Une ombre tutélaire plane sur l’histoire de la Belgique. Sans avoir été le premier à écrire sur le passé du jeune État, Henri Pirenne conditionne durablement une vision rétrospective nationale en publiant sept tomes d’une Histoire de Belgique entre 1899 et 1932. Pour lui, il n’y a pas d’histoire des Wallons, ni d’histoire des Flamands ; l’une et l’autre se confondent dans l’histoire de Belgique. Avec ses qualités et ses défauts, cette somme s’est imposée comme la matrice de l’histoire belge, tout en masquant la richesse et l’originalité méthodologique de l’œuvre de l’historien verviétois. Traitant des origines jusqu’au XIVe siècle, le premier tome paraît en allemand, car il doit s’inscrire dans une collection allemande dirigée par Karl Lamprecht sur l’histoire de l’Europe (Geschichte der Europaeischen Staaten). Il paraît au tout début 1899, comme le montrent les premières réactions et les comptes rendus élogieux. Dès 1900, Pirenne devient le référant des défenseurs d’une âme belge pluriséculaire. Les manuels scolaires sont adaptés en conséquence. Désormais, l’histoire comparée des multiples principautés est abandonnée au profit d’une approche monolithique prenant comme cadre les limites de la Belgique de 1830.
(NB : date présumée pour le jour et le mois)