Les Pays-Bas emportés dans les guerres civiles et religieuses : Union d’Arras contre Union d’Utrecht (1579)

Reprenant pied aux Pays-Bas avec le duc de Farnèse (bataille de Gembloux 1578) qui devient le nouveau gouverneur général, Madrid n’entend pas cesser de chasser ce qu’il appelle l’hérésie protestante. En restituant leurs anciens privilèges aux catholiques du sud des Pays-Bas, les Espagnols s’allient la noblesse et les États de deux provinces « wallonnes » (Artois et Hainaut) qui concluent l’Union d’Arras (6 janvier 1579) : ils reconnaissent ainsi la souveraineté espagnole et catholique sur leur territoire. Calvinistes ou revendiquant la liberté religieuse, des provinces du nord et beaucoup de villes refusent d’abjurer leur foi et répliquent par l’Union d’Utrecht (23 janvier), alors que les autres provinces refusent de s’engager. Tournai, où les calvinistes ont fait beaucoup d’adeptes, est la seule ville de Wallonie à adhérer à l’Union d’Utrecht. Au terme de ce conflit, les Habsbourg perdront les provinces du nord.

Références
Ar73 ; Duby174a ; GeGB49 ; GM02-252


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Les guerres de religion embrasent l’Europe (XVIe-XVIIe siècles)

La question religieuse marque le XVIe siècle. La réforme connaît un vif succès et le protestantisme gagne sans cesse du terrain depuis ses principaux foyers, en Angleterre et surtout dans l’empire germanique. Toute l’Europe est concernée. Alors que la branche « autrichienne » des Habsbourg fait face à l’expansion musulmane et orthodoxe à l’est, la branche « espagnole » mâte violemment les soulèvements qui agitent les Pays-Bas, où revendications religieuses et politiques se mêlent. En France, l’opposition entre catholiques et protestants mobilise également fortement la royauté qui accorde des « places de sûreté » aux huguenots. Ces guerres marquent durablement la construction politique européenne durant 80 ans et ne trouvent leur épilogue que par la signature des traités de Westphalie, en 1648.

Références
GM03-06 - GrossA03_9


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Dispositions du traité de Cateau-Cambrésis (1559) relatives à l’espace wallon

La faiblesse affichée par Marie de Bourgogne, propulsée à la tête de l’ensemble bourguignon suite au décès de Charles le Téméraire au siège de Nancy (1477) est mise à profit par le roi de France. Passés dans le patrimoine des Habsbourg suite au mariage de Marie avec Maximilien, les anciens états bourguignons sont désormais défendus par l’empereur qui en est le suzerain. La lutte entre François Ier et Charles Quint se solde par le succès du second. Tournai (1521), la Flandre et l’Artois (traités de Madrid en 1526 et de Cambrai en 1529) entrent dans l’orbe impérial. Quant à la principauté de Liège, un statut de neutralité lui a été reconnu en 1492, même si un prince-évêque accepte d’y laisser construire pour l’empereur les forteresses de Mariembourg (1546), de Philippeville (1554) et de Charlemont près de Givet (1555) : il s’agit de verrouiller l’accès de la vallée de la Meuse. Le 2e traité de Cateau-Cambresis (1559) rétablit une paix fragile : après avoir annexé Cambrai (1543), Charles Quint confirme la perte de la souveraineté de la France sur l’Artois et la Flandre, tout en abandonnant la Bourgogne (Traité de Crécy-en-Laonnois, 1544). Alors que les Anglais s’emparent brièvement de Boulogne sur Mer (1544-1546), la France occupe les trois évêchés romans de Metz, Verdun et Toul situés dans les frontières de l’empire germanique (1552). Occupé par les Anglais depuis 1347, Calais revient à la France en 1558. Signé en 1559, le second traité de Cateau-Cambrésis entérine ces situations et oblige la France à libérer les places qu’elle avait occupées en Flandre. Cette paix aura des effets durables pendant près d’un siècle.

