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Vecqueray, ou Dom André (aussi orthographié Vecquerai) Georges

Eglises, Socio-économique, Entreprise

Henri-Chapelle 22/02/1714, Malmedy 03/05/1778

Certes vouées essentiellement à la vie religieuse, les abbayes – nombreuses en pays wallon – jouent aussi un rôle déterminant dans la vie économique. Dans la principauté abbatiale de Stavelot-Malmedy, les moines de l’ordre bénédictin, installés le long de la Warche, ne font pas exception, profitant de la force hydraulique de quelques bras d’eau. Dès le XVIe siècle, une activité de tannerie se développe ; on dénombre aussi un moulin à grains, une scierie, voire un fondeur de cloches au XVIIIe siècle. À la même époque, naît une nouvelle activité industrielle orientée dans la fabrication de papier et de carton ; l’entreprise sera rachetée en 1801 par Henri Steinbach. Nommé à la direction de la papeterie le 21 mai 1754, dom André Vecqueray a joué un rôle essentiel dans le développement dans cette activité appelée à un grand avenir dans la région de Malmedy. Ce sont les recherches patientes de Maurice Lang qui ont contribué à tirer le rôle essentiel de Vecqueray de l’oubli.

Premier garçon d’une famille paysanne de neuf enfants, le jeune Vecqueray présente des prédispositions pour l’étude ; son oncle, curé à la Clouse (près d’Aubel), l’oriente vers la vie religieuse. Admis au noviciat à l’abbaye de Malmedy (1733), ordonné sous-diacre à Cologne (1735), il devient prêtre en 1738. Après une douzaine d’années consacrées à l’étude et à la prière, il se passionne pour un projet que soutient le prince-abbé.

Un premier projet de papeterie avait vu le jour en 1726, mais sans être concrétisé. Il inspire cependant un second projet, lancé en 1750, par un bourgeois malmédien qui obtient l’aval des responsables de l’abbaye. Entre 1751 et 1753, deux bâtiments sont construits et, dès 1753, les religieux commencent à fabriquer à la fois du papier et du carton. Durant la phase de construction, dom André Vecqueray est envoyé en mission. Au cours de plusieurs voyages « dans le monde », il se familiarise avec cette activité et découvre certains secrets de fabrication ; mais il est surtout chargé de recruter une main d’œuvre spécialisée, qu’il rencontre dans les régions avoisinantes : au pays de Liège, dans les Pays-Bas et dans le duché de Juliers ; enfin, il prospecte des débouchés et amènent les premiers clients.

En dépit des efforts consentis, les premiers résultats obtenus par les moines sont désastreux. La qualité n’est pas au rendez-vous, les clients sont mécontents et les stocks s’accumulent à Malmedy. Subissant au quotidien les conséquences de cette situation, Vecqueray accepte d’être nommé à la direction de la papeterie abbatiale, tout en revendiquant « les pleins pouvoirs » (1754). Inquiet des conséquences financières de l’entreprise pour la communauté religieuse, le prince-abbé autorise Vecqueray à réorganiser les méthodes de fabrication et accepte d’emprunter un montant indispensable à la relance des activités.

En offrant désormais des produits de qualité, Vecqueray n’a guère de peine à trouver des débouchés, principalement auprès des manufactures de draps déjà bien présentes à Verviers, Eupen, Aix-la-Chapelle, Roetgen, Montjoie et Malmedy, où les cartons sont indispensables. Le redressement de la papeterie abbatiale est progressif, mais l’entreprise est bénéficiaire et les profits générés servent à l’amélioration du bien-être général de la communauté. Celle-ci est cependant agitée par d’importants problèmes internes et, en raison de sa capacité à bien gérer la fabrique de papier, dom André Vecqueray se voit confier la charge de prieur claustral, ad interim (1762). Ramenant le calme et la concorde entre les moines, le prieur est confirmé officiellement dans ses fonctions par le prince-abbé (1763), avant de se confier l’autorité temporelle sur le monastère de Malmedy. Chef d’entreprise, « inspecteur au service de l’abbé », dom André Vecqueray entre encore au Conseil provincial de Stavelot (1765).
Afin d’exercer au mieux toutes ses responsabilités, Vecqueray demande à être déchargé de la direction de la papeterie. Jusqu’à son décès, en 1778, il restera membre de la Commission des religieux en charge de la surveillance des comptes de l’entreprise. Mais, en octobre 1766, frère Henri lui a succédé dans la gestion quotidienne ; il restera à la tête de la papeterie jusqu’au moment où la principauté abbatiale se fond dans les nouveaux départements français (1795). Ce frère Henri était né Jean-Godefroid Cavens (1725-1800) ; il est l’oncle d’Eulalie Cavens qui épousera, en 1827, Henri-Joseph Steinbach, fils du fondateur de la Papeterie Steinbach..., née du rachat, sous le régime français, de l’entreprise bénédictine.

Sources

Maurice LANG, Dom André Vecqueray, fondateur de la papeterie abbatiale de Malmedy, et sa famille, dans Folklore Stavelot–Malmedy–Saint-Vith, 1952, t. XVI, p. 51-93
Joseph BASTIN, Les origines de la papeterie-cartonnerie de Malmedy, dans Armonac Walon d’Mâm’dî, 1937, p. 97-98
Maurice LANG, Généalogies, dans Folklore Stavelot–Malmedy–Saint-Vith, 1965, t. XXIX, p. 59-70