no picture

Plomteux Clément

Culture, Edition

Liège 20/04/1737, Liège 1792 (supposé)

Dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, le secteur de l’imprimerie est un secteur prospère de l’économie des provinces wallonnes, singulièrement en principauté de Liège et dans le duché de Bouillon. Profitant du statut particulier de ces contrées, des maîtres-imprimeurs y publient des ouvrages condamnés dans d’autres pays, y contournent la censure ecclésiastique ou, au contraire, éditent des libelles de catholiques opposés aux réformes de l’empereur d’Autriche. Il est aussi des imprimeurs, moins scrupuleux encore, qui n’hésitent pas à reproduire les succès du moment sans disposer des droits, en toute impunité, puisque les privilèges protégeant les livres français, par exemple, ne concernent pas les terres wallonnes. À la veille de la Révolution de 1789, le secteur de la « réimpression » se porte par conséquent très bien et, parmi les imprimeurs et éditeurs wallons de renommée européenne – comme Bassompierre ou Boubers –, figure l’atelier de Clément Plomteux. Comme l’a bien montré Daniel Droixhe, c’est cet atelier que représente si finement le peintre Léonard Defrance, au début des années 1780, dans ses « visites de l’imprimerie ».

Par son mariage, en 1766, avec Marie-Elisabeth Kints (1740-1790), la fille du libraire-bibliothécaire Everard Kints, Clément Plomteux fait son entrée dans le monde de l’imprimerie liégeoise au milieu du XVIIIe siècle. L’entreprise de Kints est déjà prospère quand Plomteux en reprend la direction (1767). Puissant imprimeur officiel des États de Liège, il dispose, depuis 1764, du privilège d’imprimer tous les ouvrages religieux à l’usage du diocèse de Liège ; il est aussi le bibliothécaire de la cité de Liège (1766-1792). Parallèlement à ce statut enviable, Plomteux n’hésite pas à utiliser ses presses pour des publications nettement plus profanes. Imprimeur des œuvres de Voltaire en 30 volumes (1771-1777), des écrits d’Helvétius (4 volumes, 1776) ou de la Révolution de l’Amérique de Raynal (1781), Plomteux ne recule pas devant les grands projets éditoriaux : à partir de 1777, avec d’autres imprimeurs européens, il entreprend la publication du Dictionnaire universel des sciences morale, économique, politique et diplomatique de Jean-Baptiste Robinet. Au début des années 1780, Plomteux rejoint le libraire-philosophe lillois Charles-Joseph Panckoucke dans son ambitieux projet d’Encyclopédie méthodique ; en l’occurrence, il s’agissait de compléter et d’améliorer l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. À cette œuvre gigantesque et financièrement aventureuse, qui s’étendra jusqu’en 1832, Plomteux apporte sa contribution de 1782 à 1788.

Imprimeur des mandements épiscopaux, Plomteux a fait fortune en exportant vers l’Espagne de nombreux livres d’église, tout en offrant sur le marché européen un choix judicieux de livres philosophiques, mais aussi antiphilosophiques, et en n’hésitant pas à se livrer à la contrefaçon. Il n’est pas rare en effet de rencontrer des ouvrages de cette époque, indiquant Genève, Londres, Cologne ou Paris comme lieux d’édition, alors qu’ils ont été réalisés à Liège, sur les nombreuses presses qu’il y possède.

Lié à la franc-maçonnerie – il occupe l’un des rangs les plus élevés de la loge de la Parfaite Intelligence, apparue vers 1770 –, Clément Plomteux a continué d’entretenir avec le prince-évêque Hoensbroeck les bonnes relations qu’il avait nouées avec son prédécesseur Velbrück ; celui-ci en avait fait l’un de ses proches conseillers. De 1787 à 1788, Plomteux est choisi pour exercer l’une des deux fonctions de bourgmestre de la cité de Liège. Il est ainsi l’un des tout derniers magistrats de l’Ancien Régime, dont il ne conteste guère le fonctionnement ; opposé aux réformes, il est notamment l’une des parties intéressées au bon fonctionnement des Jeux de Spa. En 1792, on perd complètement sa trace.

Sources

Henri FRANCOTTE, La propagande des encyclopédistes français au pays de Liège (1750-1790), Bruxelles, 1880, p. 96-97, 182-183
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), t. II, p. 82
Daniel DROIXHE, Une histoire des Lumières au pays de Liège. Livre, idées, société, Liège, Cefal-éd. ULg, 2007, p. 91-300
Joseph BRASSINNE, L’imprimerie à Liège jusqu’à la fin de l’ancien régime, dans Histoire du livre et de l’imprimerie en Belgique, des origines à nos jours, Bruxelles, Musée du livre, 1929, V, p. 35 et ssv.
Michel HANNOTTE (dir.), Journaux et journalistes liégeois au temps de l’Heureuse Révolution, catalogue de l’exposition La Plume et le Plomb, Liège, 1989, p. 60-
Eugène DE SEYN, Dictionnaire biographique des sciences, des lettres et des arts en Belgique, Bruxelles, 1935, t. II, p. 828
Joseph BRASSINNE, L’imprimerie à Liège jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, dans L’Histoire du livre et de l’imprimerie en Belgique, Bruxelles, Musée du livre, 1929, p. 35-37
Maurice DES OMBIAUX, dans La Meuse, 21 février 1902
Jacques LIÉNARD, Autour d’une relation inédite des journées révolutionnaires des 16, 17 et 18 août 1789, dans Le Vieux Liège, janvier-mars 1995, n°268, p. 251-264
Daniel DROIXHE, Deux chansons relatives à des imprimeries liégeoises du XVIIIe siècle, dans Bulletin de la Société Le Vieux-Liège, 1995, n°268, p. 245
http://gw.geneanet.org/olisein?lang=fr&pz=olivier+jean+pierre&nz=lisein&ocz=0&p=clement&n=plomteux (s.v. mai 2016)