Jo Van Hove

Église Notre-Dame du Travail à Bray

Érigée en 1932 selon les plans de l’architecte Henri Balthazar, l’église Notre-Dame du Travail est intimement liée aux charbonnages du Levant de Mons. Cette exploitation industrielle, qui a fonctionné entre 1911 et 1949, possédait des fours à coke, une petite centrale électrique et un charbonnage. Il reste de nos jours de cette exploitation passée quelques habitations ouvrières, plusieurs terrils ayant modifié le paysage et cette église de style moderniste et Art déco. L’édifice a été érigé grâce aux fonds collectés au cours d’une tombola nationale promue par l’abbé Bondroit. Elle possède des fondations en béton armé et des murs en béton maigre coulé dans des coffrages de 3 à 4 mètres. 

Les façades sont décorées de sculptures réalisées par Joseph Gillain, peintre, graveur, orfèvre et dinandier qui connut également un grand succès en tant qu’auteur de bande dessinée sous le pseudonyme de Jijé. Au-dessus du porche d’entrée se trouve un bas-relief représentant sainte Thérèse de Lisieux et, de part et d’autre, deux statues figurant un mineur et sa famille. L’église se caractérise par son imposant campanile polygonal formant une croix situé à l’angle du sanctuaire. 

À l’intérieur, bon nombre de détails Art déco ajoutent une touche supplémentaire à l’atmosphère imposante des lieux : chandelier en laiton, tabernacles, grilles et vitraux. Intéressante à de nombreux égards, l’église Notre-Dame du Travail est un exemple rare d’un édifice religieux Art déco exploitant les techniques du béton armé.

Place du Levant 7
7130 Bray

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Classement comme monument le 6 avril 2012

Institut du Patrimoine wallon

Arts populaires par excellence, la musique, le cinéma et la bande-dessinée ont vu plusieurs artistes wallons s’imposer comme des références dans leur domaine. D'Eugène Ysaye aux frères Dardenne en passant par l’école de Marcinelle en bande-dessinée, retrouvez dans cette leçon la diversité et la créativité d’auteurs qui ont donné leurs lettres de noblesse à ces disciplines.

© Sofam

Paape Eddy né Edouard Paape

Culture, Bande dessinée

Grivegnée  03/07/1920, Bruxelles 12/05/2012

Peut-être moins connu que Jijé ou Tillieux, que Greg ou Hubinon, Eddy Paape occupe pourtant une place majeure dans le monde de la bande dessinée notamment pour ses Histoires de l’Oncle Paul ou les aventures de Marc Dacier et celles de Luc Orient. Grand travailleur diplômé de l’Institut Saint-Luc, où il étudia la peinture, Eddy Paape a surtout appris sur le tas, ayant eu la chance de croiser la route de jeunes alors prometteurs comme Franquin, Morris ou Peyo et d’être épaulé par Jijé et Hubinon.

Entré chez Spirou en 1946, Eddy Paape reçoit d’emblée la lourde responsabilité de remplacer Jijé dans le dessin des aventures de Jean Valhardi, mission à laquelle il s’attèle jusqu’en 1954 : sur des scénarios de Jean-Michel Charlier, il emmène Valhardi dans des aventures exceptionnelles, notamment Le Château maudit, Le Rayon Super-Gamma et La Machine à conquérir le monde. Dans le même temps, Paape se cache sous le pseudonyme de Millpatt dans les colonnes de La Libre Belgique  (1953-1960).

À partir de 1951, Eddy Paape crée le personnage de L’Oncle Paul qui racontera une centaine d’Histoires pendant 15 ans. Par la suite, de nombreux autres dessinateurs reprendront la série de ce disciple de l’École de Marcinelle. Créatif à l’imagination fertile, Eddy Paape donne ensuite naissance à André Lefort dans Risque-Tout, puis à Marc Dacier dans Spirou (1958) : jusqu’en 1970, le globe-trotter connaîtra treize aventures.

À côté des personnages de bandes dessinées, Eddy Paape introduit dans Spirou des genres nouveaux : sur des textes d’Octave Joly, il réalise une biographie de Winston Churchill (1958-1959) ; dans le même temps, il est le responsable d’un espace du magazine consacré aux jeux : de 1952 à 1963, Le coin des dégourdis est animé par les personnages de Geai et Mogliw, puis vient une page didactique intitulée Le coin des curieux. Dans les années 1960, Eddy Paape poursuit ce genre particulier dans les pages de Pilote sous les pseudonymes de Milpatt et Peli.

Après avoir réalisé une série humoristique, Pathos et Setungac, avec Hubinon, dans Record (1963-1964), Paape quittera définitivement l’école de Marcinelle pour rejoindre l’équipe de Tintin (1965) : après quelques récits sous le pseudonyme de Forget, il donne naissance à Luc Orient (1966) ; rédacteur en chef du Journal de Tintin et animateur de l’École de Bruxelles, Greg est au scénario de cette série à succès : 18 titres sortent de 1969 à 1994 aux éditions du Lombard. Associé à Dûchateau, Delporte, Roze et Andréas notamment, Paape réalise d’autres séries avant de lancer, en 1988, la première de la série Les Jardins de la Peur, sur des scénarios de Jean Dufaux.

