Laffut Anne

Politique, Député wallon

Libramont 02/10/1973

Députée wallonne : 2019-2024 ; 2024-

Depuis la première élection directe des députés wallons, le 21 mai 1995, obtenir au moins un élu dans la circonscription électorale d’Arlon-Marche-Bastogne ou dans celle de Neufchâteau-Virton est un exercice difficile et périlleux pour tous les partis, en raison de l’attribution de 3 sièges dans la première et surtout de deux sièges seulement dans l’autre, d’autant qu’il convient d’intégrer les effets de l’apparentement. Les libéraux du PRL puis du MR en ont fait l’expérience, obtenant toujours le soutien de plus de 20% des électeurs dans la première circonscription et autour des 30% dans la seconde ; malgré de tels résultats, le MR a raté un siège en 2009 du côté d’Arlon-Marche-Bastogne, et un aussi en 2004 et 2009 du côté de Neufchâteau-Virton. La question du rééquilibrage dépassant le seul territoire luxembourgeois, le décret spécial wallon adopté le 25 janvier 2018 répartit désormais autrement les sièges du Parlement de Wallonie entre l’ensemble des circonscriptions électorales wallonnes, réduites de 13 à 11. Ainsi, les deux circonscriptions mentionnées sont-elles réunies et disposent de six députés wallons à partir du scrutin wallon du 26 mai 2019. C’est dans ce contexte qu’est élue Anne Laffut. Elle occupait la deuxième place des effectifs sur la liste du MR emmenée par Willy Borsus et le résultat est à la hauteur des espérances libérales. Dans le sillage du ministre-Président wallon sortant (17.750 vp), Anne Laffut totalise 11.974 vp sur nom, contribuant à faire du MR la première force politique de la Belle province (25,27%). Dans les autres partis, seul le cdH René Collin (16.908 vp), autre ministre sortant, et le socialiste Philippe Courard (13.535 vp), président sortant du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, réalisent un résultat individuel supérieur à celui de la bourgmestre de Libin.

Depuis plusieurs années déjà, la jeune femme qui dispose d’un diplôme de secrétaire de direction a fait ses armes en politique, en travaillant d’abord auprès de mandataires libéraux, en se forgeant ensuite un nom auprès des électeurs de la province. Pendant une dizaine d’années, elle est attachée parlementaire, d’abord auprès de Michel Wauthier, député permanent namurois, puis député fédéral, ensuite auprès de Philippe Collard, dont elle est la secrétaire politique, quand le député candidat bourgmestre parvient à renverser Guy Lutgen à la tête de Bastogne. 

En octobre 2000, Anne Laffut se présente pour la première fois au suffrage des électeurs dans le district de Neufchâteau. D’emblée, elle décroche un mandat de conseillère provinciale et devient l’une des deux secrétaires du bureau du Conseil provincial (avec la PS Véronique Biordi), le PRL (16) et le PS (11) poursuivant leur collaboration au sein du Collège provincial, grâce à une large majorité de 27 élus sur 47 au Conseil. Jusqu’en 2006, elle représente aussi son parti au conseil d’administration de l’Association Intercommunale d’œuvres médico-sociales de la Haute-Lesse, où elle est membre du comité de direction, et jusqu’en 2014, elle est administratrice d’Idelux Finances.

A mi-parcours de la législature, cependant, précisément au soir des élections fédérales du 18 mai 2003, l’exécutif provincial enregistre quatre départs, deux députés permanents PS et une MR (Dominique Tilmans) partant siéger à la Chambre fédérale, tandis qu’Armand Schanus (MR) est concerné par la limite d’âge. Pour remplacer les deux libéraux, la fédération MR du Luxembourg reçoit sept candidatures, dont celle d’Anne Laffut. Ce n’est qu’après un second tour, serré, que Jacques Balon lui est finalement préféré. Même si elle est désignée à la vice-présidence de l’assemblée provinciale (octobre 2004), au sein du MR, les tensions nées de la succession de Schanus vont laisser des traces, surtout au moment de la composition des listes en vue des élections d’octobre 2006. à Libin, Anne Laffut refuse en effet de se présenter aux communales derrière le MR Bertrand Arnould. Appelée à trancher le différend, la fédération provinciale du MR donne sa préférence à Arnould et, en raison du refus de Laffut d’obtempérer, la prive d’une candidature à l’élection provinciale. S’affirmant « candidate bourgmestre », Anne Laffut constitue alors une liste Autrement, où se retrouvent surtout des sociaux-chrétiens, mais aussi des socialistes et des libéraux, échevins ou conseillers sortants, ainsi que des candidats indépendants actifs dans le monde associatif local. 

