Compère Gaston

Culture, Lettres wallonnes, Poésie

Conjoux 27/11/1924, Uccle 14/07/2008

Romancier, poète, compositeur, dramaturge, nouvelliste et traducteur, Gaston Compère, véritable homme-orchestre, définit son parcours comme semé de rencontres déterminantes : avec le compositeur Pierre Froidebise, en 1941, avec des « professeurs admirables », le Père Stinglhamber, en 1942, Servais Etienne, en 1945, « en ce qui regarde l’éducation à la sensibilité intuitive [et] l’explication de textes ». 

D’autres découvertes suscitent son enthousiasme : celles de Jean-Sébastien Bach, de Shakespeare, des lyriques grecs et de Virgile, de Schopenhauer, de Dante, de Maeterlinck, de Marcel Thiry, et de l’éditeur parisien Pierre Belfond qui fait confiance à l’écrivain wallon quand il veut publier ses premières nouvelles, Sept machines à rêver, et son premier roman Le fort de Gleisse, au début des années 1970. 

À l’époque, il n’avait publié que quelques recueils de poésie, dont Géométrie de l’absence. Une vingtaine d’autres suivront, ainsi qu’une quinzaine de romans, une dizaine de nouvelles, et encore des essais, des pièces de théâtre, des biographies, des livres de souvenir et des adaptations d’œuvres dramatiques surtout anglaises. Son roman Je soussigné Charles le Téméraire, duc de Bourgogne (1985) est sans doute son œuvre majeure.

Doué par la musique comme pour les études, étudiant à l’Athénée de Ciney puis au Collège Saint-Quirin de Huy, où il suit des humanités classiques malgré les années de la seconde occupation allemande, Gaston Compère s’inscrit en Philologie romane aux Facultés de Namur, avant d’achever ses licences à l’Université de Liège (1947). 

Comme beaucoup de jeunes professeurs de français, il visite la Wallonie et apprend à la connaître au travers de ses établissements scolaires : professeur à l’Athénée de Rochefort puis à celui Chênée jusqu’en 1952, il reste un an à l’Athénée d’Ixelles, avant d’être désigné à l’Athénée de Liège (1953-1954). Parallèlement, il prépare une thèse de doctorat en philologie romane sur le théâtre de Maeterlinck : il l’a rencontré à Nice, en 1948, soit un an avant sa mort. Proclamé docteur par l’Université de Liège en 1955, il a choisi de retourner à l’Athénée d’Ixelles, qu’il ne quittera plus avant 1986, y inculquant le goût des lettres à toute une génération d’étudiants.

De surcroît, Gaston Compère a poursuivi des études musicales au Conservatoire de Liège, où il fait notamment la connaissance d’Édouard Seny et de Célestin Deliège. Cette formation musicale lui inspirera cette harmonie des mots et des phrases, cette sensibilité aux rythmes si typiques de son œuvre. 

Après une rencontre avec Marcel Thiry et trois premiers recueils, c’est avec Géométrie de l’absence (1969) que Gaston Compère se fait connaître dans le monde de la poésie, avant de frapper à la porte tous les autres genres littéraires avec la même aisance : la nouvelle, le théâtre et surtout le roman. Créant « des personnages auxquels on ne reste pas indifférent » (LEFÈBVRE), Gaston Compère suggère les émotions, suscite la réflexion et mêle sérieux et dérision dans une œuvre abondante, dont chaque page rappelle toute sa maîtrise des ressources de la langue et sa culture.  Également compositeur, il est notamment l’auteur d’une élégie pour violoncelle et a signé la bande sonore du film de Claudio Serughetti, Polders, les noces de la terre, de l’Eau et du Ciel, qui lui est dédié.

En 1976, Compère est l’un des 143 signataires de la Nouvelle Lettre au roi (29 juin), destinée à dénoncer l’extrême lenteur mise dans l’application de l’article 107 quater de la Constitution ; il plaide ainsi en faveur d’un fédéralisme fondé sur trois Régions : Bruxelles, Flandre et Wallonie.

Largement reconnu dans toute la francophonie, Gaston Compète a été très souvent récompensé. Prix de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie pour Le Sagittaire (1952), Prix de la Communauté française pour Écrits de la Caverne (1976), Prix Jean Ray pour La femme de Putiphar (1975), Prix Rossel 1978 pour Portrait d’un roi dépossédé (1978) et 1985 pour Je soussigné Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, il reçoit également, en 1988, le Grand Prix international d’expression française, décerné par la Fédération internationale des Écrivains de langue française, le Grand prix de Littérature de la francophonie, en 1989, ainsi que le Grand Prix de la Société des Gens de lettres pour Anne de Chantraine ou la naissance d’une ombre (1988) et le Prix quadriennal Gaston et Mariette Heux pour l’ensemble de son œuvre (1991).

