Colin Maillard Jean

Huy Xe/XIe siècles

Jouer à Colin-Maillard, des générations d’enfants ont adoré : les yeux bandés, un chasseur doit toucher d’autres joueurs qui tournent autour de lui ; celui qui est touché doit laisser au chasseur le soin de reconnaître son visage ; s’il est identifié, le « chassé » prend la place du chasseur. Ce jeu paraît vieux comme le monde, mais son nom trouve ses origines dans la vallée de la Meuse. La légende veut en effet qu’un guerrier valeureux, répondant au nom de Jehan Colin, aurait défendu la ville de Huy lors d’une attaque du comte Lambert de Louvain. Bien que ses yeux aient été crevés dans la bataille, la légende veut toujours que le gaillard ait poursuivi le combat, frappant au hasard tout autour de lui. Il aurait été anobli par le roi Robert en 999 et le nom Maillard aurait été ajouté à son patronyme pour se souvenir du maillet qu’il brandissait lors du combat.
 

Une autre tradition affirme que c’est un certain Jean Coley qui eut les yeux crevés lors d’une bataille contre les Frisons en 1017. Surnommé le « Grand Maillart », ce Colin-maillard serait l’ancêtre de la famille des de Maillart, une ancienne famille ardennaise, propriétaires du château de Landreville (en Champagne-Ardenne, sur la commune de Bayonville) : au premier étage de cette demeure, on trouve une cheminée monumentale dont les piliers sont sculptés et représentent le visage du fameux Colin-Maillard.
 

Quoi qu’il en soit, on ne peut suivre M. Tournier quand il assimile à la Flandre le comté de Huy : aux Xe et XIe siècles, ce comté lotharingien bientôt intégré dans la future principauté de Liège s’étendait à ce point vers le sud que la proximité avec Bayonville ne doit pas étonner. Le personnage est entré de longue date dans le folklore hutois, qui entretient sa mémoire, comme tous ceux qui évoquent son nom lors d’un jeu les yeux bandés.
 

Sources

Michel TOURNIER, Le Vent Paraclet, Paris, Folio Gallimard, p. 117