Code postal
6850

Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Plaque Paul VERLAINE

Plaque commémorative Paul Verlaine, dessinée par l’architecte Jules Ghobert, 26 juin 1932.


« Paliseul ou Jéhonville », Belgique, par Sedan et Bouillon (Verlaine).
Entre Paliseul, Bertrix, Bouillon, Corbion, Sedan et Jéhonville, les références à Paul Verlaine sont nombreuses dans l’espace public, presque autant que les allusions à cette région dans l’œuvre de l’écrivain. « Car (…) Verlaine restait foncièrement attaché au pays de ses aïeux, et l’atmosphère ardennaise est constamment présente au fil de ses écrits, en un jeu continu de miroirs » (CHANTEUX-VAN GOTTOM, p. 10). Les relations entre Paul Verlaine et l’Ardenne wallonne sont intimes. En 1924, Paul Dresse avait été l’un des premiers à établir dans le détail « l’ascendance paternelle ardennaise » de l’écrivain et à mettre en évidence les affinités ardennaises du poète dans son œuvre. Le père Verlaine, Nicolas, est originaire de Bertrix (1798-1865) ; d’autres membres de sa famille résidaient dans la région, dont une de ses tantes (Henriette, épouse Grandjean, 1796-1869) qui avait offert son château de Carlsbourg aux frères des Écoles chrétiennes. Pendant plusieurs étés, entre 1849 et 1873, Paul Verlaine séjourne régulièrement entre la Lesse et la Semois, dans un pays et auprès de gens qui marqueront durablement son imaginaire :

« L’endroit où demeurait ma tante est, à trois lieues de Bouillon, un tout petit chef-lieu de canton, Paliseul […] Un joli site perché, qui corrige l’âpreté un peu des toits trop uniformément en ardoises… » (Croquis de Belgique, 1895).
Né à Metz au hasard des affectations professionnelles de son père, c’est à Paris que Paul Verlaine (1844-1896) grandit ; sa famille s’est installée dans la capitale française après la démission du père Verlaine de la carrière militaire (1851). Mis en pension durant sa scolarité, l’adolescent exprime déjà son mal-être et ne s’attardera pas dans les études. Employé municipal, le jeune Verlaine est surtout attiré par l’écriture : son premier recueil de poésies paraît en 1866, mais un premier amour impossible le tourmente ; alcool et violence altèrent définitivement le comportement de celui qui, coup sur coup, voit son mariage éclater et sa situation professionnelle perdue : il est renvoyé de la mairie parisienne pour avoir soutenu les Communards (1871). Sa relation tumultueuse avec Arthur Rimbaud s’achève à Bruxelles : pour avoir blessé son ami au poignet au cours d’une bagarre violente, il est condamné et privé de liberté dans la prison de Bruxelles puis à celle de Mons jusqu’en 1875. Au terme de sa peine réduite, il a retrouvé la foi catholique et il devient professeur. Après avoir donné des cours en Grande-Bretagne, il atterrit à Rethel où il entretient une relation singulière avec l’un de ses élèves (1877-1883) qui se termine à nouveau tragiquement. Bien que reconnu comme un maître, voire comme un précurseur par les défenseurs du symbolisme, Verlaine ne s’en remettra jamais, décédant à Paris d’une congestion pulmonaire à l’âge de 51 ans. Désigné « Prince des Poètes » en 1894, le poète maudit, auteur en 1895 de Croquis de Belgique, laisse une œuvre majeure et son souvenir fait l’objet d’une attention toute particulière dans le pays où il vécut une partie de sa jeunesse.
Sur un côté de la future « Maison Paul Verlaine », qui appartenait alors à Paul Poncelet, notaire et bourgmestre de Saint-Hubert, à l’angle de la rue Paul Verlaine et de la petite ruelle qui revient vers la Grand Place de Paliseul, une plaque rappelle une période importante de la vie de l’entité :


ICI
JOUA
PAUL
VERLAINE


PLACÉ PAR LES ÉCRIVAINS ARDENNAIS
LE 26 JUIN 1932


L’initiative de cette plaque sobrement décorée en revient aux Écrivains ardennais, coutumiers de ce genre de démarches. Lors de l’inauguration, de nombreuses personnalités officielles avaient fait le déplacement, dont Jules Poncelet, député du Luxembourg et président de la Chambre en exercice, Jules Destrée en tant que représentant officiel de l’Académie de Langue et de Littérature françaises de Belgique, et le Consul de France Fernand Sarrien. Autour de Thomas Braun et de très nombreux écrivains ardennais et d’ailleurs (comme Marcel Thiry ou Olympe Gilbart), les autorités locales représentées par le bourgmestre Poncelet avaient également réussi à faire venir différentes personnalités françaises (dont l’éditeur des œuvres de Verlaine). Outre la lecture de poèmes, Thomas Braun, J-P. Vaillant et Henri d’Acremont avaient préparé chacun un discours, tandis que Jules Destrée s’adressa au nombreux public en une brève improvisation.

