Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Mémorial Maurice DESTENAY

Mémorial Maurice Destenay, réalisé par Marceau Gillard, 29 septembre 1975 ; circa 1976.

Située place des Carmes, du côté du bâtiment de l’Athénée de Liège Ie un mémorial est dédié à Maurice Destenay (Tilleur 1900 – Liège 1973), personnalité libérale importante de la vie politique liégeoise puisqu’après avoir été député et échevin, il devient le bourgmestre de la plus grande ville de Wallonie de l’époque, en l’occurrence entre 1963 et 1973. Très vite après sa disparition, ses amis se réunissent pour lui ériger un monument qui prend place dans l’espace public. Avec un médaillon réalisé sobrement par Marceau Gillard (Louvroil 1904 – Liège 1987), le mémorial Destenay est inauguré en 1975 en même temps que son nom est attribué à l’un des grands boulevards de la cité.

Ayant connu la Grande Guerre durant son adolescence, Maurice Destenay mène une carrière d’instituteur durant tout l’Entre-deux-Guerres, tout en exerçant des responsabilités au sein du Parti libéral ; mobilisé en 1939-1940, ce lieutenant est fait prisonnier de guerre à la suite de la Campagne des 18 Jours et va connaître une captivité de 5 ans similaire à celle de près de 65.000 autres Wallons de sa génération. Actif dans l’action wallonne, il va mener une carrière politique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. 

Ancien président des Jeunesses libérales, opposant affirmé au retour de Léopold III, le député de Liège ne devient pas ministre, mais, désigné à la présidence nationale du Parti libéral (1954-1958), il se flatte d’avoir été l’un des auteurs du fameux Pacte scolaire. Sans doute est-ce la raison de sa désignation comme Ministre d’État en 1966. Conseiller communal (1952), échevin de l’Instruction publique et des Sports (1953-1964), il prend plusieurs initiatives depuis l’hôtel de ville de Liège pour défendre la Wallonie et la langue française. Fédéraliste affirmé, défenseur des Fourons au début des années 1960, il remplace Auguste Buisseret à la tête de la ville de Liège tout en continuant à affirmer des positions wallonnes. Il est le dernier maire libéral de la cité liégeoise, qui s’est largement agrandi après la fusion des communes de 1976.

Durant son maïorat, la ville de Liège était entrée dans une période de grands travaux, selon un plan directeur faisant la part belle aux grandes voies de pénétration vers le centre-ville. Dès lors, le nom de Destenay fut donné à la nouvelle avenue reliant le bord de Meuse au boulevard d’Avroy. Son mémorial y fut aussi inauguré à un endroit particulièrement visible, à l’heure des Fêtes de Wallonie. Cette visibilité s’est singulièrement restreinte quand d’importants travaux justifièrent son déplacement et son installation à hauteur de la place des Carmes, devenue zone piétonne en 1975. La stèle en pierre bleue originale n’a subi aucun changement au cours de ce transfert. Avec ses lignes droites et très simples, la stèle accueille un médaillon réalisé par Marceau Gillard et porte l’inscription suivante :

M. DESTENAY
BOURGMESTRE
           DE LIÈGE
MINISTRE  D’ETAT
  1900-1973

Mémorial Maurice Destenay

En 1974 déjà, Gillard avait reçu commande d’une médaille présentant le profil droit de Maurice Destenay ; Jean Lejeune l’avait jugée « digne des médailleurs liégeois du grand siècle » ; pour le mémorial, il adapte son œuvre et livre une stèle de facture très classique, répondant parfaitement au genre officiel que constitue l’exercice auquel il s’est déjà livré ou se livrera encore pour représenter ou honorer Hector Clockers, Edmond Cathenis, Jean Lejeune, Edgard Scauflaire, Constant Burniaux, Jules Jaumotte et d’autres encore, soit dans l’espace public, soit dans l’espace fermé de cimetières.

Né en France de parents wallons, Marceau Gillard arrive à Liège avec sa famille en 1914. Au sortir de la Grande Guerre, il suit les cours de dessin à l’Académie de Liège avant d’opter aussi pour la sculpture, où il devient l’élève d’Oscar Berchmans. Il se distingue par plusieurs prix durant sa formation (1918-1928). Restaurateur de tableaux (dans les années 20), décorateur de théâtre, il devient professeur dans le réseau provincial liégeois (1931-1949) à Seraing, puis à Huy ; après la Seconde Guerre mondiale, il succède à Oscar Berchmans quand il devient professeur de sculpture à l’Académie de Liège (1949-1970). Membre de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie, Gillard fait partie du groupe « Pointes et Bosses », sous-section figurative de l’association présidée par Marcel Florkin. Aspirant à la réalisation de grands formats, il répond surtout à des commandes officielles et privées, émanant principalement de la région liégeoise. Associé notamment à la décoration du Pont des Arches (« Naissance de Liège » – 6 mètres) et du Pont Albert Ier, il signe l’imposant monument d’hommage aux victimes de Grâce-Berleur, tuées lors des événements de la Question Royale. À Huy, il signe le monument aux prisonniers politiques de la Seconde Guerre mondiale. 

 

Paul DELFORGE, dans Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2000, t. I, p. 482-483
Joseph TORDOIR, Des libéraux de pierre et de bronze. 60 monuments érigés à Bruxelles et en Wallonie, Bruxelles, Centre Jean Gol, 2014, p. 193-196
Jean-Patrick DUCHESNE, Musée en plein air du Sart Tilman, Art&Fact asbl, Parcours d’art public. Ville de Liège, Liège, échevinat de l’Environnement et Musée en plein air du Sart Tilman, 1996
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 626-627
Joseph PHILIPPE, Marceau Gillard dans l’École liégeoise de sculpture, Liège, 1991
Jean BROSE, Dictionnaire des rues de Liège, Liège, Vaillant-Carmanne, 1977, p. 125

Avenue Destenay
Place des Carmes
4000 Liège

carte

Paul Delforge