Guy (Focant)

Centre administratif Cap Nord du SPW

Conçu par l’architecte montois Jean Barthélemy (par ailleurs président des Journées du Patrimoine en Wallonie de 1991 à 2008) au sein de l’Atelier d’urbanisme, de réhabilitation et d’architecture (AURA), le Centre administratif du Ministère de l’Équipement et des Transports - aujourd'hui intégré au sein du Service public de Wallonie - fut édifié derrière les voies de chemin de fer de la gare de Namur à partir d’octobre 1996 et achevé en juin 1999. L’édifice se singularise non seulement parce qu’il fut le plus grand bâtiment public réalisé jusqu’alors en Wallonie, mais aussi par la précision et le raffinement de sa réalisation ainsi que par la modernité de son image. Offrant une superficie totale de 68.000 m² et pouvant accueillir 950 agents autour d’une rue intérieure qui permit de développer un espace interne d’une valeur esthétique manifeste, il réussit le pari d’intégrer une construction d’envergure dans le paysage urbain en tirant parti d’un terrain long et étroit, tout en marquant sa présence – et donc celle de la Région – avec une certaine solennité.

Un ministère pour le XXIe siècle

La création du Ministère de l’Équipement et des Transports (le MET) remonte à l’été 1989, lorsqu’eut lieu le transfert aux Régions (décidé par la loi du 8 août 1988) de nouvelles compétences, principalement en matière d’économie, de transport et d’infrastructure. Quelques 3.500 agents des Travaux publics, des Communications, du Fonds des Routes, des Voies navigables et des Voies aériennes intégrèrent ainsi le 1er janvier 1990 le tout nouveau Ministère, créé alors aux côtés du Ministère de la Région wallonne (le MRW, remontant à 1981). Ceux-ci furent d’abord disséminés dans divers locaux namurois, mais le principe de la construction d’un bâtiment pour les regrouper fut arrêté dès 1990 et le choix du site de la gare fut accepté par l’Exécutif régional dès l’année suivante. Il fallut ensuite deux ans de discussions complexes sous la
houlette du cabinet du Ministre en charge des Implantations Robert Collignon pour que le projet prenne corps et soit approuvé en mai 1994, puis deux ans de démarches diverses encore pour pouvoir entamer le chantier en octobre 1996.

Le démarrage des travaux du Centre administratif du MET suivait d’un peu plus d’un an et demi l’inauguration par le même Robert Collignon, le 13 janvier 1995, du siège central du MRW, à Jambes, entamé en mars 1992. OEuvres des architectes Honoré, Minet, Wargnies, Farla et Greisch, celui-ci accueillait sur le site de l’ancien hôtel de ville de Jambes quelque 800 fonctionnaires dans un bâtiment renouant avec l’inspiration urbanistique et architecturale de la Renaissance, tout en dégageant à ses pieds une nouvelle place de la Wallonie. L’équipe architecturale initiale (Honoré et Farla) avait été constituée en 1984 déjà lorsque le Ministre-Président Jean-Maurice Dehousse avait lancé un concours de promotion pour l’implantation des administrations régionales à Namur, décidée en 1983 mais remise en cause entre 1985 et 1987.

Une cellule provisoire de la future administration wallonne, forte de douze agents, avait été mise en place en mars 1981 et elle s’était efforcée dans un premier temps de regrouper l’ensemble des fonctionnaires alors régionalisés en un lieu unique à Bruxelles, square Frère-Orban. À l’époque, en matière d’outils publics régionaux, seuls des agents de la Société de Développement régional de Wallonie (SDRW) se trouvaient à Namur, soit au siège de celle-ci (rue Grafé, 5), soit au 54 de la rue Godefroid, face à la gare. Ils furent intégrés au MRW en juillet 1983, la SDRW ayant été dissoute. Les premiers transferts de fonctionnaires depuis Bruxelles pour Namur eurent lieu au milieu des années 1980, dans les endroits les plus divers : au-dessus du magasin C&A face à la gare, dans une aile encore inoccupée de l’hôpital (avenue Albert Ier face à la Meuse), dans des immeubles à appartements transformés en bureaux à Jambes, etc. Le Ministre-Président Bernard Anselme put élaborer une politique d’implantations plus cohérente au tournant des années 1980-1990.

