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Peterson Andrew

Science, Agronomie

Sowerby (Yorshire du nord) 03/07/1800, Londres 09/09/1869

Le nom de l’industriel anglais Cockerill est bien connu en pays wallon ; le nom de l’un ou l’autre de ses compatriotes impliqués dans le domaine industriel pourrait être éventuellement cité, mais si le domaine d’activité devait être restreint à celui de l’agriculture, il y a peu de chance que surgisse spontanément le nom d’Andrew Peterson. Pourtant, cet ingénieur agronome anglais a marqué la première moitié du XIXe siècle dans le Pays de Famenne, avant d’étendre ses expériences en Ardenne et ses investissements à Jemelle.

Arrivé dans un pays qui venait tout juste de conquérir son indépendance, cet agronome autodidacte est doté d’une bonne fortune qui lui permet d’acheter une série de terrains agricoles généralement considérés, par les « locaux », comme incultes ou peu propices à l’exploitation. Ce sont justement ces caractéristiques qui intéressent l’Anglais : procédant à un remembrement rigoureux et systématique des terres (échange, rachat, modification des chemins…) pour disposer d’étendues homogènes sur environ 200 à 300 hectares, il les confie en location à des fermiers qui sont tenus de respecter scrupuleusement ses consignes (elles figurent noir sur blanc dans les baux à ferme passés devant notaire), dont l’emploi de chaux qu’il fournit gratuitement.

C’est ainsi qu’il se porte acquéreur d’un domaine de 300 hectares à Hogne (Somme-Leuze), autour du château ; il quittera cet endroit en 1845. Entretemps, il achète la « Cense du Bois », à Jemelle (1837/8), dépendant anciennement de l’abbaye de Saint-Hubert. En 1840, il est l’éphémère propriétaire de la « cense du Mont » et de la « cense Delmotte » à Dorinne (Yvoir) dans le Condroz. Enfin, en 1846, il achète un superbe terrain sur le site de Préhyr et y fait construire un cottage de standing, sur le modèle de la maison du grand écrivain et poète britannique John Milton. Ce domaine de 12 hectares n’a cessé de s’embellir au fil des ans et de ses propriétaires respectifs, eux aussi fidèles aux préceptes premiers de son fondateur.

Et la magie opère lorsque l’Anglais le décide. Les travaux qu’il ordonne sont parfois spectaculaires, comme ce canal long d’un kilomètre et demi sur 6 mètres de large, destiné à irriguer, depuis la Lhomme, les prairies qu’il possède entre Rochefort et Jemelle (1838). Le foin qui y est produit n’a jamais été autant recherché par les cultivateurs du coin qui abandonnent progressivement leur scepticisme, tandis que l’agronome autodidacte est de plus en plus persuadé de la validité de ses théories. Ses terres sauvages se transforment en bonnes prairies voire en parcelles cultivées ; les Famennois bénéficient d’une seconde récolte, celle du regain, en septembre, et l’homme d’affaires récolte rapidement le bénéfice de ses investissements. Conscient de l’intérêt de travailler main dans la main avec tous les partenaires, il entretient de bonnes relations avec les autorités provinciales qui ont l’agriculture dans leur compétence. En 1863, il devient d’ailleurs le vice-président de la commission agricole de la province de Luxembourg.

En 1852, Andrew Peterson met ses principes en application dans des conditions plus difficiles encore, en affrontant le rude climat du plateau de Bastogne. Il se porte alors acquéreur d’un domaine du côté de Ménil (Mesnil), à proximité d’Amberloup (Sainte-Ode), et y construit une « ferme-modèle », dont l’exploitation s’avère un succès. Pionnier des plantes fourragères, Peterson est à la base de la suppression de la jachère, introduit la chaux, contribue à l’acclimatation du froment de printemps et à l’amélioration du mouton ardennais par croisement avec des sujets écossais ; il fait supprimer la charrette à roulettes qu’il remplace par la charrue de type Brabant ; il favorise la plantation de résineux…

Au moment de l’arrivée du chemin de fer à Jemelle, Andrew Peterson perçoit toutes les implications que cela entraîne. Il fait ouvrir un lotissement de 175 terrains à bâtir (sur le Maurlet), lance l’exploitation de carrières de grès (Lamsoul, 1861) et favorise un réseau public de distribution d’eau (1874)… En récompense des services rendus à l’agriculture, Peterson obtient la naturalisation ordinaire en 1860 et est fait « Chevalier de l’Ordre de Léopold » en 1862. Rentré à Londres pour se soigner, il ne reverra jamais la région à laquelle il a apporté tant d’innovations.

Une rue de Jemelle porte son nom.
 

Sources

Émile PIRARD, Andrew Peterson, Vedrin, à compte d’auteur, 2010