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Dethier (ou De Thier) Laurent-François

Révolutions

Spixhe-Theux 14/09/1757, Theux 01/07/1843


À la suite de la Prise de la Bastille, Laurent-François Dethier prend la tête d’un mouvement révolutionnaire et républicain ; à son initiative, le Congrès de Polleur adopte, dès le 16 septembre 1789, une Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Si l’on considère généralement que cette œuvre fut collective, force est de reconnaître le rôle prépondérant joué par l’avocat Dethier, par ailleurs bourgmestre de Theux. Tour à tour Liégeois, Autrichien, Français, Hollandais et Belge, bourgmestre, représentant du Tiers, député de l’Ourthe et membre du Congrès national, L-Fr. Dethier contribue à la transformation des institutions qui l’entourent en restant fidèle à un seul principe : il est républicain. Au-delà de son activité politique, l’avocat Dethier a consacré une partie de son existence à l’étude des sciences naturelles, du folklore et de l’archéologie. Plus d’un siècle après sa disparition, son premier biographe (J. Meunier) fait ressurgir une personnalité marquante qu’avaient révélé les événements de 1789.

Formé à Saint-Trond, puis aux universités de Louvain et de Reims, diplômé en Droit (1780), avocat, particulièrement intéressé aux affaires publiques, le jeune Laurent François Dethier est d’abord le chef de la faction opposée à la famille des « de Limbourg » dans le dernier quart du XVIIIe siècle. En 1788, il est choisi bourgmestre de Theux (avril-novembre). Défenseur farouche des idées des Lumières, il prend une part active aux événements révolutionnaires qui se déroulent en principauté de Liège et en particulier dans le marquisat de Franchimont, à partir de l’été 1789. Dès le 9 août, il convoque en Congrès à Polleur, tous les représentants des cinq bans du Marquisat (Jalhay, Sart, Spa, Theux et Verviers) ; la première réunion se tient le 26 août et Dethier prononce le discours inaugural ; dès la 5e séance, le 16 septembre, le « Congrès de Polleur » rend publique une Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, plus radicale que la déclaration française. Approuvée à l’unanimité, elle est jugée plus radicale parce que le texte wallon ne reprend pas l’article XVII français et ne reconnaît donc pas, en la propriété, un droit inviolable et sacré, même s’il la range dans les droits naturels et imprescriptibles. Aux côtés de Dethier qui est l’homme fort du Congrès, le spadois Jean-Guillaume Brixhe joue un rôle important, en tant que secrétaire.

Lors des premières élections liégeoises (juin 1790), L-Fr. Dethier devient le premier représentant du marquisat de Franchimont à l’État Tiers. En juillet, avec Fyon notamment, il constitue une « Société des Amis de la Liberté à Theux » qui, par pétition, réclame un local. Dès le 16 août, est élaboré un projet de constitution franchimontoise. Jugeant les décisions liégeoises trop timorées, Dethier et ses partisans tiennent à un modèle ressemblant à la France ; ils sont même décidés à se battre contre les Liégeois pour imposer leurs idées. Mais à l’heure où les troupes autrichiennes se rapprochent dangereusement pour restaurer l’Ancien Régime, le Congrès de Polleur cesse de se réunir (janvier 1791) et L-Fr. Dethier part trouver refuge en France. Il n’a de cesse de défendre le rattachement à la France de la principauté de Liège, ou du moins « des pays de Franchimont, de Stavelot et de Logne » dont il imagine l’organisation politique et sociale. Il est aidé par Brixhe qui rédige le Code du Droit public des pays réunis de Franchimont, Logne et Stavelot, où se trouvent les procès-verbaux des séances de l’assemblée de Polleur.

