La province Wallonia de l’ordre des Capucins (1712)

À partir du XVIIIe siècle, le substantif latin Wallonia s’est imposé dans l’ordre des Capucins pour désigner la partie de leur province de Germanie inférieure où l’usage du français prédomine. Au sein de cette Provincia Walloniae, l’autonomie des Capucins liégeois est reconnue à partir de 1704 et cette mention apparaît désormais aussi sur la carte. Par ailleurs, on constate surtout que la Provincia Walloniae s’est fortement réduite par rapport à son étendue de 1618.

Références
Atout17 ; BBtMRW ; Ency03


Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)

La province Wallonia de l’ordre des Capucins (1618)

Quand, au milieu du XVIe siècle, les Jésuites espagnols arrivés à Louvain doivent dénommer la nouvelle province de leur Compagnie, ils reprennent, eux qui prêchent en latin, le terme romain de Belgae. En 1564, la province de Germania inferior est divisée entre la province du Rhin et la « provincia belgica ». En 1612, cette dernière est divisée en Flandro-Belgique et Gallo-Belgique (gallo-belgica).
À partir du XVIIe siècle, l’ordre des Capucins réorganise l’administration de sa province dite de Germanie inférieure. Dès 1616, le critère de la langue est ici aussi utilisé pour établir une distinction entre la Provinciae Flandriae pars et la Provincia Gallo-Belgiae sev Walloniae. Les Capucins suivent ainsi l’exemple des Jésuites. Le substantif latin Wallonia est utilisé dès 1618 par les Capucins et finit par s’imposer : la Provincia Walloniae supplante l’appellation Provincia Gallo-belgiae.

Références
Atout18 ; BBtMRW ; Ency03 ; MVW06 ; WPH3-73


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Diocèses et provinces ecclésiastiques après 1559

Le 31 juillet 1559, la bulle pontificale Super Universas annonce la réforme des diocèses. Laborieusement obtenue, elle transforme les Pays-Bas habsbourgeois en une forteresse du catholicisme en Europe du nord. Ils comprennent désormais trois nouvelles provinces ecclésiastiques et ne dépendent plus d’aucune autorité extérieure, des provinces métropolitaines des archevêques de Cologne et de Reims, ou des évêques de Liège, de France ou d’ailleurs. Intervenant après la prise de l’Artois, de la Flandre et du Cambrésis par Charles Quint, cette concordance « parfaite » entre frontières politiques et religieuses s’accompagne d’une prise en compte des réalités linguistiques.
La frontière linguistique apparaît en effet clairement entre l’archevêché de Malines divisé en sept nouveaux évêchés (tous flamands) et Cambrai qui comprend cinq diocèses romans ; les provinces wallonnes sont soumises au roi d’Espagne, les provinces picardes au roi de France. Dans cette réorganisation, seul le duché de Luxembourg a été oublié ; en fait, il a été privé d’un siège épiscopal en raison de l’opposition farouche des évêques de Liège et de Trèves.
La province ecclésiastique d’Utrecht (groupe frison-batave) s’étend dans la partie septentrionale des Pays-Bas, et compte les sièges suffragants d’Harlem, Deventer, Middelbourg, Groningue et Leeuwarden, qui s’ajoutent à Utrecht déjà existant, élevé au rang d’archevêché. Ces six évêchés n’ont qu’une existence éphémère. Dès 1580, ils cessent d’exister ; en 1592, est érigé le vicariat apostolique des Provinces-Unies.
La province ecclésiastique de Malines (groupe flamando-brabançon) – élevée en archevêché et supérieure aux deux autres provinces – sera flamande et brabançonne. Elle comprend les six diocèses de Gand, Bruges, Ypres, Anvers, Bois-le-Duc et Ruremonde. Ce choix témoigne de l’importance que les Habsbourg continuent à témoigner à Malines.
Enfin, est érigée une province ecclésiastique de Cambrai (groupe gallo-wallon), où les nouveaux diocèses de Namur et de Saint-Omer prennent place à côté de Cambrai, Boulogne (1567 !), Tournai et Arras. Ces deux derniers sont fortement démembrés par rapport à la situation antérieure et la Thérouanne a disparu. À l’évêque de Cambrai est conféré le titre d’archevêque.
La partie luxembourgeoise des Pays-Bas fait exception à l’homogénéisation apportée par cette réforme. Elle resta partagée entre trois métropoles et six diocèses jusqu’à la fin de l’Ancien régime (Trèves, Cologne, Reims, Liège, Metz et Verdun) malgré plusieurs projets de réforme.
Quant au diocèse de Liège, il est la principale « victime » de cette réforme habsbourgeoise. Il est en effet fortement amputé de contrées espagnoles au profit des diocèses de Malines, Anvers (archidiaconé de Campine), Bois-le-Duc, Middelbourg et Namur. Le diocèse de Liège perd aussi l’université de Louvain et, en raison du développement d’une université à Douai, aucun projet ne se concrétisera en pays mosan. Se sentant lésés par l’érection des nouveaux diocèses, Cologne et Liège introduisirent des recours auprès du pape et de l’empereur. En vain.

