Paul Delforge - Diffusion Institut Destrée - Sofam

Plaque André RENARD

Plaque commémorative André Renard, réalisé par Alphonse Darville, 14 septembre 1963.

La disparition aussi brutale que soudaine d’André Renard en juillet 1962 a suscité une multitude de réactions et d’initiatives en pays wallon, particulièrement dans la région liégeoise. Très vite, dans les communes à forte majorité socialiste, le nom d’André Renard a été attribué à une rue ou à une place (Amay, Herstal, Wanze, Romsée, etc.). 
Des souscriptions sont lancées pour ériger qui une stèle, qui une plaque commémorative. Un imposant monument sera inauguré en septembre 1965 au cimetière de Seraing, mais c’est à Wandre, en septembre 1963, qu’est inaugurée la toute première plaque commémorative.
 

Sur la façade d’une maison de la place… André Renard, à quelques dizaines de mètres du passage à niveau, une plaque rectangulaire en marbre accueille un médaillon de bronze représentant le profil gauche du leader syndical wallon, tandis que l’inscription suivante est gravée en lettres d’or :


ANDRE RENARD
LEADER SYNDICALISTE
WALLON
1911 - 1962
___     ____
 
LE 14 SEPTEMBRE 1963

 

Plaque commémorative André Renard – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Figure marquante du paysage politique wallon et belge, surtout depuis les événements de l’hiver 1960-1961, André Renard (Valenciennes 1911 - Liège 1962) jouit d’un soutien populaire exceptionnel dans le bassin industriel liégeois. Avec son décès, le Mouvement populaire wallon perd son président, le journal quotidien La Wallonie et l’hebdomadaire syndical Combat leur directeur. Des autres fonctions qu’il a exercées dans sa carrière, Renard a démissionné au lendemain de la grande grève wallonne contre la Loi unique. Le jeune délégué syndical des années 1930, l’ancien ouvrier devenu responsable du service d’études et de documentation du syndicat socialiste (fin 1937) avait largement contribué à la naissance de la FGTB à la Libération et y avait occupé différentes fonctions importantes : président de la Fédération des Syndicats de la région de Liège (1944), secrétaire national de la Fédération des Métallurgistes (1945), secrétaire national (1946-1948, 1949-1953), secrétaire général adjoint, en charge des régionales wallonnes (1953-1961). Promoteur de la définition du programme doctrinal du syndicat socialiste, André Renard était devenu le défenseur déterminé d’un nouveau programme socio-économique reposant sur des réformes de structure fondamentales destinées à introduire de la planification souple et à contrôler les secteurs-clés de l’économie. La disparition soudaine de cet important moteur de l’action wallonne brise des milliers d’espérances et oblige ses compagnons de route à développer de nouvelles stratégies.

D’après Combat, l’hebdomadaire du Mouvement populaire wallon, l’inauguration de la plaque André Renard a donné lieu à une imposante mobilisation dans les rues de Wandre et de Herstal. Alors que des drapeaux wallons étaient arborés aux fenêtres à côté de calicots portant les mots « fédéralisme » et « réformes de structures », voire une photo d’André Renard, un impressionnant cortège s’est dirigé vers la place de la Gare désormais rebaptisée. De nombreux discours furent prononcés, notamment par Simon Paque, André Genot et Raymond Latin, évoquant la personnalité d’André Renard, mais surtout les raisons de son engagement. Au-delà du souvenir, il s’agissait surtout d’évoquer les revendications du moment, principalement « le droit pour la Wallonie de disposer d’elle-même et de choisir les voies de son expansion économique et sociale ».

Déjà choisi pour représenter Jules Destrée, c’est le sculpteur Alphonse Darville qui signe le médaillon « André Renard ». Né à Mont-sur-Marchienne en 1910, formé notamment à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles, Prix Godecharle 1931, Premier Grand Prix de Rome (1935), Darville avait été très vite reconnu et sollicité dans les milieux carolorégiens de l’Entre-deux-Guerres sensibles à la question wallonne. Co-fondateur de L’Art vivant au pays de Charleroi (1933), attaché à la promotion de la création artistique en Wallonie, co-fondateur de la section de Charleroi de l’Association pour le Progrès intellectuel et artistique de la Wallonie (1945), Darville va contribuer à la création de l’Académie des Beaux-Arts de Charleroi, qu’il dirige de 1946 à 1972. Auteur de l’insolite monument au pigeon-soldat qui trouve place dans le parc Astrid de Charleroi (1951), il avait notamment signé l’imposante statue de Jules Destrée inaugurée à Charleroi en 1957.

Sources

Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (dont Combat, 19 septembre 1963)
Pierre TILLY, André Renard, Le Cri, Fondation Renard, Bruxelles-Liège, 2005
Paul DELFORGE, Encyclopédie du Mouvement wallon, t. III, Charleroi, Institut Destrée, 2001, p. 1380-1387.
Paul DELFORGE, Essai d’inventaire des lieux de mémoire liés au Mouvement wallon (1940-1997), dans Entre toponymie et utopie. Les lieux de la mémoire wallonne, (actes du colloque), sous la direction de Luc COURTOIS et Jean PIROTTE, Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 1999, p. 285-300.
Geneviève ROUSSEAUX, Alphonse Darville sculpteur, Charleroi, Institut Jules Destrée, 1982, coll. « Figures de Wallonie »
Alphonse Darville : 60 [soixante] années de sculpture, catalogue d’exposition, 20 novembre 1982 - 16 janvier 1983, Jean-Pol DEMACQ [préface],  Charleroi, Musée des Beaux-Arts, 1982
Alphonse Darville 1977, Charleroi, Impaco, 1977
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 290 ; t. II, p. 190.
 

Place André Renard
4020 Wandre

carte

Paul Delforge