CHARLIER dit la Jambe de Bois Jean-Joseph

Révolutions

Liège 04/04/1794, Liège 31/03/1866

Jean-Joseph Charlier, passé à la postérité sous le nom de Charlier dit la Jambe de Bois, apparaît comme un personnage à ce point mythique qu’on le dirait légendaire. Une importante littérature s’est emparée du personnage et lui a fait vivre des aventures parfois rocambolesques, de même que les artistes qui voulurent le représenter, les uns avec sa quille de bois à droite, les autres la plaçant à gauche… Or, cet homme de condition modeste a bien existé et celui qui était à l’origine un simple tisserand a bien participé aux Journées de Septembre 1830, incarnant les volontaires liégeois qui, comme d’autres Wallons, venaient faire la Révolution dans les rues de Bruxelles.

Né au moment où l’ancienne principauté de Liège était sur le point d’être annexée à la France, J-J. Charlier est incorporé comme soldat, en septembre 1813, dans le 69e Régiment d’infanterie au service de Napoléon. Avec certitude, on sait qu’il fait la campagne d’Allemagne ; le doute s’installe ensuite car on perd sa trace au printemps 1814 ; revient-il au pays, désertant l’armée française ou perd-il une jambe à Waterloo en 1815 ? L’hypothèse la plus vraisemblable est son départ de l’armée impériale un mois après la première abdication de Napoléon, son retour à Liège, sans blessure, avant de rejoindre ses compagnons d’armes durant la Campagne des 100 Jours. Ce serait sur le champ de bataille de Waterloo que le Liégeois aurait été blessé ; mal soignée, la jambe s’infecta alors qu’il était rentré à Liège et on dut l’amputer pour stopper la gangrène. À partir de 1818, il perçoit d’ailleurs une petite pension de l’État en raison de son handicap.

En septembre 1830, il est parmi les premiers volontaires liégeois prêts à en découdre avec les « Hollandais ». S’étant emparé de deux canons dans la « cité ardente », les volontaires se rendent à Bruxelles ; ils y arrivent début septembre ; durant les journées décisives (23-27 septembre), le Liégeois se distingue en maniant avec habileté « Willem », c’est le nom de son canon ; il finit par décourager les soldats orangistes au parc de Bruxelles. En guise de récompense, le gouvernement provisoire le nomme capitaine d’artillerie à la retraite (décembre 1830). Charlier dit la Jambe de Bois restera encore en service durant les premiers mois de l’indépendance, avant de s’en retourner à la vie civile et de reprendre son métier de tailleur. Décoré de la Croix de fer, médaillé de Sainte-Hélène, chevalier de l’ordre de Léopold, ce véritable « héros de 1830 » vivra encore longtemps dans son quartier de Sainte-Walburge, disparaissant à l’âge de 72 ans. En 1853, il publiera ses mémoires, y précisant notamment que c’était de la jambe droite qu’il était amputé, sans jamais préciser dans quelles circonstances il l’a perdue bien avant 1830.

Sources

La Vie wallonne, septembre 1928, XCVII, p. 65
René HENOUMONT, Charlier dit la jambe de bois : le canonnier liégeois de 1830, Bruxelles, Legrain, 1983
Paul EMOND, Moi, Jean-Joseph Charlier dit Jambe de Bois, héros de la révolution belge, Bruxelles, 1994 (rideau de Bruxelles)
Les journées de septembre 1830, Mémoire de Jean-Joseph Charlier dit la jambe de bois, capitaine d’artillerie en retraite, Liège, 1967 (première édition en 1853)