Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque Étienne LENOIR

Plaque sur la maison natale d’Étienne Lenoir, réalisée par Ernest Bernardy, 1989.

Le premier hommage rendu à Étienne Lenoir, le père du moteur à explosion, s’est déroulé conjointement à Paris et dans son village natal de Mussy-la-Ville. En 1912, une plaque commémorative avec un médaillon de bronze était inaugurée au Conservatoire de Paris, tandis qu’une plaque était apposée sur sa maison natale. Lors de l’attaque allemande d’août 1914, la région des frontières luxembourgeoises n’est guère épargnée et, parmi les nombreuses destructions qui sont alors enregistrées, figure la maison natale de Lenoir. Une fois la paix revenue et la période de reconstruction quasiment achevée, les autorités locales décident, conjointement avec celles d’Arlon, de rendre un nouvel hommage à l’enfant du pays. 

En même temps que le monument réalisé par Paul Dubois est officiellement inauguré à Arlon, une autre cérémonie est l’occasion d’apposer un nouveau mémorial sur la façade du n°27 de la rue de Late (août 1929). Peut-être le temps a-t-il fait son œuvre et fait disparaître ledit mémorial car, en 1961, Wallonie libre déplore qu’aucune initiative d’envergure n’ait été prise pour honorer Lenoir dans son village natal. En 1985, les autorités mussipolitaines confie à Fernand Tomasi le soin de réaliser l’imposant monument installé près de l’église. Quatre ans plus tard, le céramiste Ernest Bernardy rend, à son tour, hommage à Lenoir en réalisant l’œuvre placée au-dessus de la porte d’entrée du n°27 de la rue de Late : une mosaïque composée de 48 carrés (8 x 6), ornée de feuilles de chêne et, au centre, comprenant une automobile ancienne, ainsi que la mention :
ici
    naquit
        Étienne LENOIR

Génial inventeur (notamment de la bougie d’allumage), Étienne Lenoir bénéficie d’une place de choix dans l’histoire des sciences et des techniques. En 1860, il déposait un brevet révolutionnaire pour « un moteur à air dilaté par la combustion des gaz ». Il ne s’agissait là que l’un des nombreux brevets de ce fils de maraîcher parti à Paris pour gagner sa vie et réaliser ses rêves. Être le premier à rouler en voiture dans Paris (en 1863) était certainement l’un d’eux.

Comme de nombreux jeunes Wallons de sa génération, Ernest Bernardy (Athus 1923 – Virton 2000)  voit ses études bouleversées par l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale. Entré à l’École normale de Virton (1937), il obtient le diplôme d’instituteur en 1943, mais il est attiré par la peinture depuis son plus jeune âge. Encouragé par Jules Vinet et Jean Lejour, c’est devant le Jury central qu’il décroche un diplôme lui permettant d’être désigné comme professeur de dessin, tant dans le secondaire qu’à l’École normale. À l’Athénée de Virton, il accomplira toute sa carrière (1947-1986). Avant cela, forcé au travail obligatoire (1943-1944), il passe de longues journées en usine, puis devient surveillant d’internat, ensuite inspecteur adjoint au ravitaillement pendant les premiers mois de la Libération et, durant son service militaire, surveillant des prisonniers de guerre allemands. Parallèlement, cet autodidacte installé à Saint-Mard se fait peintre d’abord, avant de se tourner résolument vers la poterie et la céramique, ainsi que les mosaïques, sans jamais abandonner le pinceau. 

Attiré par les impressionnistes puis par l’œuvre de Van Gogh, Ernest Bernardy représente de nombreux paysages sidérurgiques inspirés par sa ville natale ; il se laisse aussi attirer par d’autres lumières du sud, de la France comme de la Wallonie. S’il possède un chalet en Provence (Puyméras), il vit régulièrement en Gaume (Saint-Mard), où il est le fondateur d’un club de tennis qu’il préside pendant un quart de siècle. Auteur d’illustrations pour quelques livres, Bernardy discipline son art ; son univers se fait plus rigoureux, raisonné et construit. 