Témoignage de Georges Horevoets, ancien Secrétaire général du Ministère de la Région wallonne

"Nous avons également à négocier le transfert des fonctionnaires qui composent le Ministère de la Région wallonne au départ de huit ministères nationaux. Le passage des membres du personnel des ministères nationaux aux ministères des Communautés et des Régions ne se fait pas sans peine. Sur les mille quatre cent cinquante agents qui composent le cadre du Ministère, neuf cents tout au plus sont transférés. Les effectifs ressemblent quelquefois à une armée en déroute. Des pans entiers de l’administration se retrouvent sans le moindre encadrement. De surcroît, ils sont dispersés dans de multiples bâtiments bruxellois. Je me souviens encore que l’on nous avait même transféré des agents... décédés ou retraités. 
Notre tâche consiste alors à rassembler l’ensemble de nos troupes en un lieu unique de Bruxelles : square Frère-Orban, à proximité du Conseil d’État. Pour faire face à une telle situation comme pour éviter tout double emploi, nous proposons à l’Exécutif régional wallon de fusionner le Ministère et la Société de Développement régional pour la Wallonie (S.D.R.W). Ce que malheureusement nous n’avons pas prévu, c’est qu’à la veille de la fusion, l’Exécutif décide de gonfler le cadre de la S.D.R.W, si bien que ce sont cent cinquante-six agents supplémentaires qui rejoignent le Ministère. 
En 1984, l’Exécutif décide d’installer ses services à Namur. D’abord, le cabinet du Ministre-Président, puis l’administration. L’économie, l’environnement, les pouvoirs locaux déménagent ensuite progressivement. Fin 1985, changement de coalition. Melchior Wathelet décide de tout arrêter, allant jusqu’à rappeler les camions en route vers Namur. L’administration doit dès lors vivre avec cette double implantation jusqu’en 1988, moment où l’ensemble des services rejoignent définitivement la capitale wallonne". 
Source: L’Aventure régionale, p. 71-72.

Boulevard du Nord, 8, 5000 Namur

carte

Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

C. Bailleux - DPat - SPW

Immeuble, rue Van Opré n° 89

Petit immeuble de bureaux de trois niveaux construit fin 1984 à l’angle des rues Van Opré et Kefer, dont l’entrée se situe d’ailleurs dans cette dernière.

Le troisième Exécutif de la Région wallonne (juin 1983 – décembre 1985) De gauche à droite et de haut en bas : Philippe Busquin, Jean-Maurice Dehousse, André Damseaux, Valmy Féaux, Jacqueline Mayence et Melchior Wathelet © Collection privée

Abritant aujourd’hui des services de la Communauté française (Allocations d’études et Protection judiciaire), cet immeuble fut édifié à la demande du cabinet du Ministre Valmy Féaux qui venait de s’installer à Namur, pour y loger sa cellule « Emploi ». C’est là qu’eut lieu le 13 mars 1985 la première réunion de l’Exécutif régional en territoire wallon. De 1988 à 1992, la cellule « Implantations » du cabinet du Ministre-Président Bernard Anselme (installé rue Kefer) occupa les lieux.

"L’installation de mon cabinet à Namur m’astreignit à de fréquentes navettes vers Bruxelles où restaient localisés les autres Ministres de la Région wallonne. Les réunions de l’Exécutif se tenaient chez le Ministre-Président au boulevard de l’Empereur tous les mercredis. J’obtins quand même que l’Exécutif se réunisse quelques fois à Namur. La première réunion de l’Exécutif à Namur eut lieu le mercredi 13 mars 1985 dans les locaux fraîchement terminés – l’eau sourdait encore des murs – du bâtiment annexe destiné à la cellule « emploi ». La presse salua cette réunion comme un événement historique : des Ministres wallons qui pour la première fois tenaient leur réunion à Namur". Témoignage de Valmy Féaux, in L’Aventure régionale, p. 97. 

Rue Van Opré 89
5100 Namur

carte

Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009

Dehousse Jean-Maurice

Politique, Député wallon, Ministre wallon

Liège 11/10/1936, Waterloo 07/02/2023

Député wallon : 1980-1981 ; 1981-1985 ; 1985-1987 ; 1988-1991 ; 1992-1995 ; 1995*
Ministre wallon : 1977-1978 ; 1979-1981 ; 1982-1985
3e Ministre-Président wallon 1979-1981 ; 1982-1985

Docteur en Droit de l’Université de Liège (1960), porteur d’une licence spécialisée de l’École des hautes études internationales de l’Université américaine John Hopkins (1961), diplômé des hautes études fédéralistes au Collège universitaire d’Aoste (1963-1964), aspirant FNRS (1962-1965), fils de Fernand Dehousse et de Rita Lejeune, Jean-Maurice Dehousse se forge, dès son plus jeune âge, une conscience wallonne et fédéraliste. 

Secrétaire de la Commission politique préparatoire au congrès de fondation du Mouvement populaire wallon (1961), il milite au sein du groupement créé par André Renard, est membre du PSB et affilié à la FGTB. Assistant à l’Institut d’Études juridiques européennes de l’Université de Liège (1966-1971), professeur à l’École supérieure de Traduction et Interprétations, à Bruxelles (1965-1971), il est délégué syndical FGTB pour le personnel scientifique de l’Université de Liège et se passionne pour les débats qui mobilisent les socialistes wallons tant à Tournai qu’à Verviers (1967). Affecté aux Services de Programmation de la Politique scientifique (décembre 1969), Jean-Maurice Dehousse est détaché au Cabinet de Freddy Terwagne, où il devient chef de Cabinet adjoint du ministre des Relations communautaires (1970). À la suite du décès de ce dernier et du départ de René Godefroid, il devient chef de Cabinet de Fernand Dehousse (1971). 

