L’armée belge en position de paix renforcée (10 mai 1940)

Les années trente, marquées par des tensions croissantes sur le plan international, vont voir se modifier les orientations de la Belgique au point de vue de sa politique étrangère. Aux groupements flamands qui réclament la fin des accords militaires avec la France (Los van Frankrijk !) s’oppose un Mouvement wallon partisan d’un renforcement des accords avec la France, notamment sur le plan économique. Le 6 mars 1936, invoquant le Pacte de Locarno, les gouvernements belge et français signifient la fin de l’accord militaire. Le lendemain, l’armée du Reich réoccupe la rive gauche du Rhin, violant ainsi les articles 42 à 44 du Traité de Versailles et les articles 1 et 2 du Pacte de Locarno, sans provoquer de réactions autres que verbales chez les anciens alliés. Au contraire. Dès l’été 1936, la nouvelle ligne politique de la Belgique sera celle « des mains libres » ou politique d’indépendance, plaçant sur le même pied l’Allemagne hitlérienne et la France du Front populaire, demandant des garanties aux grandes puissances sans être elle-même garante. Au contraire, la position des militants wallons consiste à affirmer que « la Belgique doit assistance à ses garants comme ceux-ci lui doivent assistance en raison même de la communauté d’intérêt et du même souci de liberté et d’indépendance ».
À ces orientations en matière de politique étrangère s’adapte la politique militaire de défense. La critique des dispositions prises avant 1914 conduit à l’établissement de nouveaux plans de défense. Sous la pression flamande, la stratégie consiste à abandonner une politique de défense à la frontière et à se protéger également de la France. Dans une confidence à son conseiller militaire, à l’entame des années ’30, le roi Albert constatait déjà que deux camps s’affrontent désormais sur le terrain de la défense nationale : « pour l’un, tout repose sur l’aide de la France ; l’autre veut le retour au neutralisme ». Fin 1936, la ligne officielle du gouvernement consiste à créer un système militaire belge « qui ne soit tourné contre personne mais qui puisse pivoter suivant les exigences de l’heure » (la défense sur plaque tournante). Pour les parlementaires wallons, les lacunes des fortifications sur la frontière de l’Est ouvrent la voie à l’Allemagne, plaçant la Wallonie en première ligne. Les retards dans la construction d’un fort à Sougné-Remouchamps concentrent toutes les attentions. La politique officielle de neutralité sera appliquée jusqu’au bout et le dispositif militaire restera inchangé, à tel point que le général Van den Bergen, chef de l’état-major général qui, en janvier 1940, avait fait enlever des barricades à la frontière française, sera démis de ses fonctions. Quelques mois plus tard, c’est l’invasion allemande.

Références
HBC359 ; P695 ; VDL54 ; www_cm1940


Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)

La Belgique a cessé d’être neutre (1919-1936)

Après les événements de la période 1914-1918, les territoires rhénans sont occupés par les forces alliées pour une période provisoire. Des troupes françaises, américaines, anglaises et même belges sont chargées du maintien de la paix en Rhénanie, chacun dans une zone déterminée (en 1923, la France suppléera le départ des Américains).
Après l’Armistice, il est apparu difficile que la Belgique conserve son statut de pays neutre, statut imposé par le traité des XXIV Articles (1831-1839). Des négociations ont été menées pour conclure un traité belgo-franco-britannique mais elles échouent. Le 7 septembre 1920, un accord militaire est approuvé par les gouvernements de la France et de la Belgique. Cet accord d’états-majors présente un caractère défensif ; dirigé contre l’Allemagne, il doit jouer dans « le cas d’une agression militaire non provoquée ».
Application de cet accord, les troupes françaises et belges viennent occuper la Ruhr en 1923 et 1924 afin de marquer la désapprobation des deux pays face aux retards du gouvernement de la République de Weimar dans le paiement des dommages de guerre prévus par les traités de Versailles (la France occupe seule d’autres villes). Le soutien ferme initialement consenti par l’Angleterre s’est transformé en démarche de conciliation prenant en compte les difficultés rencontrées par l’Allemagne. Pressentant que les dispositions de Versailles ne seraient pas respectées, la France et la Belgique ont ainsi tenté d’obtenir les réparations dues par la force, en occupant les centres de production de charbon, de fer et d’acier de la vallée de la Ruhr (janvier 1923). Cela provoque de vives tensions au sein de la République de Weimar ; des attentats sont perpétrés contre les troupes belges ; une république rhénane autonome est proclamée à Aix-la-Chapelle (octobre) ; finalement, en 1924, l’ordre est rétabli et les troupes d’occupation finissent par se replier (août 1925). En octobre 1925 est ratifié le Traité de Locarno ou Pacte rhénan entre l’Allemagne, la Belgique, la Grande-Bretagne, la France et l’Italie. Ce texte établit une garantie mutuelle des frontières franco-allemandes et belgo-allemandes ; la Belgique se retrouve donc, à la fois, garantie et garante. En 1930, la Rhénanie est totalement évacuée, cinq ans plus tôt que ne le prévoyait le traité de Versailles.

Référence
DamiA28


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La Belgique de 1839

Ce n’est qu’en 1838 que le roi des Pays-Bas se résout à accepter la situation provoquée par la révolution belge de 1830 et à signer le traité des XXIV articles. La Belgique doit s’acquitter d’une partie importante de la dette des Pays-Bas, même si le principal est antérieur à l'unification de 1815. Parmi les autres articles, le traité de Londres (19 avril 1839) impose à la Belgique un statut de neutralité totale, que garantissent l'Autriche, la France, le Royaume-Uni, la Prusse et la Russie. La Confédération germanique apporte également sa signature aux traités.
Les Pays-Bas conservent le contrôle des bouches de l'Escaut (un droit de péage est imposé jusqu’en 1863) et un accès à Liège par la Meuse. Ils conservent aussi une partie du grand-duché luxembourgeois. Reconnu comme indépendant mais attribué en fief au roi des Pays-Bas (1815), le grand-duché ne parvient pas à se libérer. État membre de la Confédération germanique (1815), dépecé en 1839 pour constituer une partie de la Belgique, et adhérant au Zollverein (1842), il dispose de ses propres institutions, mais il doit encore supporter la présence d’une garnison prussienne dans la citadelle de Luxembourg. En 1867, la France de Napoléon III propose secrètement aux Pays-Bas de racheter le grand-duché, mais quand la transaction est éventée, une crise éclate au cœur de l’Europe. La diplomatie calme le jeu et le grand-duché est reconnu neutre et indépendant (1867).
C’est à la même date que la province néerlandaise de Limbourg perd le titre officiel de duché qui lui avait été attribué en 1839. Entre ces deux dates (1830-1866), le duché de Limbourg a fait aussi partie de la Confédération germanique.

Références
HaHu150 ; Sel146 ; WTcM01 ; WTcM19 ; www_cm1830


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