De retour à Theux dans les pas de Dumouriez, il incite ses compatriotes à voter la réunion (26 décembre 1792) et, en 1793, se montre partisan d’une distinction claire entre Liégeois et Franchimontois quand commence la seconde Restauration. Réfugié à nouveau à Paris, Dethier est admis au Club des Jacobins (juin 1793) et revient définitivement à Theux en 1795. Agent au service de la République dans l’arrondissement de Spa, juge au tribunal de Spa (1795), juge de paix du canton de Spa (1796-1797), juge au tribunal civil de Liège (1797-1798), Dethier est élu député au Conseil des Cinq Cents, la chambre législative qui se réunit à Paris, mais il en démissionne à la suite du coup d’État de Bonaparte, le « despote usurpateur ». En 1800, il rentre au pays où il se consacre à l’écriture.

En l’an VII, il avait rédigé un mémoire dédié à la « grande république une et indivisible ». Ce goût de l’écriture, il le met à profit durant la période où il se retire de la politique, non sans militer en faveur de l’instruction publique. Comme il s’intéresse à l’archéologie, à la linguistique et aux sciences naturelles, il rédige plusieurs traités et ouvrages dans ces divers domaines, sans systématiquement les publier. Il est en contacts épistolaires avec de nombreux savants de son temps. Minéralogiste et géologue, il est connu pour plusieurs découvertes de minéraux anciens et pour l’établissement de la première carte géologique couvrant tout le département de l’Ourthe. En 1817, il est candidat à la chaire de minéralogie de l’Université de Liège. Outre un Calendrier perpétuel wallon-français, il signe aussi Origines wallonnes ouvrage (inédit) où se manifeste son intérêt pour le passé et le « folklore » wallons, comme en témoigne le long sous-titre « recherches archéologiques sur l’histoire et les antiquités du pays wallon Belgique, son idiome, sa mythologie, ses lois et usages primitifs les plus remarquables ».
Au moment de la Révolution de 1830, Laurent-François Dethier revient sur la scène politique. À Theux d’abord comme bourgmestre, comme député ensuite : membre du Corps législatif, il est député suppléant au Congrès national en 1830. Il y plaide en faveur d’un régime républicain pour l’État qui vient de faire sa révolution contre les Pays-Bas. Quand une majorité de députés opte pour un système monarchique, L-Fr. Dethier remet immédiatement sa démission. Après les événements de 1830, il est décoré de la Croix de fer.
 

 

Sources

http://www.wallonie2010.eu/DroitsHomme.htm
Paul HARSIN, La Révolution liégeoise de 1789, Bruxelles, Renaissance du Livre, 1954, coll. Notre Passé, p. 97-98, 119-120
Élisée LEGROS, dans La Vie wallonne, III, 1960, n°291, p. 197-202
Gustave DEWALQUE, dans Biographie nationale, t. 5, col. 824-826
Joseph MEUNIER, La personnalité attachante de l’avocat theutois L. F. Dethier, dans Fédération archéologique et historique de Belgique, Annales. XXXIVe session, Congrès de Verviers, 22-25 juillet 1951. Programme du congrès et résumé des communications - textes des mémoires, 1954, p. 57-66
Joseph MEUNIER, Un acteur de la Révolution liégeoise : l’avocat Laurent-François Dethier, 1757-1843, géologue et publiciste, représentant du peuple au Conseil des 500, membre du Congrès national de Belgique et ses correspondants, dans Bulletin de la Société verviétoise d’archéologie et d’histoire, Verviers, Gérard, 1959, vol. 46, p. 7-144
Joël BAUM, Le Theutois Laurent-François Dethier et le Spadois Jean-Guillaume Brixhe, acteurs majeurs de la révolution et de lapériode française dans le pays de Franchimont (1789-1805), Université de Liège, mémoire inédit en Histoire, 2010-2011

 

 

Mandats politiques

Echevin de la Cour de Justice de Theux
Bourgmestre de Theux (1788)
Représentant au Tiers (1790)
Député de l’Ourthe au Conseil des Cinq Cents (1799-1800)
Membre suppléant du Congrès national (1830-1831)