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Perrons du territoire franchimontois

Territoire d’une superficie minime, le marquisat de Franchimont possédait de nombreux perrons. Trois sont parvenus jusqu’à nous et témoignent de l’importance de ce type de monument. Alors que dans le Hainaut et en Flandre, le beffroi symbolise les libertés acquises au Moyen Âge, le perron est le symbole des libertés acquises par Liège et ses Bonnes Villes. En effet, pour marquer leur appartenance à la principauté, certaines s’étaient dotées d’un perron comparable à celui de Liège, tel est par exemple le cas de Hasselt. Le territoire franchimontois n’est pas en reste : Verviers, Sartlez-Spa, Theux et Spa érigent un tel monument. À l’origine, la première fonction du perron pourrait donc être tout simplement de signifier aux habitants, aux voyageurs et aux étrangers la possession par la localité d’une série de privilèges et de libertés, d’un certain degré d’autonomie variable selon les cas, en rapport direct avec les libertés et franchises accordées aux Bonnes Villes. Le perron peut être considéré comme le centre géographique de la franchise, servir de borne-frontière, être le témoin d’événements plus ou moins importants. Situé sur la place principale, là où se tient le marché et à proximité de l’hôtel de ville ou de l’église, il est chargé d’une signification qui en fait un symbole du pouvoir et des droits acquis : il participe à la promulgation des édits et des règlements, est le témoin de la justice rendue à ses pieds, le lieu de la convocation des plaids généraux dans certains endroits.

Jalhay/Sart-lez-Spa

L’origine de Sart remonte au Xe siècle lorsque des habitants de Theux défrichèrent une partie de la localité voisine et donnèrent ainsi son nom au village. La première mention de Sart, en 1130, atteste l’existence d’une chapelle ; ce n’est que plus tard que le lieu fut érigé en paroisse et devient un des cinq bans du marquisat de Franchimont. Les habitants reçoivent du prince-évêque Louis de Bourbon (1456-1482) le droit de bourgeoisie en 1457. Sart fit les frais de la politique principautaire et fut incendié par les troupes de Charles le Téméraire en 1468.

Toujours situé sur la place du village, face à l’église, le perron de Sart existe selon toute vraisemblance depuis 1456. L’événement d’importance eut toutefois lieu le 14 septembre 1534, lorsque le prince-évêque Érard de la Marck accorda officiellement à Sart une foire et un perron. Le monument, composé d’une colonne octogonale en calcaire posée sur six marches et surmonté d’une pomme de pin et d’une croix, doit son aspect actuel à une restauration entreprise en 1904.

Theux

Deux perrons furent érigés dans la capitale du Franchimont. Le premier, installé en 1457, représentait le symbole des libertés communales octroyées en 1457 par les bourgmestres de Liège qui mirent ainsi Theux au rang des Bonnes Villes du pays. Il fut démoli dès 1468 par les troupes de Charles le Téméraire et reconstruit quelques années plus tard. Le monument a toutefois disparu à la fin du XVIIIe siècle.

Situé place du perron, le monument actuel date de 1768. Il remplace l’ancien perron démoli et se présente sous la forme d’une colonne annelée, posée sur quatre marches et surmontée d’une pomme de pin et d’une croix. Il fut érigé à la demande du marquis de Franchimont et prince-évêque de Liège Charles-Nicolas d’Oultremont, qui avait également octroyé un perron à Villers-l’Évêque 8. Les armes du prince, frappées au fût de la colonne, furent martelées à la Révolution et replacées en 1924 lors d’une réfection du monument.
 

Le perron de Verviers © IPW

Verviers

Verviers constituait sous l’Ancien Régime un des cinq bans du marquisat de Franchimont. Ravagée elle aussi par les troupes bourguignonnes en 1468, la ville se releva progressivement dans la seconde moitié du XVIe siècle et profita alors de la ruine de la draperie rurale dans les Pays-Bas suite aux guerres de religion. Verviers devint un important bourg manufacturier suffisamment important pour obtenir le titre de Bonne Ville de la principauté de Liège en 1651. La ville est dès lors ceinte d’une muraille, qui fut toutefois détruite dès 1675 par les troupes de Louis XIV, occupant la place forte de Limbourg toute proche.

Situé sur la place du Marché, le perron de Verviers fut lui aussi octroyé par Érard de la Marck en 1534. Il fut une première fois restauré en 1561 et entièrement remplacé en 1732 par le monument actuel qui, comme à Liège, consiste en une fontaine surmontée du perron. Il a été conçu comme cela au moment de la canalisation du ruisseau de Mangombroux qui passait à proximité et qui permettait de lier ce symbole des libertés de la population avec une commodité qui lui était aussi destinée. Classé en 1934, le monument est érigé en blocs de calcaire sur une hauteur de près de 4 m et surmonté d’une colonne de bronze achevée par une croix sur pomme de pin, comme la plupart des autres perrons. Chacune de ses faces est décorée par un masque d'angelot, en bronze également, qui crache son jet d'eau dans un vaste coquillage en pierre. Sur l'une des faces, une double porte en bois remplace la porte en bronze décorée d'armoiries placée en 1732. Les armoiries des bourgmestres Simonis et Delmotte ainsi que du prince-évêque Georges-Louis de Berghes ont en effet été enlevées lors de la Révolution belge de 1830.

Jalhay / Theux / Verviers

Frédéric MARCHESANI, 2013