_andre.html
Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 363
Charles BURY, Les Statues liégeoises, dans Si Liège m’était conté, n°35, été 1970, p. 5
Edmond MARCHAL, dans Biographie nationale, t. 22, col. 572-579
Roucourt, dans Biographie nationale, t. 20, col. 205
Ernest DISCAILLES, Charles Rogier d’après des documents inédits, Bruxelles, s.d., vol. 1, p. 151
Chantal JORDENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 557-561
Alexia CREUSEN, dans Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996 
Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 255
L. ALVIN, Van Hasselt, dans Biographie nationale, t. 8, col. 759
Le politique, municipal, provincial et national (ancien Mathieu Laensbergh), 10 septembre 1829, n°216, p. 3
Jean BROSE, Dictionnaire des rues de Liège, Liège, Vaillant-Carmanne, 1977, p. 154

 

Statue André-Modeste Grétry (Liège)

Place de la République française
4000 Liège

carte

Paul Delforge

Paul Delforge

Mémorial Robert GREGOIRE

Mémorial Robert Grégoire, réalisé par Paul Du Bois, avec un buste de Jean Van Neste et un bas-relief signé Robert Mermet datant de 1937, 4 juillet 1935. 

À l’entame de l’avenue de la Libération, à Aywaille, au bout de la chaussée à laquelle on accède depuis le pont sur l’Amblève, à hauteur du parc Jules Thiry, un imposant monument bénéficie de la largeur de l’espace public pour rendre un hommage « national » aux motards, et en particulier à Robert Grégoire (1901-1933). Natif d’Aywaille, ce dernier s’était pris de passion pour les compétitions de motocyclette au lendemain de la Grande Guerre. Après avoir remporté ses premiers bouquets sur sa propre machine, le garagiste devient « pilote d’usine » lorsque Saroléa l’engage à la fin des années 1920. Le succès est toujours au rendez-vous. Champion de Belgique expert en 500 cc en 1932 et 1933, Grégoire décroche plusieurs records du tour sur circuit en compétition et un record du monde, celui du kilomètre en départ arrêté. Cette quête de la vitesse pure coûtera la vie à Robert Grégoire, victime d’un accident lors des essais sur le circuit de Francorchamps le 21 juillet 1933.


La disparition tragique du pilote aqualien frappe fortement les esprits. Très vite, avec le soutien d’Édouard Grégoire, le père du pilote, la « Royale Ligue motoriste Ourthe et Amblève » décide d’élever une stèle à la mémoire de Robert Grégoire. Un Comité est mis en place, présidé par Lambercy et Thomas notamment. Au début du mois de juillet 1935, la stèle est inaugurée en présence de nombreuses délégations belges et étrangères, des autorités locales et du président des clubs motocyclistes de Belgique (Lamborelle). Il est vrai que depuis la disparition de Robert Grégoire, l’élite des motocyclistes belges a été décimée : Noir et Paul Demeuter se sont tués en course en juillet 1934 et Antoine Lambert en 1935. La destination du monument Grégoire a par conséquent sensiblement évolué au cours de sa réalisation et l’inauguration est l’occasion de rendre hommage à l’ensemble des pilotes récemment décédés.


À ce moment, en juillet 1935, le monument réalisé par Paul Du Bois se présente sous la forme d’une haute stèle en pierre bleue surmontée d’un buste en bronze représentant un motocycliste. Sur la face de la stèle côté Amblève, une allégorie féminine pleure les disparus en tendant vers le haut une branche végétale ; à la hauteur de la main tendue apparaît la mention :


A NOS
CHAMPIONS
MOTOCYCLISTES


IN MEMORIAM

 

Mémorial Robert Grégoire (Aywaille)

Sur la face avant du monument (l’orientation est donnée par rapport à la position du visage du buste), en contrebas, un bas-relief réalisé dans la pierre montre une moto de course légèrement de face, avec un pilote au guidon et le numéro 1. Tout en haut de cette face du monument, le nom de ROBERT GREGOIRE a été gravé lui aussi dans la pierre. Volontairement, le sculpteur qui a réalisé le buste ne lui a pas donné les traits d’un pilote connu ; il ne s’agit donc pas de Robert Grégoire. Ce buste est l’œuvre du sculpteur liégeois Jean Van Neste.