Dessinée par l’architecte Jules Ghobert, la plaque fournie par les Ardoisières de Martelange est une allusion à la proximité de l’endroit où le jeune Paul Verlaine venait jouer avec Hector Perot (de 12 ans son aîné), dont le père Joseph, percepteur des postes, fut bourgmestre de Paliseul : les Perot habitaient la maison aujourd’hui appelée Paul Verlaine. Elle évoque aussi l’amitié de Verlaine avec le jeune Jean-Baptiste Dewez (1841-1899) qui deviendra le directeur du collège Juste Lipse à Louvain (1871). Quant à la matière de la plaque commémorative, il s’agit de schiste d’Ardenne, évocation à la fois des ardoises d’écriture des écoliers de cette époque et des ardoises de couverture des toits typiques de la région. Au milieu des années 1970, quand est inauguré un complexe culturel avec salles polyvalentes, une inscription est placée au-dessus de la porte d’entrée principale. Il s’agit de cette phrase de Verlaine :


au pays de mon père
on voit
des bois sans nombre…


Si Paul Verlaine est définitivement attaché à la littérature de la France et si l’Ardenne occupe une place indéniable dans son œuvre, il est une hypothèse formulée par Guy Gilquin sur l’influence qu’a pu avoir Verlaine sur l’émergence d’un milieu artistique dans cette partie de la Wallonie, et pas seulement sur Albert Raty : « Avec ses vers fameux, Paul Verlaine n’a-t-il pas été l’élément qui fit prendre conscience aux artistes et poètes wallons de leur existence et du potentiel inspirateur que constituait cette région éloignée des centres urbains ? » (GILQUIN, cité par CHANTEUX-VAN GOTTOM, p. 13).
Quant à Jules Ghobert (Wéris 1881-Bruxelles 1971), après sa formation en architecture à Saint-Luc Liège, il s’adonne tant à la peinture, à la lithographie qu’à l’architecture, cette dernière étant son activité professionnelle principale. Auteur d’un inventaire des constructions rurales et traditionnelles (1914), il signe les plans de nombreuses habitations privées, tant à Bruxelles qu’à Louvain pour l’essentiel, au lendemain de la Grande Guerre. Cet ami de Charles Counhaye partage avec le Verviétois le goût du monumental et du luminisme et, comme lui, est rattaché à l’école du fauvisme brabançon. Ensemble, il contribue à l’aménagement intérieur de l’abbaye de Tongerlo (1920-1935), tandis que Ghobert réalise aussi des commandes de monuments commémoratifs, comme à Paliseul, ou funéraires. Ayant participé sans succès à plusieurs concours internationaux d’architecture, il remporte, en 1937, celui de l’aménagement du complexe du Mont-des-Arts, à Bruxelles. Après moults péripéties dues à l’indécision des autorités, il collabore avec Maurice Houyoux pour établir les plans définitifs d’un projet qui évolue sans cesse et qui occupera trente années de sa carrière : les travaux sont exécutés entre 1954 et 1969. L’ensemble comprendra finalement bibliothèque, palais des congrès, cabinet des Estampes et archives et marquera durablement le cœur de Bruxelles.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse 
La Vie wallonne, décembre 1922, n°28
Paul DRESSE, dans Les Cahiers mosains, 15 février 1924, n°1, p. 9-11
Danielle CHANTEUX, Paul Verlaine et l’Ardenne : regard singulier d’enfance, Neufchâteau, Weyrich, 2011
Jean ISTACE, Les séjours de Paul Verlaine à Paliseul, dans Terres d’Herbeumont à Orchimont, bulletin n°39, 2013, p. 16-28
La Grive, octobre 1932, cité par Jean ISTACE
Exposition « Verlaine, Ardennais de souche et de cœur », et vidéo du Gsara, cfr http://gsara.tv/outils/verlaine-adrennais-de-souche-et-de-coeur/ 
http://www.tvlux.be/video/paliseul-paul-verlaine-et-l-ardenne_10040.html
http://balat.kikirpa.be/peintres/Detail_notice.php?id=2526 (s.v. juillet 2015)
Exposition Verlaine, cellule n° 252. Turbulences poétiques, Mons, capitale culturelle 2015, musée des beaux-arts 2015-2016
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 622

 

Plaque Paul Verlaine (Paliseul)

Rue Paul Verlaine
6850 Paliseul

carte

Paul Delforge

IPW

Pont Marie-Thérèse

Situé au nord du village, à cheval sur les communes de Paliseul et Libin, un pont franchit la Lesse sur l’ancienne route Bouillon-Liège qui, sous l’Ancien Régime, reliait la principauté de Liège et les Pays-Bas autrichiens. Cette remarquable construction en moellons de schiste classée le 12 mai 1989 comporte quatre arches surbaissées et un parapet coiffé de pierres de taille en demi-lunes. 

Il est élargi de chaque côté afin de permettre de canaliser les animaux avant de franchir la rivière. En amont, trois becs sont situés entre les arches afin d’orienter les eaux vers les quatre ouvertures. L’ouvrage doit son nom, selon la tradition, à l’impératrice Marie-Thérèse qui l’aurait fait construire à la suite d’un accident dont elle fut victime en franchissant la Lesse à cheval. Ce pont a longtemps facilité le passage de la route reliant Paris à Liège.

carte

Frédéric MARCHESANI, 2013

© KIK-IRPA, Bruxelles

Maison Istace-Dambour

Parmi les cheminées de la demeure, une très belle taque de foyer en fonte retient l’attention. 

Placée dans une cheminé en bois sculpté datée de 1700-1710, une taque millésimée 1559 porte les armes impériales. 

Au centre de la composition, un écu représente l’aigle bicéphale surmontée d’une couronne royale entourée du soleil et de la lune et supporté de part et d’autre par deux griffons couronnés. 

Un bandeau au-dessus de la composition date l’œuvre « AN[N]O 1559 ». 

La présence dans une demeure du duché de Luxembourg d’une taque aux armes impériales autrichiennes est des plus originales pour l’époque. 

En 1559, le duché est possession de la couronne espagnole, depuis trois ans entre les mains du roi Philippe II, fils de Charles Quint. 

L’empereur du Saint-Empire, dont les armes figurent ici à Paliseul est à ce moment Ferdinand Ier, l’oncle du roi d’Espagne, désigné par son frère Charles Quint à sa succession en 1556 au moment de son abdication. Il est à l’origine de la branche autrichienne des Habsbourgs.

6850 Paliseul

carte

Frédéric MARCHESANI, 2013