Tilkin Alphonse

Culture, Lettres wallonnes

Glain 04/08/1859, Liège c. 26/05/1918

Formé à la gravure sur arme, Alphonse Tilkin ne va jamais abandonner sa profession, devenant, au début du XXe siècle le patron d’une importante fabrique d’armes. Cependant, sa notoriété trouve son origine dans les multiples formes d’illustration de la langue wallonne auxquelles il s’adonne sans compter. Connu pour ses compositions de chansonnier et d’auteur dramatique wallons, il est l’un des principaux animateurs du théâtre dialectal de la « Belle Époque » ; il est aussi le fondateur du Spirou, le tout premier journal en wallon de Liège, imprimé dans la cité ardente. Président de la Fédération wallonne avant la Grande Guerre, il ne lui survivra pas.

Intitulée Lisa, sa première chanson date de 1877 ; elle figure dans Mes proumîres, recueil de romances, chansons, poèmes et déclamations wallonnes qui paraît en 1885. De nombreuses autres compositions sortiront de sa plume ; dans les dernières années du XIXe siècle, il tient aussi la barre du premier Cabaret wallon de Liège (1895-1900). Il monte sur scène avec aisance.

Depuis avril 1880, Alphonse Tilkin est aussi joué au théâtre ; cinq ans avant le succès phénoménal de Tâti l’pèriquî d’Édouard Remouchamps, il propose On novai locataire (1880) pour le plaisir d’un parterre qui répond facilement aux intrigues simples qui lui sont proposées ; le public revient pour suivre Les avinteures da Nanol (1882), Ine nute èmon Fina (1883), Les pauves honteux (1884), Li bârbî (1884) et Ine ancienne cantinière (1885).

Drame, comédie, opérette, vaudeville à tiroirs, en français, en wallon, voir roman, l’auteur est fécond ; il inscrit à son actif plus de 50 pièces de théâtre, dont encore Jôseph Colasse (1887) et Vât mîx târd qui mäie (1888) récompensées du second prix littéraire de la Société le Lion Belge. Décernées par la Société liégeoise de Littérature wallonne, une médaille d’or récompense Jône et vîx (1887) et une médaille de bronze couronne Lès qwate saison (1888). Parmi d’autres, les comédies ou opérettes Gougnotte li Sourdeau (1890), Li Coq dè Viège (1894), Pauline (1895), Li Portrait ou les deux Frés (1898), Les deux Soroches (1900), Dj’a me ton l’fer ou (1906), Rintis (1909), Matante Nanète (Médaille d’or de la SLLW et prix du gouvernement, 1910), L’Efant (1911), Melie est k’hayowe (1913) attirent un public friand.
Traducteur en wallon de Liège du brabançon Edmond Étienne, membre de nombreux jurys, rédacteur à l’Express, chargé de la chronique du Théâtre wallon, Alphonse Tilkin ajoute à cette activité wallonne la responsabilité d’un journal entièrement écrit en wallon. Depuis 1883, La Marmite connaît un succès certain à Namur et alentours, mais le wallon de Liège ne trouvera à s’exprimer que dans Li Spirou, gazette des tiesses di hoye, dont Tilkin est à la fois le fondateur, le propriétaire et le rédacteur en chef. Bihebdomadaire, Li Spirou accueille de nombreux auteurs et anime, de toutes les manières (concours notamment), le mouvement littéraire dialectal à l’est du pays wallon jusqu’en 1904. Promouvoir la langue wallonne, divertir, sont ses seuls objectifs. Pas plus que sa gazette, Tilkin ne se mêle réellement de politique.

Néanmoins, cofondateur de la Société des auteurs dramatiques et chansonniers wallons de Liège (1887) qu’il préside de 1890 à 1902, membre de la Société liégeoise de Littérature wallonne, président de la Fédération wallonne de la province de Liège (à partir de 1902) il accepte de faire partie du Comité permanent du Congrès wallon (1890-1893) et il participe notamment au Congrès de Namur en 1891. D’autre part, en 1902, Al longue crôye est une comédie satirique où il s’attaque à la vente à crédit. Enfin, en 1905, Maurice Wilmotte peut compter sur son aide précieuse lors du montage du Congrès de langue française qui se tient à Liège. Celui qui s’est fait une spécialité de comédies en wallon fort appréciées accueille encore les participants au Congrès wallon de 1905 par une représentation du drame patriotique qu’il a composé : Li famille Tassin, paru sous forme de roman dès 1900.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Charles DEFRECHEUX, Joseph DEFRECHEUX, Charles GOTHIER, Anthologie des poètes wallons (…), Liège, Gothier, 1895, p. 105-106
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), t. II, p. 494 ; t. III, p. 211
Maurice WILMOTTE, Mes mémoires, Bruxelles, 1949, p. 165
Robert WANGERMÉE, Dictionnaire de la chanson en Wallonie et à Bruxelles, Liège, Mardaga, 1995, p. 334
Comité permanent du Congrès wallon, Compte rendu analytique des débats du Congrès wallon, Namur, 1891, Liège, 1892, Bruxelles 1893
Wallonia, t. 10, 1902, p. 190-194
A mon nos autes, bulletin liégeois des tranchées, 1er août 1918 ; La Meuse, 1886-1914, dont 11 octobre 1913 ; Le Télégraphe, 31 mai 1918