Sollicité par André Cools, Jean-Maurice Dehousse se porte candidat au scrutin législatif de 1971 dans l’arrondissement de Liège. Il fait son entrée à la Chambre des représentants avec le but de contribuer à la fédéralisation de l’État belge et de faire émerger une Wallonie autonome. S’il ne soutient pas le projet de loi de régionalisation provisoire déposé par Robert Vandekerckhove et François Perin (1974), il en mesure les avancées, plaide en faveur d’un rapprochement entre le Rassemblement wallon et le PSB, et soutient le plan de régionalisation définitive conclu entre le PSB-BSP d’une part, la FGTB de l’autre (1976). Quand le PSB revient dans les majorités (1977-1981), son but est de réaliser la régionalisation définitive.

Ministre de la Culture française dans le gouvernement Tindemans, puis Vanden Boeynants (3 juin 1977-18 décembre 1978), Jean-Maurice Dehousse fait partie du Comité ministériel des Affaires wallonnes présidé par Guy Mathot. C’est à cette époque que sont signés les « fameux » accords Dehousse-Persoons qui établissent des critères solides de répartition budgétaire entre Wallons et Bruxellois francophones dans les matières communautaires. Dans l’entourage d’André Cools, J-M. Dehousse prend part aux longues et incessantes négociations institutionnelles. Dans le gouvernement Martens I qui se met en place en avril 1979, J-M. Dehousse est désigné au poste de ministre de la Région wallonne et est chargé de la présidence du premier Exécutif de la Région wallonne qui, à ce moment, continue de faire partie du gouvernement national, mais remplace le CMAW. En charge de l’Énergie, de la Fonction publique, du Budget et de la Tutelle des communes pour le territoire wallon, il conserve ces fonctions jusqu’au 21 septembre 1981, la régionalisation définitive ayant été adoptée entre-temps (en août 1980). Le député Dehousse peut ainsi siéger dès le 15 octobre 1980 au Conseil régional wallon et soumettre la politique de son gouvernement au contrôle d’une instance législative officielle.

Lors du scrutin du 8 novembre 1981, J-M. Dehousse quitte la Chambre des représentants pour le Sénat où il est un élu direct. Conformément aux accords conclus entre les partis traditionnels, le nouvel Exécutif régional wallon est formé à la proportionnelle et la présidence n’en est attribuée à J-M. Dehousse qu’à partir d’octobre 1982, exerçant depuis décembre 1981 les compétences de l’Économie régionale et de l’Emploi. La mise en place d’un nouveau niveau de pouvoir et de son administration est la priorité de son gouvernement. En 1983, le choix de Namur comme capitale est entériné, avec des dispositions de décentralisations vers les grandes villes wallonnes.

Après le scrutin législatif d’octobre 1985, J-M. Dehousse s’oppose à toute forme de fusion de la Région wallonne au sein de la Communauté ; dès lors, il ne peut y avoir d’accord avec le PRL et le PSC et la formule d’un exécutif wallon à la proportionnelle a fait son temps. Depuis les bancs de l’opposition, le sénateur prépare activement son retour, la crise fouronnaise lui procurant une occasion supplémentaire de réclamer de nouvelles avancées dans la réforme de l’État. 

Le succès électoral du PS, en 1987, laisse présager de grands espoirs que l’accord péniblement négocié durant cent jours au niveau national ne comble pas. La tension atteint des sommets au sein de la Fédération liégeoise du PS, J-M. Dehousse se positionnant contre la participation du PS au gouvernement national. Si sont notamment votées la communautarisation de l’enseignement, la régionalisation de nouvelles compétences et la reconnaissance de Bruxelles comme région-capitale, le clan Dehousse est en rupture avec le clan Cools : le rebelle est « persona non grata » dans les exécutifs mis en place et en conflit ouvert au conseil communal de Liège. Candidat à la succession d’Ed. Close, J-M. Dehousse est privé de la mairie liégeoise par H. Schlitz (janvier 1991), à l’heure où les socialistes wallons se réunissent en congrès à Ans. Dès 1989, il avait vu dans la « cogestion de la Communauté par les deux régions » la solution à suivre : à la Communauté, les compétences qui se plient mal à la discussion régionale (enseignement supérieur, recherche scientifique, RTBF), à la Région tout le reste. Si un consensus intervient entre socialistes wallons, il est loin d’en être de même à Liège.

