Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Mémorial du général PIRON à Couvin

Les monuments d’hommage à la Brigade Piron sont nombreux, en Belgique, comme en France ou aux Pays-Bas. Ils sont une quarantaine à rappeler le rôle de la brigade dans la libération de certains lieux ou à évoquer la mémoire de ses soldats tombés au combat, évocation individuelle ou collective. Un seul monument, cependant, rend hommage individuellement au commandant de la First Belgian Brigade, Jean-Baptiste Piron et il est situé dans sa ville natale. En plus de donner son nom à la place principale de Couvin, les autorités locales y ont érigé une stèle avec un médaillon. L’ensemble a été réalisé à partir d’un médaillon qu’avait réalisé le sculpteur Victor Demanet.

Mémorial général Piron – © Photo Paul Delforge – Diffusion Institut Destrée © Sofam

Le sculpteur Victor Demanet

Né à Givet de parents namurois, Victor Demanet (1895-1964) a grandi au confluent de la Sambre et de la Meuse, ses parents tenant un commerce d’antiquités au cœur de la ville wallonne. Appelé à leur succéder, Demanet fréquente l’académie des Beaux-Arts (1916-1919) où il est l’élève de Désiré Hubin, mais la révélation lui vient des œuvres de Constantin Meunier et surtout de la thématique sociale et ouvrière développée par le peintre/sculpteur bruxellois. Lors d’un séjour à Paris, les œuvres de Rude, Carpeaux et Rodin finissent par convaincre Demanet que sa voie est dans la sculpture. Remarqué au Salon des Artistes français de Paris, en 1923, pour son buste de Bonaparte à Arcole, Victor Demanet s’impose rapidement comme un portraitiste de talent auquel sont confiées de nombreuses commandes publiques. Comme d’autres artistes de son temps, il réalise plusieurs monuments aux victimes des deux guerres. Il est aussi l’auteur de plusieurs dizaines de médailles (dont une du général Piron), ce qui ne l’empêche pas de poursuivre une œuvre plus personnelle à l’inspiration comparable à celle de Constantin Meunier, avec de nombreux représentants du monde du travail. Installé à Bruxelles depuis 1926, il décède à Ixelles en 1964. Sans croiser la route de J.-B. Piron, l’artiste est un contemporain du militaire.

Jean-Baptiste Piron

En effet, c’est en 1896 que Jean-Baptiste Piron naît à Couvin. Entré à l’École militaire à 17 ans, il n’a pas 20 ans quand il est appelé à diriger un peloton au sein du 2e régiment de ligne en août 1914 et combat notamment sur l’Yser. L’armée sera sa destinée. Nommé capitaine en 1933, il fait partie de l'état-major du 5e corps d'armée quand commence la Drôle de Guerre. 

À l’issue de la Campagne des 18 Jours et de la capitulation décidée par Léopold III, J.-B. Piron refuse de se constituer prisonnier et, après plusieurs mois de pérégrination, parvient à atteindre l’Écosse (février 1942). En Grande-Bretagne, après la disparition tragique de Georges Truffaut qui avait tenté de constituer les bataillons d’une armée belge opérationnelle, Piron se voit finalement confier, par Hubert Pierlot, le commandement d’un noyau de combattants capables d’aider les forces alliées. 

À la tête de la First Belgian Brigade, le colonel arrive en Normandie en août 1944 et participe à la campagne de libération, avant d’être propulsé vers l’avant du front : le nord de la France est dégagé plus rapidement que prévu et la Brigade Piron accompagne les troupes britanniques dans leur mouvement de libération, essentiellement du côté des provinces flamandes ; les hommes de la Brigade Piron seront encore de la Bataille des Ardennes et livreront de durs combats aux Pays-Bas (fin 1944 - début 1945). 

Général-Major (décembre 1945), Piron reste à la tête des troupes belges qui occupent une partie de l’Allemagne aux côtés des Alliés (décembre 1946 - décembre 1947), avant d’être nommé Lieutenant-Général (décembre 1947), puis chef de l'état-major de la Force terrestre belge et aide de camp du roi Baudouin (janvier 1951). En 1954, contre son gré, il est placé à la présidence d’un Conseil supérieur des Forces armées. Sa carrière militaire s’achève en juillet 1957 et il consacre ses loisirs à écrire ses mémoires. Il accepte aussi de participer aux hommages rendus à sa brigade, ou à sa personne comme c’est le cas à Couvin, en septembre 1971.