Formé à la sculpture à l’Académie de Liège, Jean (André) Van Neste (Grivegnée 1883-date de décès inconnue) a fait carrière dans la sculpture, tout en se lançant dans la peinture en autodidacte. Retenu prisonnier dans les camps allemands pendant la Première Guerre mondiale (il séjournait à Munster en mars 1915), Van Neste représentera les conditions de sa captivité, ainsi que des portraits de prisonnier dans quelques tableaux. Son œuvre peint privilégie cependant les paysages, les fleurs et les natures mortes, voire quelques scènes villageoises. Comme d’autres sculpteurs, il eut diverses commandes de monuments aux morts de la Grande Guerre dont principalement celui de Spa.


En 1935, lors de l’inauguration, un bas-relief en bronze a déjà été apposé à mi-hauteur, dans le prolongement de la végétation sculptée sur la face côté Amblève : lui aussi œuvre de Jean Van Neste, il représente Paul Demeuter. Par la suite, d’autres bas-reliefs viendront s’ajouter au « Mémorial aux glorieux pionniers du Sport Motocycliste belge » ; ainsi, dès 1937, y trouve-t-on celui de Robert Grégoire, réalisé par Robert Mermet.
Après la Seconde Guerre mondiale, avec le soutien de la Fédération motocycliste de Belgique, la RLMOA s’occupera de l’entretien, de la restauration et d’un nouvel aménagement du monument qui se transforme en un mémorial dédié à tous les motocyclistes décédés en course, tout en honorant les victimes des deux guerres mondiales. Autour du monument, un espace rond est circonscrit par la construction d’un mur en moellons ; à ses extrémités, le demi-cercle bâti supporte un casque de motard reposant sur des feuilles de lauriers, tandis que débordent du mur une demi-roue et la partie arrière d’une moto. À deux endroits dans la partie haute du muret en moellons, une pierre bleue a été gravée au nom de :


LA
FEDERATION MOTOCYCLISTE BELGE
A SES HEROS


DE
BELGISCHE MOTORIJDERS BOND
AAN ZIJN HELDEN


ainsi que la mention             1914–1918         1940–1945


À l’arrière du socle principal, la liste des noms de motocyclistes décédés au cours de compétitions belges est apposée ; le nom des délégués officiels décédés au cours de compétition apparaît aussi. Cette nouvelle inauguration se déroule le 8 juin 1958.


Daté de 1937, le bas-relief représentant Robert Grégoire est dû au ciseau du sculpteur français Robert Mermet (Paris 1896 – Cusset 1988). Avant la Grande Guerre, alors qu’il n’avait que 14 ans, il intègre l’École nationale supérieure des arts décoratifs, à Paris ; après l’Armistice, il se retrouve en Belgique où il va réaliser l’essentiel de sa carrière. Inscrit à l’Académie de Bruxelles à partir de 1921, il bénéficie des conseils de Montal, son professeur de dessin, et il fait ses armes dans l’atelier de Paul Du Bois. Lauréat du Grand concours triennal de sculpture de l’Académie de Bruxelles en 1923, héritier de Rodin et de Gimond, Mermet va signer de très nombreux bustes, pour des notables bruxellois fortunés, mais aussi un buste d’Einstein et un autre du docteur Schweitzer. Il est cependant peu présent dans l’espace public wallon ; son travail se rencontre néanmoins à Bioul (monument Vaxelaire), à Charleroi (le « révolté » sur un palais de l’industrie) et à Aywaille. Au moment de l’invasion allemande de mai 1940, il trouve refuge non loin de Vichy, à Cusset précisément où il installe définitivement son atelier. Là, outre un monument aux morts inauguré en 1953, le statuaire est régulièrement invité à réaliser le buste de maires ou d’écrivains (comme Émile Guillaumin), tout en formant de jeunes élèves (comme Georges Jeanclos). D’inspiration, il réalise aussi de nombreux nus, de petite taille, qui ne sont pas sans rappeler certaines œuvres de Paul Du Bois. D’ailleurs, si la présence de bas-reliefs de Mermet dans la cité aqualienne peut s’expliquer par la véritable passion qu’il nourrissait pour la moto, il est tout aussi vraisemblable qu’elle soit motivée par les liens qui unissaient le « jeune » sculpteur à son maître, Paul Du Bois, auquel il faut sans aucun doute attribuer le mémorial Grégoire.


