Paul Delforge
Monument Alexis HOUBOTTE
Monument Alexis Houbotte, réalisé par Julien Dillens, jardin de l’hospice Fiérain, mai 1905 ; parc Houbotte, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
À l’origine, le monument Alexis Houbotte, inauguré en 1904, a été installé dans le jardin de l’Hospice Fiérain. Par la suite, il a été déplacé et s’est retrouvé au centre d’un parc aménagé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, sur l’emplacement de l’ancien domaine des Carmes. Le lieu qui fut baptisé « parc Houbotte » accueille aussi, depuis 1951, le monument aux victimes wavriennes tant des deux guerres mondiales que la Révolution de 1830, et depuis 1954 la cloche Dongelbert. En raison de sa situation proche de la gare, ce parc occupe une position relativement centrale dans la ville de Wavre et l’on ne peut que s’étonner, par conséquent, du peu d’informations relatives au « médecin de la bienfaisance publique », titre qui figure sur la face avant du piédestal qui supporte son buste. L’activité d’Alexis Houbotte a sans conteste marqué les esprits de la population locale, puisqu’une souscription publique a été lancée pour lui ériger un monument. Pourtant, l’historiographie paraît bien pauvre lorsqu’il s’agit de cerner davantage le parcours et l’activité de ce médecin. Chacun s’accorde à lui reconnaître une attention particulière à l’égard des pauvres et des malades durant de nombreuses années, dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Il apparaît de manière précise que le « docteur bienfaiteur des pauvres » a été le médecin de la Bienfaisance publique de 1875 à 1901, mais aucune information ne paraît disponible pour cet homme dont la date naissance reste aussi inconnue. Par conséquent, il existe un véritable contraste entre la discrétion de ce médecin et la notoriété qui entoure l’artiste qui a sculpté son buste.
Fasciné par une exposition des œuvres de Léopold Harzé (1867), formé notamment par le Liégeois Simonis à l’Académie de Bruxelles qu’il fréquente en cours du soir (1864-1868, 1873-1875), Julien Dillens (1849-1904) devait devenir ingénieur selon l’avis de son père en dépit d’un environnement familial largement ouvert au monde artistique. Il sera dessinateur, aquarelliste et sculpteur. Employé sur plusieurs chantiers de décoration bruxellois (années 1870), le jeune sculpteur y fait ses armes, tout en exposant quelques œuvres personnelles dans les Salons. C’est l’une d’elles, L’Enigme, montrée à Bruxelles, qui focalise l’attention de tous les critiques en 1876. Taxé de « vulgaire », son nu féminin semble faire scandale, alors qu’il est fort apprécié par de jeunes artistes qui se mobilisent, forment un Cercle qui, plus tard, deviendra L’Essor et organisent une exposition des œuvres de Dillens. Après un bref séjour à Paris, ce dernier remporte le Prix de Rome 1877 : son goût pour le style néo-renaissance français va pouvoir s’immerger à la source. Imprégné de Renaissance italienne, le style novateur de Dillens se heurtera encore pendant quelques années à l’absence de reconnaissance de ses contemporains.
Pendant dix ans, les grandes commandes officielles lui échappent ; il doit se contenter de réalisations secondaires jusqu’au moment où, au début des années 1890, les commandes abondent à Bruxelles comme en pays flamand. Ses bustes officiels ou d’inspiration se multiplient, de même que les monuments funéraires, les fontaines, etc. Il est fait appel à son talent pour des statues didactiques destinées à l’Exposition universelle de Bruxelles (1897). Exposant souvent à l’étranger, professeur à l’École artistique d’Ixelles (1887) puis à l’Académie de Bruxelles (1898-1901), président de l’Essor, l’artiste fidèle à son style et à ses thèmes de prédilection est à la fois un « grand maître de la sculpture belge » et un artiste controversé quand la commande lui est passée pour le buste en bronze d’Alexis Houbotte. Il doit d’ailleurs s’agir de l’une des toutes dernières réalisations du sculpteur : atteint d’un cancer, Julien Dillens décède en décembre 1904 ; le monument Houbotte semble, quant à lui, avoir été inauguré en mai 1905.
Pierre GUSBIN, Wavre : Parc de la mémoire, dans Wavriensia, n° 1, 2011, p. 17-30
Hugo LETTENS, dans Jacques VAN LENNEP (dir.), La sculpture belge au 19e siècle, catalogue, t. 2, Artistes et Œuvres, Bruxelles, CGER, 1990, p. 367-372
Georges-Marie MATTHYS, dans Biographie nationale, t. 43, col. 334-346
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 495
Jardin de l’hospice Fiérain puis parc Houbotte
1300 Wavre
Paul Delforge