IPW

Musée ducal et hôtel de ville de Bouillon

L’actuel hôtel de ville de Bouillon servait de palais ducal, sous le règne de la famille de la Tour d’Auvergne. Ce vaste ensemble enduit composé d’un bâtiment du XVIIe siècle, fortement reconstruit au XIXe siècle, situé à la pointe nord de l’esplanade du château et dominant la place ducale était donc la résidence du gouvernement bouillonnais. 

Nationalisé après la Révolution française, le bâtiment devint officiellement l’hôtel de ville de Bouillon en 1840. Inscrite dans le périmètre de l’ancien palais ducal, la résidence au gouverneur du duché est intimement liée au palais princier.

L’ancienne résidence du gouverneur © Nancy Perot

Non loin de là, l’actuel musée ducal est installé dans un très bel hôtel particulier édifié par Nicolas-Joseph de Spontin, conseiller à la Cour souveraine du duché de Bouillon. Une cour s’étend face à l’entrée des bâtiments enduits de crépi blanchi et surmontés de toitures à la Mansart couvertes d’ardoises en schiste du pays. L’ensemble témoigne encore de l’esprit du XVIIIe siècle. En tant que musée d’histoire local, l’institution retrace plusieurs siècles d’histoire du duché.

Rue du Petit 1
6830 Bouillon

carte

Frédéric MARCHESANI, 2013

SPW-Patrimoine

Château de Bouillon et fortifications de la ville médiévale et moderne

Le château de Bouillon avec, à l’avant-plan, la tour d’Autriche © Jacques Barras

Le site de Bouillon a de tout temps été occupé pour son important attrait stratégique. 

Le large méandre décrit par la Semois à cet endroit enserre un important éperon naturellement protégé par un escarpement rocheux et par la large rivière qui l’entoure. 

Le site est occupé dès le IIe siècle avant Jésus-Christ. À quelques centaines de mètres du site de l’actuel château, le plateau de la Ramonette qui culmine à 300 m d’altitude a lui aussi été occupé rapidement. Il servit d’assise au Moyen Âge à une première fortification qui prenait la forme d’une motte castrale destinée à défendre le château. Celle-ci, la tour de Beaumont, disparut définitivement en 1141. 

Un premier château est quant à lui mentionné à Bouillon en 988. La construction de la seconde forteresse, à l’initiative du duc Godefroid de Bouillon, fut entamée sous son règne (1061-1100).

La plaque en l’honneur de Louis XIV à l’entrée du château © IPW

 

Toujours en grande partie debout, la forteresse domine ce site grandiose et répond parfaitement, de par sa position avantageuse, aux usages militaires du Haut Moyen Âge. 

Le château et son système de défense ont sans cesse évolué jusqu’au XVIe siècle. Devenus ducs de Bouillon, les princes-évêques n’eurent de cesse de perfectionner cette machine de guerre censée protéger le sud de leur territoire face au royaume de France et au duché de Luxembourg. 

À l’exception d’un élément de tour, peut-être médiéval, les bâtiments visibles de nos jours ne remontent pas au-delà du XVIe siècle. Les constructions médiévales ont en effet souffert du siège de Charles Quint en 1521. Il faut attendre 1551 et le règne de Georges d’Autriche pour que d’importants travaux soient réalisés : il fit construire la petite poudrière ronde, la porte à bossage et le frontispice du troisième châtelet d’entrée, la tour de l’Horloge et la tour d’artillerie qui porte son nom au début du château, la « tour d’Autriche ». Gravées sur celle-ci se trouvent les armoiries du prince-évêque millésimées de 1551. 

La physionomie du site fut alors une première fois bouleversée et fit disparaître les éléments anciens ; contrairement aux croyances largement établies, le château ne conserve donc rien de l’époque du célèbre Godefroid de Bouillon. 

L’arrivée des de la Tour d’Auvergne en 1591 ouvrit près d’un siècle de contestation entre les princes-évêques et cette famille pour l’obtention du titre de duc de Bouillon, un siècle sans travaux majeurs. La prise du château en 1676 par Louis XIV lors de la guerre de la ligue d’Augsbourg et la confirmation du titre aux vicomtes de Turenne en 1678 annoncèrent une nouvelle campagne d’importance. 

