Materne Jean

Politique, Socio-économique, Entreprise

Wépion 22/07/1889, Jambes 21/06/1964

Malgré d’évidentes dispositions pour les études, Jean Materne interrompt ses humanités chez les Jésuites pour entrer dans la fabrique familiale : il a 15 ans. Quelques années plus tard, il succèdera à son père comme président-directeur général des Établissements Édouard Materne, entreprise installée à Jambes depuis 1896 et spécialisée dans la fabrication de confitures, de sirop et de conserves de fruits au naturel. Après la Grande Guerre et le pillage organisé par l’occupant, les Materne réinvestiront dans un outil plus moderne. Jean Materne partagera les commandes d’une entreprise en pleine expansion et poursuivra l’essor de l’initiative paternelle, disposant d’usines en Wallonie et en France dès 1938, qu’il gère de mains de maître, tout en contrôlant ses vergers et ses fermes productrices des matières premières. 

Patron attentif au sort de son personnel, Jean Materne est tout autant au courant des progrès techniques de son temps. Les avantages des méthodes de conservation par le froid qu’il avait perçus avant-guerre sont confirmés à la Libération. Avec les Américains débarquent aussi les congélateurs. Dès 1946, Jean Materne installe à Grobbendonck une toute nouvelle usine qui sera spécialisée dans la fabrication de conserves de légume : comme les pots de confiture Materne, les produits Frima vont inonder le marché alimentaire, débordant les frontières belges.

Après l’Armistice de novembre 1918, l’industriel qui fréquente les milieux libéraux de longue date et connaît bien François Bovesse accepte de se présenter au suffrage des électeurs. Conseiller communal élu en 1926, il siège d’abord dans l’opposition, avant de s’imposer, dès 1933, comme le bourgmestre de Jambes… pour trente ans. Il va gérer sa commune comme une industrie, contribuant à son agrandissement, et la dotant d’égouts et d’un second pont sur la Meuse. Dans le même temps, il siège aussi au conseil provincial de Namur (1929-1945) qu’il préside à partir de 1936. Durant son mandat, il est un promoteur décidé de l’École hôtelière de Namur. De 1941 à 1964, il fut aussi le président du Foyer Jambois, société de logements sociaux : plus de 500 maisons seront construites à l’entame des années 1960.

À sa sensibilité libérale s’ajoute un intérêt pour la question wallonne. Président de la fédération libérale de Namur, il provoque la réunion constitutive de l’Entente libérale wallonne, qu’il préside de 1937 à 1950, afin « d’étudier les problèmes spécifiquement wallons et faire entendre, dans le cadre national, les aspirations de la Wallonie libérale ». De 1938 à 1940, Jean Materne est aussi l’un des délégués de Namur à l’Assemblée wallonne. Après la Seconde Guerre mondiale, l’industriel libéral apporte encore son soutien au Congrès national wallon, et fait partie de son Comité permanent (1945-1950) ; il préside aussi le comité provincial namurois du Conseil économique wallon, organisme informel dont il est aussi membre du comité de direction et administrateur (1945-1964). Sénateur provincial désigné en 1954, il abandonne ce mandat le 19 janvier 1963, et il est remplacé par Michel Toussaint. D’abord fort réticent à l’idée fédéraliste, il s’y ralliera prudemment durant les années 1950.

Trois ans après la disparition de Jean Materne, sa société est rachetée par un groupe américain, WR Grace, et cesse d’être une entreprise familiale. Raymond (1931-2007) ne succède à son père qu’à la tête de la commune de Jambes. Dans les années 1960, il avait acquis une propriété en bord de Meuse qui, après être devenue patrimoine communal en 1971, accueillera, en 1993, le siège de la présidence du gouvernement wallon, l’Élysette.

 

Sources

Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 1085
Jacques MERCIER, Karl SCHEERLINCK, Made in Belgium, Un siècle d’affiches belges, Tournai, Renaissance du Livre, 2003, p. 81
Dictionnaire biographique namurois, sous la direction de Fr. JACQUET-LADRIER, Numéro spécial de la revue Le Guetteur wallon, n°3-4, Namur, 1999, p. 171
Cécile DOUXCHAMPS-LEFEVRE, dans Nouvelle Biographie Nationale, t. VI, p. 294-296

 

Mandats politiques

Conseiller communal de Jambes (1926-1964)
Bourgmestre (1933-1964)
Conseiller provincial (1929-1945)
Sénateur provincial (1954-1963)