Pousseur Henri

Culture, Musique

Malmedy 23/06/1929, Liège 06/03/2009

Au cœur de la musique contemporaine, Henri Pousseur occupe une place toute particulière. Initié par Pierre Froidebise et André Souris, il se construit au contact des Boulez, Berio et autres Stockhausen et s’impose lui-même comme « le chef de file de l’avant-garde musicale en Wallonie » (P-J. Foulon).

Formé par Eugène Micha à Stavelot, interpellé par les symphonies d’Anton Bruckner, le jeune Pousseur poursuit sa formation au Conservatoire de Liège et s’engage totalement dans la musique sérielle (1946). Mais le genre n’est guère apprécié dans la Cité ardente, et il achève ses études au Conservatoire de Bruxelles. Orienté d’abord par P. Froidebise (vers la musique wébernienne) et par A. Souris (qui modèle sa personnalité d’avant-garde), l’organiste de l’église Saint-François-de-Sales à Liège s’initie au dodécaphonisme, enseigne à l’Athénée d’Eupen avant de rencontrer Pierre Boulez puis Karlheinz Stockhausen, et d’inscrire son nom à la pointe des chercheurs orientés vers la musique expérimentale.

Artiste d’avant-garde, compositeur rigoureux, théoricien, il fonde le Studio de Musique électronique de Bruxelles (1958), fréquente les studios de Milan et de Cologne, et les hauts lieux de la création contemporaine (Darmstadt et Donaueschingen en Allemagne, le Domaine musical à Paris), et tente de concilier les tentations de l’électronique à son souci de réaliser une musique vivante, qui accorderait à l’interprète une liberté d’action (musique aléatoire). Un contrat avec Universal pour l’enregistrement de disques lui permet de quitter l’enseignement (il était professeur à l’Athénée de Forest) pour se consacrer entièrement à son art. En 1961, il fonde avec Pierre Bartholomée l’ensemble « Musiques nouvelles » pour jouer adéquatement sa propre œuvre mobile Répons. L’année précédente, il a entamé, avec Michel Butor, l’écriture de Votre Faust, œuvre qui permet l’intervention du hasard par le biais des spectateurs, tout en continuant à produire de multiples autres réalisations (1960-1967). Outre une longue et fructueuse collaboration avec M. Butor, Pousseur amorce ainsi une importante démarche de théorisation, afin de pouvoir généraliser les découvertes de ses multiples expériences. Plusieurs livres et articles en témoignent qui s’ajoutent à de nombreuses compositions.

Professeur aux universités de Darmstadt, Bâle, Cologne et New-York/Buffalo, il enseigne à nouveau à Liège à partir de 1970. Professeur de composition, il inaugure le Centre de Recherches musicales de Wallonie, avec l’aide de Philippe Boesmans, P. Bartholomée et Robert Wangermée. Ce foyer très créatif offre à de jeunes artistes d’approfondir leurs recherches et de réaliser des œuvres collectives. Au Palais des Congrès de Liège (1971), Pousseur organise le Midi-Minuit qui attire la foule et connaît un retentissement international. Il poursuit avec Le temps des cerises et Jardin d’espoir wallon (1973). Professeur de musicologie à l’Université de Liège, il devient le directeur du conservatoire (1975-1994) avec lequel il s’était séparé 25 ans plus tôt. Avec quelques artistes partageant ses expériences musicales, il met l’accent sur la diversité pédagogique, ouvre des classes de jazz, d’improvisation et de pratique de la musique contemporaine.

La renommée de Pousseur a franchi toutes les frontières ; joué dans les grands festivals et étudié dans les universités, « il a su concevoir des œuvres utopiques où il aspire à réconcilier les langages de toutes les musiques du passé et du présent dans une conception » (Wangermée). Entre 1984 et 1987, il supervise à la demande du gouvernement français la réforme des études musicales et le lancement de l’Institut de Pédagogie musicale, premier élément de la nouvelle Cité de la Musique créée par le Ministère français de la Culture sur le site de La Villette à Paris. Animateur et fondateur de la revue Marsyas, il se consacre entièrement à la création, dans les années 1990, en multipliant les expériences.

Plusieurs maisons européennes ont édité les dizaines de partitions d’Henri Pousseur dont l’œuvre a été saluée de son vivant : docteur honoris causa des Universités de Metz et de Lille III,  il a reçu le Grand prix du disque 2004 de l’Académie Charles Cros. Ses archives sont déposées à la Fondation Sacher à Bâle.

Sources

Wallonie. Atouts et références d’une région, Namur, 2005
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. III
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. IV
La Wallonie à l’aube du XXIe siècle, Namur, Institut Destrée, Institut pour un développement durable, 2005
Sonatine pour piano, 1949

Œuvres principales

Séismogrammes, 1954
Scambi, 1957
Madrigal I, 1958
Répons, 1960 à John Cage
Trois Visages de Liège, 1961
Votre Faust, 1961
Mnémosyne, 1968
Crosses of Crossed Colors, 1970
Icare Apprenti, 1970
Liège à Paris, 1977
Flexions I, 1979
La seconde Apothéose de Rameau, 1981
La Rose des Voix, 1982
Traverser la Forêt, 1987
Seize Paysages planétaires, 2000
Voix et vues planétaires, 2003
Dépli et Configuration de l’Ombre, 2007
Auguri per i Lustri Futuri, 2007
Musique croisée, L’Harmattan, 1997
Ecrits théoriques, Mardaga, 1954-1967
Série et harmonie généralisées, 2009