Une plaque en l’honneur du roi de France se situe d’ailleurs au-dessus du porche en plein cintre d’entrée du château. Datée de 1684, elle mentionne également le duc de Bouillon Godefroid-Maurice de la Tour d’Auvergne et porte l’inscription latine « Ludovico Magno Galliar regi principum vindici belli pacis que arbitro Godef. Maurit. De Turre Avernae dei gratia bullionni dux (…)» (Louis le Grand, roi de France, justicier et arbitre de la guerre et de la paix. Godefroid-Maurice de la Tour d’Auvergne, par la grâce de Dieu, duc de Bouillon (…)). Vauban se rendit à Bouillon et, impressionné par le site, rédigea immédiatement un mémoire pour la fortification du château et de la ville. Dans un premier temps, les Français renforcèrent et modernisèrent les défenses du château : rehaussement des courtines, maisons pour officiers, casernes pour les troupes, nouvelle poudrière, nouvel arsenal. Dans un second temps, la ville se vit elle aussi fortifiée : les plans de Vauban apportèrent plusieurs courtines à créneaux, des portes, des casernes et l’édification de neuf tours bastionnées.

Le bastion de Bretagne. Photo G. Focant © SPW-Patrimoine

Une ancienne caserne de Vauban subsiste boulevard Heynen ; construit en 1690, ce bâtiment constitue un remarquable exemple de corps de caserne de cavalerie. Plus loin, se trouve l’ancienne infirmerie militaire. Parmi les ouvrages conservés en ville, les bastions de Bretagne, de Bourgogne et du Dauphin constituent des éléments caractéristiques de l’art défensif de l’époque. Ce sont de solides bâtisses de schiste en forme de pentagone percés de meurtrières et présentant une échauguette.

Le blason de Georges d’Autriche sur la tour qui porte son nom © IPW

 

Esplanade Godefroy 1 

6830 Bouillon

carte

Frédéric MARCHESANI, 2013

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Godefroid de Bouillon à Bouillon

Sculpteur des rois et des reines, des soldats et des résistants, des personnages historiques lointains comme de personnalités contemporaines, Victor Demanet a fait de l’espace public, notamment de Wallonie, sa galerie d’exposition. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’est rapidement imposé comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Il a déjà participé à plusieurs expositions internationales et reçu d’importants prix et distinctions lorsque lui est confiée la réalisation d’une statue de Godefroid de Bouillon destinée à la ville de Bouillon. Paradoxalement, en effet, il existe à Bruxelles, depuis 1848, l’impressionnante statue équestre réalisée par Eugène Simonis et à Liège, depuis 1884, une statue due au ciseau de Léon Mignon sur la façade du Palais provincial, mais Bouillon ne dispose d’aucune représentation de son plus illustre représentant. L’occasion de réparer cet oubli est offerte aux autorités locales au moment où s’achèvent d’importants travaux de voirie : jusque-là fort encombrée, la rue de la Maladrerie a fait l’objet d’un dédoublement et le nouveau quai dégage de nouvelles perspectives (circa 1937). À l’instar plus modeste du Pont Saint-Ange à Rome, les autorités locales décident de garnir les deux accès du pont de Liège d’une statue : l’une dédiée à Saint-Arnould, l’autre à Godefroid de Bouillon. La commande des deux œuvres est passée à Victor Demanet qui doit inscrire les deux statues sur un socle imposant (2,5 m de haut, sur 0,9 m de large) où viendront s’inscrire des bas-reliefs en bronze à motifs héraldiques.
Artiste certes aguerri, Victor Demanet est ainsi confronté au défi de supporter la comparaison avec ses illustres devanciers liégeois, tout en inscrivant « son » Godefroid dans l’histoire locale, celle du duché millénaire et de la ville natale de Léon Degrelle.