Si l’on ne trouve nulle trace de signature de Paul Du Bois sur le monument (ni d’ailleurs dans les biographies qui sont consacrées à l’un et dans les brèves descriptions consacrées à l’autre), il suffit de quelques « arguments » pour se convaincre qu’il en est bien l’auteur. Au-delà de sa naissance à Aywaille et de sa proximité avec Mermet, Paul Du Bois vient d’achever un monument Lenoir à Arlon (1931) qui le lie au monde des moteurs automobiles. Dans le style du monument, on reconnaît la griffe de l’artiste wallon qui recourt volontiers à une allégorie féminine pour mettre davantage en évidence son sujet. C’est particulièrement évident dans le cas d’Aywaille. Sous réserve d’éléments contraires, il semble par conséquent que, dans une production déjà abondante, il faille ajouter le « Mémorial Grégoire » d’Aywaille à l’œuvre de celui qui fut formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1877-1884), qui fut l’élève de Louis François Lefèbvre, de Jean-Joseph Jaquet et d’Eugène Simonis, avant de profiter des conseils de Charles Van der Stappen.


Ouvert à l’avant-garde sans renier son attachement à la Renaissance, membre-fondateur du groupe bruxellois d’avant-garde le Cercle des XX, puis de la Libre Esthétique, Paul Du Bois excelle dans les portraits quand lui parviennent les premières commandes officielles de la ville de Bruxelles. Sans abandonner des œuvres de son inspiration qui sont remarquées et primées lors de Salons et d’Expositions à l’étranger, il réalise le monument Félix de Mérode (Bruxelles, 1898) qui symbolise le début de son succès. En 1900, il est nommé professeur à l’Académie de Mons (1900-1929) et, deux plus tard, il est chargé du cours de sculpture ornementale (1902-1905), puis de sculpture d’après l’antique (1905-1910) à l’Académie de Bruxelles où il reste en fonction jusqu’en 1929. En 1910, il succède à Charles Van der Stappen à l’École des Arts décoratifs. Vice-président du jury d’admission des œuvres pour le Salon des œuvres modernes de l’Exposition internationale de Charleroi (1911), Du Bois signe plusieurs monuments commémoratifs dans l’espace public de Wallonie et on lui doit aussi des bijoux, des médailles (dont celle de l’Exposition universelle de Liège en 1905). Né Paul Dubois, il avait très tôt changé la graphie son nom (en Paul Du Bois) afin d’éviter d’être confondu avec… son célèbre homonyme français.

 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, dont Le Soir, 31 mai 1991
Théo MATHY, Dictionnaire des sports et des sportifs belges, Bruxelles, 1982, p. 111-112
http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_Circuit_de_Spa-Francorchamps_fatal_accidents (s.v. décembre 2014)
René HENRY, Aywaille – Chronique illustrée du XXe siècle, Liège, Dricot/PAC Aywaille, s.d., p. 94-95, 104-107
http://racingmemo.free.fr/M%20HISTOIRE/M-HIST%201934.htm (s.v. avril 2015)
Les Mermet d’hier et d’aujourd’hui, bull. n°17, mars 2007, sur http://www.mermet.asso.fr/IMG/pdf_bulletin17.pdf (s.v. avril 2015)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 517
Paul Du Bois 1859-1938, édition du Musée Horta, Bruxelles, 1996
Anne MASSAUX, Entre tradition et modernité, l’exemple d’un sculpteur belge : Paul Du Bois (1859-1938), dans Revue des archéologues et historiens d’art de Louvain, Louvain-la-Neuve, 1992, t. XXV, p. 107-116
Anne MASSAUX, dans Nouvelle Biographie nationale, t. 4, p. 142-145
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 672

Avenue de la Libération 1
Promenade Jean d’Ardenne
4920 Aywaille

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Zénobe GRAMME

En raison du succès très important remporté par la souscription publique lancée dès 1903 pour honorer Zénobe Gramme à Liège, le « Comité du Monument Gramme » s’est trouvé pourvu de moyens dépassant ses espérances et lui permettant de faire davantage que l’érection de l’impressionnant monument inauguré à Liège, à hauteur du pont de Fragnée, dans le cadre de l’Exposition universelle. Par conséquent, le Comité s’est tourné vers le village natal de l’inventeur, à savoir Jehay. Ravies de pouvoir honorer leur illustre citoyen né dans le village en 1826, les autorités communales lui consacrent une fontaine et décident aussi d’apposer une plaque commémorative sur sa maison natale. Mais autant était facile de choisir un lieu bien situé pour la fontaine, autant il fut difficile d’identifier la maison de famille où Zénobe-Théophile Gramme était né le 4 avril 1826.

