Fiévez Amé (ou Aimé-Joseph)

Militaires

Calonne 7/03/1891, tué sur le front à Steenstrate, près de la ville d’Ypres, 26/03/1917


Le bilan humain de la Première Guerre mondiale est particulièrement saisissant : quel que soit le camp des belligérants, on dénombre 18,5 millions de morts, civils et militaires confondus et plus de 21 millions de soldats blessés. Près de 2% de la population de tous les États en guerre ont disparu entre 1914 et 1918. En Belgique, c’est près de 1,5% de la population de 1914 qui a disparu quand est annoncé l’Armistice. Aux 62.000 victimes civiles s’ajoutent près de 43.000 soldats tués et des milliers de blessés. Partout dans les villages, des centaines de monuments rendent hommage aux disparus, de façon discrète ou de manière plus ostensible.

Inaugurée le 11 novembre 1922, la tombe du soldat inconnu – qui se trouve au pied de la colonne du Congrès, à Bruxelles – symbolise l’hommage de toute la Belgique aux soldats tués. En Wallonie, il n’existe pas de « monument concurrentiel », tandis qu’à Dixmude a été élevée la Tour de l’Yser, inaugurée en août 1930, pour commémorer la paix en Europe, tout en rendant hommage aux victimes flamandes de la Grande Guerre.

Dès l’entame de sa construction en 1928, la Tour de l’Yser est devenue le lieu de pèlerinage du Mouvement flamand. À partir de 1932, la crypte de la Tour accueille, à côté de six cercueils individuels de soldats flamands, celui contenant les corps de trois soldats retrouvés sur le champ de bataille de Steenstrate ; les corps du caporal Fiévez et des frères Frans et Edward van Raemdonck sont à ce point imbriqués, affirme-t-on alors, qu’ils sont placés ensemble dans le même cercueil. Au fil du temps et d’hommages politiquement distincts, les frères van Raemdonck – proches du mouvement frontiste – deviennent le symbole des soldats flamands méprisés par les officiers francophones et sacrifiés en raison de leur incompréhension du sens des ordres qui leur étaient donnés en français.

Dès l’été 1917, nul n’ignore la présence du caporal wallon Amé Fiévez aux côtés des frères van Raemdonck. Originaire de la région d’Antoing, Fiévez avait 23 ans quand l’armée impériale viola les frontières des pays voisins. Derrière l’Yser, il a subi pendant des mois toutes les misères d’une guerre de tranchées qui n’en finit pas. Lors d’un assaut nocturne sur le Stampkot, dans la nuit du 25 au 26 mars 1917, Amé Fiévez est surpris dans son élan par une riposte allemande, en même temps que les frères van Raemdonck. Récupérées dans le no man’s land de la plaine de l’Yser, leurs dépouilles seront déplacées à plusieurs reprises : en 1924, ils sont enterrés ensemble dans le cimetière militaire de Westvleteren ; leurs trois noms figurent sur le monument de Steenstrate (1933) ; mais si officiellement le corps de Fiévez est resté au cimetière de Westvleteren, dans les faits, il a bien été transféré dans la crypte de l’Yzer en 1932.

En 1955, plusieurs articles de la presse francophone révèlent la situation, tandis que des descendants de la famille protestent contre le caractère illégal de la situation. Il faudra attendre les préparatifs des commémorations du centième anniversaire de la Grande Guerre pour que le caporal wallon Amé Fiévez bénéficie d’hommages personnalisés, tant à Dixmude qu’à Antoing. Il était l’un des 9.750.000 soldats tués durant la Première Guerre mondiale.

 

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, en particulier Le Soir, L’Avenir 24/03/2014
Maarten VAN GINDERACHTER, Raemdonck, dans Nieuwe Encyclopedie van de Vlaamse Beweging, Tielt, Lannoo, 1998, t. III, p. 2528-2529