Les disputes sont permanentes en Cité ardente et l’assassinat d’André Cools (18 juillet 1991), après avoir provoqué stupeur et consternation, n’apaise pas les rivalités. Ce sont les électeurs qui assurent à Jean-Maurice Dehousse la légitimité de son positionnement. Le scrutin de 1991 se transforme en un triomphe personnel, dont bénéficie l’ensemble du PS. Si la présidence du gouvernement wallon lui est interdite par l’auto-désignation de Guy Spitaels, J-M. Dehousse accepte de devenir ministre de la Politique scientifique (8 mars 1992-24 décembre 1994) dans le gouvernement national de Jean-Luc Dehaene qui doit s’atteler à la phase suivante de la réforme de l’État. En charge des Institutions culturelles et scientifiques nationales (Monnaie, Beaux-Arts, etc.), le ministre n’abandonne ni sa ville ni la Wallonie. À la suite de son collègue socialiste bruxellois et ministre des Affaires sociales Philippe Moureaux, il assume pendant plusieurs semaines une fonction officieuse de ministre des affaires régionales wallonnes pour le compte du PS et de gardien de l’application des conclusions du Congrès d’Ans. Comme député, J-M. Dehousse vote les dispositions issues des accords dits de la Saint-Michel et de la Saint-Quentin (1992-1993). La Belgique devient réellement fédérale et la primauté est accordée aux Régions. 

Choisi comme administrateur de l’Institut Destrée (décembre 1991), membre actif de Wallonie Région d’Europe, nommé président de l’asbl Le Grand Liège (mars 1992), le conseiller communal liégeois brigue le maïorat de la Cité Ardente en octobre 1994. La coalition PS (18)-PSC (12) est reconduite et J-M. Dehousse abandonne son portefeuille ministériel pour se consacrer exclusivement à ses nouvelles fonctions maïorales. Il ne renonce pas à son mandat de député et ne résiste pas à l’idée d’être élu directement au Parlement wallon le 21 mai 1995. Il ne manque pas ce rendez-vous historique, obtenant la confiance de l’arrondissement de Liège (et d’un socialiste sur quatre) pour figurer parmi les 75 premiers députés élus directement au Parlement wallon. L’acte est éminemment symbolique. Après avoir participé à la séance inaugurale du nouveau Parlement wallon, le bourgmestre de Liège renonce au mandat de député wallon dès juillet pour se consacrer exclusivement à la Cité ardente.
Cependant, entre Liège et son maïeur, l’histoire d’amour tourne au vinaigre et, en 1999, quand la nomination de Ph. Busquin en tant que Commissaire européen libère son siège au Parlement, Jean-Maurice Dehousse, premier suppléant, choisit de démissionner de ses fonctions de bourgmestre de la ville de Liège et d’opter pour l’hémicycle européen (1999-2004). Dans le même temps, il pose sa candidature à la présidence du PS, avec un programme qu’il veut résolument de gauche. La première élection d’Elio Di Rupo à la présidence du PS, la première au suffrage universel des membres, ne souffre cependant d’aucune discussion.

Eurodéputé, J-M. Dehousse est amené à travailler à la préparation de textes fondamentaux pour la consolidation de la construction européenne. Partisan d’une Charte européenne, il déplore l’absence « d’Europe sociale » dans le texte de la Constitution européenne qui est soumise à ratification et mène résolument bataille contre son adoption. Après cinq années de travail parlementaire tant à Bruxelles qu’à Strasbourg, Jean-Maurice Dehousse n’est plus candidat aux élections européennes du 13 juin 2004. Candidat aux élections communales du 8 octobre 2006, il n’est pas réélu et quitte le Conseil communal liégeois au terme de 30 années d’activité municipale.

Sources

Cfr Encyclopédie du Mouvement wallon, Parlementaires et ministres de la Wallonie (1974-2009), t. IV, Namur, Institut Destrée, 2010, p. 163-168

Mandats politiques

Député (1971-1981)
Conseiller communal de Liège (1977-2006)
Ministre de la Culture française (1977-1978)
Membre du Comité ministériel des Affaires wallonnes (1977-1978)
Ministre de la Région wallonne (1979-1981)
Président des cinq Exécutifs régionaux wallons au sein des gouvernements Martens et Eyskens (1979-1981)
Membre du Conseil régional wallon (1980-1981)
Sénateur (1981-1991)
Membre du Conseil régional wallon (1981-1991)
Ministre de l’Exécutif régional wallon (1981-1985)
Président de l’Exécutif régional wallon (1982-1985)
Député (1992-1995)
Membre du Parlement wallon (1992-1995)
Ministre fédéral (1992-1994)
Bourgmestre de Liège (1995-1999)
Député wallon (1995)
Député européen (1999-2004)