Artiste du Neuvième Art, Eddy Paape devient, en 1969, l’un des tout premiers professeurs de bandes dessinées au monde. Il enseigne à Saint-Luc Bruxelles d’abord (1969-1976), à l’Académie de Saint-Gilles ensuite (1975-1985). Parmi ses étudiants, et sans être exhaustif, certains auront plus tard une signature plus célèbre que leur maître : Philippe Berthet, Cossu, Andreas, Schuiten, voire Plantu.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Alain DE KUYSSCHE, Eddy Paape, la passion de la page d’après, Lombard, 2008
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. III, p. 344-349
Francis MATTHYS, Eddy Paape, marathonien de la BD, dans La Libre, 14 mai 2012
Daniel COUVREUR, Eddy Paape, créateur de Luc Orient et premier professeur de BD en Europe, dans Le Soir, 12 mai 2012

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Spirou

Culture, Bande dessinée

Marcinelle 21/04/1938

C’est en 1938 que l’éditeur Jean Dupuis lance le Journal de Spirou « le premier vrai magazine populaire européen consacré à la bande dessinée » (Aucquier). Depuis Marcinelle, et sous le crayon de Rob-Vel d’abord, le petit groom vêtu d’un costume à boutons d’or va connaître des aventures extraordinaires, entouré de ses compagnons Fantasio, Spip et autre comte de Champignac, affrontant notamment le terrible Zorglub. L’univers de Spirou est étoffé par l’imagination de Jijé puis surtout de Franquin qui fait notamment apparaître le Marsupilami. Portant un nom wallon signifiant à la fois « écureuil » et « gamin vif et espiègle », Spirou connaît d’autres animateurs avec Fournier, Yves Chaland, Nic et Cauvin, Tome et Janry, Morvan et Munuera, Yoann et Vehlmann. Dans le magazine qui porte son nom, c’est un véritable vivier de la bande dessinée qui traverse les générations depuis 1938. Malgré les obstacles et les difficultés, Le Journal de Spirou poursuit son existence. Mais il ne ressemble plus guère à ses débuts, au temps de l’étonnant Jean Dupuis. 

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Gillain Joseph

Culture, Bande dessinée

Gedinne 13/01/1914, Versailles 19/06/1980

Les héros de bande dessinée se sont multipliés sous le crayon inspiré de Joseph Gillain. Dans son univers se croisent ainsi Jojo, Blondin et Cirage, Trinet et Trinette, Jean Valhardi, Jerry Spring, Tanguy et Laverdure, et bien d’autres auxquels il convient d’ajouter des biographies presque didactiques (Don Bosco et Christophe Colomb). Avant de se lancer dans ce genre nouveau, Gillain s’était fait peintre, graveur et sculpteur. Formé par Alex Daoust dès son plus âge (1920), le jeune Gillain suit trois ans les cours des métiers d’art à Maredsous avant de gagner l’Université du Travail à Charleroi et l’institut de la Cambre. En fait, il n’y a pas d’école pour la bande dessinée ; dès lors, Gillain va l’inventer, à sa manière. Après ses premiers pas dans un journal catholique namurois, Le Croisé, où il anime le personnage de Jojo, il entre dans l’équipe du tout nouveau Journal de Spirou où il reprendra brièvement le personnage du groom à Rob-Vel, et créera Fantasio. L’École de Marcinelle est en train de naître. Jijé en sera l’âme, aux côtés de Franquin, Morris, Tillieux, Giraud et Maltaite notamment. Entré à Pilote à la fin des années 1960, Jijé participe à l’âge d’or de la bande dessinée et à sa transformation en véritable neuvième art. À l’entame du XXIe siècle, un Musée Jijé connaît une existence éphémère.

TOUSSAINT Jacques (dir.), Jijé... Un artiste wallon au service de la bande dessinée, Centre d’archéologie, d’art et d’histoire de Jambes, Namur, 2010
http://www.dupuis.com/catalogue/FR/au/83/jije.html
MARTENS Thierry, Nouvelle Biographie nationale, 1999, t. V, p. 175-177
La Wallonie à l’aube du XXIe siècle, Namur, Institut Destrée, Institut pour un développement durable, 2005
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. III, p. 347-348, 353



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Daoust Alex

Culture, Sculpture, Gravure


Bioul 5/06/1886, Champion 7/01/1947


Sculpteur et dessinateur au talent aussi grand que sa modestie, Alex Daoust a marqué une génération de jeunes Dinantais durant l’Entre-deux-Guerres par son enseignement, et l’histoire de la sculpture de Wallonie par plusieurs réalisations remarquables.


