Anne Mortiaux, Retour aux sources. 1995

Namur (Jambes), place de la Wallonie, bâtiment 3. Hall accessible aux heures de bureau

Le hall d'entrée du troisième bâtiment du complexe administratif du SPW, à Jambes, est probablement le plus "ingrat" pour les artistes. Parce qu'il offre une surface de sol très étriquée, découpée par des parois verticales aux longueurs irrégulières, et qu'il est traversé en son milieu par deux colonnes massives. Pourtant, Anne Mortiaux y a trouvé une solution remarquable pour y intégrer une oeuvre d'art, conforme à sa démarche plastique : elle a associé le tracé irrégulier du plan aux relevés précis des méandres de la Meuse et de ses vingt-quatre affluents et confluents.

Sa première intervention a alors été d'inscrire le parcours de ces diverses rivières sur la pierre bleue du hall. Rompant la monotonie du plan, ce tracé qui commence à l'extérieur du bâtiment semble ainsi animer le sol d'un frissonnement intérieur, presque névralgique. Anne Mortiaux a ensuite disposé contre les parois vingt-quatre parallélépipèdes de verre contenant l'eau de chacune des rivières, puisée chaque fois à leur source ! Pour ce faire, elle a patiemment remonté le cours des rivières, jusqu'à leur point de jaillissement les plus reculés. Des photographies, apposées en frise au fond du hall, commentent ces "expéditions" menées jusqu'aux sources de ces rivières.

Esthétiquement très harmonieuse, l'intégration d'Anne Mortiaux s'enrichit encore d'une épaisseur conceptuelle. Le patient retour aux sources qui a guidé sa recherche est plus qu'une démarche, c'est une manière de voir le monde, une philosophie de vie, serait-on tenté d'écrire. Une manière de remonter à l'origine des choses, y compris à l'origine de soi même. L'eau, source de toute vie, devient prétexte à un voyage introspectif extrêmement personnel. L'oeuvre suggère une manière de regarder au fond des choses, de traverser les cloisons, de surmonter obstacles et embûches qui se dressent, avec l'irrésistible détermination de l'eau qui coule vers la mer.

Focus sur la place de la Wallonie à Jambes

L'évolution constitutionnelle de la Belgique accordant de plus en plus de compétences aux pouvoirs fédérés, la jeune Région wallonne a, dès le début des années 1990, dû trouver l'espace nécessaire à l'installation de ses nouveaux services administratifs. Lors des premières constructions des futurs bâtiments régionaux, c'est le décret pris par la Communauté française (pourcents applicables à l'intégration d'oeuvre d'art) qui fut d'application (immeubles Tilot et Bovesse II).

Rapidement toutefois, la Région, pressée de réussir son implantation dans sa nouvelle capitale, a mis en place sa propre commission des Arts. Avant même d'être officiellement créée, celle-ci a dû plancher sur l'organisation de quatre concours, destiné à l'aménagement du nouveau complexe architectural que la Région était en train d'ériger, sur la nouvelle place de la Wallonie, à Jambes.

Ces concours portaient sur l'aménagement du patio principal et des halls d'accueil des trois bâtiments. Les lauréats désignés ont été Françoise et Georges Pirson (Patio), Costa Lefkochir (Hall du bâtiment I), Francis Dusépulchre (hall du bâtiment II), et Anne Mortiaux (hall du bâtiment III).