A Libin et ses 5.000 habitants, la campagne électorale 2006 est aussi acharnée qu’indécise. Occupant la deuxième position derrière Christian Baijot (436 vp), Anne Laffut réunit sur son nom 727 voix de préférence, ce qui est très nettement le meilleur résultat de sa liste ; avec 42,46%, Autrement obtient 7 élus. En face, la liste OSDE de Bertrand Arnould (899 vp) obtient elle aussi 7 élus, en obtenant cependant le soutien de deux électeurs de plus (42,53%). Le scénario est identique à celui de l’an 2000. Seul élu de La nouvelle Liste (LNL, 9,2%), c’est à Augustin Kreit (218 vp) que revient le rôle de juge-arbitre : obtenant un échevinat et la présidence du CPAS, il s’allie à Autrement. Anne Laffut a gagné son pari et devient la première femme bourgmestre de Libin, son résultat personnel étant déterminant, selon le tout récent Code de la démocratie locale (projet Courard devenu le décret wallon du 8 décembre 2005). En lien avec sa nouvelle fonction, elle doit présider la Maison d’accueil d’Anloy (2006-2013), ainsi que l’Euro Space center, le Comité de concertation du CPAS et la COPALOC (2006-).

Présente en 3e position sur la liste MR emmenée par Philippe Collard, dont elle est toujours la collaboratrice, Anne Laffut prend toute la mesure de sa popularité, le 10 juin 2007, quand elle réalise 10.858 vp dans la circonscription luxembourgeoise, soit le 7e résultat tous partis confondus, le MR y demeurant la première force politique (30,41%). Consciente d’avoir manqué son élection à la Chambre de peu en 2007, elle nourrit l’espoir de devenir députée lors du scrutin fédéral anticipé du 23 juin 2010, en occupant la deuxième place derrière Philippe Collard. La désillusion est cependant très grande au sein du MR qui perd alors 11%, se retrouve 3e parti et n’obtient pas l’élection d’un deuxième député, Anne Laffut réalisant 7.824 vp, face à la tornade cdH emmenée par Benoit Lutgen et l’excellent résultat personnel du PS Philippe Courard.

Se concentrant sur ses dossiers communaux, la bourgmestre de Libin – par ailleurs vice-présidente de la fédération provinciale du MR (-2014) – mobilise néanmoins ses collègues des autres localités sur la question du prix de l’eau de distribution, sur le rétrécissement progressif de l’autonomie communale, sur les conséquences de la tempête de 2010 sur les exploitations forestières, etc. Les élections communales d’octobre 2012 sont celles de la confirmation. Emmenant la liste Horizon 2018 vers un plantureux succès (58,6% et 9 sièges), la tête de liste (1.342 vp) dispose désormais d’une solide majorité absolue que le scrutin d’octobre 2018 vient confirmer : avec 1.808 vp, la bourgmestre emmène Horizon 2024 vers un résultat qu’aucune autre liste n’atteint ailleurs en Wallonie : 77,86% (hormis à Herbeumont, où la liste Action atteint 80%, et dans les six communes où une seule liste est en présence). Avec 14 sièges sur 17, la liste de la bourgmestre de Libin a éteint quasiment toute opposition, en se prévalant d’une série de réalisations : Maison médicale, développement du pôle spatial, plate-forme bois énergie et réseau de chaleur, gestion des forêts communales, futur village des aînés, construction des logements tremplins, lancement d’un Groupement d’action locale (GAL) pour développer un bassin de vie réunissant Libin, Libramont, Saint-Hubert et Tellin selon le principe de l’économie circulaire (2015-), etc. Néanmoins, la législature 2018-2024 n’est pas un long fleuve tranquille, à Libin, avec son lot de départs et d’arrivées, à tout le moins de conseillers siégeant désormais comme indépendants en attendant octobre 2024, où une troisième liste voit le jour.

La dynamique insufflée à Libin par sa bourgmestre a poussé la fédération provinciale du MR à revoir ses positions à son égard. Aux élections provinciales d’octobre 2012, Anne Laffut est retenue pour remplacer une candidate MR qui s’est portée candidate, aux communales à Libin, sur la liste Vision d’Avenir de Bertrand Arnould… contre l’avis de la Fédération. Bien qu’en 4e position sur la liste emmenée par Yves évrard dans le district de Neufchâteau, Anne Laffut réalise 2.552 vp, soit le 2e résultat du MR, ce qui lui rouvre les portes du Conseil provincial, où elle est désignée cheffe du groupe MR. Tête de liste en octobre 2018, elle totalise 4.489 vp, le MR conservant 36,7% et deux élus dans le district chestrolais.

