Collin René
Politique, Député wallon, Ministre wallon
Fisenne 29/04/1958
Ministre wallon : 2014-2019
Député wallon : 2019-2024
Dans l’histoire des institutions politiques wallonnes, il n’est pas rare qu’un extra-parlementaire soit désigné à une fonction ministérielle. Depuis Guy Coëme en 1981, William Ancion, Charles Michel, Marie Arena… et bien d’autres n’étaient pas parlementaires au moment où ils ont été désignés ministres dans un exécutif wallon ; certains n’avaient jamais exercé de mandat antérieurement, d’autres avaient été élus à d’autres niveaux de pouvoir. C’est à cette dernière catégorie qu’appartient René Collin quand il est désigné à une fonction ministérielle dans le nouveau gouvernement wallon, en juillet 2014, à majorité PS-cdH, présidé par Paul Magnette. Dixième ministre extra-parlementaire au niveau wallon, René Collin possède en effet une très longue expérience d’exercice des responsabilités politiques quand il arrive à Namur.
Originaire de Fisenne où son père était facteur et sa mère agricultrice, René Collin a terminé des humanités classiques au Collège Saint-François, à Marche-en-Famenne, avant de s’orienter vers le Droit. Licencié en Droit de l’Université catholique de Louvain (1980), il fait partie des premières cohortes d’étudiants à sortir de la « nouvelle » cité universitaire implantée en Brabant wallon. Inscrit au Barreau de Marche, il s’installe comme avocat dans la capitale de la Famenne ; à diverses reprises, il a l’occasion de plaider en correctionnelle et en cour d’Assises ; il a notamment été le défenseur du commissaire de police Michel Demoulin, chef d’enquête écarté, dans un dossier périphérique à l’Affaire Dutroux. Mais progressivement, c’est à la politique qui va principalement se consacrer René Collin.
Six ans après la fusion des communes d’Amonines, de Mormont, de Soy et d’érezée, il se porte candidat sur une liste PSC au suffrage des 1.600 électeurs du « grand » érezée. En 1976, le PSC de Jacques Bonjean avait remporté la majorité absolue (49,6% et 6 sièges) ; en 1982, deux listes s’affrontent et le PSC renforcé frôle les 80%, ne laissant qu’un seul mandat à son adversaire du renouveau communal. C’est là que commence le parcours politique de René Collin qui est élu conseiller communal PSC et désigné à la présidence du CPAS (1982-1988). En octobre 1988, trois listes se présentent sans priver le PSC d’une large majorité absolue (54,2%) et René Collin devient échevin ; le PSC atteint 59% en octobre 1994 quand il devient bourgmestre, plus exactement quand il entame sa première législature en tant que « maïeur », la passation de pouvoir entre Jacques Bonjean, l’ancien, et René Collin, le nouveau, s’étant effectuée plusieurs mois avant le scrutin de 1994. Cette année-là, le PSC avait raté un 8e conseiller communal à une voix près. En octobre 2000, sous la bannière « Action », le PSC conserve 56,1% des électeurs, mais ses adversaires se sont réunis sur une seule liste ; la majorité de René Collin (803 vp) est par conséquent réduite à 6 sièges (-1) sur les onze du Conseil communal. Ce résultat d’octobre 2000 est davantage qu’un avertissement. Incarnant une volonté de changement, l’opposition « Intérêts communaux » (53,1%) parvient à renverser, en 2006, la majorité absolue que détenait le PSC-cdH depuis trente ans. En perdant 9%, la liste « Action » de René Collin (699 vp) se retrouve à 5 sièges (46,9%) contre 6 pour le nouveau bourgmestre Michel Jacquet (744 vp). Il n’y aura pas de revanche : en octobre 2012, la liste du maïeur (955 vp) conforte sa majorité (57,8%) et, dans un Conseil communal élargi, gagne deux sièges (8), laissant la liste conduite par Jean-François Collin – le neveu – (687 vp) et poussée par René Collin (553 vp) à 5 sièges (42,2%). Il est vrai que depuis 2006, René Collin ne siège plus à érezée, étant appelé à d’autres fonctions.