Ce jour-là, les autorités locales dévoilent en effet l’imposante stèle en marbre rouge sur laquelle est incrusté le médaillon en bronze où Demanet avait représenté le profil gauche de J.-B. Piron, le regard autoritaire, fixant l’horizon. Sous le médaillon, apparaissent trois carrés aux couleurs l’un des armes de la Brigade Piron, l’autre de la Belgique, et le troisième de Couvin. Alors que figurent côte à côte, tout en bas, les drapeaux de l’Angleterre, de la France, des Pays-Bas et des États-Unis, une large plaque en bronze, gravée, développe la longue dédicace :

LA VILLE DE COUVIN ET LES ANCIENS
COMBATTANTS DE LA BRIGADE PIRON
EN HOMMAGE
AU LIEUTENANT GENERAL
J.PIRON - D.S.O.
NATIF DE CETTE VILLE QUI EN 1944
A LA TÊTE DE LA FIRST BELGIAN BRIGADE
PARTICIPA AU DEBARQUEMENT EN
NORMANDIE ET CONTRIBUA A LA LIBERATION
DE LA FRANCE, LA BELGIQUE ET LA HOLLANDE

René DIDISHEIM, Au-delà de la Légende : L'histoire de la brigade Piron, Liège, Pim Services, 1946.
Henri BERNARD, dans Nouvelle Biographie nationale, t. I, p. 290-291.
Jean-Baptiste PIRON, Souvenirs 1913-1945, Bruxelles, 1969.
G. WEBER, Des hommes oubliés, Histoire et histoires de la brigade Piron, Bruxelles, 1978.
Paul PIRON, Dictionnaire des artistes plasticiens de Belgique des XIXe et XXe siècles, Lasne, 2003, t. I, p. 397
Jacques TOUSSAINT, Victor Demanet dans Arts plastiques dans la province de Namur 1800-1945, Bruxelles, Crédit communal, 1993, p. 147.
http://www.brigade-piron.be/monuments_fr.html (s.v. mai 2014)
Informations communiquées par Jean Henrard (juin 2014)

 

Place du général Piron/
rue du Bercet
5660 Couvin

carte

Paul Delforge

© Sofam

Piron Jean-Baptiste

Militaires, Résistance

Couvin 10/04/1896, Uccle 04/09/1974

Le nom de Piron est indissociablement lié à la Brigade qui participa, aux côtés des armées alliées, à la Libération de la Belgique, en septembre 1944. Jean-Baptiste Piron était le commandant de la 1ère brigade belge des Forces belges libres qui s’était (re)constituée en Angleterre.

Entré à l’École militaire à 17 ans, le jeune Piron avait déjà connu une guerre mondiale : il n’avait pas vingt ans quand il est appelé à diriger un peloton au sein du 2e régiment de ligne en août 1914. Emporté dans les combats sur l’Yser, le lieutenant (1916) devient observateur à la 6e escadrille de reconnaissance (1917), où il sera blessé suite à un atterrissage forcé. Il a 22 ans quand la guerre se termine et il est nommé capitaine temporaire, la confirmation ne survenant qu’en 1933. L’armée sera sa destinée. 

Poursuivant ses études, il entre à l'état-major du 2e corps d'armée à Anvers, avant de rejoindre un régiment de grenadiers. Commandant, il intègre le régiment de cyclistes frontière à Henri-Chapelle. Major en mars 1936, il retrouve un régiment de grenadiers et, quand commence la Drôle de Guerre, J-B. Piron fait partie de l'état-major du 5e corps d'armée. À l’issue de la Campagne des 18 Jours et de la capitulation annoncée par Léopold III, l’officier refuse de se constituer prisonnier et, après plusieurs mois de pérégrination, parvient à atteindre l’Écosse en février 1942, après un passage par Gibraltar.

Notamment à l’instigation de Georges Truffaut, plusieurs initiatives ont déjà été menées en Grande-Bretagne pour former des bataillons d’une armée belge opérationnelle. C’est au moment même où Truffaut perd la vie dans un exercice de tirs, que Piron est chargé de la formation du 1er bataillon de fusiliers, d'une batterie d'artillerie et de l'escadron blindé. Il constitue son propre état-major et, en décembre, Hubert Pierlot lui confie le commandement d’un noyau de combattants capables d’aider les forces alliées. Nommé colonel à la veille du débarquement en Normandie, il touche le sol français avec ses hommes en août 1944. Tenue en réserve pour le moment de la libération du sol belge, la Brigade Piron participe à quelques combats en Normandie avant d’être propulsée vers l’avant du front : le nord de la France est dégagé plus rapidement que prévu et la Brigade Piron accompagne les troupes britanniques dans leur mouvement de libération, essentiellement du côté des provinces flamandes ; les hommes de la Brigade Piron seront encore de la Bataille des Ardennes et livreront de durs combats aux Pays-Bas (fin 1944 - début 1945).