Déjà candidate au scrutin régional wallon du 7 juin 2009 (2e suppléante, elle avait réalisé 4.297 vp, soit le 2e score des suppléants), elle occupe la 2e place des effectifs (7.012 vp), le 25 mai 2014, derrière Yves évrard (8.162 vp). En réalisant sensiblement le même résultat individuel, ce duo contribue à ramener au MR le député wallon qui lui échappait depuis 2004, et à maintenir le parti au premier rang des forces politiques (30,2%) de cette circonscription. Le 26 mai 2019, on l’a vu, c’est le duo Borsus-Laffut qui obtient deux députés wallons et pose le MR comme première force politique de tout le Luxembourg belge (25,3%). De surcroît, le taux de pénétration de la nouvelle députée wallonne est tel (7,25%) qu’il l’autorise à conserver sa fonction de bourgmestre de Libin (dispositions du décret spécial wallon du 9 décembre 2010 limitant le cumul de mandats des députés wallons). Administratrice du TEC Namur-Luxembourg (2011-2019), de Vivalia (2014-2018), de l’AIVE devenu Idelux Eau (2012-2019), du Sanatorium Belgica (2012-2017), de l’Association des Provinces Wallonnes (2012-2019), elle renonce aussi à son mandat de conseillère provinciale. à l’automne 2019, lors de l’élection du président du MR, elle apporte son soutien à Philippe Goffin.

Membre de la Commission de vérification des pouvoirs, de la Commission Emploi-Action sociale-Santé, de la Commission de Coopération (2019-2024), la députée wallonne se plonge rapidement dans les dossiers et affronte une législature particulière, puisqu’elle sera marquée par la crise sanitaire de la Covid-19, les inondations de juillet 2021, la guerre en Ukraine et la crise énergétique, alors que la Déclaration de Politique régionale voulait mettre l’accent sur l’emploi, la lutte contre la pauvreté, le contrôle des finances publiques, la transition climatique et l’ambitieux Plan de Relance du gouvernement dirigé par Elio Di Rupo. D’ailleurs, quand la pandémie de la Covid-19 nécessite des mesures d’urgence et que le Parlement de Wallonie accorde des pouvoirs spéciaux à son Gouvernement, la députée est désignée par son parti pour le représenter au sein de la « Commission spéciale chargée de contrôler l’action du gouvernement wallon dans le cadre de la crise sanitaire de la Covid-19 » (15 avril-17 juin 2020). Dans le cadre de la surveillance de l’épidémie, avec ses collègues Sabine Roberty (PS), Mourad Sahli (PS), Véronique Durenne (MR), Laurent Heyvaert (écolo) et Stéphane Hazée (écolo), Anne Laffut fait adopter un décret qui organise la communication entre la cellule de surveillance des maladies infectieuses de l’AViQ, le Centre régional de crise et les pouvoirs locaux, et permet la mise en place d’équipes mobiles, chargées de prendre des mesures en cas de détection de foyer de contamination (mi-octobre 2020). Par ailleurs, elle fait partie des députés wallons porteurs d’une série de textes levant les obligations sur le port du masque et sur l’usage du Covid Safe Ticket (printemps 2022), ainsi que sur l’isolement automatique après un dépistage positif (mai 2023).

Attentive aux dossiers relatifs aux zones rurales, en particulier à sa province, la députée wallonne questionne les ministres wallons sur des sujets comme la baisse des prix des résineux, les conséquences de la peste porcine africaine et les mesures prises pour lutter contre ce fléau et compenser les lourdes pertes subies par de nombreux acteurs, sans oublier la crise des scolytes qui frappe fortement les forêts ardennaises. Au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, elle est membre et vice-présidente de la Commission Budget-Fonction publique-Égalité des chances-Tutelle sur Wallonie-Bruxelles Enseignement-Bâtiments scolaires (2019-2024).

Le 9 juin 2024, elle occupe à nouveau la 2e place sur la liste MR emmenée par Willy Borsus, dans la circonscription « luxembourgeoise », sollicitant des électeurs le renouvellement de son mandat de députée wallonne. Avec 12.847 vp (3e meilleur résultat tous partis confondus), elle contribue à la progression spectaculaire du MR (+9,46%) dans une circonscription où le PTB (9% en 2019) ne présente pas de liste. Depuis la première élection directe des députés wallons, le 21 mai 1995, aucun parti n’a jamais réuni autant d’électeurs que le MR 2024 dans la province de Luxembourg (58.034) et jamais les libéraux n’ont atteint un tel pourcentage, même au temps des anciennes circonscriptions séparées. Le MR décroche trois mandats, Anne Laffut retrouvant le Parlement de Wallonie, avec Willy Borsus (22.574 vp) et Yves Evrard (7.659 vp).

 

Mandats politiques

Conseillère provinciale (2000-2006 ; 2012-2018)
Conseillère communale à Libin (2006-)
Bourgmestre (2006-) 
Députée wallonne (2019-)

 

Sources

Centre de Recherche & Archives de Wallonie, Institut Destrée, Revue de presse (-06/2024), dont Le Soir, 30 mai 2003, 3 juin 2003, 28 octobre 2006 
Parlement de Wallonie, Rapports d’activités, de 2019 à 2023, https://www.parlement-wallonie.be/rapports-brochures
Cumuleo (-2023)
https://www.annelaffut.be/bio

 

 

Parlementaires et ministres de Wallonie (+ 2024)