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Maison natale de Jean-Joseph Fyon

Cet édifice construit au début du XVIIIe siècle est de style Régence. Il s’agit d’une des belles constructions verviétoises de l’époque, caractérisée par l’usage du linteau appareillé, la présence de corbeaux apparents, d’un fronton triangulaire et d’un grand porche donnant sur une cour intérieure.

Cet immeuble fut la propriété d’Edmond Fyon, drapier cossu et bourgmestre de Verviers, et ensuite de son fils aîné.

Le frère de ce dernier, Jean-Joseph, entra lui aussi dans l’histoire mais pour d’autres raisons. Né dans cette maison en 1745, Jean Lambert Joseph Fyon entre tôt dans la vie politique verviétoise : il est conseiller en 1769 puis bourgmestre à deux reprises de 1772 à 1774 et de 1777 à 1778. Sous l’Ancien Régime, il est également maître des postes impériales.

Au moment de la Révolution liégeoise de 1789, Fyon s’érige en représentant de l’aile radicale du mouvement et parvient à se faire élire à nouveau bourgmestre ; il inaugure ainsi une carrière politique et militaire qui le conduira dans les plus hautes sphères du pouvoir. Devant l’intervention des troupes impériales dans le marquisat de Franchimont, il est nommé colonel du 2e régiment d’infanterie des forces liégeoises le 26 avril 1790.

Après la première restauration du prince-évêque, il s’exile à Paris où il prend la tête du « comité des Belges et des Liégeois réunis ». En 1792, il fait partie des troupes de La Fayette et puis entre à Liège avec le général Dumouriez. Il poursuit sa carrière militaire au sein de l’armée républicaine jusqu’en septembre 1793. Le 4 décembre de la même année, il est arrêté pour conspiration contre la République et interné à Saint-Lazare. Libéré grâce à l’aide de Bassenge et Robespierre, il est incarcéré une seconde fois entre avril et juillet 1794.

Après l’annexion de la principauté de Liège, il est élu député du département de l’Ourthe au conseil des Anciens. Resté fidèle à ses convictions révolutionnaires, il s’oppose au Directoire et à Napoléon, refusant de voir le régime changer à nouveau. Inscrit sur la liste de proscription en 1801, il rentre sur ses terres et décède à Liège le 2 septembre 1816.

Thier-Mère-Dieu 18
4800 Verviers

carte

Classée comme monument le 4 octobre 1974

Frédéric MARCHESANI, 2014

© La révolution liégeoise du 18 août 1789 - Gravue d'A. Weber

Fyon Jean Joseph

Révolutions

Verviers 1745, Liège 02/09/1816


Descendant d’une famille d’industriels actifs dans le marquisat de Franchimont et impliquée dans la vie de la cité, tant à Verviers qu’à Liège, fils du fabriquant lainier Edmond Fyon, Jean Joseph Fyon jouit très tôt d’une forte popularité qui le conduit à s’occuper à son tour de la chose publique. Conseiller de Régence en 1770 quand son père exerce la magistrature au moins pour la 3e fois, il devient l’un des deux bourgmestres de Verviers durant les années 1772 et 1773, ainsi qu’en 1777-1778. Par la suite, veuf en 1779 au moment où il est le père de sept filles en bas âge, Jean Joseph Fyon paraît surtout occupé à assumer sa charge de maître des postes impériales, à Verviers, succédant à Pascal Pirons, avant d’être démis de ses fonctions en raison « d’erreurs de gestion » (1776-1791). En litige de longue date contre certaines décisions du prince-évêque devant la Chambre impériale de Wetzlaer, son hostilité à l’égard du prince-évêque Hoensbroeck se nourrit volontiers des idées nouvelles portées dans le pays de Liège. Selon la légende qui entoure le personnage, avant même le 18 août 1789, Fyon paradait dans les rues, entouré d’une foule parée de cocardes franchimontoises, lui dressant une haie d’honneur, sous les cris de « Vive Fyon ! Vive la liberté ! ».