René Collin s’est en effet tourné vers d’autres niveaux de pouvoir, avec un point commun permanent, le fait d’être systématiquement aux prises avec la compétence de l’Agriculture, voire du Tourisme. Secrétaire politique de Charles-Ferdinand Nothomb lorsque celui-ci était vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur (1981-1986), René Collin reste en contact avec le niveau politique national quand il devient conseiller auprès de Paul De Keersmaeker, Secrétaire d’État aux Affaires européennes et à l’Agriculture (1986-1992). En 1995, après avoir pris ses fonctions de bourgmestre et alors que se réalise le transfert d’importantes compétences vers la Wallonie, René Collin devient le chef de Cabinet de Guy Lutgen, ministre wallon de l’Agriculture (1995-1999).
Lors du triple scrutin du 13 juin 1999, où Guy Lutgen n’est plus candidat, René Collin se présente aux élections régionales et rassemble 7.000 voix sur son nom, mais il n’est pas élu. Alors que le « nouveau PSC » connaît sa première véritable période d’opposition à tous les échelons de pouvoir, il contribue à la reconstruction du parti et à sa transformation. En septembre 2003, il accepte la présidence de la Fédération luxembourgeoise d’un cdH en pleine refondation et de relever pas mal de défis. C’est à titre de soutien qu’il prend part aux élections fédérales du 10 juin 2007 (14e place pour le Sénat et 19.063 vp dans le collège français) et du 23 juin 2010 (15e place pour le Sénat, 20.342 vp) ; il n’entendait pas être élu. Le 25 mai 2014 non plus, quand il occupe la 4e et dernière place de la liste emmenée par Benoit Lutgen dans la circonscription provinciale du Luxembourg pour la Chambre fédérale (13.195 vp). En dehors des enjeux communaux, c’est le niveau provincial qui intéresse principalement René Collin.
Depuis 1985, il siège régulièrement au Conseil provincial luxembourgeois et, à la fin des années 1990, il y devient le chef du groupe PSC-cdH. Après le scrutin d’octobre 2006, le cdH devient le nouveau partenaire de majorité provinciale du PS, ainsi que l’avaient négocié déjà à l’automne 2004 René Collin avec son homologue président provincial du PS André Perpète. Réunissant 2.212 vp dans son district de La Roche-en-Ardenne (32,7%), René Collin devient alors député provincial, en charge des Finances, de l’Économie, du Tourisme et… de l’Agriculture. Assurément, ces élections d’octobre 2006 s’avèrent contrastées puisque le parti qu’il représente se retrouve dans l’opposition après 30 années de majorité absolue à érezée et qu’il se retrouve au Collège provincial après 30 années d’opposition pour le PSC sur « ses » terres luxembourgeoises.
Quand il entre au Collège provincial, son nouveau vice-président renonce à ses fonctions communales et à celles d’administrateur de l’AIVE, mais reste présent aux Conseils d’Idelux Finances, d’Interlux, de la Société publique d’administration des bâtiments scolaires-Luxembourg, de l’Association des provinces wallonnes, jusqu’en juillet 2014. Président de la Fédération touristique du Luxembourg belge (2006-2014), René Collin siège aussi au Conseil d’administration de BEP crématorium (2007-2013), d’Ethias (2007-2014), de Ciger asbl (2007-2012), de Lothinfo asbl (2007-2014), de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Luxembourg belge (2009-2014), d’Idelux Projets Publics (2011-2014), de Vivalia (2012-2014), d’Adehis sa (2013-2014). Il préside l’Association de Défense des Producteurs laitiers (2008-2014), le Centre d’Économie rurale (2008-2014) et la Coordination hospitalière luxembourgeoise (2008-2011), ainsi que le Fonds de Calamité agricole (2009-2014). En octobre 2012, reconduit au Conseil provincial (4.921 vp dans le district de Marche-en-Famenne), ainsi que dans ses fonctions de député provincial, René Collin conserve les mêmes attributions auxquelles s’ajoutent les « ressources naturelles ». En juillet 2014, cependant, il est appelé à exercer de nouvelles fonctions.