Réalisée en terre cuite en 1938, son étude (19 cm) convainc ses commanditaires et rapidement la statue de Godefroid de Bouillon, signée Victor Demanet et datée de 1938 (sur le côté droit du socle), peut être installée à l’un des deux accès du Pont de Liège. La cérémonie d’inauguration, le 25 juin 1939, se déroule en grandes pompes. La duchesse de Vendôme (la sœur de feu le roi Albert Ier) a fait le déplacement. Mais quelques mois plus tard, lors de l’invasion allemande de mai 1940, aucune chance n’est laissée au Pont de Liège. Le bombardement épargne miraculeusement les deux statues. À la Libération, il n’est plus question de les réinstaller sur le pont reconstruit. Elles sont séparées et le Godefroid de Bouillon escalade le contrefort pour trouver place à quelques mètres de l’entrée du château. Son socle est réduit au minimum, bénéficiant cependant de la pente du contrefort pour conserver le caractère dominateur qu’avait imaginé le sculpteur. Ni cheval ni cotte de maille, ni heaume ni épée, ni couronne ni drapeau, le Godefroid de Bouillon de Demanet est plutôt solennel, presque religieux, en partie caché ou protégé par un haut bouclier. Ostensiblement, sur le côté droit du duc lotharingien, apparaît un parchemin avec trois sceaux, et seule se lit la fameuse formule des croisés répondant à l’appel du pape Urbain II : « Dieu le veult ». On ignore si le sculpteur était ravi par l’emplacement choisi après-guerre pour sa statue, mais on sait que l’œuvre avait été appréciée. De nombreux exemplaires en petit format ont en effet été produits et vendus par la suite ; de surcroît, lors du neuf centième anniversaire de la naissance de Godefroid de Bouillon (1961), les talents de médailliste de Victor Demanet sont à nouveau sollicités pour la réalisation d’une médaille représentant en buste l’illustre chef de la croisade.

Ayant grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse où ses parents tiennent un commerce d’antiquités au cœur de la ville, Victor Demanet (Givet 1895 – Namur 1964) était appelé à leur succéder si ses études à l’Académie des Beaux-Arts (1916-1919), ne lui avaient pas donné le goût de la pratique de la sculpture. Élève de Désiré Hubin, Demanet eut la révélation en voyant des œuvres de Constantin Meunier et surtout celles traitant de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois. Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin avaient fini de convaincre Demanet que sa voie était dans la sculpture. Comme d’autres artistes de son temps, il va réaliser plusieurs monuments aux victimes des deux guerres ; auteur de plusieurs dizaines de médailles, il poursuit aussi une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail.

 

Sources

Les sculptures en pierre de Victor Demanet à Bouillon, Les jalons d’une ville n°3, dans 
http://www.sculpturepublique.be/6830/Demanet-GodefroidDeBouillon.htm
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397
Jacques TOUSSAINT, Les médailles du sculpteur-médailleur Victor Demanet (1895-1964), dans Revue belge de numismatique et de sigillographie, Bruxelles, 1984, n°130, p. 141-204 + planches
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147
Général GUILLAUME, Godefroid de Bouillon, dans Biographie nationale, t. 2, col. 802-819

Statue de Godefroid de Bouillon

Pont de Liège
6830 Bouillon

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Paul Delforge

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Statue Godefroid de Bouillon à Liège

Au milieu du XIXe siècle, afin de doter l’institution provinciale de Liège de bâtiments dignes de ce niveau de pouvoir, d’importants travaux sont entrepris autour de l’ancien palais des princes-évêques. Propriétaire des lieux (1844), l’État belge retient le projet du jeune architecte Jean-Charles Delsaux (1850) et lui confie la mission de réaliser la toute nouvelle aile, en style néo-gothique, sur le côté occidental du Palais. Face à la place Notger, Delsaux (1821-1893) achève l’essentiel du chantier en 1853, mais des raisons financières l’empêchent de réaliser la décoration historiée qu’il a prévue pour la façade du nouveau palais provincial. Vingt-cinq ans plus tard, le gouverneur Jean-Charles de Luesemans prend l’avis d’une commission pour déterminer les sujets et les personnes les plus dignes d’illustrer le passé de « la Nation liégeoise ». Placés sous la responsabilité de l’architecte Lambert Noppius (1827-1889), une douzaine de sculpteurs vont travailler d’arrache-pied, de 1877 à 1884, pour réaliser 42 statues et 79 bas-reliefs.

Membre de cette équipe, Léon Mignon (Liège 1847 – Schaerbeek 1898) va réaliser quatre des 42 statues et représenter deux scènes historiques (La bataille de Steppes et L’institution de la Fête-Dieu). De retour d’un séjour de plusieurs mois à Rome, grâce à la Fondation Darchis, Léon Mignon s’est installé à Paris ; rentrant à Liège de temps à autre, il apporte sa contribution au chantier de décoration du Palais provincial. C’est aussi durant cette période qui va de 1876 à 1884 que l’artiste réalise ses œuvres majeures, celles qui lui assurent en tout cas une réelle notoriété : Li Toré et son vis-à-vis Le Bœuf de labour au repos.