Créateur de dizaines de mosaïques murales, il façonne inconsciemment une sorte de musée à ciel ouvert (à Virton, deux athlètes sur une maison privée, pignon de l’ancienne Auberge de Jeunesse, carte historiée de la Gaume, figures du folklore local  et les vieux métiers face au kiosque ; à Saint-Mard, une œuvre de 60 m² sur la façade du complexe sportif, une fresque sur une boulangerie ; à Arlon, une fresque censurée à la FGBT, etc.). L’artiste ne pouvait manquer de raviver, à Mussy, le souvenir d’Étienne Lenoir, comme il l’avait fait, en 1966 déjà, dans un autre style, pour rendre à Virton ses géants Djean et Djeanne d’Mâdy. En 1999, il avait été fait membre de l’Académie luxembourgeoise. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 261-262
Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
Jean CULOT, Les îles où je demeure. Essai sur le peintre et céramiste Ernest Bernardy, Virton, 2000
Virton – Saint-M’Art, Virton, MTG, 2004
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 87

Plaque Étienne Lenoir (Mussy-la-Ville, Musson)

Rue de Late 27
6750 Mussy-la-Ville (Musson)

carte

Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Monument Étienne LENOIR

Monument Étienne Lenoir,  réalisé par Paul Du Bois, 18 août 1929 puis 1961

Bien avant la commune de Mussy (1985), la ville d’Arlon a honoré un illustre inventeur originaire de la région par un monument d’envergure. C’est en effet en 1929 que les autorités locales inaugurent le mémorial Étienne Lenoir dont la réalisation a été assurée par le sculpteur Paul Dubois.
Né à Mussy-la-Ville en 1822, Lenoir est un inventeur « multirécidiviste ». Plus de cent brevets sont enregistrés à son nom. Mais c’est son brevet déposé en 1860 « Pour un moteur à air dilaté par la combustion du gaz de l’éclairage enflammé par l’électricité » qui constitue sa contribution majeure à l’évolution des sciences et des techniques. Au sein de la Société des Moteurs Lenoir-Gautier et Cie qu’il a créée à Paris, où il réside depuis 1838, il parvient à mettre au point le premier moteur à combustion interne. « Il ne manquait que la compression à ce premier moteur à gaz industriel pour réaliser le cycle universellement adopté par la suite ». 

En septembre 1863, la première automobile Lenoir équipée d’un moteur à gaz de 1,5 CV effectue 18 kilomètres en 3 heures. Les moteurs Lenoir ne cesseront d’être construits et améliorés jusqu’à la fin du siècle, sans assurer la prospérité de son inventeur qui continue à déposer des brevets dans des domaines très divers. Néanmoins, plusieurs Prix importants couronnent ses découvertes dont l’importance ne fut réellement appréciée qu’après son décès, en 1900, à Paris. La ville lumière est d’ailleurs la première à immortaliser Étienne Lenoir en lui dédiant une plaque commémorative et un médaillon de bronze au Conservatoire de Paris, en même temps qu’une plaque est apposée sur sa maison natale, à Mussy (1912). Suite à sa destruction par les Allemands en août 1914, il fut décidé d’y ériger un nouveau mémorial. Dans le même temps, Arlon inaugure, le 18 août 1929, un monument plus ambitieux, dans le parc Léopold Ier.

Créé vers 1845 sur l’emplacement de l’ancienne muraille de la ville, ce parc communal accueillait aussi un kiosque à musique et la statue du roi Albert Ier en tenue de militaire lorsqu’en 1961, il est l’objet d’une profonde transformation. Outre la destruction du kiosque et le déplacement du roi Albert devant l’Église St-Martin, il perd le monument dédié à Étienne Lenoir ; au lieu de bénéficier d’un espace fortement dégagé tout autour de lui, celui-ci est relégué hors du Parc, sur l’esplanade située en face de l’Institut Notre Dame d’Arlon (INDA), en contre-bas de la rue Lenoir, entre la rue Joseph Netzer et la rue de l’Esplanade. 

