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Hôtel Raymond de Biolley

Parmi les grandes figures verviétoises de la fin de l’Ancien Régime figurent les membres de la famille Biolley. Raymond Biolley est le troisième de la lignée après l’installation de Jean Biolley au début du XVIIIe siècle et conduit la famille au sommet de la gloire. Pour la signifier, il désire se faire construire une demeure élégante et confie sa réalisation à l’architecte Henri Douha. De style Louis XVI et situé aux numéros 28-34 de la place Sommeleville, l’immeuble d’origine comporte neuf travées, dont trois en avant-corps légèrement en saillie, trois niveaux et une toiture à la Mansart avec deux lots de trois lucarnes et un fronton triangulaire. La composition est parfaitement symétrique bien que l’avant-corps soit traité différemment. Le premier étage est décoré de panneaux sculptés de draperies et de guirlandes. L’intérieur est lui aussi richement décoré, surtout dans les trois salons. Depuis l’époque de son édification sous le régime français, l’immeuble a subi les affres du temps. À droite est construite une annexe dont l’intégration est assez réussie bien que l’ensemble ait perdu sa symétrie. L’action des propriétaires successifs au XXe siècle est, elle, bien plus discutable. En 1932, les lucarnes, brisis et fronton sont supprimés pour transformer l’étage en appartements. En 1952, le rez-de-chaussée est défiguré à des fins commerciales : les bossages des façades disparaissent sous un enduit, les baies de l’avant-corps sont modifiées et de nouvelles ouvertures sont percées ! Un projet de réaffectation en espace muséal rendra à l’avenir son lustre d’antan à l’hôtel de Biolley en corrigeant les erreurs du siècle dernier.


 

Vue d’un salon intérieur de l’hôtel de Biolley © IPW

 À quelques pas de là, le bâtiment situé au 8 de la place Sommeleville était lui aussi lié à la famille Biolley. Il appartenait à Édouard de Biolley (1799-1851), bourgmestre de Verviers, colonel de la garde civique sous le régime belge mais surtout industriel de premier plan. Construit dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’édifice est toutefois profondément remodelé dans les premières années du XIXe siècle en style Empire. Cette rénovation apporte à la façade principale un balcon, un troisième étage ainsi qu’une travée supplémentaire percée d’un portail.

Place Sommeleville 28-34 
4800 Verviers

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Classé comme monument le 28 mai 1973

Frédéric MARCHESANI, 2014

La transition entre l’Ancien régime et notre époque a été marquée par la Révolution industrielle et les bouleversements sociaux qu’elle a entraînés. Qu’il s’agisse de droit de vote, de protection des travailleurs ou de la construction de la sécurité sociale, retrouvez dans cette leçon les avancées conquises dans ces domaines et qui ont façonnées la société wallonne  telle que nous la connaissons aujourd’hui.

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Biolley Jean-François

Socio-économique, Entreprise

(cinquième génération)

Verviers 06/10/1755, Verviers 12/09/1822

Le fils de Lambertine Simonis et de Jean-François Biolley (IV), dont il porte le parfait patronyme, est l’un des représentants de la 5e génération de cette famille originaire de Sallanches, en Haute-Savoie. Comme ses nombreux frères et sœurs, Jean-François Biolley est né à Verviers où son paternel a pris la tête de la « Maison François Biolley et Fils », manufacture de draps et laine qui connaît une forte croissance tout au long du XVIIIe siècle en bord de Vesdre. À la mort de son père, en 1790, il lui succède à la tête de la « Maison François Biolley et fils ». Il est aussi seigneur de Champlon.

Quand éclatent les troubles révolutionnaires dans la principauté de Liège, à partir de l’été 1789, les usines Biolley restent parmi les rares à fournir encore du travail. Les affaires sont cependant plus difficiles et elles s’aggravent surtout durant l’hiver 1794-1795. Une partie de la famille Biolley part se mettre à l’abri du côté de Hambourg et de Brunswick, mais la République française a besoin que tournent les usines et que mange la population. Très vite, dans une ville de Verviers devenue française, la Maison Biolley reprend ses activités. Sous ce régime français, Jean-François Biolley devient d’ailleurs membre du Conseil général du département de l'Ourthe. Il fait aussi partie de la députation verviétoise qui est envoyée à Liège, le 3 juillet 1803, pour rencontrer Napoléon.