Très précis sur la date, l’acte de naissance ne mentionnait rien de l’adresse de la famille Gramme qui quitta le pays au moment où le jeune garçon avait douze ans. Entre 1838 et 1907, beaucoup d’eau avait coulé sous les ponts et, en l’absence de sources écrites, rarissimes étaient les témoins susceptibles d’avoir connu les « Gramme ». Seul Olivier Gervalle, un vieillard de la localité, affirma avoir fréquenté l’école en même temps que Zénobe et se souvenir que la maison de famille se situait au n°2 du chemin de la Conterie. Malgré le millésime « 1850 »… qui apparaissait nettement au-dessus du linteau de la porte d’entrée de ladite maison, on fit confiance au souvenir du vieil homme et on inaugura, le 4 août 1907, c’est-à-dire le même jour que la fontaine, une plaque indiquant :

DANS CETTE MAISON EST NÉ
LE 4 AVRIL 1826
ZÉNOBE GRAMME
INVENTEUR
DE LA DYNAMO INDUSTRIELLE

Invitée à la cérémonie, la sœur de Zénobe Gramme (Zoé Gramme fut directrice de l’École normale d’Arlon) fait alors discrètement savoir aux organisateurs de la cérémonie que son frère n’est pas né à cet endroit ; l’endroit où est apposée la plaque était précédemment occupée par une autre maison, plus petite, où vint habiter la famille Gramme en 1833… Cinq ans auparavant, Zénobe était né dans une maison située au coin de la drève du Saule Gaillard (au n°39) et de la ruelle Halain (ou Hallin)… moins d’un kilomètre à vol d’oiseau sépare les deux maisons. Plusieurs fois restaurée et réaménagée, la maison de la rue Saule Gaillard date de 1758.

En dépit des informations acquises lors de l’inauguration de la plaque en août 1907 et après l’événement, l’erreur ne fut jamais corrigée et la plaque commémorative demeura au n°2 du chemin de la Conterie, lui-même rebaptisé – par erreur – rue Zénobe Gramme. Si certaines incertitudes entouraient la naissance du génial inventeur, nul n’ignorait cependant que ce menuisier bricoleur et curieux avait réussi à transformer les lois de la physique en un simple instrument fiable. Après plusieurs brevets divers, Gramme déposait en 1869 celui de son innovation majeure pour une machine dynamoélectrique. Il faisait franchir une étape décisive à l’énergie électrique. À la tête de sa propre société, il parviendra à vendre son « produit » de plus en plus perfectionné à l’industrie et à être reconnu de son vivant pour son invention extraordinaire.

La plaque apposée sur la supposée maison natale est toute de sobriété. Il semble qu’elle soit due, elle aussi, au sculpteur liégeois Émile David (Liège 1871 - ), déjà auteur de la fontaine de la place du Tambour. Formé à l’Académie de sa ville natale avant de prendre la route de Paris pour s’y perfectionner, David était l’un des deux « Liégeois » candidats au Prix de Rome de sculpture 1894, mais ce fut un autre Wallon, Victor Rousseau, formé par des professeurs liégeois de l’Académie de Bruxelles qui fut lauréat. Sculpteur et statuaire, David réalise de nombreux portraits-bustes et médaillons, où l’élément féminin prend une place importante. Son expérience et ses qualités étaient déjà suffisamment établies sur la place de Liège pour que lui soit confié le projet du monument Gramme de Jehay en 1907. Il signe d’autres monuments du même type, essentiellement dans la région liégeoise et sa renommée est grande avant que n’éclate la Première Guerre mondiale. Son nom est cité parmi les artistes susceptibles d’attirer les visiteurs aux Salons d’art de l’époque. On perd totalement sa trace durant la Grande Guerre.