Placé néanmoins dans un cadre arboré et bien entretenu, le mémorial Lenoir est nettement moins visible, notamment parce qu’il est privé de la totalité de son socle. À l’origine, en effet, Paul Dubois avait conçu un ensemble sculptural relativement complexe : devant une haute et large colonne en forme d’obélisque à trois niveaux, dont le plus haut comporte un écusson où se trouve représenté le profil gauche du célèbre inventeur, le sculpteur a ajouté une femme qui se tient debout, et qui donne l’impression d’enlever le voile en tissu qui cachait jusqu’alors le portrait de Lenoir. La position de la dame est telle que le portrait apparaît entre ses bras tendus. 

Tout cet ensemble est encore visible à Arlon ; il manque le socle rectangulaire initial dont la hauteur représentait le quart de la taille totale du monument. De plus, comme cet ensemble était placé sur une sorte de butte entourée d’une grille en fer forgé, le mémorial Lenoir tel qu’il était présenté en 1929 surmontait nettement la taille des « spectateurs ». Cet effet de « domination » n’existe plus aujourd’hui et le panneau original qui reprenait la dédicace a disparu et laissé la place à une plaque (don du syndicat d’initiative d’Arlon) posée au pied du monument actuel. Le contenu est similaire et sans surprise :
A ÉTIENNE LENOIR
1822 – 1900
INVENTEUR DU MOTEUR A GAZ.

Concernant le sculpteur qui signe le monument Lenoir, tous les textes évoquent systématiquement « le sculpteur français Paul Dubois ». On ne peut que s’étonner de cet unanimisme à l’égard d’un artiste, certes célèbre, mais décédé depuis 1905… Ne s’agirait-il pas plutôt que sculpteur wallon Paul Du Bois, né Dubois et qui avait très tôt changé la graphie son nom (Paul Du Bois) afin d’éviter d’être confondu avec… son célèbre homonyme français ? Si l’on observe le style du monument, on est tenté de reconnaître la griffe de l’artiste wallon qui recourt volontiers à une allégorie féminine pour mettre davantage en évidence son sujet. C’est particulièrement évident dans le cas arlonais. 

Sous réserve d’éléments contraires, il semble par conséquent que, dans une production déjà abondante, il faille ajouter le monument Lenoir d’Arlon à l’œuvre de celui qui fut formé à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles (1877-1884), qui fut l’élève de Louis François Lefèbvre, de Jean-Joseph Jaquet et d’Eugène Simonis, avant de profiter des conseils de Charles Van der Stappen. 

Ouvert à l’avant-garde sans renier son attachement à la Renaissance, membre-fondateur du groupe bruxellois d’avant-garde le Cercle des XX, puis de la Libre Esthétique, il excelle dans les portraits quand lui parviennent les premières commandes officielles de la ville de Bruxelles. Sans abandonner des œuvres de son inspiration qui sont remarquées et primées lors de Salons et d’Expositions à l’étranger, il réalise le monument Félix de Mérode (Bruxelles, 1898) qui symbolise le début de son succès. En 1900, il est nommé professeur à l’Académie de Mons (1900-1929) et, deux plus tard, il est chargé du cours de sculpture ornementale (1902-1905), puis de sculpture d’après l’antique (1905-1910) à l’Académie de Bruxelles où il reste en fonction jusqu’en 1929. En 1910, il succède à Charles Van der Stappen à l’École des Arts décoratifs. Vice-président du jury d’admission des œuvres pour le Salon des œuvres modernes de l’Exposition internationale de Charleroi (1911), Du Bois avait signé d’autres monuments commémoratifs avant celui d’Arlon : ainsi Alfred Defuisseaux (Frameries, 1905), Antoine Clesse (Mons, 1908). En 1931, il signe tour à tour le monument Frère-Orban (Liège) et Viehard (Tournai). On lui doit aussi des bijoux, des médailles (dont celle de l’Exposition universelle de Liège en 1905). 

Sources 

Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. II, p. 517
Jean-François POTELLE (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000, p. 191
Paul Du Bois 1859-1938, édition du Musée Horta, Bruxelles, 1996
Anne MASSAUX, Entre tradition et modernité, l’exemple d’un sculpteur belge : Paul Du Bois (1859-1938), dans Revue des archéologues et historiens d’art de Louvain, Louvain-la-Neuve, 1992, t. XXV, p. 107-116
Anne MASSAUX, dans Nouvelle Biographie nationale, t. 4, p. 142-145

Monument Étienne Lenoir

Place Léopold Ier puis esplanade de la rue Étienne Lenoir
6700 Arlon

carte

Paul Delforge

Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée - Sofam

Mémorial Étienne LENOIR

Mémorial Étienne Lenoir, réalisé par Fernand Tomasi, septembre 1985.