Références
Bou154 ; Duby174c ; Er53b ; FH04-235 ; RouNa-206


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Diocèses et provinces ecclésiastiques après 1559

Le 31 juillet 1559, la bulle pontificale Super Universas annonce la réforme des diocèses. Laborieusement obtenue, elle transforme les Pays-Bas habsbourgeois en une forteresse du catholicisme en Europe du nord. Ils comprennent désormais trois nouvelles provinces ecclésiastiques et ne dépendent plus d’aucune autorité extérieure, des provinces métropolitaines des archevêques de Cologne et de Reims, ou des évêques de Liège, de France ou d’ailleurs. Intervenant après la prise de l’Artois, de la Flandre et du Cambrésis par Charles Quint, cette concordance « parfaite » entre frontières politiques et religieuses s’accompagne d’une prise en compte des réalités linguistiques.
La frontière linguistique apparaît en effet clairement entre l’archevêché de Malines divisé en sept nouveaux évêchés (tous flamands) et Cambrai qui comprend cinq diocèses romans ; les provinces wallonnes sont soumises au roi d’Espagne, les provinces picardes au roi de France. Dans cette réorganisation, seul le duché de Luxembourg a été oublié ; en fait, il a été privé d’un siège épiscopal en raison de l’opposition farouche des évêques de Liège et de Trèves.
La province ecclésiastique d’Utrecht (groupe frison-batave) s’étend dans la partie septentrionale des Pays-Bas, et compte les sièges suffragants d’Harlem, Deventer, Middelbourg, Groningue et Leeuwarden, qui s’ajoutent à Utrecht déjà existant, élevé au rang d’archevêché. Ces six évêchés n’ont qu’une existence éphémère. Dès 1580, ils cessent d’exister ; en 1592, est érigé le vicariat apostolique des Provinces-Unies.
La province ecclésiastique de Malines (groupe flamando-brabançon) – élevée en archevêché et supérieure aux deux autres provinces – sera flamande et brabançonne. Elle comprend les six diocèses de Gand, Bruges, Ypres, Anvers, Bois-le-Duc et Ruremonde. Ce choix témoigne de l’importance que les Habsbourg continuent à témoigner à Malines.
Enfin, est érigée une province ecclésiastique de Cambrai (groupe gallo-wallon), où les nouveaux diocèses de Namur et de Saint-Omer prennent place à côté de Cambrai, Boulogne (1567 !), Tournai et Arras. Ces deux derniers sont fortement démembrés par rapport à la situation antérieure et la Thérouanne a disparu. À l’évêque de Cambrai est conféré le titre d’archevêque.
La partie luxembourgeoise des Pays-Bas fait exception à l’homogénéisation apportée par cette réforme. Elle resta partagée entre trois métropoles et six diocèses jusqu’à la fin de l’Ancien régime (Trèves, Cologne, Reims, Liège, Metz et Verdun) malgré plusieurs projets de réforme.
Quant au diocèse de Liège, il est la principale « victime » de cette réforme habsbourgeoise. Il est en effet fortement amputé de contrées espagnoles au profit des diocèses de Malines, Anvers (archidiaconé de Campine), Bois-le-Duc, Middelbourg et Namur. Le diocèse de Liège perd aussi l’université de Louvain et, en raison du développement d’une université à Douai, aucun projet ne se concrétisera en pays mosan. Se sentant lésés par l’érection des nouveaux diocèses, Cologne et Liège introduisirent des recours auprès du pape et de l’empereur. En vain.

Références
AT4.1 ; deMo-16-17 ; GeGB49 ; HPLg-138 ; TrauLxb-158


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Le partage de l’empire de Charles Quint (1556-1558)

Ayant décidé d’abdiquer pour des raisons de santé, Charles Quint confie à son fils, Philippe II, les Pays-Bas, la Franche-Comté et le Charolais (1555). En 1556, il lui remet aussi son héritage « espagnol ». Frère cadet de Charles Quint, Ferdinand reçoit les possessions autrichiennes des Habsbourg et est désigné empereur germanique en 1558.

Références
FH04-310 ; GM02-267 ; GrossA02a ; LR79 ; www_cm1555


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L’empire des Habsbourg avant l’abdication de Charles Quint (1555)