Réalisé en pierre durant la même période, son Godefroid de Bouillon (c. 1058/1061-1100) ne ressemble en rien aux « monuments » que la ville de Liège implante aux Terrasses. La représentation du chevalier parti délivrer la « Terre sainte » lors de la première croisade, en abandonnant ses biens et son château au prince-évêque de Liège, montre un personnage imposant et décidé, portant une couronne (celle de roi de Jérusalem ou d’avoué du Saint-Sépulchre ?), et sans arme apparente. Située à l’extrême droite du péristyle, sur la partie supérieure des colonnes, la statue de Godefroid de Bouillon est celle qui est le plus à droite.

Elle témoigne que Léon Mignon n’est pas qu’un sculpteur animalier, même si son œuvre la plus connue à Liège reste Li Toré. Bénéficiaire d’une bourse de la Fondation Darchis, cet élève studieux de l’Académie des Beaux-Arts de Liège, qui fréquentait depuis son plus jeune âge l’atelier de Léopold Noppius, avait trouvé l’inspiration en Italie (1872-1876). Médaille d’or au salon de Paris en 1880 pour son taureau, il s’était installé à Paris (1876-1884) avant d’être contraint à habiter Bruxelles pour pouvoir  exécuter des commandes officielles du gouvernement : c’est l’époque de ses bustes, mais aussi de la statue équestre de Léopold II particulièrement remarquable, d’une série de bas-reliefs pour le Musée d’Art moderne de Bruxelles et le Musée des Beaux-Arts d’Anvers, ainsi que d’une Lady Godiva, sa dernière œuvre.

 

Sources

Julie GODINAS, Le palais de Liège, Namur, Institut du Patrimoine wallon, 2008, p. 89
Hubert SILVESTRE, dans Biographie nationale, t. XLIV, col. 446-459
Willy LEMOINE, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 491-493
http://www.chokier.com/FILES/PALAIS/PalaisDeLiege-Masy.html
Michel Péters sur http://fr.slideshare.net/guest78f5a/petit-historique-de-la-sainttor-des-tudiants-ligeois (s.v. août 2013)
Hugo LETTENS, Léon Mignon, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 504-508
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 231
Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996

 

Statue de Godefroid de Bouillon

Palais provincial (façade)
4000 Liège

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Paul Delforge

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D'autres traces liées au duché de Bouillon

Plusieurs autres bâtiments et monuments sont liés de près ou de loin au passé bouillonnais, parmi lesquels ceux cités ci-après.

1. Bouillon, ancien hôpital civil, édifié par le duc de Bouillon Emmanuel de la Tour d’Auvergne. Important ensemble de style traditionnel construit en 1633.

2. Bouillon, maison Dorival, résidence de plusieurs présidents de la Cour souveraine.

3. Bouillon, couvent des Sépulcrines, fondé par le prince-évêque de Liège Ferdinand de Bavière.

4. Bouillon, maison du prévôt. Demeure construite en même temps que les casernes, dans le dernier tiers du XVIIe siècle. Logement du commandant de la place.

5. Bouillon, ancien corps de garde de la Porte de la Poulie, une des portes d’accès de la ville construite par Vauban.

6. Bouillon/Dohan, château de Dohan, siège d’une seigneurie du duché de Bouillon. Rebâti en 1619 par Florent Lardenois de Ville, seigneur de Dohan et capitaine-prévôt de Cugnon-Chassepierre. Manoir en schiste et grès des XVIIe et XVIIIe siècles surplombant la Semois.

7. Bouillon/Ucimont (Botassart), château de Botassart, ancien siège de la seigneurie du même nom (Botassart était une des 4 « siries » du duché de Bouillon – sortes de pairies).

8. Paliseul/Carlsbourg, école d’agriculture, ancien château de Carlsbourg, ayant appartenu aux ducs de Bouillon. Transformé et aménagé dans le troisième quart du XVIIIe siècle par les de la Tour d’Auvergne.

9. Paliseul/Opont (Beth), ancien château des Abbyes ou château de Beth, résidence du seigneur des Abbyes (remanié par la suite).

10. Bièvre/Gros-Fays, château-ferme de Gros-Fays, siège d’une seigneurie hautaine du duché de Bouillon aux mains des Lamock (se trouve sur le territoire du duché de Luxembourg, prévôté d’Orchimont). Manoir traditionnel construit par Florent de Lamock en 1684, constitué d’un corps de logis flanqué de deux tourelles et de dépendances du XVIIIe siècle.