 

Sources

Une certaine idée de la Wallonie. 75 ans de Vie wallonne, Liège, 1995, numéro spécial de La Vie wallonne, t. LXIX, p. 21
Eugène DE SEYN, Dictionnaire biographique des sciences, des lettres et des arts en Belgique, Bruxelles, 1935, t. I, p. 191
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 292
La Vie wallonne, novembre 1930, CXXIII, p. 82-83

 

Plaque Zénobe Gramme (Jehay)

Chemin de la Conterie 2
Rue Zénobe Gramme 
4540 Jehay

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument-buste Zénobe GRAMME

En Wallonie, nul n’ignore que Zénobe Gramme est un enfant du pays. Le génial inventeur de la dynamo a fait, très tôt, l’objet d’hommages appuyés. L’inauguration du monument spectaculaire du pont de Fragnée, à Liège, en 1905, dans le cadre de l’Exposition universelle, montrait au monde que celui qui était né à Jehay, avait grandi et appris son métier au pays de Liège avait des racines wallonnes profondes que personne ne pouvait contester. Si les localités ne manquent pas d’attribuer le nom de Gramme à l’une de leur rue, d’autres monuments, plus modestes, viennent encore rappeler les origines de Zénobe Gramme, avant son départ pour Paris où il a déposé, en 1869, le brevet de son innovation majeure, une machine dynamoélectrique. On scrute alors avec attention la biographie de Zénobe Gramme et l’on retient qu’il a appris son premier métier, celui de menuisier, tant à Hannut, qu’à Huy et à Liège.

C’est en mémoire de plusieurs passages du génial inventeur à Huy que les autorités locales prennent l’initiative d’ériger un monument supplémentaire en son honneur. Dans sa jeunesse (vers 1848), Gramme a en effet suivi des cours du soir à l’École industrielle de Huy tout en travaillant comme apprenti chez un menuisier de la région ; plus tard, après son invention, dans les années 1870, il a réalisé une expérience qui marque les esprits. Depuis la pointe de la forteresse, il allume une sorte de phare, projette un faisceau de lumière et balaye la vallée au grand émerveillement de la foule rassemblée. Saisissant l’occasion des cinquante ans de la disparition de l’inventeur et du 125e anniversaire de sa naissance, Huy inaugure un buste en bronze placé au bout de l’avenue Albert Ier, juste devant la gare, sur une place qui porte le nom de l’inventeur. Ce lieu est aussi symbolique car la place qui s’étend devant la gare du nord est l’un des tout premiers endroits de Huy à avoir bénéficié de l’éclairage électrique. Organisée le 19 août 1951 en présence du gouverneur de la province, des recteurs des universités et de nombreuses autres personnalités, l’inauguration donne lieu à d’importantes festivités.

Le monument qui est découvert ce jour-là se présente sous la forme d’un bronze soutenu par un socle en marbre rectangulaire. Sur la face avant ont été sobrement gravés puis dorés les mots suivants :

ZENOBE
GRAMME


1826-1901

Composée de trois blocs de pierre, une haute colonne en forme d’obélisque s’élève derrière le buste et s’achève en pointe. Sur la partie supérieure, tant à l’avant qu’à l’arrière, l’électricité a été stylisée. À l’arrière de la colonne, dans la partie inférieure, l’artiste a représenté de manière allégorique la révolution provoquée par l’invention de l’illustre Zénobe Gramme. Formé à l’Académie de Liège, Guillaume Gueury (Blegny 1910 - ) est professeur dans l’enseignement provincial ; à l’Institut provincial de Huy, Gueury succède à Marceau Gillard au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Professeur d’arts plastiques, il fait partie de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie ; il est membre du groupe des sculpteurs. S’il signe le buste en bronze de Zénobe Gramme (1951), Gueury est plutôt un adepte du grès et de la terre cuite.

