Halleux Laurent

Culture, Musique

Verviers 24/01/1897, Bruxelles 10/05/1964

Comme Alphonse Onnou, autre violoniste verviétois, Laurent Halleux s’inscrit résolument dans les pas de ses illustres devanciers que furent François Prume, Henri Vieuxtemps et autres Guillaume Lekeu. Formé à l’École de musique de Verviers (dans la classe de Nicolas Fauconnier), médaille de Vermeil de musique de chambre et de violon 1912, il obtient également le prix et la bourse Vieuxtemps, avant de poursuivre sa formation dans la classe du Liégeois César Thompson au Conservatoire de Musique de Bruxelles. Premier Prix de violon 1914, le jeune prodige n’a pas d’âge quand il intègre le futur quatuor à cordes Pro Arte – en 1913 selon les uns, en 1916 selon les autres – mais en tout cas sous la direction du virtuose Alphonse Onnou. Le succès de ce quatuor deviendra tel qu’en 2013 son centième anniversaire est célébré en grandes pompes aux États-Unis…

Sa participation effective et continue au quatuor est attestée dès 1917, année où le nom définitif est adopté : le Quatuor Pro Arte repose principalement, à ses débuts, sur les deux Verviétois, le premier violon Alphonse Onnou et sur le second violon Laurent Halleux, ce dernier remplaçant parfois le premier. Leurs partenaires varient pendant quelques mois, jusqu’à ce que Fernand Quinet et Germain Prévost les rejoignent de manière constante (1919). En 1921, lorsqu’il reçoit le Prix de Rome, Fernand Quinet est cependant contraint de céder son siège à Robert Maas ; il s’agit du dernier changement significatif avant le succès remporté par le quatuor dans l’Entre-deux-Guerres. 

Contraints au service militaire, les jeunes musiciens se produisent parfois sous le nom de Quatuor à Archets du 1er Régiment des Guides (1920-1921). Une fois libérés de leurs obligations, les « quatre » ne vont plus cesser de se produire, faisant connaître des compositeurs de leur époque (choix artistique d’Onnou), ou se faisant les interprètes de compositeurs plus classiques (orientation de Halleux) : Schönberg, Milhaud, Bartok, Roussel, Honegger, Berg, Absil, Beethoven… Ils reçoivent aussi des compositions spécifiques de Chevreuille, Darius Milhaud et Igor Stravinsky, qui sont autant de témoignages de la qualité du groupe. Pendant un peu plus de dix ans, jusqu’au début des années 1930, Bruxelles est le lieu régulier des Concerts Pro Arte, mais, de plus en plus souvent, le quatuor est appelé à l’étranger. Parfois, Laurent Halleux est invité à se produire en dehors du quatuor, avec son violon Émile Laurent, modèle Guadagnini ; mais il s’agit là d’exceptions.

Remarqué par Elizabeth Sprague Coolidge, une milliardaire américaine passionnée par la musique de chambre, le quatuor est invité aux États-Unis dès 1926 ; il se produit lors de l’inauguration de la salle de musique de la bibliothèque du Congrès, à Washington, puis régulièrement, grâce à sa mécène, il retourne en Amérique du Nord pour donner les Concerts Pro Arte-Coolidge. Quand éclate la Seconde Guerre mondiale, le quatuor se retrouve coincé Outre-Atlantique. Il décide de continuer à se produire sur place. Le responsable de l’Université du Wisconsin leur offre l’hospitalité, à Madison, sur le campus, en tant que « quatuor-en-résidence ».

Frappé d’une leucémie, aux États-Unis, en novembre 1940, Onnou est le premier à disparaître. Il était le modérateur du groupe. Il est remplacé par le catalan Antonio Brosa (1894-1979), formé à Barcelone à l’école verviétoise du violon par Mathieu Crickboom ; Halleux n’avait pas souhaité devenir le premier violon. Mais l’absence d’Onnou précipite la séparation de Laurent Halleux et de Germain Prevost. Second violon du groupe, Halleux décide de quitter le quatuor durant l’été 1943. Il remplace Thomas W. Petre, récemment décédé, au sein du London String Quartet et dès ce moment travaille pour les studios de cinéma de La Metro Goldwyn Mayer, à Hollywood ; il est alors remplacé par le violoniste liégeois Albert Rahier.

Alors que des Américains perpétuent durablement le Pro Arte Quartet of the University of Wisconsin, Laurent Halleux poursuit sa route à Los Angeles. Sa famille l’a rejoint en 1941. Outre sa collaboration au cinéma, il joue dans des orchestres de chambre qui se produisent Outre-Atlantique. En 1952, il fait partie du Quatuor Hongrois qui se produit à Bruxelles, dans un cycle Beethoven. Depuis 1950, il joue de l’alto et est membre de l’Orchestre Philharmonique de Los Angeles. Au début des années soixante, il rentre au pays et sera quelque temps second violon à l’Orchestre national de Belgique.

Sources

Anne VAN MALDEREN, Historique et réception des diverses formations Pro Arte (1912-1947), thèse de doctorat, Louvain-la-Neuve, 2012
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, en particulier Le Jour Verviers du 02/05/2014, La Libre Culture du 21/05/2014
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. III, p. 394
http://proartequartet.org/about.html (s.v. mai 2016)
Anne VAN MALDEREN, Le quatuor Pro Arte (1912-1947), dans Revue de la Société liégeoise de musicologie, Liège, 2002, n°19, p. 25-45 sur http://popups.ulg.ac.be/1371-6735/index.php?id=480&file=1 (s.v. mai 2016)
Eric Walter WHITE, Stravinsky : A critical Survey 1882-1946, Toronto, 1997, p. 180