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Grégoire Henri

Académique, Philologie

Huy 21/03/1881, Rosières 26/09/1964

La qualité des études classiques en Wallonie a souvent été saluée sur le plan international et la réputation de plusieurs maîtres universitaires est incontestable. Le philologue et historien polyglotte, professeur à l’Université de Bruxelles, Henri Grégoire, a joué un rôle éminent, surtout dans le domaine des études byzantines.

Aux études à l’Athénée de Huy (1892-1898), Henri Grégoire témoigne déjà de grandes facilités dans l’apprentissage des langues ; en autodidacte, il s’initie au grec moderne, qu’il pratiquera toute sa vie. Très tôt fasciné par l’Orient, il s’inscrit à la Faculté de Philologie classique de l’Université de Liège. Docteur en 1902, lauréat du concours des bourses de voyage l’année suivante, Henri Grégoire fréquente l’École des Hautes Études et l’Institut catholique de Paris, séjourne un an en Allemagne, à Munich et à Berlin, se rend en Italie et travaille dans diverses bibliothèques. Visitant le Sinaï, Jérusalem et la Palestine (1905-1906), membre étranger de l’École française d’Athènes, il passe trois années dans la capitale grecque, où il s’intéresse particulièrement à l’épigraphie byzantine, avant de se voir attribuer, en 1909, en qualité de chargé de cours, une chaire de grec à l’Université de Bruxelles. C’est là qu’il accomplit toute sa carrière. Professeur extraordinaire en 1911, ordinaire en 1914, il enseigne, durant les années de guerre, dans les athénées de Schaerbeek et Saint-Gilles, tout en pratiquant le journalisme dans L’Écho de la guerre, d’abord, publié dans sa ville natale, dans Le Flambeau, ensuite, journal clandestin politico-littéraire qu’il avait créé avec d’autres et qui poursuivra sa route, après l’Armistice, puisqu’il paraîtra jusqu’en 1976.

Intéressé par la littérature russe et, de manière générale, par les langues slaves, Henri Grégoire reprend ses fonctions académiques, au sortir de la guerre, et centre son enseignement sur la philologie byzantine et grecque moderne, tout en multipliant les publications et articles scientifiques, les comptes rendus et voyages. Récompensé par le Prix Zappas, pour son Recueil des inscriptions grecques chrétiennes, publié en 1922, il est chargé, l’année suivante, par Henri Pirenne, d’organiser une section byzantine au congrès international qui devait se réunir à Bruxelles. Animateur d’autres congrès byzantins organisés suite à cette initiative, Henri Grégoire crée la revue internationale des études byzantines, Byzantion, à laquelle il confère un grand prestige.

Doyen, à la demande du roi Fouad, de la Faculté de Philosophie et Lettres du Caire (1925-1928), Henri Grégoire organise un cours libre sur l’histoire de Byzance, avant d’être nommé président de la Faculté des Lettres de l’Université de Bruxelles (1929-1932). Fondateur, en 1930, de l’Institut de Philologie et d’Histoire orientales, il édite l’Annuaire de celui-ci, à partir de 1932. 

Conférencier, Henri Grégoire présente ses travaux en Belgique et à l’étranger, à Stanford, où il est professeur invité, Prague, Varsovie, Cracovie, Brno, Belgrade, Skopje, Athènes, Genève, Sofia, Nice, Strasbourg, Alger, Berkeley, où il occupe la chaire de Sather Lecturer, mais aussi à Ottawa, Montréal, Toronto et Washington. Loin de cantonner ses investigations à l’Antiquité classique et à l’histoire byzantine, il mène des recherches dans des domaines d’études très éloignés les uns des autres : traductions des tragiques grecs, notamment Euripide et Eschyle, étude du genre épique en général, en faisant des incursions dans la littérature française, allemande, slave, arménienne, turque, rendues possibles par sa connaissance approfondie de nombreuses langues.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Henri Grégoire se réfugie en France puis part pour les États-Unis. Installé, dès octobre 1940, à New York où il est professeur à la New School for Social Research, il fonde l’École libre des Hautes Études, dont il est le vice-président, puis le président, à partir de 1944, et quelques revues à l’existence éphémère, notamment Renaissance. À son retour en Europe, il reprend ses cours à l’Université de Bruxelles. 
Passant quelques mois en Grèce, en pleine guerre civile, il réunit, tel un journaliste, les articles qu’il avait donnés au Soir sur le sujet ainsi que de nouveaux chapitres sous une publication, Dans la montagne grecque, septembre 1947-juillet 1948, qui lui valut le Prix René Jauniaux.

Directeur, en 1948, de l’Institut de Philologie et d’Histoire orientales, instigateur, la même année, de la Fondation byzantine et néo-grecque, dont il est nommé directeur, il fonde, en 1949, La Nouvelle Clio, revue internationale de la découverte historique et crée une association d’études mythologiques, Théonoé.

Membre de diverses académies et sociétés savantes dans le monde, docteur honoris causa de plusieurs universités, Henri Grégoire reçoit, en 1950, le Prix du Concours quinquennal des Sciences historiques pour l’ensemble de son œuvre pendant la période 1940-1945 et notamment pour son ouvrage paru en grec, Digénis Akritas, avant d’accéder à l’éméritat, en 1951.

Très actif durant sa retraite, il conserve un cours libre d’histoire byzantine, s’occupe de ses revues et fondations, crée le Centre national de Recherches byzantines, participe à divers congrès, donne des conférences dans les universités étrangères et continue de se rendre en Grèce et en Turquie. Son mémoire sur Asklépios a été couronné du Prix Goblet d’Alviella de l’Académie de Langue et de Littérature françaises de Belgique, à laquelle il était actif depuis 1931.

Sources

Alice LEROY-MOLINGHEN, dans Biographie national, t. 44, col. 554-575
Claire PRÉAUX, « Henri Grégoire », dans Revue belge de Philologie et d’Histoire, t. 43, n° 3, 1965, p. 1193-1198
André GRABAR, « Éloge funèbre de M. Henri Grégoire, associé étranger de l’Académie », dans Comptes rendus des séances de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 108ᵉ année, n° 2, 1964. p. 288-291
François PIROT, dans La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres. Arts. Culture, t. III, p. 169

Œuvres principales

Studia Pontica (1906-1910)
Les perles de la poésie slave (1918)
Recueil des inscriptions grecques chrétiennes (1922)
Les suppliantes et Ion (1923)
Iphigénie en Tauride (1925)
Vie de Porphyre, évêque de Gaza (1931)
Vasiliev, Byzance et les Arabes (1933)
Vie de Constantin attribuée à Eusèbe (1939)
Ο Διγενής Ακρίτας : η Βυζαντινή εποποιία στην ιστορία και στην ποίηση (1942)
Dans la montagne grecque, septembre 1947-juillet 1948 (1948)
Hélène (1950)
Les persécutions dans l’Empire romain (1951)
Asklépios, Apollon Smintheus et Rudra (1949)
Les Bacchantes (1961)