À l’arrière de l’église de Mussy, un solide bloc pesant 10 tonnes en grès d’Esch-sur-Alzette symbolise l’évolution et les progrès de l’automobile, de l’aviation et de la navigation. Inauguré en 1985, il prend place dans le village natal d’Étienne Lenoir (1822-1900), le célèbre inventeur du moteur à explosion. Réalisé par le sculpteur Fernand Tomasi qui a choisi lui-même la pierre dans une carrière de Tétange, au grand-duché de Luxembourg, le mémorial comporte sur son flanc droit, gravées dans la pierre, une dizaine de silhouettes d’automobiles qui reflètent l’évolution de ce moyen de locomotion. Sur la partie centrale, apparaît un moteur stylisé, avec ses bielles et ses pistons ; en bas à droite, un cercle symbolisant sans doute une roue laisse apparaître en son milieu une série de mots gravés et inscrits de manière artistique : « Étienne Lenoir / Inventeur/ 1860 / Mussy »
Le portrait de l’inventeur est, quant à lui, sculpté sur la partie supérieure.

Depuis le début du XXe siècle, diverses initiatives avaient été prises, à Paris comme à Arlon, pour commémorer l’invention d’Étienne Lenoir ; mais à Mussy-la-Ville, aucune initiative ne semblait vouloir naître, ainsi que le déplorait le mouvement Wallonie libre en 1961. Finalement, les autorités locales décidèrent d’un mémorial qui fut érigé à l’arrière de l’église. Les Mussipolitains rendaient ainsi officiellement hommage au plus célèbre des enfants du pays. 

Depuis lors, à diverses reprises, des « concentrations » se déroulent au pied du mémorial, comme celle organisée par la province de Luxembourg, en mai 2010, à l’occasion des 150 ans du dépôt du brevet n°43624 pour « un moteur à air dilaté par la combustion des gaz ». Il ne s’agissait là que l’un des nombreux brevets de ce fils de maraîcher parti à Paris pour gagner sa vie et réaliser ses rêves. Génial inventeur (notamment de la bougie d’allumage), Lenoir entre progressivement dans l’histoire des sciences et des techniques et l’on accorde de plus en plus d’attention à l’importante invention qui fut la sienne. Un musée rappelle l’activité qui fut celle de celui qui fut le premier à rouler en voiture dans Paris. C’était en 1863. 

Sources 

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 261-262
Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
 

Mémorial Étienne Lenoir

Rue de Late
6750 Mussy-la-Ville (Musson)

carte

Paul Delforge

Lenoir Etienne

Conception-Invention

Mussy-la-Ville 12/01/1822, La Varenne Saint Hilaire 03/08/1900

Énoncer les multiples inventions d’Étienne Lenoir revient à lire les pages d’un bottin de téléphone. Le trait est certes exagéré mais, en tentant de cerner le personnage, Jean Pelseneer a réussi à identifier près d’une centaine de brevets déposés par cet autodidacte, né en Gaume et débarqué à Paris à l’âge de 16 ans sans aucune formation scolaire. Illettré, mais capable de percevoir le moyen d’améliorer et de perfectionner des techniques ou des objets, Étienne Lenoir fut bien sûr amené à exercer une multitude de petits métiers pour subsister, avant de trouver sa voie. 

Contrairement à ses illustres contemporains wallons (Gramme, Solvay ou Empain), ni la notoriété ni l’aisance ne vinrent récompenser l’imagination de l’inventeur : pourtant, au milieu du XIXe siècle et au cœur de la Révolution industrielle, Étienne Lenoir apporta une contribution majeure en déposant un brevet « Pour un moteur à air dilaté par la combustion du gaz de l’éclairage enflammé par l’électricité » (1860).