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Frédéric MARCHESANI, 2013

Guy Focant (SPW)

Château fort de Bouillon

Installé sur une crête rocheuse enserrée par la Semois, un premier château fort est mentionné en 988. La construction de la seconde forteresse débute sous le règne du célèbre duc Godefroid de Bouillon (1061-1100). En 1082, un second donjon est construit par Godefroid de Bouillon qui vend ensuite le domaine à l’évêque de Liège avant de partir en Croisade.

Le château et son enceinte ont ensuite sans cesse évolué jusqu’au XVIe siècle.

Les constructions médiévales ont souffert du siège mené par les Espagnols en 1521 et il faut attendre 1551 avant que d’imposants travaux soient réalisés, quelques années avant l’arrivée des Français dans la région.

L’installation des de la Tour d’Auvergne en 1591 ouvre près d’un siècle de contestation entre les princes-évêques de Liège et cette famille pour l’obtention du titre de duc de Bouillon. La prise du château par les troupes de Louis XIV en 1676 et la confirmation du titre aux vicomtes de Turenne en 1678 font définitivement balancer le château et l’entièreté du duché de Bouillon dans le giron français suite à la signature en 1679 du traité de Nimègue qui attribue officiellement le territoire aux de la Tour d’Auvergne.

Lorsqu’éclatent les événements révolutionnaires de 1789, le duché de Bouillon est donc un État semi-autonome résolument tourné vers la France. Ouvert aux idées nouvelles, ayant accueilli des encyclopédistes en fuite, le duché prend une part active à la Révolution française.

Le 7 mars 1790, à l’initiative de François Pirson, les Bouillonnais se réunissent à Paliseul et décident de former une «assemblée générale du duché de Bouillon» sur le modèle de l’Assemblée nationale de Paris. Pirson, formé à Sedan, est issu d’une famille aisée du duché mais s’ouvre aux idées des Lumières. En 1789, il se fait le porte-parole des notables qui avaient quelques griefs contre le duc et devient un moteur de la constitution de ce nouvel organe décisionnel. L’assemblée compte 55 députés représentant toutes les communes du duché et est approuvée par le duc de Bouillon, Godefroy Charles Henri de la Tour d’Auvergne. L’assemblée bouillonnaise s’installe dès lors au château et préside aux destinées de l’ancien duché jusqu’à son annexion à la république en 1795. 

Une de ses premières décisions est d’abolir les privilèges et les droits féodaux sur le territoire ducal dès 1790. En février 1791, elle proclame la souveraineté nationale du duché. En 1792, l’assemblée devient permanente et se donne comme but d’approuver une constitution pour le pays de Bouillon ; celle-ci est proclamée le 28 mars et transforme le duché en monarchie constitutionnelle, comme cela avait été le cas en France. Le duc de la Tour d’Auvergne se voit contraint de prêter serment et de respecter la loi fondamentale. En 1793, François Prison est envoyé à Paris dans le but de négocier la création d’une république ardennaise. Le 24 avril 1794, la république de Bouillon est proclamée par un décret de l’assemblée. Cet événement confirme le destin à part de l’ancien duché de par son appartenance française d’Ancien Régime. Les Bouillonnais ne connaissent pas de restauration après la défaite de Dumouriez en 1793 et poursuivent le processus d’évolution institutionnelle alors que le reste de nos territoires subit le retour à l’Ancien Régime. 

Cette éphémère république de Bouillon ne vit toutefois que quelques mois. Cette relative indépendance n’empêche pas l’annexion de l’ancien duché à la République française le 25 octobre 1795 ; son territoire est démembré et partagé entre les départements des Ardennes, des Forêts et de Sambre-et-Meuse.

Durant cette période, le château est réaménagé notamment sous l’impulsion de Vauban: ouvrages en avancée, casernes, arsenal et une poudrière.

Sous le régime hollandais, le donjon est détruit en 1824 pour laisser la place à d’autres casernes, mais le site militaire est déclassé en 1853. 
 

Rue du Château
6830 Bouillon

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Classé comme monument et site le 26 mai 1975
Patrimoine exceptionnel de Wallonie

Institut du Patrimoine wallon

DE JÉRUSALEM BAUDOUIN

Politique

Lieu de naissance inconnu vers 1065, El Arich 02/04/1118


Cadet d’une famille de trois enfants, Baudouin est d’abord appelé à entrer dans les ordres, avant d’abandonner cette voie pour prendre les armes. Marié à Godehilde, fille de Raoul II comte de Conches, Baudouin est surtout renommé pour ses faits d’armes commis en Orient.