Nommé aide de camp du prince Charles devenu régent (septembre 1945-juillet 1950), commandant de la 2e division d'infanterie, J-B. Piron est promu Général-Major en décembre 1945. Pendant un an (de décembre 1946 à décembre 1947), il est encore à la tête des troupes belges qui occupent une partie de l’Allemagne aux côtés des Alliés. Lieutenant-Général (décembre 1947), il est déchargé de ses fonctions en Allemagne et devient chef de l'état-major de la Force terrestre belge et aide de camp du roi Baudouin (janvier 1951). Ce qui apparaît comme une promotion est fort mal ressenti par Piron qui souhaitait garder ses fonctions en Allemagne. En 1954, contre son gré, il est placé à la présidence d’un Conseil supérieur des Forces armées. Sa carrière militaire s’achève en juillet 1957 et il consacre ses loisirs à écrire ses mémoires.

Sources

La Wallonie. Le Pays et les Hommes. Histoire. Économies. Sociétés, t. II, p. 307
René DIDISHEIM, Au-delà de la Légende : L'histoire de la brigade Piron, Liège, Pim Services, 1946
Henri BERNARD, dans Nouvelle Biographie nationale, t. I, p. 290-291
Jean-Baptiste PIRON, Souvenirs 1913-1945, Bruxelles, 1969
G. WEBER, Des hommes oubliés, Histoire et histoires de la brigade Piron, Bruxelles, 1978

Truffaut Georges

Militantisme wallon, Politique

Liège 22/12/1901, Hereford (Angleterre) 3/04/1942

Secrétaire de rédaction au journal quotidien La Wallonie (1923), militant wallon, conseiller communal de Liège (1932), Georges Truffaut est élu député dans l’arrondissement de Liège en 1934, mandat qu’il exercera jusqu’à son dernier souffle en 1942. Échevin des Travaux de la ville de Liège (1935), fondateur de l’asbl Le Grand Liège et du Conseil économique wallon, il s’emploie à repositionner la Cité Ardente au cœur de l’Europe. L’Exposition de l’Eau de 1939 était la première étape spectaculaire d’un ambitieux plan de redéploiement de Liège. Anti-rexiste, favorable à une union douanière franco-belge, opposé à la politique belge de neutralité, le député du POB dépose à la Chambre, avec Joseph Martel et François Van Belle, la première proposition de loi visant à instaurer un système fédéral en Belgique (1er juin 1938), reposant sur trois régions (Wallonie, Flandre et, au moins, l’arrondissement de Bruxelles). La prise en considération de la proposition est rejetée par la Chambre, le 2 février 1939.

Combattant de ‘40, refusant la capitulation du 28 mai, Truffaut rejoint l’Angleterre où il rencontre Charles de Gaulle et fait des propositions à Churchill pour reconstituer une armée et continuer la lutte. Incorporé dans les Forces belges de Grande-Bretagne, chef d’une mission destinée à retrouver l’encaisse-or de la Banque nationale, il tente d’être le représentant de la Wallonie à Londres, dans la lutte contre l’occupant. Le 3 avril 1942, il meurt accidentellement, lors d’un exercice militaire. Le 1er octobre 1947, la dépouille de Georges Truffaut retrouve le sol wallon, inhumé à la pelouse d’honneur du cimetière de Sainte-Walburge.

Sources

TRUFFAUT France, Georges Truffaut 1940-1942. Le dernier parcours d’un combattant, Liège, Luc Pire, 2011
Un siècle de projets fédéralistes pour la Wallonie. 1905-2005, Charleroi, Institut Jules-Destrée, 2005
LIBON Micheline, DEHOUSSE Jean-Maurice (préface), Georges Truffaut. Wallonie : utopies et réalités, Charleroi, Institut Jules-Destrée, 2002, coll. Écrits politiques wallons, n°8
Encyclopédie du Mouvement wallon, Charleroi, 2001, t. III
TRUFFAUT France, Sauver l’or belge, La mission du capitaine Georges Truffaut en Afrique occidentale (août-septembre 1940), Tubize, ILHS-IEV, 1997
MUSIN Linda, Georges Truffaut. Essai biographique, dans France TRUFFAUT, Sauver l’or belge, Tubize, 1997
DELFORGE Paul, Cent Wallons du Siècle, Liège, 1995
La Wallonie. Le Pays et les hommes (Histoire, Economie, Société), Bruxelles, t. II, p. 283, 320, 330

Mandats politiques

Conseiller communal de Liège (1933-1942)
Député (1934-1942)
Échevin (1935-1942)