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Hannonet-Gendarme Jean-Baptiste Céleste

Socio-économique, Entreprise

En Ardennes 1781, Tours 5/12/1851

Parmi les industriels wallons du début du XIXe siècle aidés par des mécaniciens anglais – en l’occurrence Cockerill et surtout Thomas Bonehill – Jean-Baptiste Hannonet est l’un des premiers à faire confiance à ce savoir-faire lorsqu’il entreprend de développer un pôle sidérurgique dans la région de Couvin. Aidé aussi par un financement d’Isidore Warocqué ainsi que par son beau-père Jean-Nicolas Gendarme, Hannonet-Gendarme va se retrouver, vers 1830, à la tête de la plus importante exploitation du fer du pays wallon après celle de John Cockerill : l’ancien maître des forges de Pernelle (Couvin) dispose de mines de fer, de charbon et du matériel le plus à la pointe du progrès. Malheureusement, cela ne suffira pas et, en 1833, son projet industriel fait faillite.

Au sud de Mézières, entre la Meuse et l’Aisne, Jean-Nicolas Gendarme est un industriel prospère, disposant de mines, de fourneaux et de forges, qui trouvent à s’enrichir en fournissant les armées napoléoniennes. À partir de son mariage avec Flore Gendarme, Jean-Baptiste Hannonet-Gendarme se constitue une sorte de complexe industriel similaire dans la région de Couvin où il était déjà actif : forges et fourneaux de Pernelle (1816), forge Saint-Roch (1823), ainsi que des minières à Jamiolle, Nismes et Couvin. Sa production, Hannonet la destine à la Marine française d’abord. Après Waterloo, les affaires sont plus laborieuses ; Hannonet ne parvient à s’ouvrir les portes hollandaises qu’à partir de 1821 ; la qualité de son acier est appréciée et jusqu’en 1830, il va fournir les arsenaux d’Anvers, d’Amsterdam et de Rotterdam.

Par le Fonds de l’Industrie institué par le roi Guillaume d’Orange, Hannonet-Gendarme (comme d’autres industriels) reçoit une aide précieuse de l’État qui lui permet de poursuivre la modernisation de ses outils. Four à réverbère, laminoir moderne et four en briques réfractaires sont construits avec l’aide des anglais Dickson et Penning (1822) ; en 1823, c’est Thomas Bonehill qui débarque à Couvin qui va y installer un haut-fourneau à coke (1824-1826), à l’emplacement de l’ancienne fonderie à canons et de son fourneau ; il semble être allumé en 1826 ; il s’agirait là du deuxième haut-fourneau à coke du continent européen, construit juste après celui de Cockerill à Seraing et en même temps que celui de Huart à Hauchies.

En même temps que Cockerill, Huart et Orban, celui qui est médaillé d’or de l’exposition de Harlem en 1825 fait construire un laminoir à étirer le fer en barres. Début 1830, la Société en commandite des Hauts Fourneaux et Forges de Couvin installe des machines à vapeur sur ses minières de Couvin (La Suédoise et au bois des Minières) et de Jamioulx (deux autres). Réunissant dans le même établissement l’exploitation du minerai, le travail de la fonte et du fer au coke et à la houille, une qualité de minerai exceptionnelle et la présence d’un cours d’eau, l’entrepreneur namurois avait tout pour réussir : cependant, sa situation géographique n’est guère favorable et des erreurs de gestion lui sont fatales. En dépit de ses efforts, les derniers essais de fabrication d’acier tentés en 1830 échouent ; la révolution belge met un terme aux commandes destinées au marché hollandais ; Isidore Warocqué ne peut plus suivre. Le cœur de la sidérurgie wallonne va battre dans les bassins de Liège et de Charleroi, le long de la Meuse et de la Sambre. Emportant son banquier dans sa chute, Hannonet-Gendarme ne survit pas à la course folle entamée par ses concurrents. En 1833, la faillite des activités couvinoises est prononcée.

Contrairement à une légende qui voudrait que le patron failli ait mis fin à ses jours en se jetant dans l’Eau-Noire, Jean-Baptiste Hannonet a survécu à son projet. Sans que l’on connaisse ses activités, il finira ses jours à Tours, en 1851.

 

Sources

Marianne RENSON, Hannonet-Gendarme, un pionnier de la révolution industrielle, dans Sixième congrès de l'Association des Cercles francophones d'histoire et d'archéologie de Belgique et LIIIe congrès de la Fédération des Cercles d'archéologie et d'histoire de Belgique organisé par les Sociétés d'histoire et d'archéologie de Mons, Saint-Ghislain et Soignies, 24-27 août 2000, [2002], t. II, p. 223-232
Ernest DONNAY, Grandeur et décadence d’un maître de forges couvinois, dans Au pays des Rièzes et des Sarts, hiver 1960, n°4, p. 163-170
Jacques SACRÉ, Un maître de forges couvinois : Charles-Jean-Baptiste-Céleste Hannonet-Gendarme, dans Au pays des Rièzes et des Sarts, 4e trim. 1990, n°120, p. 606-615
La première révolution industrielle à Couvin. 1815-1832/Hannonnet-Gendarme, s.l., s.d.
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Histoire. Économies. Sociétés, t. I, p. 328, 330, 338
Ginette KURGAN, Serge JAUMAIN, Valérie MONTENS, Dictionnaire des patrons en Belgique, Bruxelles, 1996, p. 64, 655
Nicolas BRIAVOINE, Sur les inventions et perfectionnements dans l’industrie depuis la fin du XVIIIe siècle jusqu’à nos jours, Mémoires couronnés par l’Académie royale des Sciences et Belles-Lettres de Bruxelles, Bruxelles, 1838, t. XIII, p. 125, 126, 128, 129, 132-133