Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Camille RONFLETTE

Monument Camille Ronflette, 11 octobre 1931.
Réalisé par César Battaille.

Au bout de la rue, là où les habitations de Beloeil s’arrêtent et où les prairies reprennent leurs droits, s’élève un imposant monument rendant hommage au docteur Camille Ronflette. Depuis son esplanade spécialement aménagée, encerclé par une épaisse haie basse de legustrum, le monument donne l’impression de dominer l’horizon ; en fonte, une barrière basse entoure encore le monument précédé d’un petit sentier d’accès, tandis qu’un bas-relief représente le profil gauche du médecin décédé dix-huit mois à peine avant la double commémoration organisée par les autorités locales et les amis de Camille Ronflette. Non seulement une stèle lui est dédiée, mais en plus la rue est rebaptisée à son nom dans un délai inhabituellement court (à l’époque, on exige un délai de cinq années avant d’attribuer le nom d’une personnalité décédée à une voirie publique). Cette impatience à célébrer Camille Ronflette n’est que partiellement compréhensible à la seule lecture de la dédicace placée sous le bas-relief :

Monument Camille Ronflette – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam



A
CAMILLE RONFLETTE
MÉDECIN
1855 – 1930
SES AMIS ET SES CONCITOYENS
RECONNAISSANTS.
 

Ce sont l’humilité et le dévouement d’un médecin de campagne que ses contemporains ont souhaité immortaliser. Pendant cinquante ans, en effet, Camille Ronflette s'est volontairement investi, sans compter son temps et ses efforts, à s’occuper de tous les malades de Beloeil et de toute la région alentour. À travers Ronflette, tous les médecins sont ainsi remerciés pour le réconfort qu’ils apportent discrètement à la communauté villageoise.

Fils d’un médecin originaire d’Ath venu s’installer à Beloeil, Camille Ronflette (1855-1930) a accompli ses humanités au collège épiscopal d’Enghien, avant de mener des études en médecin à l’Université libre de Bruxelles. Interne aux hôpitaux bruxellois, il paraît promis à des fonctions de direction importantes tant les rapports de service de ses chefs étaient élogieux. À tout le moins, il pourrait se constituer une patientèle cossue dans la « bonne » société de la capitale. Pourtant, Ronflette quitte l’atmosphère de la ville et revient à Beloeil seconder son père et lui succéder comme médecin de campagne. L’attention témoignée par le médecin à ses contemporains prend aussi la forme d’un engagement politique : pendant un quart de siècle, il siège comme conseiller communal et exerce les fonctions d’échevin. Par ailleurs, chacun connaît dans la région de Beloeil sa passion pour la colombophilie et son grand intérêt pour la botanique. Ses observations de la végétation de la région de Beloeil et ses découvertes d’espèces rares ont fait l’objet de diverses publications et Ronflette a été accueilli, en 1884, au sein de la Société royale de Botanique de Belgique.

Pour inscrire dans la durée le souvenir de l’humble médecin, un comité s’est formé et a confié au sculpteur César Battaille la confection du monument. Originaire de Basècles, Battaille (1882-1963) s’est d’abord passionné pour l’aviation avant de poursuivre sa carrière en tant qu’industriel et sculpteur. Il est le fils d’Octave Battaille, industriel spécialisé dans les engrais chimiques et les aliments pour bestiaux et par ailleurs sénateur et bourgmestre de Basècles. Porteur d’un diplôme d’ingénieur civil (Mons et Bruxelles), César Battaille semble avoir aussi suivi les cours de l’École nationale des Arts et Métiers à Paris quand il conçoit et construit un avion au début des années 1910 ; son triplan est d’ailleurs breveté en 1911. Après des essais de vol fructueux, l’invasion puis l’occupation allemandes de 14-18 contraignent cependant Battaille à renoncer à son aventure. Engagé dans l’armée belge, il se retrouve à Calais où il met au point différents types de bombes et d’explosifs. Après l’Armistice, ce pionnier de l’aviation aide son frère dans l’usine familiale et, à partir des années 1930, se consacre principalement à son hobby. Avant la guerre déjà, César Battaille avait présenté quelques-unes de ses sculptures dans des Salons. Ses sujets d’inspiration sont variés, même si deux thématiques influencent manifestement sa production : d’une part, son autre passion pour la chasse et la nature fait de lui un sculpteur animalier ; d’autre part, après la Grande Guerre, Battaille est régulièrement sollicité pour réaliser des stèles et monuments en l’honneur d’aviateurs (ainsi, le monument Edmond Thieffry, en 1932) ; après la Libération, il signe son œuvre maîtresse, en 1950, un imposant monument à la mémoire des aviateurs belges décédés durant le second conflit mondial, au cimetière de Bruxelles. Vingt ans plus tôt, il réalisait le mémorial Ronflette, à Beloeil, plus discret mais au style déjà caractéristique de l’artiste, influencé par la sculpture funéraire italienne et qui signait C.O. BATT.

 

http://www.beloeil.be/fr/officiel/index.php?page=90 (s.v. novembre 2013)
http://www.genealogieonline.nl/fr/stamboom-guy-spillebeen/I5136.php 
La Vie wallonne, janvier 1933, CXLVIII, p. 185-188
Louis POPULAIRE, Le docteur Camille Ronflette, savant et philanthrope, dans Coup d’œil sur Beloeil, n°27, 2/1986, p. 72-77
Félicien LEURIDANT, Bibliograpgie beloeilloise. Camille Ronflette 1955-1930, dans Annales du Cercle archéologique dAth et de la région, 1934, t. XX, p. 101-106
Michel MANDL, Pierre CRYNS, César Battaille, Héros de la guerre 1914-1918, avionneur, officier armurier, artiste sculpteur, Les Vieilles Tiges de l’Aviation belge asbl, s.l., s.d., http://www.vieillestiges.be/files/memorials/MABBattaille-FR.pdf (s.v. mai 2014)
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 63

Rue docteur Ronflette
7970 Beloeil

carte

Paul Delforge