 

Sources

Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. 29, col. 627-634
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 666
Cor ENGELEN, Mieke MARX, Dictionnaire de la sculpture en Belgique à partir de 1830, Bruxelles, août 2006, t. III, p. 1753
Joseph PHILIPPE, Marceau Gillard dans l’École liégeoise de sculpture, Liège, 1991, p. 3

Monument et buste de Zénobe Gramme

Place Zénobe Gramme
4500 Huy

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Zénobe GRAMME

Quelques mois à peine après le décès, à Paris, de Zénobe Gramme, l’association des anciens élèves de Polytechnique et de Centrale, à Paris, fait connaître son intention d’ériger un monument à la mémoire de l’illustre inventeur. Après son invention, le nom de Gramme s’était imposé comme celui d’une marque et l’on en avait fini par oublier que ce nom renvoyait à un génial inventeur qui, en se retirant discrètement, dans la banlieue parisienne n’avait pas facilité l’entretien de sa mémoire. L’idée des Parisiens fait cependant bondir les milieux belges ; plusieurs articles paraissent et Oscar Colson retrace, pour la revue Wallonia, une importante biographie qui insiste sur les racines wallonnes de l’inventeur de la dynamo. Plutôt qu’un comité bruxellois, ce sont des Liégeois qui prennent l’initiative : l’Association des Ingénieurs sortis de l’École de Liège formule, dès août 1903, le projet d’ériger un monument en l’honneur de son illustre membre. Un Comité présidé par Frédéric Nyst – par ailleurs président de l’AILg – lance une importante souscription publique qui parvient à sensibiliser plus d’un millier de communes, de sociétés et de particuliers : ce sont près de 75.000 francs qui sont rassemblées auxquels le gouvernement, la province et la ville de Liège ajoutent de plantureux subsides.

Pourvu de moyens importants, le « Comité du Monument Gramme » (au sein duquel on retrouve notamment le professeur George Montefiore-Levi) peut se permettre d’ériger un impressionnant monument à Liège, d’apposer une plaque commémorative à Jehay et de créer des bourses d’études pour les étudiants de l’École industrielle de Liège. Chacun s’accorde à considérer que l’inauguration du monument liégeois doit s’inscrire dans le cadre de l’Exposition universelle qui se tient alors dans la Cité Ardente. Le monument prend place dans le prolongement du pont de Fragnée lui aussi rénové et inauguré en 1905.

En présence du ministre Gustave Francotte – en charge du Travail –, le bourgmestre Gustave Kleyer exprime la satisfaction de « la Capitale wallonne » d’accueillir un tel monument. Il est à la mesure du génie attribué à Zénobe Gramme puisqu’il comprend trois groupes de sculpture en bronze s’appuyant sur un socle en pierre de très grande largeur : Gramme menuisier, Gramme méditant, vingt ans plus tard.

La partie évoquée ici s’intitule « la dynamo ». Menuisier bricoleur et persévérant, Zénobe Gramme (1826-1901) dépose en 1869 le brevet de son innovation majeure, une machine dynamoélectrique. À la tête de sa propre société, il parviendra à vendre son « produit » de plus en plus perfectionné à l’industrie. C’est à l’inventeur qui a révolutionné le monde que cette partie du monument rend hommage. Sur un socle plus élevé que les deux autres, occupant la position centrale, un autre socle en forme de colonne carrée est surmonté d’un large buste, réalisé en bronze, qui présente Zénobe Gramme en demi corps. Sa main repose sur une dynamo bien visible. Symbolisant une déesse personnifiant la science selon les uns, la porteuse d’électricité selon les autres, une femme se tient à la droite de l’inventeur ; elle tient les palmes glorieuses et « les foudres électriques ».

