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Pierre L'hermite

Eglises

Amiens dans la deuxième moitié du XIe siècle, date et lieu de décès inconnus

Personnage historique ou personnage légendaire, la vie de Pierre l’Ermite a inspiré depuis des siècles pas mal de publications, les unes sérieuses, les autres romanesques. Tout ce qui rattache Pierre l’Ermite au pays wallon relève de la seconde catégorie. En effet, selon G. Kurth, c’est une légende qui relie le prétendu prédicateur de la première croisade à la ville de Huy vers 1100, année où il aurait regroupé autour de lui une communauté de religieux et fondé le monastère de Neufmoustier. La légende se poursuit en précisant que Pierre l’Ermite y finit ses jours en 1115. L’auteur de ce « pieux mensonge » n’est autre que Jacques de Vitry qui, explique toujours G. Kurth, est lui-même prédicateur en faveur d’une nouvelle croisade, cette fois contre les Albigeois. Il utilise ce subterfuge pour convaincre le petit peuple de la principauté de Liège de participer à son projet ; à diverses reprises, cet auteur fait naître des personnalités héroïques provenant du nord de la France actuelle en bord de Meuse et multiplie les indices pour convaincre ses interlocuteurs d’accomplir un geste similaire à leurs illustres ancêtres.

Le vrai Pierre l’Ermite est né en Picardie, au pays d’Amiens. Avant la première croisade, il avait, comme tant d’autres de ses contemporains, fait un pèlerinage en Terre-Sainte. Et quand le pape Urbain II prêche la croisade, Pierre l’Ermite est un instrument de la politique romaine et apparaît comme un prédicateur parmi d’autres, peut-être plus populaire lorsqu’il parcourt la France du Nord le pays wallon notamment, pour recruter des participants pour la croisade. Il n’était « (…) ni noble, ni lettré, ni chevalier, ni précepteur des princes de Boulogne. Ses contemporains ne l’appelaient pas Pierre L’Hermite, mais l’ermite, le moine ou le prêtre Pierre. Les sources authentiques ne nous apprennent rien sur sa famille, sur ses parents plus que sur ses éventuels descendants. (…) il savait (…) utiliser (…) la crédulité des masses (…) » (Flori).

Quittant Cologne en 1096 à la tête de quelques milliers d’hommes, Pierre l’Ermite gagne Constantinople non sans péripéties. En 1099, il participe à la prise de Jérusalem par les chrétiens et est chargé de veiller à l’exécution du service religieux. Après la bataille d’Ascalon (12 août 1099), on perd sa trace jusqu’au moment où des auteurs anciens, dont Gilles d’Orval, expliquent qu’en 1101, avec sa famille et plusieurs riches seigneurs de la vallée de la Meuse, Pierre l’Ermite entame un retour au pays par bateau. Pris dans une tempête sévère, ils jurent d’édifier une église s’ils parviennent à toucher terre. Pour exécuter ce vœu, une parcelle de terrain aurait été attribuée à Pierre l’Ermite au nord de Huy pour qu’il y construise une église en l’honneur du saint Sépulcre et de saint Jean-Baptiste ; ensuite, il se serait retiré dans le prieuré des chanoines réguliers respectant la règle de Saint-Augustin : on est là dans l’origine légendaire de Neufmoustier (Wallenborn), tout autant que dans la vie légendaire de Pierre l’Ermite, pour lequel les sources sont muettes pour la partie de sa vie postérieure à 1099. « On ignore presque tout de son origine ; on ne sait rien de sa fin » (Flori)

Godefroid KURTH, dans Biographie nationale, t. XVII, col. 435-442

Jean FLORI, Pierre l’Ermite et la première croisade, Paris, Fayard, 1999, essentiellement p. 20-28, 494-495

Hélène WALLENBORN, Pierre l’Ermite aux origines du Neufmoustier ?, dans Annales du Cercle hutois des Sciences et des Beaux-Arts, Huy, 1994, t. XLVIII, p. 221-239

Jean-Pierre RORIVE, La vie d’une abbaye. Le Neufmoustier (ca 1100-1797), de Pierre l’Ermite à la Révolution, Editions Jourdan, Waterloo, 2011

Jean-Pierre RORIVE, Le domaine de l’abbaye du Neufmoustier des origines au début du XVe siècle, extrait des Annales du Cercle hutois des Sciences et des Beaux-Arts, Huy, 1977, t. XXXI, p. 35-122, en particulier p. 57-58