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Defoin Arthur

Politique

Anseremme 7/10/1865, Dinant 17/02/1928


Lors de l’invasion allemande d’août 1914, l’envahisseur commet de nombreuses exactions à l’encontre des civils dans les villes et communes de l’est du pays wallon : incendies, pillages, exécutions sommaires, etc. marquent la bataille dite des frontières. Avec 674 civils exécutés et plus d’un millier de maisons détruites au soir du 23 août, Dinant est la cité la plus meurtrie de Wallonie. Comme d’autres maires du pays wallon, Arthur Defoin est resté à son poste au lendemain de l’ultimatum allemand et a tout fait pour maintenir l’ordre en signant une ordonnance de police dès le 4 août. Incitant la population locale à garder son calme, à ne pas se rassembler et à déposer armes et moyens de diffusion au bureau de police le plus proche, il a obéi aux injonctions venant de Bruxelles. Le 6 août, il rappelle aux civils qu’ils ne peuvent en aucun cas s’attaquer aux soldats ennemis. Malgré ses efforts, il ne peut éviter la mise à sac de sa ville par les Allemands. Lui-même est d’ailleurs victime des exactions de l’envahisseur.

La position stratégique de Dinant en fait un objectif névralgique tant pour les Français qui ne veulent pas perdre cet ancrage sur la Meuse, que pour les Allemands qui entendent contrôler tous les ponts sur le fleuve. Au lendemain d’une confrontation violente entre les deux armées, les troupes saxonnes s’en prennent aux civils dinantais et, mutatis mutandis, font revivre à la cité un drame aussi atroce qu’en 1466, lorsque les Bourguignons incendièrent la cité mosane. Impuissant face à la fureur allemande alimentée par une peur panique de pseudo francs-tireurs (23 août), Arthur Defoin est retenu comme otage dès le soir du 23 août, « par mesure de sécurité », avec d’autres notables. Ensuite, les Allemands vont retenir 33 ecclésiastiques prisonniers à Marche, tandis que sont envoyés en Allemagne, à Cassel précisément, 416 civils dont Arthur Defoin, l’échevin Léon Sasserath, une dizaine de magistrats, les employés de la prison, des professeurs du collège communal, et bien d’autres, jeunes et vieux. Sans enquête, interrogatoire ni jugement, ils sont maintenus en détention à Cassel pendant trois mois.

Finalement, aucune charge n’étant retenue contre lui (ni d’ailleurs contre ses 400 compagnons d’infortune), Arthur Defoin est autorisé à quitter Cassel et à rentrer à Dinant. Il y revient fin novembre et retrouve ses fonctions exercées. En son absence, le premier échevin catholique, François Bribosia, avait assuré l’intérim. Comme de nombreux autres « maïeurs » de Wallonie sous l’occupation, Defoin va veiller au ravitaillement et à la « tranquillité » de ses administrés traumatisés par les événements, assurer une sépulture pour les nombreux défunts, et commencer à reconstruire un tissu social. Mais en 1915, il entre en conflit avec le Comité provincial d’Alimentation et préfère démissionner et se retire de la vie politique. À nouveau, le catholique Bribosia assure l’intérim. En janvier 1919, Defoin remet officiellement sa démission au roi. Il n’a pas changé d’avis.

Membre du parti libéral, élu conseiller communal de Dinant lors des élections d’octobre 1911 qui avaient vu le succès des socialistes et des libéraux partout en Wallonie, Arthur Defoin était jusque-là un commerçant spécialisé dans le secteur du bois. Depuis les années 1890, il possédait une scierie dans le quartier sud de la ville, société qu’il avait constituée après avoir exercé le métier de batelier, qui était aussi celui de son père. Son expérience politique fut de courte durée mais mouvementée. Depuis la démission du bourgmestre Ernest Le Boulengé (1910), Dinant se cherchait un successeur. Victorien Barré fut poussé par le choix des électeurs en octobre 1911 ; en même temps que ce dernier devenait bourgmestre, Defoin devenait échevin. Mais en février 1914, pour convenance personnelle, le libéral Victorien Barré démissionne. En avril 1914, Arthur Defoin héritait alors de l’écharpe maïorale, en ignorant tout de ce qui l’attendait...

 

Sources

Informations communiquées par M. Coleau, archiviste à Dinant
M. TSCHOFFEN, Le sac de Dinant et les légendes du livre blanc allemand du 10 mai 1915, Leyde, 1917
http://www.dinant.be/patrimoine/histoire-dinantaise/sac-du-23-aout-1914
http://www.matele.be/le-carnet-bribosia-un-document-historique-majeur (s.v. septembre 2014)
Chanoine Jean SCHMITZ et Dom Norbert NIEUWLAND, Documents pour servir à l’histoire de l’invasion allemande dans les provinces de Namur et de Luxembourg, Bruxelles, Paris, Librairie nationale d’art et d’histoire, G. Van Oest & Cie, 1922, t. IV, quatrième partie, Le combat de Dinant, II. Le sac de la ville, p. 29, 269-274