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse, dont La Libre, 15 juillet 2008
Gaston COMPÈRE, Sept machines à rêver, Bruxelles, Luc Pire, 2010, p. 307-315 (Espace Nord, n° 298)
Jean-Marie KLINKENBERG, dans La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres. Arts. Culture, t. III, p. 53
Jacques LEFÈBVRE, https://www.servicedulivre.be/sites/default/files/gaston_compere.pdf 
https://www.servicedulivre.be/Auteur/comp%C3%A8re-gaston 
http://www.livreshebdo.fr/article/je-soussigne-gaston-compere-ecrivain-belge 

Œuvres principales

Le sagittaire, poésie (1952)
Le théâtre de Maurice Maeterlinck, essai (1955)
Europe mon amour, poésie (1960)
Le signe infortuné, poésie (1964)
Géométrie de l’absence, poésie (1969)
Le fort de Gleisse, roman (1974)
Sept machines à rêver, nouvelles (1974)
La femme de Putiphar, nouvelles (1975)
Écrits de la caverne, poésie (1976)
Pourrir par les orteils, théâtre (1977)
Le rempart de Babylone, théâtre (1977)
Le dernier duc d’Occident, essai (1977)
Portrait d’un roi dépossédé, roman (1978)
L’officier des ténèbres, roman (1979)
Un millénaire de patience d’ange, poésie (1979)
Le grand bestiaire, poésie (1979)
Derrière l’œil, nouvelles (1979)
Jean-Sébastien Bach, biographie (1980)
Les griffes de l’ange, roman (1981)
Gueule de glace, théâtre (1981)
Dommage qu’elle soit une putain de John Ford, adaptation (1982)
Darmien d’Aldyth Morris, adaptation (1982)
La constellation du serpent, roman (1983)
Profération de la parole perdue, poésie (1983)
Le cauchemar de l’acteur de Christopher Durang, adaptation (1983)
Sœur Marie-Ignace vous explique tout de Christopher Durang, adaptation (1983)
La mandragore de Machiavel, adaptation (1983)
Le bout du monde, théâtre (1984)
Kearn ou la colère de Dieu de Fitz-Simmons, adaptation (1984)
Je soussigné Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, roman (1985)
Songe de l’œil bleu, poésie (1985)
Les eaux de l’Achéron, nouvelles (1985)
Dieu dans le trou, roman (1986)
Robinson 86, roman (1986)
L’Apocalypse de saint Jean, traduction (1987)
L’art de parler en public pour ne rien dire, essai (1987)
Anne de Chantraine ou la naissance d’une ombre, roman (1988)
Le fouille-merde, nouvelles (1988)
Nathan le Sage de Gotthold Ephraïm Lessing, adaptation (1988)
Licornes, poésie (1989)
Corbeaux, traduction du livre de Heidi Holder (1989)
L’Apocalypse de Saint Jean, adaptation (1989)
Maurice Maeterlinck, biographie (1989)
Sept demeures de l’adieu, poésie (1990)
Le livre d’Heures, traduction du livre de Rainer-Maria Rilke (1990)
Antigone de Sophocle, adaptation (1990)
Les jardins de ma mère, souvenirs (1990)
Bloemardinne ou Du séraphique amour, roman (1991)
Cimmérie, Divagation à travers un paysage, roman (1992)
Lettres rouges, lettres noires, roman (1992)
Foi, poésie (1992)
Sade, disait-il, théâtre (1992)
Richard, théâtre (1992)
Polders, essai de géographie sentimentale, essai (1992)
Lieux de l’extase, poésie (1993)
L’écharpe d’Iris, théâtre (1993)
Relation de ma promenade du 26 septembre, nouvelles (1993)
Portraits de Wallonie, les facettes d’une identité, article (1994)
Portrait d’un écrivain, article (1994)
Musicoscopie, poésie (1995)
L’hiver, nouvelles (1995)
La tragédie du Téméraire, théâtre (1995)
O (promenade), nouvelles (1996)
Moments musicaux, Lettres à Pascale, essai (1996)
Le serpent irisé, nouvelles (1997)
Le torticolis de la girafe, récit (1997)
In Dracula memoriam, roman (1998)
Échafaudages, poésie (1999)
Les éléments, poésie (2000)
Nuit de ma vie, poésie (2000)
Kâma-Sûtra, poésie (2001)
Le maelström dans la cervelle, poésie (2002)
Lux mea. Anthologie poétique arbitraire (1952-2004), poésie (2004)
Je soussigné Louis XI, roi de France, essai (2005)
Louis XI, voix d’outre-tombe, essai (2005)
Caroline et Monsieur Ingres, roman (2006)
Je me souviens de Bruxelles, anthologie (2006)
Roméo et Juliette de Shakespeare, adaptation (s. d.)
La mégère apprivoisée de Shakespeare, adaptation (s. d.)
Le roi Lear de Shakespeare, adaptation (s. d.)