Assurément soutenu par une bande à sa dévotion, Fyon s’empare du pouvoir par la force, le 18 août 1789 et, acclamé par la foule, prend la tête de la Magistrature verviétoise, en même temps que son ami Thomas de Biolley. Lors de la première séance du Congrès de Polleur, où il siège comme délégué de Verviers, Jean Joseph Fyon est choisi à la présidence, avant de laisser à de plus convaincus la conduite des travaux. Il en va de même à l’assemblée des bonnes villes réunies à Liège, où il a été nommé député de Verviers. En juillet 1790, avec Dethier, il constitue la Société des révolutionnaires franchimontois, mais sans prendre part à ses travaux. Par contre, il se montre davantage assidu lorsqu’un bataillon de volontaires franchimontois prend les armes ; éphémère commandant (mai 1790), il est nommé colonel de l’un des deux régiments de l’armée « nationale » liégeoise et prend part aux expéditions dans le Limbourg face aux forces « exécutrices ». Il ne peut cependant empêcher le retour du prince-évêque, début 1791, et son rôle en vue – ainsi que des aspects peu glorieux – le place au premier rang des bannis : tous ses biens sont confisqués.

Réfugié à Paris, Jean Joseph Fyon se mêle aux cercles politiques qui préparent de nouveaux plans. Membre du Comité des Belges et Liégeois réunis, il rejoint ensuite le Comité révolutionnaire des Belges et Liégeois réunis, mais il est davantage enclin à la bagarre qu’aux débats d’idées. Rentré au pays de Liège après le succès de Dumouriez, il reçoit le commandement militaire du pays de Liège et est élu membre de la convention nationale (20 décembre 1792). Général de brigade à la tête de la Légion liégeoise, il reprend les armes, ne peut éviter la seconde restauration autrichienne (printemps 1793) et se retrouve réfugié à Paris, repris dans le tourbillon politique avec ses « amis » franchimontois. La zizanie s’installe pourtant dans leurs rangs et, loin de partager l’idée d’une annexion à la France, Fyon rallie le parti dit des modérés, installant une haine définitive avec ses adversaires franchimontois. Fin 1793 et en avril 1794, Fyon connaît même la prison, victime des intrigues liégeo-liégeoises à Paris, et accusé de conspiration. Hyacinthe Fabry n’hésite pas à le qualifier de « colonel assassin ».

Ayant disparu des cercles politiques au printemps 1794, celui qui est alors surnommé avec exagération le « général Fyon » réapparaît sur ses terres liégeoises au lendemain de l’absorption de la principauté et des Pays-Bas autrichiens au sein de la République (1er octobre 1795) et est choisi comme député du département de l’Ourthe au Conseil des Anciens, lointain ancêtre du Sénat qui tient ses réunions à Paris. Cependant, Fyon n’en a pas fini avec les problèmes. Considéré comme trop montagnard pour certains, il est soupçonné par d’autres de tremper dans la « Conjuration des égaux » (mai 1796) et dans l’affaire dite du camp de Grenelle (septembre 1796), conduite par Gracchus Babeuf, chez qui l’abolition de la propriété individuelle est une priorité. Si les idées de Babeuf peuvent être rapprochées de la Déclaration des droits de l’homme du Congrès de Polleur qui se distinguait de la Déclaration française de 1789 par l’absence d’un 17e article, celui consacrant, en France, la propriété privée comme droit inviolable et sacré, les idées de J-J. Fyon apparaissent moins radicales. Dans l’entourage de Babeuf, on considérait « Fyon vendu aux ex-conventionnels ; Fyon est un modéré ; c’est un homme amphibie, on ne sait pas ce qu’il est » (Charles Germain, cité par RIVIALE, p. 167). Pressenti comme militaire pour encadrer le soulèvement espéré, le général de brigade Fyon échappe de justesse à une condamnation lors du procès de Babeuf, son cas étant renvoyé à plus tard. Il est finalement acquitté, mais ne récupère pas son mandat au Conseil des Anciens.