Ayant hérité des Pays-Bas et de la Franche-Comté à la mort de son père Philippe le Beau (1506), Charles II devient roi de Castille, de la Haute-Navarre et des possessions « espagnoles » en Amérique, à la mort de son grand-père Ferdinand II d’Aragon (1516). Avec sa mère, il hérite aussi des biens d’Aragon, Naples, Sicile, Sardaigne, Baléares et Malte. En 1519, la mort de Maximilien, son autre grand-père, lui attribue les possessions des Habsbourg en Autriche. De surcroît, il lui succède comme roi des Romains et empereur du Saint-Empire de la Nation germanique. Jusqu’à son abdication en 1555, il accroît ses colonies en Amérique et ses possessions en Europe centrale.
Dans la compétition (ou confrontation) qui l’oppose au roi de France, essentiellement François Ier (1494-1547), Charles Quint conquiert Tournai en 1521 et remporte un succès déterminant à Pavie (1525). Après un an d’emprisonnement à Madrid, François Ier accède aux volontés de Charles Quint. Et même si de vives contestations (armées) marquent encore les années suivantes, il est au moins deux dispositions des traités qui ne varieront pas : le roi de France renonce à l’Artois, à la Flandre et à sa suzeraineté sur ces deux provinces (paix des Dames, Cambrai, 1529 et traité de Crépy-en-Laonnois, 1544). Désormais, le tracé le plus occidental de la frontière impériale abandonne l’Escaut pour prendre naissance sur les bords de la mer du nord, passer entre l’Artois et les possessions anglaises de Calais, longer l’Artois et repiquer sur Cambrai. Dans le prolongement, les trois Évêchés (Verdun, Toul, Metz) sont annexés et placés sous tutelle française en 1552. Les traités de Westphalie les annexeront à la France en 1648.

Références
FH04_146 ; FH04-310 ; GM02-267 ; GrossA02a ; LR79 ; www_cm1555


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Diocèses et provinces ecclésiastiques avant 1559

Soucieux de mieux contrôler le pouvoir de l’Église et d’empêcher des « étrangers » d’intervenir par le biais du pouvoir religieux dans les affaires temporelles qui les concernent, Charles Quint comme Philippe II a notamment souhaité réformer les limites des provinces ecclésiastiques héritées des provinces romaines et faire coïncider les frontières des diocèses avec celles de leurs possessions. Preuve – si besoin en était – de l’importance de la confédération et surtout des entités confédérées des Pays-Bas, les nouveaux diocèses qui y sont créés (quatorze) correspondent assez bien avec les contours des structures internes. Il n’y a pas un évêché pour les Pays-Bas, mais une série de diocèses qui collent aussi près que possible aux anciens comtés, duchés voire seigneuries. Tous les liens sont coupés entre les évêchés des Pays-Bas et les archevêques « étrangers » de Reims, Trèves et Cologne.
Avant 1559, l’ensemble des territoires dépend de trois métropoles chrétiennes situées en périphérie des possessions des Habsbourg : Cologne, Reims et Trèves. La province ecclésiastique de Reims (siège de l’archevêché) qui comptait une douzaine de diocèses, dont ceux d’Arras, Thérouanne, Cambrai, Reims et Tournai concernent la partie occidentale de la Wallonie actuelle. La province ecclésiastique de Cologne (siège de l’archevêché) s’étendait aux régions au nord de l’Escaut et de la Meuse par le diocèse d’Utrecht, aux régions rhénanes par le diocèse de Cologne, et aux actuelles provinces de Limbourg (belge et hollandaise), Liège, Namur, la moitié du Luxembourg et du Brabant, une partie d’Anvers et quelques contrées de Hollande et d’Allemagne par le vaste diocèse de Liège. La province ecclésiastique de Trèves, enfin rayonnait notamment sur l’autre moitié de la province actuelle du Luxembourg (par le diocèse de Trèves), et comprenait aussi les diocèses romans de Metz, Verdun et Toul.

Références
AT4.2 ; deMo-14 ; GeGB47


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Pays-Bas et Principauté de Liège (1549)

