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Peers Willy

Officier (2015)

Willy Peers naît à Kain le 17 mars 1924, dans un milieu libre penseur. Durant la guerre, après ses études secondaires, il refuse le Service du travail obligatoire instauré par l’occupant et rejoint la Résistance comme soldat sanitaire. Dès ce moment, il affirme sa volonté de devenir médecin afin de « servir l’humanité ». Il réussit sa première candidature en 1947 devant le jury central.

À dix-sept ans, il adhère au Parti communiste dont il restera membre jusqu’à la fin de sa vie. Il s’engage en faveur d’un service national de la santé puis d’une politique de santé publique qui permette un accès de tous à des soins de qualité.

Devenu obstétricien - il exercera à la maternité provinciale de Namur de 1959 à son décès, en 1984 -, le docteur Peers s’engage en faveur de la diffusion de la technique de l’accouchement sans douleur, méthode d’origine soviétique et qui s’implante en France dans certaines cliniques progressistes. Il s’investit dans la préparation à l’accouchement et est chargé par l’ONE d’organiser un enseignement sur ce thème, destiné aux médecins, aux infirmières et aux accoucheuses. 

Willy Peers mène un triple combat : pour l’introduction de l’accouchement sans douleur, la diffusion d’une contraception moderne (toute propagande en sa faveur est interdite en Belgique depuis 1923) et la modification de la législation réprimant l’avortement (poursuivi sur base des articles 348 à 353 du Code pénal de 1867). En ce sens, il fonde, en 1970, la Société belge pour la légalisation de l’avortement.

Pratiquant des interruptions volontaires de grossesse sans publicité mais en dehors de la clandestinité, le docteur Peers rompt la loi du silence qui pèse sur cette question. L’objectif est notamment de garantir que cette pratique soit exécutée dans des conditions médicales meilleures face aux dangers du marché noir de l’avortement.

Le 17 janvier 1973, il est inculpé pour avoir pratiqué des avortements et placé en détention préventive. De nombreux comités de soutien se constituent en quelques jours, pour sa libération et contre les poursuites en la matière. Une pétition est lancée et recueille des dizaines de milliers de signatures. Des femmes et des médecins se déclarent spontanément « complices » de son action. Une grande manifestation se tient à Namur le 29 janvier. André Cools, président du Parti socialiste, lui apporte son soutien politique et une personnalité comme le chanoine Pierre de Locht prend publiquement une position humaniste courageuse, à l’encontre de l’épiscopat. Après 36 jours, Willy Peers est remis en liberté. L’instruction ne débouchera jamais sur un procès. 

« L’affaire Peers » lance le débat et amorce la longue lutte pour la dépénalisation de l’avortement qui sera portée par les milieux de gauche et laïque. Elle aboutira… dix-sept ans plus tard, par l’adoption de la loi Lallemand-Michielsens, co-signée par celui-là même qui fut l’avocat du docteur Peers. Décédé le 30 novembre 1984, Willy Peers ne pourra assister à l’aboutissement de ce combat.

À l’occasion du 25e anniversaire de la loi dépénalisant l’interruption volontaire de grossesse, le Gouvernement a élevé, à titre posthume, le docteur Willy Peers au rang d’officier du Mérite wallon.