Le 18 mai 1940, Hitler proclame l’annexion des trois cantons (Eupen, Saint-Vith, Malmedy) à l’Allemagne, rattachés à la Rhénanie. Sans transition, les lois belges sont remplacées par la législation allemande. De surcroît, les communes de Baelen, Gemmenich, Henri-Chapelle, Hombourg, La Calamine, Membach, Montzen, Moresnet, Sippenaeken et Welkenraedt sont annexées au Reich (décret du 23 mai 1940 avec effet rétroactif au 10 mai). Une nouvelle frontière est tracée qui isole de la Wallonie ces dix communes appelées « Aufbaugebiet », territoire de germanisation. Jusqu’au 1er septembre 1940, les actes de l’État civil sont rédigés en français, ensuite l’allemand devient la langue officielle, l’administration belge et la monnaie sont remplacées et le personnel politique communal destitué dans la mesure où il a refusé de prêter serment de fidélité au Führer. Plutôt que d’accepter le diktat nazi, plus de 1300 personnes quittent leur habitation pour s’installer à Bruxelles, mais surtout dans les villes wallonnes, notamment à Verviers, Ans et Waremme. « On part en Wallonie », disait-on alors à Henri-Chapelle.
Au bout d’un an, les habitants des dix communes sont considérés comme « Deutsche auf Wiederruf » (Allemands sous réserve). Ceux de Saint-Vith, Eupen et Malmedy deviennent des Reichsdeutsche. La germanisation est en œuvre avec ses conséquences : en octobre 1941, l’enrôlement concerne les jeunes nés en 1922. La résistance sera active et les filières d’évasion se mettront en place, faisant passer des dizaines de personnes entre Baelen et Dolhain, avant de les confier aux réseaux verviétois et liégeois. La libération intervient le 11 septembre 1944. Pendant plusieurs années, il subsistera une certaine gêne ou ambiguïté de la part de la capitale belge à l’égard de ces dix communes. Malgré des proclamations maintes fois répétées, les habitants éprouveront du mal à faire comprendre qu’ils sont de langue romane dans tous leurs contacts avec les sphères de l’enseignement, de l’administration et de la justice. À l’heure de la fusion des communes (1976), le législateur aura tendance à garder toutes ces communes entre elles, formant quatre pôles : Baelen, Welkenraedt, La Calamine et Plombières. Un régime linguistique spécial est en vigueur depuis les années soixante en matières scolaire et administrative.
Référence
DamiA96l
Institut Destrée (Paul Delforge et Marie Dewez) - Segefa (Pierre Christopanos, Gilles Condé et Martin Gilson)