Dès ses humanités au collège de Belle-Vue à Dinant, Alex Daoust se révèle un dessinateur doué, mais la carrière artistique ne semble pas tenter l’adolescent qui devient professeur de mathématiques à l’Abbaye de Maredsous. Cependant, la rencontre avec l’abbé Dom Pascal qui enseigne le modelage à l’École d’arts décoratifs de l’Abbaye conduit Daoust vers la sculpture. Ses sujets sont d’abord religieux et correspondent à des commandes quand éclate la Grande Guerre. Après l’Armistice, il décroche un diplôme qui lui permet d’enseigner le dessin dans les Écoles moyennes de l’État et, en 1920, il devient professeur de dessin à l’Athénée de Dinant, établissement où il accomplit toute sa carrière (1920-1946). Proche d’Eugène Gillain pour lequel il contribue à l’illustration d’ouvrages (années 1920) et de la revue des Cahiers wallons (1937), il avait notamment été le premier professeur de dessin du jeune Joseph Gillain (en 1924), qui se fera un nom dans la bande dessinée sous le pseudonyme de Jijé. En parallèle, le co-fondateur de l’Université populaire de Dinant enseigne aussi à l’École industrielle de Dinant. Durant toute la période de l’Entre-deux-Guerres, il s’attèle à ressusciter et à rénover l’art de la dinanderie.


Se dégageant du côté « académique » de ses débuts, sa sculpture développe un style plus personnel ; elle est guidée par son amour de la Wallonie, de ses habitants, de ses traditions. Ainsi illustre-t-il plusieurs ouvrages de littérature wallonne. Continuant à sculpter des œuvres d’inspiration personnelle, Daoust répond aussi à des demandes de particuliers ou à des commandes officielles ; destiné à immortaliser l’assaut aussi héroïque que vain de quelques « pantalons rouges » lancés à l’attaque de la Citadelle, son remarquable et imposant (3 mètres) monument L’Assaut, au cimetière français de Dinant, lui ouvre de nouvelles portes (1927). Combinant avec bonheur son esprit mathématique avec son élan artistique, influencé par le cubisme, il se fait un nom avec modestie. Le bas-relief réalisé pour le monument Sebald, à Houffalize, synthétise à la fois ses convictions (chrétiennes, françaises et wallonnes) et son savoir-faire.


Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, outre un bas-relief glorifiant les martyrs des camps d’extermination, il se lance dans un projet qu’il mûrit depuis longtemps : « réaliser un ensemble d’œuvres sculpturales (reliefs, statues) et fusains dont le thème serait d’essence tout à fait wallonne », qu’il intitulerait L’Âme wallonne et qui serait installée à Liège. De ce projet ambitieux, il n’aura l’occasion de réaliser que la partie centrale, « Noël de Wallonie », bas-relief où l’on reconnaît pêle-mêle César Franck, Ysaÿe, Grétry, un prince-évêque, Charlier Jambe de Bois, Henri Simon, Varin, Auguste Donnay, Zénobe Gramme, Nicolas Defrecheux… et bien d’autres comme les marionnettes de Charlemagne, Roland, Tchantchès et Nanèsse, voire encore le cerf miraculeux de saint Hubert, un houilleur, un armurier, une botteresse… sur fond de bâtiments caractéristiques. Un accident mortel prive l’artiste des années de retraite qu’il avait préparées pour mener son projet à bien.

Jean SERVAIS, Le sculpteur Alex Daoust, dans La Vie wallonne, 1947, n°238, p. 81-104
TOUSSAINT J., dans Biographie nationale, t. 44, col. 365-368
Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. III, p. 358-359
Jacques TOUSSAINT et Joseph DEWEZ (dir.), Les Cahiers wallons ont 75 ans. Les relis Namurwès au service de l’identité wallonne, Namur, 2012, p. 82-85

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Charlier Jean-Michel

Culture, Bande dessinée

Liège 30/10/1924, Paris 10/07/1989


C’est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale que Jean-Michel Charlier débarque dans l’équipe du Journal de Spirou. Avec la bienveillante attention de Jijé, le talentueux scénariste y entame sa carrière avec son compère Victor Hubinon. Ensemble, ils vont contribuer à donner ses lettres de noblesse à l’École de Marcinelle avec une série étonnante mettant en évidence les exploits de Buck Danny. Ensuite, dans le magazine Pilote dont il est l’un des fondateurs, Charlier se concentre avec Hubinon pendant dix ans sur l’univers de Barbe Rouge. Auteur prolifique et imaginatif, maîtrisant parfaitement des intrigues complexes et donc passionnantes, Jean-Michel Charlier a servi des scénarios à d’autres grands noms de la BD : Jijé, Uderzo (Tanguy et Laverdure), Jean Giraud (Blueberry), Eddy Paape (Marc Dacier), MiTacq (Patrouille des Castors), Albert Weinberg (Dan Cooper), etc. Quant aux lecteurs de Spirou, ils ne peuvent oublier Les Belles Histoires de l’oncle Paul, jamais égalées.
Dans les aventures d’Achille Talon, Charlier apparaît à diverses reprises sous les traits d’un personnage tapant sur une machine à écrire tout en avalant d’imposants sandwichs. Dans les aventures d’Astérix, Charlier apparaît sous les traits d’un pirate à la barbe rouge.

La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. III
VIDAL Guy, Jean-Michel Charlier : Un réacteur sous la plume, Paris, Dargaud, 1995