La Belgique et ses provinces (1839)

Depuis 1795, les territoires des anciens Pays-Bas autrichiens et de la principauté de Liège ont fait l’objet d’un redécoupage administratif de la part de la République française. L’œuvre de l’avocat Charles-Lambert Doutrepont devient « loi » par l’arrêté du Comité de Salut public du 14 fructidor an III. Parmi les critères rationnels utilisés à l’époque, figure la volonté de morceler les anciennes « provinces », d’en effacer le souvenir, et, enfin, de respecter la frontière linguistique. À l’exception du département de la Dyle, les limites des départements devaient la respecter. Ainsi la principauté de Liège est coupée en deux parties, l’une essentiellement thioise, l’autre essentiellement romane. Les limites tracées sous le régime français sont conservées sous le régime hollandais et le nouvel État belge. Seule leur dénomination change. Il est donc malaisé de voir dans les provinces les héritières des anciens comtés, duchés et autres principautés.
La loi fixant les compétences des provinces, adoptée le 30 avril 1836, en définit les missions et l’organisation. En tant qu’autorités subalternes, elles s’occupent de « matières d’intérêt provincial », les unes obligatoires, les autres laissées à l’appréciation des hommes politiques qui la dirigent. Comme la commune, la province dispose d’un pouvoir législatif, d’un pouvoir exécutif et d’une administration.
En 1839, suite à la signature définitive du Traité des XXIV articles, les limites des provinces de Limbourg et de Luxembourg seront considérablement remaniées. La partie orientale du Limbourg redevient hollandaise. La partie orientale du Luxembourg constitue un grand-duché, État indépendant.
À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, lorsque le parti catholique dispose de la majorité absolue au niveau national de l’État belge, le niveau de pouvoir provincial (notamment dans le Hainaut et à Liège) donne l’occasion aux partis progressistes de développer une politique alternative dans un certain nombre de domaines (enseignement, santé, etc.).
Générant des conflits suite à l’adoption d’une série de lois dite linguistiques, les limites des provinces seront revues en 1962-1963 afin de les faire correspondre à la frontière linguistique.


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La province Wallonia de l’ordre des Capucins (1712)

À partir du XVIIIe siècle, le substantif latin Wallonia s’est imposé dans l’ordre des Capucins pour désigner la partie de leur province de Germanie inférieure où l’usage du français prédomine. Au sein de cette Provincia Walloniae, l’autonomie des Capucins liégeois est reconnue à partir de 1704 et cette mention apparaît désormais aussi sur la carte. Par ailleurs, on constate surtout que la Provincia Walloniae s’est fortement réduite par rapport à son étendue de 1618.

Références
Atout17 ; BBtMRW ; Ency03


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La province Wallonia de l’ordre des Capucins (1618)

Quand, au milieu du XVIe siècle, les Jésuites espagnols arrivés à Louvain doivent dénommer la nouvelle province de leur Compagnie, ils reprennent, eux qui prêchent en latin, le terme romain de Belgae. En 1564, la province de Germania inferior est divisée entre la province du Rhin et la « provincia belgica ». En 1612, cette dernière est divisée en Flandro-Belgique et Gallo-Belgique (gallo-belgica).
À partir du XVIIe siècle, l’ordre des Capucins réorganise l’administration de sa province dite de Germanie inférieure. Dès 1616, le critère de la langue est ici aussi utilisé pour établir une distinction entre la Provinciae Flandriae pars et la Provincia Gallo-Belgiae sev Walloniae. Les Capucins suivent ainsi l’exemple des Jésuites. Le substantif latin Wallonia est utilisé dès 1618 par les Capucins et finit par s’imposer : la Provincia Walloniae supplante l’appellation Provincia Gallo-belgiae.

Références
Atout18 ; BBtMRW ; Ency03 ; MVW06 ; WPH3-73


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Diocèses et provinces ecclésiastiques après 1559

Le 31 juillet 1559, la bulle pontificale Super Universas annonce la réforme des diocèses. Laborieusement obtenue, elle transforme les Pays-Bas habsbourgeois en une forteresse du catholicisme en Europe du nord. Ils comprennent désormais trois nouvelles provinces ecclésiastiques et ne dépendent plus d’aucune autorité extérieure, des provinces métropolitaines des archevêques de Cologne et de Reims, ou des évêques de Liège, de France ou d’ailleurs. Intervenant après la prise de l’Artois, de la Flandre et du Cambrésis par Charles Quint, cette concordance « parfaite » entre frontières politiques et religieuses s’accompagne d’une prise en compte des réalités linguistiques.
La frontière linguistique apparaît en effet clairement entre l’archevêché de Malines divisé en sept nouveaux évêchés (tous flamands) et Cambrai qui comprend cinq diocèses romans ; les provinces wallonnes sont soumises au roi d’Espagne, les provinces picardes au roi de France. Dans cette réorganisation, seul le duché de Luxembourg a été oublié ; en fait, il a été privé d’un siège épiscopal en raison de l’opposition farouche des évêques de Liège et de Trèves.
La province ecclésiastique d’Utrecht (groupe frison-batave) s’étend dans la partie septentrionale des Pays-Bas, et compte les sièges suffragants d’Harlem, Deventer, Middelbourg, Groningue et Leeuwarden, qui s’ajoutent à Utrecht déjà existant, élevé au rang d’archevêché. Ces six évêchés n’ont qu’une existence éphémère. Dès 1580, ils cessent d’exister ; en 1592, est érigé le vicariat apostolique des Provinces-Unies.
La province ecclésiastique de Malines (groupe flamando-brabançon) – élevée en archevêché et supérieure aux deux autres provinces – sera flamande et brabançonne. Elle comprend les six diocèses de Gand, Bruges, Ypres, Anvers, Bois-le-Duc et Ruremonde. Ce choix témoigne de l’importance que les Habsbourg continuent à témoigner à Malines.
Enfin, est érigée une province ecclésiastique de Cambrai (groupe gallo-wallon), où les nouveaux diocèses de Namur et de Saint-Omer prennent place à côté de Cambrai, Boulogne (1567 !), Tournai et Arras. Ces deux derniers sont fortement démembrés par rapport à la situation antérieure et la Thérouanne a disparu. À l’évêque de Cambrai est conféré le titre d’archevêque.
La partie luxembourgeoise des Pays-Bas fait exception à l’homogénéisation apportée par cette réforme. Elle resta partagée entre trois métropoles et six diocèses jusqu’à la fin de l’Ancien régime (Trèves, Cologne, Reims, Liège, Metz et Verdun) malgré plusieurs projets de réforme.
Quant au diocèse de Liège, il est la principale « victime » de cette réforme habsbourgeoise. Il est en effet fortement amputé de contrées espagnoles au profit des diocèses de Malines, Anvers (archidiaconé de Campine), Bois-le-Duc, Middelbourg et Namur. Le diocèse de Liège perd aussi l’université de Louvain et, en raison du développement d’une université à Douai, aucun projet ne se concrétisera en pays mosan. Se sentant lésés par l’érection des nouveaux diocèses, Cologne et Liège introduisirent des recours auprès du pape et de l’empereur. En vain.

Références
AT4.1 ; deMo-16-17 ; GeGB49 ; HPLg-138 ; TrauLxb-158


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