Au milieu des possessions habsbourgeoises, Tournai était demeurée ville française jusqu’en 1521 et la principauté-évêché de Liège qui s’était reconstruite garde son statut particulier au sein de l’empire germanique. Dès la fin du XVe et le début du XVIe siècle, Maximilien puis Charles Quint ont poursuivi le processus de rassemblement entamé par les Bourguignons. Les anciens comtés bourguignons sont considérés comme un tout, placés sous une couronne unique, sans pour autant que chaque entité perde ses institutions, coutumes et identité, parfois forgées pendant un demi-millénaire.
En 1532, parmi la quarantaine de ses titres, Charles Quint en porte treize qui concernent les principautés des Pays-Bas (Brabant, Limbourg, Luxembourg, Gueldre, Flandres, Artois, Hainaut, Hollande, Zélande, Namur, Zutphen, Frise, Malines). L’ensemble du territoire wallon (hormis la principauté de Liège) est concerné. Conquise en 1521, Tournai est intégrée dans le comté de Flandre. On cite généralement Utrecht, Drenthe, Overijssel et Groningue comme étant les quatre autres provinces conquises dans les années 20 et 30 pour former les XVII provinces. Quant au marquisat d’Anvers, il fait partie du Brabant. En 1543, Cambrai et le Cambrésis sont rattachés aux domaines des Habsbourg, jusqu’en 1678, moment de l’annexion à la France.
En 1548, par la Transaction d’Augsbourg, les « Pays-Bas » dispose d’un statut particulier au sein du Cercle de Bourgogne, même si chaque province reste soumise individuellement à la souveraineté personnelle de l’empereur. Pour empêcher un éparpillement des provinces dans le cas où un héritier direct viendrait à manquer, Charles Quint promulgue la Pragmatique sanction (1549) qui consolide la « Transaction » en unifiant les droits de succession des provinces et en déclarant que les Dix-Sept Provinces forment un tout transmissible et indivisible, que l’on ne peut partager.

Références
Ar73 ; Duby174a ; GM02-252 ; WPH01-214


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Le cercle impérial de Bourgogne (1548)

Au début du XVIe siècle, les anciens « pays-bas bourguignons » constituent un nouveau cercle impérial : le Cercle de Bourgogne. Tournai le rejoint en 1521 et la diète de Nuremberg confirme la situation (1522).
Par la transaction d’Augsbourg, en 1548, Charles Quint attribue aux Pays-Bas un statut particulier au sein du cercle de Bourgogne en les dispensant de devoir se plier à des lois et tribunaux de l’empire et en les exemptant de certaines taxes. Par la Pragmatique sanction (1549), il consolide la « transaction » en unifiant les droits de succession des provinces et en déclarant que les Dix-Sept Provinces forment un tout indivisible non fragmentable. En assurant que son fils Philippe II respectera les libertés et privilèges respectifs, l’empereur prend la précaution de faire ratifier le texte par les États de chaque province. La guerre des religions et les guerres de Louis XIV auront raison des intentions impériales.

Références
GrossA02 ; TrauLxb-162 ; www_cm1512 ; www_cm1513


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Les cercles impériaux (1548)

Fils de Charles IV qui avait codifié la succession impériale par la Bulle d’or, Wenceslas Ier, comte de Luxembourg mais surtout empereur lui aussi, s’emploie à organiser le Saint-Empire romain germanique, dont on sait qu’il est composé d’une mosaïque d’États, en créant quatre cercles impériaux (1387). Chaque cercle regroupe un certain nombre d’États dans le but d’assurer une défense commune, de prélever les taxes impériales et de les soumettre aux mêmes lois et tribunaux. En 1438, Albert II réorganise la composition des cercles et porte leur nombre à six. La diète impériale qui se réunit à Augsbourg en 1500 fixe à son tour de nouveaux contours à ces structures régionales, destinées à lutter contre le morcellement de l’ensemble et à créer un exécutif fédéral. En 1512, Maximilien Ier porte définitivement le nombre des cercles à dix, parmi lesquels le Cercle de Bourgogne. Quelques modifications sont encore apportées par Charles Quint et cette organisation accompagne le premier Empire germanique jusqu’à sa dislocation en août 1806.
 Tous les États germaniques ne sont pas intégrés dans les cercles. D’autre part, depuis la Bulle d’Or, l’empereur est choisi par sept princes électeurs. À l’origine, il s’agissait de trois archevêques (celui de Mayence, de Trèves, et de Cologne), du margrave de Brandebourg, du duc de Saxe, du roi de Bohême et du comte palatin du Rhin.
Au XVIIe siècle, s’ajoutent le duc de Bavière (1648) et le duc de Brunswick-Lunebourg dit électeur de Hanovre (1692). En 1701, la réunion de la marche de Brandebourg et du duché de Prusse (jusque-là hors des frontières) transforme l’électeur de Brandebourg en électeur de la Prusse. Quant à l’électeur Palatin, il hérite de la Bavière (1777) et les deux électorats sont réunis. En 1803, Napoléon modifiera la composition, peu avant que le Saint-Empire soit dissout.

Références
GrossA02b ; H68 ; www_cm1512 ; www_cm1513


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