Retrouvant du service actif comme chef de bataillon dans la Légion des Francs du Nord (octobre 1799), Fyon demeure étiqueté « jacobins » et, après l'attentat de la rue Saint-Nicaise (24 décembre 1800), il est repris sur la liste des proscrits que Bonaparte, miraculeux rescapé, fait dresser, convaincu que la « conspiration de la machine infernale » est l’œuvre de ceux qui contestent son pouvoir personnel. Bien que l’implication des Chouans soit rapidement prouvée, le premier consul Bonaparte maintient sa mesure contre les républicains de gauche et Fyon figure sur la liste des 133 proscrits élaborée par Fouché. Il semblerait avoir obtenu un passeport pour sortir de France et aurait ainsi échappé à une déportation qui lui aurait été funeste.

 

Sources

Paul HARSIN, La Révolution liégeoise de 1789, Bruxelles, Renaissance du Livre, 1954, coll. Notre Passé, p. 98, 119

Henri PIRENNE, dans Biographie nationale, t. VII, col. 397-402

Liste des bourgmestres de Verviers de 1650 à nos jours, selon Detrooz, complétée jusqu’en 2001 (cfr http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:jHB_nmF2tLEJ:ecolescommunales.verviers.be/tourisme/canevas/Chap01_Pages/personnalites/09/bourgmestres.doc+&cd=2&hl=fr&ct=clnk&gl=be) (s.v. avril 2013)

Pierre LEBRUN, L’industrie de la laine à Verviers pendant le XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, Liège, 1948, p. 123

Philippe RIVIALE, Le procès de Gracchus Babeuf devant la Haute cour de Vendôme, ou La vertu coupable, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 166-170, 255

Augustin GURDAL, Jean-Joseph Fyon et son temps, Verviers, P. Féguenne, 1931

Augustin GURDAL, dans BSVAH, vol. 26, 1933, p. 73-76

Léon LECONTE, Les événements militaires et les troupes de la Révolution liégeoise (1789-1791), dans Bulletin de l’Institut archéologique liégeois, Liège, 1932, t. LVI, p. 4-410

Adolphe BORGNET, Histoire de la révolution liégeoise de 1789, de 1785 à 1795, d’après des documents inédits, Liège, 1865, t. II

Jean DESTREM, Les déportations du consulat et de l’empire d’après des documents inédits, Paris, 1885, en particulier la note qui se trouve dans l’index
 

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Ancienne maison Fyon

Ce bel édifice construit en style Régence au début du 18e siècle est une des belles constructions verviétoises de l’époque, caractérisée par l’usage du linteau appareillé, la présence d’un fronton triangulaire et d’un grand porche donnant sur une cour intérieure. Cet immeuble fut la propriété d’Edmond Fyon, drapier cossu et bourgmestre de Verviers, et ensuite de son fils aîné. 

Le frère de ce dernier, Jean-Joseph, entra lui aussi dans l’histoire mais pour d’autres raisons. Né dans cette maison en 1745, Jean-Joseph Fyon entre tôt dans la vie politique : il est conseiller en 1769 puis bourgmestre à deux reprises de 1772 à 1774 et de 1777 à 1778. Sous l’Ancien Régime, il est également maître des postes impériales. Au moment de la Révolution liégeoise de 1789, il s’érige en représentant de l’aile radicale du mouvement et parvient à se faire élire à nouveau bourgmestre ; il inaugure ainsi une carrière militaire et politique qui le conduit dans les hautes sphères du pouvoir. 

En 1791, il s’exile à Paris où il prend la tête du « comité des Belges et des Liégeois réunis ». En 1792, il entre à Liège avec les troupes du général Dumouriez et poursuit durant un an sa carrière au sein de l’armée républicaine. Après l’annexion de la principauté de Liège à la France en 1795, il est élu député du département de l’Ourthe au Conseil des Anciens mais, après le coup d’État de Napoléon, il revient sur ses terres et meurt à Verviers en 1816.

Thier-Mère-Dieu 18
4800 Verviers

carte

Classée comme monument le 4 octobre 1974

Institut du Patrimoine wallon