Dans le gouvernement wallon rouge romaine qui se met alors en place (juillet 2014), le Luxembourgeois devient ministre en charge de compétences qu’il connaît bien : la Nature, la Forêt, la Ruralité, les Infrastructures sportives, les Infrastructures d’accueil de la Petite Enfance, le Tourisme, ainsi et surtout que l’Agriculture. Il est aussi le délégué de la Wallonie au sein de la Grande Région. Dans le même temps, René Collin entre au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, où il est responsable des Sports. Avec Jean-Claude Marcourt, il est le seul à siéger dans deux gouvernements simultanément (double casquette). Mais la législature 2014-2019 est loin d’être un long fleuve tranquille, tant du côté du gouvernement de Rudy Demotte que du côté du gouvernement de Paul Magnette. À la mi-avril 2016, on assiste à un premier remaniement, à Bruxelles, quand Joëlle Milquet finit par renoncer à son important portefeuille de l’Enseignement, de la Culture, etc. (affaire dite « des collaborateurs fantômes »). Alors qu’Alda Greoli et Marie-Martine Schyns reprennent ses attributions, René Collin est lui aussi concerné par le remaniement : il quitte en effet le gouvernement Demotte en laissant les Sports au socialiste Rachid Madrane. À l’inverse, son portefeuille wallon s’accroît d’une nouvelle compétence, celle des Aéroports régionaux (en provenance du ministre Carlo Di Antonio), tandis que les Infrastructures sportives échoient à Paul Furlan.
En juillet 2017, les Aéroports régionaux changent à nouveau de titulaire quand se met en place le gouvernement wallon présidé par Willy Borsus ; fin 2016, Collin avait fait valider par l’exécutif sa note stratégique soutenant le développement des aéroports régionaux (avec l’allongement de la piste de Charleroi). Mais, suite à l’appel du 19 juin 2017 de Benoit Lutgen, les cartes sont rebattues en Wallonie quand le cdH tourne le dos au PS et offre les clés de l’Élysette au MR. Il s’agit d’une première dans l’histoire politique de la Wallonie, puisqu’une motion de défiance constructive a raison du gouvernement de Paul Magnette. Dans le nouvel exécutif piloté par Willy Borsus, René Collin reste en place et conserve les mêmes attributions hormis les « Aéroports » qui partent chez Jean-Luc Crucke, et le Patrimoine (dont s’occupait jusqu’alors Maxime Prévôt) qui arrive dans le portefeuille de René Collin. Parmi les premières mesures phares du gouvernement Borsus, la mise en place d’un cadastre intégral des subventions allouées par les autorités wallonnes, système de transparence qui met René Collin en évidence, en raison des compétences dont il a la charge.
à l’écoute du monde agricole et de la ruralité qu’il associe régulièrement à l’élaboration de ses décisions, le ministre a mis en place un important programme régional de développement rural dès 2016 et il achève la législature en bouclant le dossier de la réforme du bail à ferme : entretemps, il a augmenté les moyens du secteur du bio, ouvert les états généraux de la biodiversité, lancé un appel à projets pour favoriser l’utilisation du cheval de trait dans les communes (2016), lancé un plan de développement stratégique pour l’horticulture ornementale et un autre pour l’aviculture (2018) et défendu l’agriculture wallonne par monts et par vaux. Celui qui est aussi un grand défenseur de la chasse et des chasseurs doit faire face à une très longue épidémie de la peste porcine africaine, aux multiples conséquences fâcheuses pour le sud de la Wallonie, et aux origines suspectes (septembre 2018-avril 2019, avec retour à la « normale » en décembre 2020) : plus de 60.000 ha du territoire du sud luxembourgeois sont strictement isolés du monde, plus de 5.000 sangliers sont analysés et plusieurs centaines « prélevés ». Le tourisme, dont il est le ministre responsable, est l’un des secteurs qui pâtit de cette crise, en dépit de diverses initiatives (création d’une route des bières wallonnes, encouragement aux auberges de jeunesse, mise en place d’un nouveau système de classification de la qualité des hôtels en Wallonie, nommé Hotelstars Union, etc.). En charge du Patrimoine, au-delà d’investissements stratégiques importants, il est le ministre qui met en place la nouvelle Agence wallonne du Patrimoine (AWaP). Initiateur du label « cimetière nature » (2015), le ministre de la nature boucle le dossier désignant les sites wallons de Natura 2000 (décembre 2016), tout en mettant en application des dispositions qui s’inscrivent dans le Programme wallon de réduction des pesticides.
Au-delà des enjeux régionaux, René Collin déménage en décembre 2015 et s’installe à Marche-en-Famenne. Le geste n’est pas neutre politiquement, car la succession d’André Bouchat, maire depuis 1986, suscite de l’intérêt. Ainsi en est-il aussi du MR Willy Borsus, le ministre-président wallon, qui, lui aussi, a choisi Marche-en-Famenne comme nouveau lieu de résidence… Au scrutin communal d’octobre 2018, le ministre René Collin (1.561 vp.) affronte dès lors son collègue Willy Borsus (1.706 vp.) dans une ville qu’André Bouchat n’a finalement pas décidé d’abandonner, laissant le choix à l’électeur. Poussant la liste de René Collin, André Bouchat (3.453 vp) met en effet tout le monde d’accord. S’appuyant sur une solide majorité absolue (14 sièges sur 25), le cdH peut de surcroît compter sur Nicolas Grégoire et ses 1.701 vp. René Collin siège comme conseiller communal.