En 1096, en effet, il se met en route vers la terre sainte, pour prendre part à la première croisade, aux côtés de son frère Godefroid et d’autres seigneurs et hommes d’armes. Son périple l’amène à prendre possession de nombreuses citadelles et places fortes qu’il rencontre sur sa route, si bien qu’il projette rapidement de consolider un nouvel État, le comté d’Edesse.

Satisfait de l’autorité qu’il exerce sur son comté, Baudouin ne participe pas à la prise de Jérusalem, le 15 juillet 1099. À la mort de Godefroid, le 17 août 1100, il part pour Jérusalem pour y prendre la succession de son frère sur le trône. Entré dans la ville sainte le 11 novembre de la même année, il est proclamé roi de Jérusalem sous le nom de Baudouin Ier de Jérusalem. Son règne ne commence pas sous les meilleurs auspices, entouré qu’il était de hordes ennemies et certains refusant de le reconnaitre comme suzerain.

En 1117, après avoir assuré la défense de ses terres en fortifiant ses frontières, il voulut conquérir la ville de Babylone. Il n’y parvint pas et mourut en chemin, le 2 avril 1118, après avoir incendié la ville de Farama avec ses hommes.  

Il fut enterré dans la chapelle d’Adam de l’église du Saint-Sépulcre, où Godefroid reposait déjà depuis dix-huit ans. Les tombeaux des deux frères furent détruits, sept siècles plus tard, en 1808. 

 

Sources

André VAN HASSELT, dans Biographie nationale, t. 1, col. 814-836.

Bouillon en croisade (1095-1100)

Répondant à l’appel du pape Urbain II (1095), Godefroid de Bouillon abandonne tous ses biens pour partir à la croisade. Il participe à la prise de Jérusalem (1099), refuse la couronne du royaume nouvellement formé, préférant le titre de Gardien de la Saint-Sépulcre, et meurt en 1100, sans héritiers directs.
L’impact provoqué par les faits d’armes de Godefroid en Terre Sainte a certainement conduit à créer un titre de duc de Bouillon dont s’honorèrent les princes-évêques (peut-être dès le XIIIe siècle) jusqu’en 1794 (les armes de Bouillon apparaissent toujours dans le drapeau de la province de Liège comme elles l’étaient dans celui de la principauté).

Références
Duby46 ; www_cm1099


Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)

Les biens vendus de Godefroy de Bouillon (1095)

Comme beaucoup d’autres comtés carolingiens, le comté d’Ardenne a été progressivement démembré au profit de grandes familles aristocratiques locales, souvent turbulentes et régulièrement en conflit tant avec l’empereur qu’avec leurs voisins immédiats. La limite méridionale du comté avait été fixée sur la Semois, rivière qui est aussi utilisée comme critère de séparation entre la Basse et la Haute-Lotharingie. Alleu héréditaire de la maison d’Ardenne, le château (re)construit sur le contrefort de Bouillon au XIe siècle contrôle les passages.
Ses propriétaires sont des princes importants des familles d’Ardenne-Verdun : Godefroid Ier a été choisi comme duc de Basse-Lotharingie (1013-1023) et son frère Gothelon qui lui succède (1023-1044), dispose aussi du titre sur la Haute-Lotharingie (1033-1044). Le château revient ensuite à un autre Godefroy dont le nom va davantage passer à la postérité en raison de sa participation à la première croisade.
Rangé aux côtés de l’empereur dans la querelle des Investitures, Godefroy de Bouillon (1058 ?-1100) est récompensé par le titre de duc de Basse-Lotharingie (1087). Quand il vend son château au prince-évêque de Liège pour partir à la croisade, il a prévu que trois de ses descendants auraient le droit de racheter le duché au même prix, à défaut le duché resterait en possession perpétuelle de l’Église de Liège. Malgré des contestations, cette dernière option scelle le sort du comté de Bouillon. Liège doit employer la force pour conserver son acquisition (1141), avec l’aval de l’empereur (1155). À quelques distances du comté d’Ardenne-Bouillon, Liège exerce aussi son influence sur le domaine de l’abbaye de Saint-Hubert.

Références
ErCover ; HHWH59 ; WPH01-236


Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)