Projets allemands concernant la frontière occidentale du Reich

On ne sait rien de précis sur les intentions du régime nazi à propos de la réorganisation de l’Europe. Plusieurs hypothèses ont circulé, pour « après la victoire du Reich sur la France ». Dans les milieux tournant autour d’Abetz, on ambitionnait de laisser le territoire français intact – l’Alsace et la Lorraine mises à part – afin d'assurer à la France le second rang en Europe, derrière l'Allemagne mais devant l'Italie. D’autres, au contraire, projetaient de ramener la France à ses frontières antérieures aux traités de Westphalie et même, pour certains, à 1552, (donc sans Metz, Toul et Verdun), correspondant sensiblement à la ligne de partage des eaux entre, d'une part, la Manche (Somme et Seine), et, d’autre part, la Mer du Nord (Escaut, Meuse, Moselle et Rhin), plus la Franche Comté, et même (projet le plus extrême) de soustraire à la France la Bourgogne (ducale) proprement dite. L’idée de rendre la Bretagne indépendante est aussi avancée, comme celle de l’intégrer à une confédération celte comprenant l'Ecosse, l'Irlande et le Pays de Galles.
Il ressort aussi de certains projets, vagues et non publiés, que l'Allemagne aurait annexé directement non seulement l'Alsace-Lorraine, le territoire de Belfort et le bassin de Briey, mais aussi le Nord (Flandre française de langue flamande étendue jusqu'au Cap Gris Nez), plus Lille (Ryssel), rattaché à une « grande Néerlande future », faisant elle-même partie plus ou moins intégrante du Reich ; de plus, aurait vu le jour une « Lotharingie » avec Nancy comme capitale et Léopold III comme roi, et composée des parties orientales de l'Artois et de la Picardie, de la Wallonie moins Eupen-Malmedy, de Bruxelles, de la Lorraine française (avec ou sans le Barois) et de la Franche-Comté. Cette « Grande-Bourgogne » (sans la Bourgogne…) – rêvée également par des rexistes belges – aurait formé un État tampon entre la France et l'Allemagne. La France n'aurait conservé qu'un petit fragment de sa frontière, à la source de l'Oise. Cette ligne Bruxelles-Morez correspond sensiblement à l'ancienne frontière entre la Neustrie et l'Austrasie, à celle du Saint-Empire avant les annexions françaises.

Références
DamiA98 ; FH05-228


Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)