no picture

Kock Daniel

Socio-économique, Entreprise

Limbourg date inconnue, Liège circa 1615

Depuis plusieurs années est posée la question de savoir si la fenderie est une invention liégeoise ? Cette activité métallurgique utilise des laminoirs à rouleaux munis de taillants pour diviser des plaques de métal en feuillards et en vergettes. De sources sûres, les quatre fenderies les plus anciennes du pays de Liège ont été construites quasi en même temps, trois en 1583, une en 1587, et toutes paraissent dirigées par Daniel Kock et des associés. Deux hypothèses sont formulées : l’une attribue aux frères Kock cette invention née de leurs activités dans la recherche de nouvelles techniques d’exhaure pour les houillères. L’autre hypothèse conduit à penser que les mêmes mécaniciens liégeois ont découvert la technique de la fenderie quelque part dans l’Empire romain de la Nation germanique et qu’ils l’ont ramenée à Liège en la perfectionnant. 

Lorsqu’elle apparaît dans le comté de Namur, vers 1609, la fenderie est dite de Nuremberg… (Hansotte), machine à découper les fers plats qu’aurait décrite Eobanus Hessus en 1532 (Yernaux & Mathy). Quoi qu’il en soit de cette origine, la fenderie liégeoise assure à la clouterie un développement considérable à partir du XVIIe siècle. On retrouve des clous « liégeois » aux quatre coins de l’Europe. Leurs usages sont multiples, notamment dans la fabrication des bateaux. Le long de la Vesdre et de l’Ourthe, les ateliers de clouterie sont particulièrement nombreux. Le duché de Luxembourg voit également prospérer cette activité.

Quant à Daniel Kock, il est originaire du duché de Limbourg où sa famille s’est spécialisée dans la fabrication d’instruments de pesage. Fils de Remacle et frère de David, notamment, il est venu s’installer à proximité de la cité du prince-évêque, peut-être en raison de son mariage avec une Liégeoise. Dans le quartier de Fragnée-Vennes, il exploite de 1582 jusqu’en 1595, le fourneau dit « des Polets » qu’en son temps Wauthier Godefroid (ou Godefrin) avait lui-même loué ; il y dispose d’un terrain, proche du cours d’eau, d’un fourneau, ainsi qu’une « usine pour fendre le fer » qu’il a construite. La mémoire collective liégeoise rapporte qu’il s’agit là de la toute première fenderie, dont Daniel Kock est l’évident inventeur. À l’évocation de son nom, chacun s’accordait à lui reconnaître une créativité fertile et de grandes connaissances en matière d’exploitations minières et métallurgiques. 

En l’absence de sources plus précises, Jean Yernaux observe en tout cas la place centrale occupée par Daniel Kock dans la gestion et le bon fonctionnement des fenderies de Henné, Hoster et Vaux-sous-Chèvremont, propriétés de l’industriel liégeois Laurent Butbach. Et s’il n’en est pas l’inventeur, il a certainement développé l’outil de manière telle que ses machines sont les meilleures de l’époque et contribuent ainsi à assurer à Liège le monopole de toutes les fenderies d’Europe.

« En 1613, Hurtino de Ugarde, « pagador » général des Pays-Bas espagnols, décrivant le nouveau procédé dans un rapport adressé au roi d’Espagne, déclare que, grâce aux machines liégeoises, « deux hommes feraient » plus en vingt-quatre heures que » cent autres employant le mode de » fabrication espagnol » (Yernaux, BN). En effectuant ainsi mécaniquement une grande partie du travail manuel, les fenderies liégeoises donnèrent à la clouterie mosane un essor inouï et lui conquirent la première place sur le marché européen.

En plus de la direction des fenderies, on attribue à Daniel Kock l’exploitation – en association avec ses frères – des importantes minières de la Blanche Plombière, à Prayon-Trooz. Il fut père d’au moins neuf enfants dont la plupart s’adonnèrent à l’industrie, certains dans les fenderies, d’autres dans la fabrication d’instruments de pesage, tandis que Marcus se distinguera en Suède où l’on continue à s’intéresser fortement à « cette famille de pionniers industriels wallons ».

Enfin, en 1601, on retiendra qu’avec son frère David, Daniel Kock obtient du prince-évêque (Ernest de Bavière) un brevet reconnaissant la paternité d’une machine destinée à puiser l’eau des galeries et puits de mines. Il s’agit là de la préfiguration de ce qui sera utilisé par Renkin Sualem à Marly. En effet, Renkin Sualem était le fils de Renkin et de Catherine Kock, fille de David Kock..., en d’autres termes le gendre de ce dernier.

 

Sources

Revue du Conseil économique wallon, n° 64, septembre 1963, p. 69
Georges HANSOTTE, La métallurgie wallonne au XVIe et dans la première moitié du XVIIe siècle, Essai de synthèse, dans Bulletin de l’Institut archéologique liégeois, Liège, 1972, t. LXXXIV, p. 37
Jean YERNAUX, dans Biographie nationale, t. XXXI, col. 515-517
Jean YERNAUX et M. MATHY, Une famille de pionniers industriels wallons au XVIIe siècle : les Kock, de Limbourg, dans Bulletin de l’Académie Royale de Belgique, classe des Lettres, 5e série, t. 46, p. 66-124, dont les pages 68 et 69