Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Statue Jean-Baptiste d’OMALIUS d’HALLOY

Statue à la mémoire de Jean-Baptiste d’Omalius d’Halloy, réalisé par Guillaume Geefs, 21 août 1881.



Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, les autorités municipales belges continuent d’être encouragées par leur gouvernement à contribuer au renforcement de « l’identité nationale » par l’implantation de statues de personnalités héroïques dans les parcs et sur les places. À Namur, le phénomène commence à se développer au moment où l’enceinte de la ville est démantelée, où les portes et les tours sont détruites, tandis qu’un plan d’aménagement et d’embellissement trace les grandes orientations du futur. En 1869, un premier grand monument a été inauguré, honorant Léopold Ier ; trois ans plus tard, c’est Isabelle Brunelle qui est honoré d’une statue dans l’espace public. En 1881, Jean-Baptiste d’Omalius d’Halloy est à son tour « statufié » et honoré par les Namurois. Entre Léopold Ier, la comtesse d’Harscamps et J-B. d’Omalius, le point commun le plus évident est le nom du sculpteur, Guillaume Geefs (1805-1883), qui signe les trois œuvres namuroises. Celle d’Omalius figure parmi les dernières de l’artiste anversois.


Formé à l’Académie d’Anvers, le jeune Geefs avait très rapidement été repéré par ses professeurs ; une bourse lui avait permis de parfaire sa formation à Paris et, à son retour, il est nommé professeur de sculpture de l’Académie d’Anvers (1833-1840). Présent dans différents salons, il s’impose avec le modèle de la statue du Général Belliard et le monument funéraire du comte Frédéric de Mérode. Le jeune royaume de Belgique venait de trouver l’un de ses sculpteurs capables de figer dans la pierre les personnes et les événements les plus illustres du pays. Statuaire du roi, Geefs s’installe à Bruxelles où son atelier répond aux multiples commandes destinées à orner les églises, les places, les édifices, les cimetières ou les salons de toute la Belgique. Ses statues de Léopold Ier se déclinent en diverses versions, dont l’une sur la colonne du Congrès, à Bruxelles, et une autre à Namur. À Anvers, il livre une statue de Rubens (1840) ; à Liège, celle de Grétry (1842). Membre de la classe des Lettres de l’Académie dès 1845, il la préside de 1858 à 1883. Il était membre de l’Institut de France.


À Namur en ce dernier tiers du XIXe siècle, le nom du Liégeois Jean-Baptiste d’Omalius d’Halloy s’élève au même rang que les Rubens, Grétry et autre Godefroid de Bouillon. Pour savoir qui du géologue ou du politique a motivé ce choix des autorités namuroises, il convient de faire le tour du monument, d’allure classique, puisque sur un haut socle élancé se dresse une statue en bronze, coulée par la Compagnie des Bronzes de Bruxelles, représentant d’Omalius de plein pied. On peut lire les inscriptions suivantes, sur la face avant :


JEAN-BAPTISTE-JULIEN
D’OMALIUS D’HALLOY
NÉ LE 16 FÉVRIER 1783

MORT LE 15 JANVIER 1875


sur la face latérale à droite quand on fait face à la statue :


ORGANISATEUR
DU GOUVERNEMENT PROVINCIAL
DE NAMUR
1815-1830
sur la face latérale à gauche :
SÉNATEUR
DE L’ARRONDISSEMENT
DE DINANT
1848 – 1875


sur la face arrière :


CRÉATEUR
DE LA GÉOLOGIE BELGE
1808 – 1874


Les deux facettes de la vie de J-B. d’Omalius sont ainsi clairement illustrées. Par ses recherches, il a contribué à la naissance de la géologie belge et, jusqu’en 1832, le scientifique est le seul à avoir réalisé une carte géologique de la France. Pour cette raison, certains auteurs n’hésitent pas à le désigner comme le fondateur de la géologie de l’empire français. Sur le bronze, on voit d’ailleurs clairement que d’Omalius tient dans sa main une carte géologique dessinée, avec l’inscription latérale suivante :


ESSAI D’UNE CARTE GÉOLOGIQUE
DE LA FRANCE, DES PAYS-BAS ET
QUELQUES CONTRÉES VOISINES


Cette carte se déplie sur une roche dont le sculpteur Guillaume Geefs s’est employé à représenter les multiples tranches, figurant les plis terrestres.


Président de la Société géologique de France (1852), correspondant de l’Académie des sciences de France (1842), président de l’Académie royale de Belgique, d’Omalius exerça également d’importantes fonctions politiques. Maire sous l’empire (entre 1807 et 1815), sous-intendant de l’arrondissement de Dinant (1814), secrétaire général du département de l’Ourthe sous le gouvernement des puissances alliées (1814-1815), il est désigné gouverneur de la province de Namur sous le régime « hollandais » (1815-1830) et publie, en 1827, le code administratif de ladite province. Dans le nouvel État belge, sa fortune lui permet d’être élu au Sénat, selon le système censitaire. Représentant catholique de l’arrondissement de Dinant (1848-1875), il exerce la vice-présidence de la Haute Assemblée de 1851 jusqu’en 1870.


C’est la Société géologique de Belgique qui a décidé, six mois après la disparition du savant, de lui élever une statue. Après avoir hésité entre Liège et Namur quant à l’implantation, la Société opte pour Namur et bénéficie de subsides tant de l’État (10.000 francs), de la Province (5.000 fr.) que de la ville (2.500 fr.), une souscription couvrant le solde des frais. Dans un premier temps, le projet envisageait d’installer le monument place Saint-Aubain ; ensuite, le nouveau square près de la gare a finalement attiré la statue, dont le sujet donne son nom au lieu.


Il ne fait aucun doute que l’initiative du monument s’inscrit dans la volonté de l’époque de renforcer le sentiment national belge. Le 12 août 1880, le Parlement avait en effet opté pour le troisième dimanche du mois d’août (et les deux jours suivants) comme nouvelle date de référence officielle de la fête nationale de la Belgique. Aucune motivation historique, sentimentale ou politique n’avait justifié ce choix, si ce n’est de supprimer une décision de loin encore antérieure, celle prise par le Congrès national, à l’unanimité, le 19 juillet 1831, sur proposition de Charles Rogier et qui avait retenu les Journées de Septembre. Jour de l’inauguration, le 21 août 1881 est le 3e dimanche du mois.

 

Sources


http://balat.kikirpa.be/photo.php?path=A4289&objnr=10142103
http://www.harscamp.be/index.php/Le-monument-a-Isabelle-Brunelle-comtesse-dHarsca/un-roi-une-comtesse-un-gouverneur.html (s.v. mars 2015)
Mémoires de Wallonie, Les rues de Louvain-la-Neuve racontent…, Luc COURTOIS (dir.), Louvain-la-Neuve, Fondation Humblet, 2011, p. 332-334
J. GUEQUIER, dans Biographie nationale, t. 16, col. 157-163
A. DE VAUX, Discours prononcé à l’inauguration du monument de M. d’Omalius d’Halloy, le 21 août 1881, Namur, L. Raikem, 1885
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Arts, Lettres, Cultures), Bruxelles, t. IV, p. 14, 21
Sybille VALCKE, dans Jacques VAN LENNEP, La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 415-417

 

Statue Jean-Baptiste d’Omalius d’Halloy (Namur)

 

Square d’Omalius

5000 Namur

carte

Paul Delforge