La réalisation de l’ensemble du monument en revient à l’architecte Charles Soubre (1846-1915) et au sculpteur Thomas Vinçotte (1850-1925). Très tôt intéressé par la sculpture, le jeune Vinçotte a déjà eu la chance de fréquenter l’atelier d’Alexandre et Guillaume Geefs, quand il est admis à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles. Élève brillant auprès de Joseph Jaquet et d’Eugène Simonis, second au Prix de Rome 1872, il part se perfectionner dans plusieurs ateliers parisiens et les bustes (l’un de P. Orts, l’autre de Giotto) qu’il présente au Salon de Bruxelles en 1875 lui assurent une notoriété définitive. Après deux années en Italie (1877-1879), il répond à de multiples commandes publiques et du Palais royal, tout en poursuivant une œuvre personnelle. En marbre ou en bronze, avec des bustes, des statues, des monuments ou des bas-reliefs, réaliste ou introduisant de la fantaisie, Vinçotte s’impose comme une valeur sûre de son temps, se spécialisant, à partir des années 1880 dans la représentation des chevaux. Originaire de Borgerhout et décédé à Schaerbeek, il a été professeur de sculpture à l’Institut supérieur national des Beaux-Arts d’Anvers de 1886 à 1921. Quant à Charles (Étienne) Soubre, second fils du compositeur Étienne Soubre, et neveu du peintre Charles Soubre, il est professeur à l’Académie des Beaux-Arts de Liège depuis 1885. Il a signé les plans de quelques villas bourgeoises essentiellement en région liégeoise (château Peltzer à Verviers, maisons sur les grands boulevards de Liège, etc.) quand il se voit confier la réalisation du monument Gramme avec Vinçotte.

 

Sources

Wallonia, 1902, p. 123-129 ; Wallonia, 1903, p. 261-283 ; Wallonia, 1905, p. 488-492
Liège, Patrimoine architectural et territoires de Wallonie, Liège (Mardaga), 2004, p. 206
Si Liège m’était conté, n°36, automne 1970, p. 11
Suzy PASLEAU, dans Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 205-206
Revue du Conseil économique wallon, n° 42, janvier 1960, p. 78
Hugo LETTENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 605-609
Anne VAN LOO (dir.), Dictionnaire de l’architecture en Belgique de 1830 à nos jours, Anvers, Fonds Mercator, 2003, p. 515-516
http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_%C3%89tienne_Soubre (sv. janvier 2014)

 

Monument Zénobe Gramme

Square Gramme
4000 Liège

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Fontaine Zénobe Gramme

Afin d’honorer leur illustre citoyen né dans le village en 1826 et décédé à Paris en 1901, les autorités communales de Jehay n’ont pas tardé à inaugurer une fontaine publique. Dans un style inspiré du XVIIIe siècle, la fontaine en pierre calcaire comporte un médaillon en bronze figurant le profil gauche du célèbre inventeur de la dynamo qui vécut plusieurs années au n°2 d’une rue de Jehay désormais appelée… rue Zénobe Gramme. Sous le médaillon orné de couronnes et lauriers, ont été gravés dans la pierre les mots suivants :

Zénobe Gramme
Inventeur de la dynamo
industrielle
Né à Jehay-Bodegnée
Le 4 avril 1826

Sous l’inscription, un bec délivre de l’eau dans un bac arrondi. À l’arrière de la fontaine, deux plaques en bronze sont insérées dans la pierre. L’une est un bas-relief présentant Z. Gramme à son atelier en train de réfléchir à sa future invention qui apparaît dans la partie supérieure gauche ; en haut à droite, on peut lire sa devise LABOR. En dessous du bas-relief, une plaque donne l’historique du monument et identifie les généreux donateurs de la souscription publique lancée par un comité de particuliers :

« Ce monument élevé
par les habitants de la commune de Jeah-Boegnée
à la mémoire de leur illustre concitoyen
avec le généreux concours
du Comité de la manifestation Gramme-Liège 1905
et de la famille des comtes van den Steen de Jehay
a été inauguré le 4 août 1907 ».

Peut-être faut-il attribuer à Émile Dave, dont la signature apparaît sur le bas-relief arrière l’ensemble de la réalisation.
Quant à Zénobe Gramme, nul n’ignore que le menuisier bricoleur et curieux qu’il était a réussi à transformer les lois de la physique en un simple instrument fiable. Après plusieurs brevets divers, Gramme  dépose celui de son innovation majeure en 1869 pour une machine dynamoélectrique. À la tête de sa propre société, il parviendra à vendre son « produit » de plus en plus perfectionné à l’industrie. C’est à la fois à un patron d’industrie qui a réussi et à un inventeur qui a révolutionné le monde que le monument rend hommage.

 

Sources

Une certaine idée de la Wallonie. 75 ans de Vie wallonne, Liège, 1995, numéro spécial de La Vie wallonne, t. LXIX, p. 21

 

Fontaine Zénobe Gramme

Rue Petit Rivage
Jehay 4540

carte

Paul Delforge