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Ville haute de Charleroi
Le cas de la ville haute de Charleroi est bien différent de celui de ces cités centenaires et millénaires qui existent en Wallonie depuis l’Antiquité et le Moyen Âge.
Charleroi est véritablement le fruit de la volonté du roi d’Espagne de protéger ses frontières et peut être dans son entièreté considérée comme une trace de l’ancien comté de Namur.
Le Traité des Pyrénées signé le 7 novembre 1659 mettait fin à une longue guerre entre Français et Espagnols. Le roi Philippe IV d’Espagne s’efforça, après la fin de ce conflit, de renforcer à nouveau les frontières des Pays-Bas espagnols, sévèrement meurtries. Il décida de la création d’une forteresse nouvelle face à la France, près du village de Charnoy.
Située sur la rive gauche de la Sambre, complétée par deux vallons latéraux et créant un éperon barré propice à une fonction défensive, la place forte sort de terre en 1666. La ville nouvelle est baptisée Charleroi en l’honneur du nouveau roi d’Espagne Charles II.
La place forte, à vocation militaire uniquement, épouse la forme d’un hexagone embastionné autour de fossés à escarpes et contrescarpes et zones inondables. Un an plus tard, la forteresse fut déjà abandonnée par les Espagnols après un démantèlement partiel ; les Français prendront le relais et décidèrent dès 1668 de la reconstruire.
Supervisés par les ingénieurs Choisy et Vauban, les travaux offrirent à Charleroi un plan radioconcentrique défini par l’actuelle place Charles II dont les rues adjacentes témoignent encore de la physionomie défensive du XVIIe siècle.
Les Français fondèrent également une ville, entamèrent une œuvre d’urbanisation et installèrent progressivement une population civile. Le sort de Charleroi ne cessa d’évoluer dans les décennies suivantes : entre 1678 et 1748, la forteresse releva des Français, fut reprise par les Espagnols et intégra les Pays-Bas autrichiens. Elle fut une dernière fois modifiée en 1816 par les Hollandais avant d’être abandonnée progressivement après l’indépendance de la Belgique. Désarmée par étapes, elle fut démantelée à partir de 1867.
De son riche passé de place défensive, Charleroi n’a malheureusement gardé que très peu de traces visibles. La Révolution industrielle et l’urbanisation effrénée ont résolument transformé le visage de la ville. La place Charles II correspond à l’ancienne place d’armes de la forteresse dont elle a gardé la forme hexagonale.
L’église Saint-Christophe, située sur cette place, est l’héritière d’une chapelle construite en 1667 par les Français. Une pierre de fondation de cette chapelle disparue, millésimée 1667 et frappée de trois lys de France est toujours conservée dans le porche d’entrée de l’église actuelle. Les bâtiments d’importance de la place d’armes telle la caserne de cavalerie ou la maison du gouverneur, ont tous disparu. La maison du bailli, aujourd’hui occupée par l’Espace Wallonie, se trouve toujours rue Turenne, à proximité de l’hôtel de ville.
Datée de 1780, la bâtisse construite en briques enduites et pierre calcaire a fait l’objet d’une belle restauration. La porte est surmontée du millésime, d’une couronne et de guirlandes taillées dans le calcaire. Classé en 1989, cet édifice est un témoin privilégié de l’architecture civile de l’époque ; elle abritait le bailli, représentant de justice dans la ville haute.
Non loin de là, au coin de la rue Turenne et de la rue du Beffroi, une borne marquée du nombre 80 et de la lettre G fait référence au génie, organisme qui décidait de l’alignement des habitations dans la forteresse.
La chapelle Sainte-Anne, située rue de la chapelle, a pour sa part été bâtie en 1819.
Récemment restaurée, elle a été élevée en pierre calcaire et briques enduites et conserve toujours deux pierres de commémoration antérieures à son édification rappelant le nom des donateurs à l’origine de la construction de l’édifice primitif en 1682, les gouverneurs de la place forte de Charleroi, Juan de la Paz Tementio et Don Juan Antonio Sarmiento y Camudio.
Quelques vestiges des fortifications existent encore mais sont invisibles depuis la chaussée.
Dans les caves du café « le Corto », situé rue de Montigny, sont conservées des casemates ainsi qu’un tronçon de souterrain qui semblent dater de la forteresse française. Rue de Dampremy, les caves de l’immeuble situé au no 61 abritent encore une voûte de soutènement qui appartiendrait au chemin couvert de la forteresse française. À gauche du bâtiment se trouve une casemate et, dans le jardin situé dans l’îlot, un long mur en pierre témoigne vraisemblablement des fortifications espagnoles ou françaises.
Place Charles II
6000 Charleroi
Frédéric MARCHESANI, 2013