Bénéficiant des bons conseils de son beau-frère, Iwan Simonis, J-F. Biolley est associé à l’engagement d’un mécanicien anglais aux talents prometteurs. Recruté à Hambourg par un des agents commerciaux de Simonis, William Cockerill vient s’installer à Verviers vers 1799 et introduit dans les usines Simonis et Biolley une série de perfectionnements techniques qui donnent un avantage incontestable aux deux drapiers verviétois : très vite, ils contrôlent plus du tiers de la production locale.

Devenu impotent, Jean-François Biolley ne peut cependant plus s’occuper lui-même de l’entreprise familiale qui comptait des centaines d’ouvriers ; il laisse la direction des affaires à sa femme, Marie-Anne Simonis (1758-1831) ; cousine de sa belle-mère, Marie-Anne Simonis est dite de Champlon depuis leur mariage en 1777 ; ils n’auront pas de descendants. C’est Raymond (de) Biolley, son neveu, qui reprendra la direction de l’ensemble de la Maison Biolley en 1831, à la mort de la veuve Simonis qui s’avère une industrielle de grande envergure, dans le sillage de son frère.



Sources

G. DEWALQUE, dans Biographie nationale, 1868, t. II, col. 436-440
Paul LÉON, dans Biographie nationale, t. XLI, col. 24-30

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Biolley Jean-François

Socio-économique, Entreprise

Sallanches (Haute-Savoie) 18/11/1705 (ou 1715), Verviers 02/11/1790

Fils de François de Sales-Alexis Biolley (III), qu’il a accompagné lorsque ce dernier a quitté Sallanches pour faire fortune dans le nord, Jean-François Biolley se retrouve sur les bords de la Vesdre où son oncle, Jean-François-Joseph, a installé une manufacture de draps dès 1725, la maison Biolley et fils. Jean-François Biolley paraît jouer un rôle actif dans le succès de l’entreprise lainière. Ainsi que le rapporte l’historien Pierre Lebrun, dès 1765, Biolley avait trouvé le moyen de teindre dans des couleurs écarlates et ses produits étaient sans concurrence. Gardant pour lui le secret de sa fabrication, il fait construire d'importants bâtiments pour exploiter son savoir-faire et investit des sommes considérables. À la fin de sa vie, la maison  Biolley avait fait faire de grands progrès à la fabrication des draps verviétois ; elle envoyait ses produits jusqu’en Russie et en Orient.

À 42 ans, son mariage avec Lambertine Simonis ressemble à une union mue par des préoccupations économico-financières. Lambertine (1721-1782) est en effet la fille de Henri Simonis (1686-1745), un important bourgeois qui, comme son frère Jacques Joseph (1717-1789), est « négociant » et sera désigné bourgmestre de la « Bonne ville ». Il semble que Jean-François Biolley exerce lui aussi la magistrature verviétoise durant l’année 1771.

Quant au couple Simonis-Biolley, il aura cinq fils entre 1751 et 1760 dont François de Sales-Alexis (V) (1751-1826) et Jean-François (1755-1822). Jean-François Biolley meurt au moment où la première révolution « liégeoise » est en péril. Il n’avait personnellement jamais témoigné beaucoup de sympathie à l’égard des fauteurs de trouble et de leurs idées ; au contraire, il était un adversaire déclaré des Zinck et autre Fyon.

 

Sources

Pierre LEBRUN, L’industrie de la laine à Verviers pendant le XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, Liège, 1948, p. 207
Ginette KURGAN, Serge JAUMAIN, Valérie MONTENS, Dictionnaire des patrons en Belgique, Bruxelles, 1996, p. 145