Après avoir été garçon de café, l’exilé parisien entre comme ouvrier dans une fabrique d’émaillage où il met au point un procédé permettant d’obtenir un émail blanc utilisé pour les cadrans de montre (1847). Il s’intéresse aussi à l’électrolyse et améliore la méthode électrolytique pour la fabrication de revêtements métalliques : la galvanoplastie. Ce procédé lui est racheté en 1851 par une firme parisienne chargée de la décoration de l’Opéra de Paris. Il soumet à des brevets d’autres inventions et améliorations de techniques existantes : amélioration du système de freinage électrique des wagons de chemin de fer (1855), système de signalisation pour le chemin de fer (1856), pétrin mécanique, régulateur pour moteur électrique, étamage du verre (1857). Mais il reste traversé par un objectif plus ambitieux : réaliser un moteur.

Ses visites fréquentes au Conservatoire des Arts et Métiers et les cours du soir gratuits qu’il suit en compagnie d’autres amis inventeurs lui permettent de passer à l’acte en 1859. Au sein de la Société des Moteurs Lenoir-Gautier et Cie à Paris qu’il vient de fonder avec un capital initial de deux millions de francs-or, il réunit toutes les données connues à l’époque et, en mécanicien ingénieux, parvient à mettre au point le premier moteur à combustion interne (23 janvier 1860). Détenteur d’un brevet d’exclusivité pour 15 ans, sa société produit plusieurs centaines de moteurs utilisés dans le bassin parisien. En août 1861, le premier bateau à moteur équipé d’un moteur Lenoir est présenté sur la Seine au roi Louis-Napoléon. « Il ne manquait que la compression à ce premier moteur à gaz industriel pour réaliser le cycle universellement adopté par la suite. En 1862, Lenoir remplace le gaz par le pétrole ». En septembre 1863, la première automobile Lenoir équipée d’un moteur à gaz de 1,5 CV effectue 18 kilomètres en 3 heures. Les moteurs ne cesseront d’être construits et améliorés jusqu’à la fin du siècle, sans assurer la prospérité de son inventeur qui continue à déposer des brevets dans divers domaines.

En 1878, le Prix Montyon de l’Académie des Sciences de l’Institut de France récompense ses travaux sur l’étamage du verre. Le Grand Prix d’Argenteuil de la Société d’Encouragement couronne ses recherches sur le tannage du cuir au moyen d’ozone (12.000 francs-or). En 1881, la IIIe République lui accorde la nationalité française et le distingue de la Légion d’Honneur pour services rendus lors du siège de Paris en 1870-1871 : l’appareil télégraphique qu’il a perfectionné a favorisé les communications internes. Qualifié d’ingénieur à la fin de sa vie, Étienne Lenoir est inhumé au cimetière du Père Lachaise et c’est surtout après sa disparition que l’on prit conscience de l’importance de son invention.
Les deux premiers moteurs construits par Lenoir sont exposés au Conservatoire national des Arts et Métiers à Paris, tandis que d’autres sont conservés dans des musées européens. 

Une plaque commémorative et un médaillon de bronze sont inaugurés au Conservatoire de Paris, et une plaque est apposée sur sa maison natale (1912) ; celle-ci est cependant détruite par les Allemands en août 1914 et un nouveau mémorial est inauguré le 18 août 1929, en même temps qu’un monument à Arlon. 

D’autres hommages sont régulièrement organisés pour célébrer le génie de celui qui contribua à la mise au point du tout premier moteur à explosion.

Sources

Jean-François POTELLE (dir.), Les Wallons à l’étranger, hier et aujourd’hui, Charleroi, Institut Destrée, 2000, p. 191
Jean-Pierre MONHONVAL, Étienne Lenoir. Un moteur en héritage, Virton, Michel frères, 1985
Jean PELSENEER, dans Biographie nationale, t. XXXIII, col. 355-364
Histoire de la Wallonie, (L. GENICOT dir.), Toulouse, 1973, p. 406

Carrefour de l'Europe ouvert à ses influences, la Wallonie a, de tout temps, été traversée par les grands courants scientifiques et technologiques. Les Wallons en ont assimilé les multiples apports et ont développé leurs propres techniques, participant ainsi, parfois de façon décisive, à l’évolution de la connaissance. Des parcours édifiants que vous pourrez retrouver dans cette leçon, au travers d’une synthèse et de documents éclairants.