Henry Albert

Académique, Philologie

Grand-Manil 20/03/1910, Nancy 22/02/2002

Alors qu’il entame une carrière universitaire prometteuse, Albert Henry est mobilisé (1938) et rejoint, en 1940, l’État-major de corps d’armée à la Citadelle de Namur. En Flandre, au moment de la capitulation du 28 mai 1940, il est fait prisonnier de guerre et interné en Allemagne durant la durée des hostilités comme 65.000 jeunes Wallons de sa génération. Captif à l’Oflag de Tibor, de Prenzlau (1941-1942) puis de Fischbeck (1942-1945), il cherche le réconfort dans l’écriture et le souvenir de la terre natale. C’est derrière les barbelés de l’Oflag de Prenzlau qu’il écrit Offrande wallonne, chant lyrique qui évoque les spécificités de la Wallonie, tout en faisant le tableau de l’apport de la Wallonie aux cultures romanes. Il observe que la façon de penser et d’agir face aux événements forme l’âme commune des Wallons. À son retour de captivité, il publie ce texte, chez Georges Thone, sans changer le moindre mot. Plusieurs éditions suivront, connaissant autant de succès que son étude scientifique sur l’Histoire des mots wallons et Wallonie qui reste la référence sur le sujet.

Docteur en Philologie romane de l’Université libre de Bruxelles (1932), lauréat du Concours des Bourses de Voyage du Gouvernement (1934), élève diplômé de l’École pratique des Hautes Études de la Sorbonne à Paris (1938), aspirant FNRS (1936-1940), chargé de cours à l’Université de Gand (1946-1949), Albert Henry est dans son domaine. Nommé professeur à l’Université de Gand (1949-1958), chargé du cours de dialectologie wallonne à l’Université libre de Bruxelles (1949), il y est finalement nommé professeur (1958-1976) et réorganise l’ensemble des programmes de cours, donnant ses lettres de noblesse à la philologie romane à l’Université de Bruxelles. « Romaniste complet, médiéviste de classe (son édition des œuvres du trouvère brabançon Adenet le Roi  (…) est une véritable somme), wallonisant, linguiste, stylisticien, Albert Henry a su imprimer à toutes ses œuvres un cachet très personnel de rigueur et de finesse ; il a tracé nombre de nouveaux chemins que ses successeurs, aujourd’hui, parcourent avec succès » (WPH, t. III). Philologue, essayiste, écrivain, ami de Saint-John Perse, spécialiste de Rimbaud, Albert Henry a été honoré de plusieurs prix de son vivant, et a été professeur invité dans plusieurs universités européennes et américaines.

Défenseur de la langue et de la civilisation françaises, attentif à la question wallonne, il dénonce les lois qui fixent le choix de la langue au nom d’un territoire, au détriment des hommes qui y vivent. En 1976, il est l’un des 143 signataires de la Nouvelle Lettre au roi (29 juin), destinée à dénoncer l’extrême lenteur mise dans l’application de l’article 107 quater de la Constitution ; il plaide ainsi en faveur d’un fédéralisme fondé sur trois Régions : Bruxelles, Flandre et Wallonie.

Sources

Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, Institut Destrée, 2001, t. II, p. 798-799
Jean-Marie CULOT, Bibliographie des Écrivains français de Belgique, t. 3, p. 78-80
Freddy JORIS, Natalie ARCHAMBEAU (dir.), Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 1995
La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Lettres - arts - culture, t. III, p. 146, 166

Œuvres principales

Offrande wallonne, Liège, Thone, 1946
L’Œuvre lyrique d’Henri III, Duc de Brabant (1948)
Les Œuvres d’Adenet le Roi (1951-1956)
Chrestomathie de la littérature en ancien français (1953)
Langage et Poésie chez Paul Valéry (1952)
Études de Lexicologie française et gallo-romane (1960)
Syntaxe expressive (ancien français et français moderne) (1960)
Le jeu de Saint-Nicolas de Jehan Bodel (1962)
Amers de Saint-John-Perse (1963)
Wallon et Wallonie, esquisse d’une histoire sémantique, Fondation Plisnier, 1965
Le Testament de Villon (1974)
Contributions à la lecture de Rimbaud, 1998
Plusieurs études critiques sur Saint-John Perse et Rimbaud
Esquisse d’une Histoire des mots Wallon et Wallonie, Charleroi, Institut Destrée, 1990, 3e éd., coll. Notre Histoire

Distinctions

Lauréat du Concours décennal du gouvernement (1950-1959)
Prix Lagrange (1962) de l’Institut de France
Prix Honoré Chavée (1963) de l’Institut France