Références
AT4.1 ; deMo-16-17 ; GeGB49 ; HPLg-138 ; TrauLxb-158


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Diocèses et provinces ecclésiastiques avant 1559

Soucieux de mieux contrôler le pouvoir de l’Église et d’empêcher des « étrangers » d’intervenir par le biais du pouvoir religieux dans les affaires temporelles qui les concernent, Charles Quint comme Philippe II a notamment souhaité réformer les limites des provinces ecclésiastiques héritées des provinces romaines et faire coïncider les frontières des diocèses avec celles de leurs possessions. Preuve – si besoin en était – de l’importance de la confédération et surtout des entités confédérées des Pays-Bas, les nouveaux diocèses qui y sont créés (quatorze) correspondent assez bien avec les contours des structures internes. Il n’y a pas un évêché pour les Pays-Bas, mais une série de diocèses qui collent aussi près que possible aux anciens comtés, duchés voire seigneuries. Tous les liens sont coupés entre les évêchés des Pays-Bas et les archevêques « étrangers » de Reims, Trèves et Cologne.
Avant 1559, l’ensemble des territoires dépend de trois métropoles chrétiennes situées en périphérie des possessions des Habsbourg : Cologne, Reims et Trèves. La province ecclésiastique de Reims (siège de l’archevêché) qui comptait une douzaine de diocèses, dont ceux d’Arras, Thérouanne, Cambrai, Reims et Tournai concernent la partie occidentale de la Wallonie actuelle. La province ecclésiastique de Cologne (siège de l’archevêché) s’étendait aux régions au nord de l’Escaut et de la Meuse par le diocèse d’Utrecht, aux régions rhénanes par le diocèse de Cologne, et aux actuelles provinces de Limbourg (belge et hollandaise), Liège, Namur, la moitié du Luxembourg et du Brabant, une partie d’Anvers et quelques contrées de Hollande et d’Allemagne par le vaste diocèse de Liège. La province ecclésiastique de Trèves, enfin rayonnait notamment sur l’autre moitié de la province actuelle du Luxembourg (par le diocèse de Trèves), et comprenait aussi les diocèses romans de Metz, Verdun et Toul.

Références
AT4.2 ; deMo-14 ; GeGB47


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La principauté de Liège sous le régime de l’Église impériale (XIe-XIIIe siècles)

