Servais Jean-Claude

Culture, Bande dessinée

Liège 22/09/1956

Dans un monde de la bande dessinée où les créateurs wallons sont nombreux, Jean-Claude Servais impose un nouvel univers au début des années 1980. La Tchalette (1982), Isabelle (1983) et surtout le personnage de Violette attirent l’attention sur ce jeune dessinateur à la sensibilité régionaliste affirmée. Certes, il inscrit résolument ses personnages dans le cadre privilégié de l’Ardenne, en particulier la Gaume, mais en signant, en 1983, le Manifeste pour la Culture wallonne, il donne un sens politique particulier à sa démarche artistique.

Diplômé de la section des arts graphiques de l’Institut Saint-Luc, à Liège (1976), le jeune Servais se fait très vite remarquer chez Dupuis, obtenant de publier ses premières planches sous le format « Carte blanche » que réserve le journal Spirou aux nouveaux talents. Hésitant entre l’école de Marcinelle et celle de Bruxelles, les débuts sont prometteurs, mais la confirmation tarde à venir. Se refusant d’être le dessinateur d’une seule maison d’édition, il s’attache surtout à Gérard Dewamme, un professeur de français qu’il a rencontré durant son service militaire, et à ses scénarios pour la majorité des albums qui paraissent dans les années 1980 : trois épisodes en noir et blanc de Tendre Violette (Casterman), trois Saisons de la vie (Lombard), ainsi que Les voyages clos (Glénat). Leur route se sépare ensuite. Après une brève expérience avec Julos Beaucarne (L’appel de Madame la Baronne, 1989), Jean-Claude Servais va désormais scénariser lui-même les histoires qu’il dessine, comme c’était déjà le cas, en 1988, avec Almanach album où se mêlent légendes et sorcellerie.

En 1992, Virton lui inspire La Petite Reine (1992) allusion au monde des abeilles, un monde très particulier car les insectes ont un instinct de tueur... Chez Casterman, Servais fera encore paraître dans les années 2000 de nouvelles aventures de Tendre Violette, sans Dewamme, mais avec des couleurs, celles apportées, depuis Fanchon, en 1998, par Raives, pseudonyme d’un Guy Servais qui n’a pas de lien de parenté directe avec Jean-Claude.

Avec Lova (1 et 2, 1992 et 1993), coloré par Émile Jadoul, Jean-Claude Servais retrouve Dupuis, l’éditeur de ses tout débuts, même si l’entreprise s’est profondément transformée depuis son départ de Marcinelle pour Bruxelles, puis Paris. C’est là qu’il fait paraître la série La mémoire des arbres, soit une douzaine d’albums produits entre 1994 et 2004, avec deux rééditions (Isabelle et La Tchalette). Parfois inspirées de faits divers réels, les histoires envoutent le lecteur dans l’univers de Servais, l’Ardenne étant une sorte de personnage récurrent. Au rêve, à l’amour et au fantastique (Iriacynthe, 1982, Pour l’amour de Guenièvre, 1992, Déesse blanche, déesse noire, 2001-2002), Servais oppose souvent des histoires de meurtre et de contrebande.

En dehors de la bande dessinée proprement dite, outre des contributions à des scripts télévisuels fondés sur ses bandes dessinées, il prend plaisir à écrire les scénarios du Labyrinthe de Durbuy 2007 et 2008, ou à scénariser un opéra folk, Champenois, l’Homme des Bois (2008). En 2009, les grottes de Han sont le théâtre d’une pièce féérique dont il écrit la première partie ; en 2011, un spectacle musical, Le Dernier Brame, est présenté au château de Laclaireau et, en 2012, c’est au théâtre que Servais invite à suivre Capiche et Violette. Autour de son dessinateur fétiche, la Gaume crée une série de lieux de mémoire (fresques, lieu d’exposition) qui sont les étapes d’un parcours Servais (communes de Chiny et Florenville).

Séduit par l’évocation romancée du passé et renouant ainsi avec un genre qu’il avait connu en 1977, chez Tintin, quand il prépara deux belles Histoires de l’Oncle Paul jamais publiées, il consacre un diptyque à l’abbaye d’Orval, en 2009-2010, et à Godefroid de Bouillon, en 2012-2013. En 2014, abandonnant pour la première fois la Gaume, J-C. Servais lance son héros sur les traces de son grand-père et l’emmène sur les chemins qui mènent à Saint-Jacques de Compostelle.

En 2018, Jean-Claude Servais a été élevé au rang d’Officier du Mérite wallon.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
http://www.jc-servais.be