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Tombe Jo WOUSSEN

Champion de Belgique de boxe (poids léger) en 1956 (à l’âge de 28 ans), devenu ouvrier métallurgiste, Joseph Woussen fut une des quatre victimes de la grande grève de l’hiver 1960. Pendant plusieurs années, des responsables du Mouvement populaire wallon organisèrent des rassemblements autour de sa tombe (en 1963, 1965, 1966) pour rendre hommage au « martyr de la classe ouvrière et de la cause wallonne ».

Jo Woussen (né à Liège en 1928) n’était pas un militant wallon, mais cet ouvrier métallurgiste fut tué d’une balle lors d’une charge de gendarmerie le 17 janvier 1961 à Chênée, pendant les manifestations de l’hiver 1960. Son destin est ainsi lié à un des grands moments fondateurs de l’identité wallonne : la « grande grève » de décembre 1960-janvier 1961 contre le projet de loi « unique » du gouvernement chrétien-libéral de Gaston Eyskens, qui annonça une série de bouleversements importants du côté des forces politiques et syndicales wallonnes, et du Mouvement wallon. Elle eut un impact considérable quant au progrès de la revendication fédéraliste.

Dès le 17 novembre 1960, une réunion des cadres wallons de la FGTB à Charleroi décidait, entre autres, la parution à partir de janvier 1961 d’un journal de lutte « spécifiquement wallon » et de la mise sur pied d’un organe de coordination syndicaliste wallon. Dès décembre 1960, l’action de grève apparaît surtout comme wallonne et socialiste. André Renard préconise une grève générale de durée illimitée, toutes les régionales wallonnes (sauf une) et les centrales professionnelles majoritaires en Wallonie l’approuvent, mais toutes les régionales flamandes (sauf Gand) et les centrales majoritaires en Flandre votent contre ! La grève dura plus d’un mois et ses objectifs évoluèrent : de l’opposition à la loi unique, l’accent se déplaça vers les problèmes spécifiquement wallons et la revendication s’étendit aux réformes de structures économiques et politiques.

Un comité de coordination des Régionales wallonnes de la FGTB avait été créé le 23 décembre à Namur. Il déclare dès le 2 janvier 1961 que « dès à présent se pose le problème de réformes de structures seules capables d’assurer l’expansion économique et la prospérité de la Wallonie dans le cadre des structures politiques du pays révisées ». Le même jour, les représentants des Fédérations wallonnes du PSB réunis à Namur décident de constituer un Comité permanent de liaison entre les Fédérations et soulignent la nécessité d’une révision des structures politiques du pays, autrement dit – car c’était déjà de cela qu’il s’agissait – du fédéralisme.

Le lendemain 3 janvier à Yvoz-Ramet, André Renard situe clairement l’enjeu : « le peuple wallon est mûr pour la bataille. Nous ne voulons pas que les cléricaux flamands nous imposent la loi. Le corps électoral socialiste représente 60 % des électeurs en Wallonie. Si demain le fédéralisme était instauré, nous pourrions avoir un gouvernement du peuple et pour le peuple ». Haranguant les grévistes le 6 janvier à Liège, le 11 à Mons, le leader syndical parle dans le même sens. Pour la première fois, la revendication d’une réforme radicale de l’État est affichée par les travailleurs wallons en lutte et elle retrouve un soutien populaire comme en juillet 1950.

L’essoufflement du mouvement commence en Wallonie quand les grévistes wallons, qui luttaient pour le retrait pur et simple de la loi, pour les réformes de structures économiques et pour le fédéralisme, s’aperçoivent que la grève ne peut plus trouver d’issue politique immédiate. Le mouvement se relâche dès le 16 janvier. Le 21, il reste 150.000 grévistes wallons seulement. Le Comité de coordination des Régionales wallonnes de la FGTB décide de « suspendre » la grève pour le 23 et de « donner de nouvelles formes à l’action », ce qui aboutira à la création du Mouvement populaire wallon, le nouveau fer de lance du combat wallon avant la création du Rassemblement wallon en 1965.

Cimetière de Chênée-Centre
Rue de Chèvremont
4032 Liège

carte

Freddy Joris & Frédéric Marchesani, avril 2009