À la fin du XIe siècle, l’évêque de Liège – soit comme chef spirituel, soit comme chef temporel et suzerain – exerce son hégémonie sur l’ensemble des régions romanes qui forment l’espace wallon actuel à l’exception de la partie romane du diocèse de Trèves (le pays gaumais). Les princes-évêques placent notamment les comtes de Hainaut sous leur domination féodale (1071-1076). Jusque-là, le comté de Hainaut était essentiellement compris dans le diocèse de Cambrai. Vers 1245, il semble que l’incorporation « temporelle » ne se réalise pas et le Hainaut reste en dehors de la principauté, situation consacrée en 1408 après la bataille d’Othée.
Cette hégémonie dure un siècle seulement, le temps de l’Église impériale. En effet, un vaste mouvement de réforme de la discipline monastique a démarré de l’abbaye de Cluny et s’est propagé dans nos contrées où les abbayes sont sensibles aux nouveaux préceptes. Parmi ceux-ci, la remise en cause de la désignation des responsables de l’Église (investiture) par des princes laïcs. Dès l’entame de son pontificat (1075), Grégoire VII s’emploie à combattre ce régime politico-religieux.
La querelle des Investitures, c’est-à-dire le formidable conflit entre l’empereur et le pape pour le contrôle de l’Église en général et de l’élection des évêques en particulier (1075-1122), puis l’effondrement de l’autorité impériale dans le courant du XIIIe siècle affaiblissent dans un premier temps, puis anéantissent finalement, le système ottonien de l’Église impériale, dont la mort de l’empereur Henri VI (1197) marque le tournant. Alors que la notion de Lotharingie disparaît, les lointains successeurs d’Otton se désintéressent des terres situées le plus à l’occident de l’empire. Le lien de subornation à l’égard de l’Église impériale se distend de plus en plus. L’élection des évêques va désormais aussi dépendre des grandes familles locales qui ont tissé leurs propres liens féodaux et assuré l’autonomie de leurs territoires, véritables petits États souverains.
À Liège, une distinction plus nette s’établit entre « diocèse » et « pays » de Liège. Le pape confère à l’élu l’autorité spirituelle, que symbolisent l’anneau et la crosse. L’empereur ne conserve que l’investiture laïque, remettant le sceptre et l’épée, symboles du pouvoir temporel. L’autorité temporelle de l’évêque ne dépasse plus les limites des domaines épiscopaux et donc de la principauté de Liège dont les frontières sont bien définies et qui s’affirme comme un État souverain, à l’instar de ses petits voisins. De surcroît, la faiblesse des héritiers de l’empire d’occident coïncide avec l’émergence de la puissance française, militaire, politique, culturelle (les arts, l’Université de Paris, le vin…, etc.) et économique (foires, etc.).

Références
AzKG-94 ; DHGe14 ; HPLg-41 ; HW04-113-114 ; Kup-527 ; LJGdLg48 ; Meuse-Rhin10 ; vRey-22


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Les abbayes du VIIe au IXe siècle

L’introduction du christianisme se réalise par vagues successives. Il s’agit d’abord d’un phénomène urbain ; le culte est attesté aux IIIe et IVe siècles par la présence des premiers évêques à Trèves et à Tongres notamment. Il se répand ensuite dans les campagnes à partir des grandes voies de communication, des garnisons romaines placées sur le Rhin, voire de certains grands domaines agricoles. Le ralliement de Clovis au christianisme romain favorise l’expansion rapide de la religion ainsi reconnue officiellement (VIe - VIIe siècles). Les nombreuses abbayes fondées entre Moselle et Meuse soutiennent cette 2e grande vague de christianisation. Les églises essaiment dans les campagnes.
Bon nombre de grandes familles franques font don de terres et de biens aux missionnaires, si bien que les abbayes disposent rapidement de vastes terres et de richesses qui en font aussi un lieu de pouvoir. La plupart des abbayes seront le berceau de nouvelles agglomérations. Au cours des VIIIe et IXe siècles, il n’est pas rare (c’est un euphémisme) que les abbayes soient régies par des laïcs. Dans le but évident de rompre le caractère héréditaire des successions d’abbaye et d’en maîtriser le pouvoir, l’empereur Otton Ier impose une réforme monastique qui lui permet, désormais, de désigner lui-même les abbés, pour les affaires spirituelles, et, à côté de lui, un avoué, gestionnaire du volet temporel (Xe siècle).


Références
Delm ; deMoAbb ; FrPtP99 ; TrauLxb95


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Les biens de l’Église de Liège au Xe siècle

Faisant partie du diocèse primitif de Tongres, la petite cité de Liège acquiert un statut tout neuf quand l’évêque Lambert y est assassiné en l’an 700. Successeur de Lambert, Hubert y fait édifier une basilique et, en 800, sous Charlemagne, Liège devient siège épiscopal, celui-ci ayant déjà migré précédemment de Tongres à Maastricht. C’est désormais depuis Liège que l’évêque, représentant local du pape, exerce un pouvoir spirituel et moral sur l’ensemble d’un diocèse qui a conservé les mêmes dimensions que l’ancienne civitas tungrorum. Progressivement, il va aussi exercer un pouvoir temporel sur les terres que lui offrent princes et seigneurs. Au Xe siècle, les donations sont nombreuses et les possessions de l’Église de Liège – sous forme de biens ou de droits – sont situées le long de l’axe Sambre-et-Meuse ; elles confèrent à l’évêque une position prestigieuse.

Références
AzKG-94 ; HPLg-16-31 ; LJGdLg48 ; Meuse-Rhin10


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