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Jean de Liège

Culture, Sculpture

DIT HENNEQUIN DE LIÈGE, VOIRE HENNEQUIN DE LA CROIX

Liège date inconnue, Paris ( ?) 1381 ou 1382

Connu tantôt sous le nom de Jean de Liège, Jehan de Liège, Hennequin de Liège, voire Jean Hennequin de Liège ou même Hennequin de la Croix, ce sculpteur s’est façonné une solide réputation en principauté dans l’art funéraire de son temps. Ses talents lui valent d’être invités en France comme en Angleterre. Ainsi le rencontre-t-on à Paris en 1361, moment où il contribue à l'exécution d'une statue de Jeanne de Bretagne pour la chapelle des Dominicains à Orléans. Chef d’atelier de sculpture parisienne, Jean de Liège collabore avec Raymond du Temple à la réalisation du  grand escalier du Louvre : il est responsable des statues du roi et de la reine (vers 1364). À partir de 1368, il construira le tombeau qui aura à accueillir le cœur de Charles V (en 1380), dans la cathédrale de Rouen (l’œuvre est détruite à la fin du XVIIIe siècle). Le sculpteur – imagier semble avoir aussi beaucoup travaillé pour Mahaut d’Artois, et sa renommée paraît bien établie lorsqu’il est invité par Édouard III, roi d’Angleterre.

Bien que sculpteur favori du roi Charles V (dont le règne s’étend de 1364 à 1380), on rencontre en effet Hennequin à Londres : le circuit commercial Hainaut-Angleterre a été renforcé au XIVe siècle par les épousailles d'Edouard Ier avec Philippa de Hainaut ; celle-ci connaît peut-être la réputation du Liégeois. C’est en tout cas sa volonté qui est rencontrée lorsque le sculpteur de Liège arrive à la Cour anglaise. Du vivant de la reine, il réalise le tombeau de Philippa de Hainaut (1311-1369), œuvre que l’on peut encore admirer dans la chapelle de Saint-Édouard dans le chœur de l’abbatiale de Westminster. Le cénotaphe en marbre noir était historié de trente statuettes et disposait d’un décor très varié et même coloré. Le temps et les destructions ont cependant fortement altéré l’œuvre originale.

De retour en France, Jean de Liège bénéficie aussi du soutien de Jeanne d’Evreux (décédée en 1371), arrière-petite-fille de Saint-Louis, et troisième femme du roi Charles IV. Pour elle, Hennequin réalise le gisant du roi Charles IV le Bel (décédé en 1328) destiné à Saint-Denis. S’inscrivant dans la tradition funéraire de son temps qu’il magnifie cependant, il place un lion et une lionne sous les pieds de ce roi, symbole de force d’une part, du rejet de la tentation et du péché d’autre part. Sous les pieds de Jeanne, il placera deux chiens en signe de fidélité de la veuve à l’égard de la mémoire de son mari. Datés de 1371-1372, les deux marbres blancs, d’une hauteur d’un mètre 35, et posés sur un marbre noir de Dinant sont visibles au Louvre. Pour le roi Charles V, il réalisera encore deux sépultures en marbre blanc en l’honneur de deux fous du roi (1374) ; œuvres exceptionnelles, elles n’ont pas traversé le temps.

Sources

Jules HELBIG, La sculpture et les arts plastiques en pays de Liège et sur les bords de la Meuse, Bruges, 1890, p. 89-94
Alexandre VIDIER, Un tombier liégeois à Paris au XIVe siècle : inventaire de la succession de Hennequin de Liège (1382-1383), dans Mémoires de la Société de l'histoire de Paris et de l'Île-de-France, t. XXX, 1903, p. 280-308