Avec le retrait politique de Dimitri Fourny, le choix de l’Europe par Benoit Lutgen et alors que le Parlement de Wallonie a créé une « nouvelle » circonscription électorale luxembourgeoise d’Arlon-Marche-Bastogne-Neufchâteau-Virton qui envoie désormais six représentants à Namur (+1), René Collin s’impose comme le leader incontestable du cdH lors du scrutin wallon du 26 mai 2019, Josy Arens se présentant à la Chambre fédérale. Avec 16.908 vp, 2e score tous partis confondus (derrière… Willy Borsus), René Collin décroche son premier mandat au Parlement de Wallonie, en plus de contribuer au maintien d’un deuxième siège pour Anne-Catherine Goffinet. Avec 22,5%, le résultat du cdH dans la Belle Province est historiquement le plus bas depuis le 21 mai 1995 et la première élection directe des députés wallons. Nouveau président du cdH, Maxime Prévôt tire la leçon politique des scrutins et annonce une cure d’opposition pour sa formation. Elle entreprend un long processus de rénovation et de refonte qui aboutit à l’émergence du mouvement Les Engagés (congrès de mars et mai 2022). René Collin participe à ce processus, tout en siégeant au Parlement de Wallonie.
Président de la Commission Budget-Infrastructures sportives (2019-2024), il fait partie du groupe des 10 députés wallons cdH dirigé par François Desquesnes. Ils seront onze avec l’arrivée de J-L. Crucke. Ensemble, ils organisent leurs travaux et leurs interventions de manière dynamique et collective, pour exister en tant que principale force d’opposition aux côtés des 10 députés du PTB. Actifs dans chaque Commission, ils sont régulièrement six ou sept à signer des propositions de décret dans toutes les matières régionales : démocratie locale et meilleur contrôle parlementaire, mobilité douce, circuit court, mesures urgentes et pratiques durant la pandémie de la Covid-19, statut des transporteurs de voyageurs par route, promotion du coworking, véhicules électriques, etc. Porteur de plusieurs propositions de résolution, René Collin intervient encore dans plusieurs débats pour faire respecter à la fois des critères environnementaux, sociaux et sanitaires, la démocratie, les libertés et les droits humains et mettre en place des mesures pour poursuivre les crimes de génocide et les atteintes au patrimoine mémoriel.
Quand Les Engagés composent leur liste pour les trois scrutins du 9 juin 2024, un processus de rajeunissement des cadres accompagne une ouverture vers la société civile. Dès l’automne 2023, René Collin annonce son soutien aux Engagés, mais son retrait de la vie politique fédérale, wallonne, provinciale et communale.
Mandats politiques
Conseiller communal à Erezée (1982-2006 ; 2012)
Conseiller provincial du Luxembourg (1985-2014)
Échevin (1989-04/1993)
Bourgmestre (04/1993-2006)
Député provincial (2006-2012, 2012-07/2014)
Ministre wallon (2014-2019)
Ministre de la Fédération Wallonie-Bruxelles (2014-04/2016)
Conseiller communal à Marche-en-Famenne (2018-2024)
Député wallon (2019-2024)
Sources
Centre d’archives privées de Wallonie, Institut Destrée, Revues de Presse (-06/2024)
Classement des députés, dans Le Vif, 07 avril 2017, p. 22-23
Cumuleo (-2023)
Parlement de Wallonie, Rapports d’activités, de 2019 à 2023, https://www.parlement-wallonie.be/rapports-brochures
http://www.rene-collin.be/en-savoir-plus/
http://collin.wallonie.be/gw_pages_biographie (s.v. décembre 2017)
https://www.favv-afsca.be/ppa/actualite/belgique/ ; https://www.chasse.be/files/files/2020-ppa-retrospectives-et-perspectives-au-07072020.pdf
http://environnement.wallonie.be/legis/consnat/natura170.html
https://medor.coop/magazines/medor-12-autumn-2018/enquete-chasse/?full=1
https://www.pwrp.be/
https://www.rtbf.be/article/rene-collin-quittera-la-politique-apres-les-elections-de-2024-11255697
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